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272. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VI, première guerre médique »

Il fut tenu enchaîné à ma porte, tout le peuple le voyait. […] Hippias avait désigné cette plage comme une porte ouverte.

273. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Orientales » (1829) — Préface de l’édition originale »

Et puis, pourquoi n’en serait-il pas d’une littérature dans son ensemble, et en particulier de l’œuvre d’un poëte, comme de ces belles vieilles villes d’Espagne, par exemple, où vous trouvez tout : fraîches promenades d’orangers le long d’une rivière ; larges places ouvertes au grand soleil pour les fêtes ; rues étroites, tortueuses, quelquefois obscures, où se lient les unes aux autres mille maisons de toute forme, de tout âge, hautes, basses, noires, blanches, peintes, sculptées ; labyrinthes d’édifices dressés côte à côte, pêle-mêle, palais, hospices, couvents, casernes, tous divers, tous portant leur destination écrite dans leur architecture ; marchés pleins de peuple et de bruit ; cimetières où les vivants se taisent comme les morts ; ici, le théâtre avec ses clinquants, sa fanfare et ses oripeaux ; là-bas, le vieux gibet permanent, dont la pierre est vermoulue, dont le fer est rouillé, avec quelque squelette qui craque au vent ; au centre, la grande cathédrale gothique avec ses hautes flèches tailladées en scies, sa large tour du bourdon, ses cinq portails brodés de bas-reliefs, sa frise à jour comme une collerette, ses solides arcs-boutants si frêles à l’œil ; et puis, ses cavités profondes, sa forêt de piliers a chapiteaux bizarres, ses chapelles ardentes, ses myriades de saints et de châsses, ses colonnettes en gerbes, ses rosaces, ses ogives, ses lancettes qui se touchent à l’abside et en font comme une cage de vitraux, son maître-autel aux mille cierges ; merveilleux édifice, imposant par sa masse, curieux par ses détails, beau à deux lieues et beau à deux pas ; — et enfin, à l’autre bout de la ville, cachée dans les sycomores et les palmiers, la mosquée orientale, aux dômes de cuivre et d’étain, aux portes peintes, aux parois vernissées, avec son jour d’en haut, ses grêles arcades, ses cassolettes qui fument jour et nuit, ses versets du Koran sur chaque porte, ses sanctuaires éblouissants, et la mosaïque de son pavé et la mosaïque de ses murailles ; épanouie au soleil comme une large fleur pleine de parfums ?

274. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Virgile, et Bavius, Mœvius, Bathille, &c. &c. » pp. 53-62

Mais il faut que l’artiste porte envie à l’artiste, & le poëte au poëte. […] Virgile avoit attaché de nuit, à la porte du palais d’Auguste, ce distique* où il le fait égal à Jupiter.

275. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

L’océan devant lui se prolongeait, immense Comme l’espoir du juste aux portes du tombeau. […] La puissance lyrique d’un génie se mesure souvent à la fréquence de la reprise de l’idée, ramenée sans cesse sous une forme nouvelle et plus frappante, au moment où on la croyait abandonnée ; c’est l’ondulation de la vague, ne quittant ce qu’elle porte qu’après l’avoir soulevé jusque sur sa crête aiguë, pour le laisser reprendre ensuite par une vague nouvelle. […] Vois-tu la chevelure que je porte ? […] Aussitôt elle porte à sa gorge l’instrument sacré : le sang jaillit. […]              Je vous porte apaisé Les fragments de ce cœur tout plein de votre gloire              Que vous avez brisé.

276. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

On admet parfaitement que le vaisseau de l’aventure porte son poltron innocent et passif, son Toussaint Lavenette. […] C’est qu’ici la durée ne paraît plus un flot qui nous porte ; mais au contraire un obstacle qu’il faut vaincre en y jetant rapidement un pont. […] Alissa s’est efforcée d’entrer par la porte étroite, elle a sacrifié sa vie à la vie éternelle et il paraît bien que le rétrécissement continu de la voie qu’elle suit vers cette porte stricte soit simplement l’affaiblissement et la perte de la vie vraie. […] À cette porte on peut d’ailleurs frapper tumultueusement ou méthodiquement. […] La Poétique d’Aristote porte sur la composition dramatique, comme la Rhétorique porte sur la composition oratoire.

277. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Elle pourrait fouler sous ses pieds le croissant qu’elle porte à son front. […] Leur bec, dur comme l’amande, porte la chair morte et la graisse sur ces montagnes. […] Cette porte entr’ouverte est son pilori. […] Par la porte qu’elle entrouvrait, un souffle, une parole de la France pénétrait parfois. […] Les sculpteurs de la Renaissance lui font ouvrir avec un fracas théâtral la porte des mausolées.

278. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

« Le lieu de la scène était un petit passage derrière sa maison, entre un ruisseau à main droite qui la séparait du jardin, et le mur de la cour à gauche, conduisant par une fausse porte à l’église. Prête à entrer dans l’église par cette porte, madame de Warens se retourna à ma voix. […] Rousseau, comblé des dons de madame de Warens, qui s’appauvrit pour son élève, part pour Lyon avec son pauvre maître de chapelle ; il l’abandonne à son premier malheur, comme les chiens ne font pas de l’aveugle indigent, qu’ils conduisent aux portes des hôpitaux. […] Incapable d’activité dans la foule, incapable de repos dans la solitude, recueilli par la famille de Girardin, à Ermenonville, dans un dernier ermitage, il y meurt d’une mort problématique, naturelle selon les uns, volontaire selon les autres : le mystère après la folie. — Le moins raisonnable et le plus grand des écrivains des idées des temps modernes repose, jeté par le hasard, sous des peupliers, dans une petite île d’un jardin anglais, aux portes d’une capitale, lui qui, dans sa mort comme dans sa vie, sembla le plus misanthrope des hommes en société, et le plus incapable de se passer de leur enthousiasme. […] voilà un enfant né dans la boutique d’un artisan, le point de vue le plus étroit pour voir le monde tout entier ; car le défaut de l’artisan est précisément de ne rien voir d’ensemble, mais de tout rapporter à son seul outil, et à sa seule fonction dans la société : gagner sa vie, travailler de sa main, recevoir son salaire, se plaindre de sa condition, si rude en effet, et envier si naturellement les heureux oisifs ; Voilà un enfant qui, dégoûté de l’honnête labeur paternel avant de l’avoir même essayé, se prend à rêver au lieu de limer, s’évade de l’atelier et de la boutique de son père, va de porte en porte courir les aventures, préférant le pain du vagabond au pain de la famille et du travail ; vend son âme et sa foi avec une hypocrite légèreté au premier convertisseur qui veut l’acheter pour trois louis d’or, qu’on lui glisse dans la main, en le jetant, avec sa nouvelle religion, à la porte ; Voilà un adolescent qui se prostitue volontairement de domesticité en domesticité dans des maisons étrangères, se faisant chasser de tous ces foyers honnêtes pour des sensualités ignobles, ou pour des larcins qu’il a la lâcheté de rejeter sur une pauvre jeune fille innocente et déshonorée !

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