Il faut faire entrer dans notre être tous les mondes imaginables, ouvrir toutes les portes de son âme à toutes les sciences et à tous les sentiments ; pourvu que tout cela n’entre pas pêle-mêle, il y a place pour tout le monde. […] Être à souper à côté de lui, que cette place est délicieuse !
Tout esprit de parti se désarme et expire en le lisant, et il n’y a place qu’à une compassion et à une admiration profonde. […] Y eut-il jamais place, dans ce cœur qui avait été saturé d’agonie dès sa tendre jeunesse, à une pure et véritable joie ?
Mais ici la méfiance, déjà propre à cette jeune nature, se marqua à l’instant ; sa physionomie se ferma : « Mais je ne connais personne à Paris », répondit-il ; — et après une pause d’un instant : « Je n’y connais plus que la colonne de la place Vendôme. » Puis s’apercevant qu’il avait interprété trop profondément une parole toute simple, et pour corriger l’effet de cette brusque réponse, il envoya le surlendemain à M. de La Rue, qui montait en voiture, un petit billet où étaient tracés ces seuls mots : « Quand vous reverrez la Colonne, présentez-lui mes respects. » Au maréchal Marmont, comme à toutes les personnes avec qui il parlait de la France, le jeune prince exprimait l’idée qu’il ne devait, dans aucun cas, jouer un rôle d’aventure ni servir de sujet et de prétexte à des expériences politiques ; il rendait cette juste pensée avec une dignité et une hauteur déjà souveraines : « Le fils de Napoléon, disait-il, doit avoir trop de grandeur pour servir d’instrument, et, dans des événements de cette nature, je ne veux pas être une avant-garde, mais une réserve, c’est-à-dire arriver comme secours, en rappelant de grands souvenirs. » Dans une conversation avec le maréchal, et dont les sujets avaient été variés, il en vint à traiter une question abstraite ou plutôt de morale, et comparant l’homme d’honneur à l’homme de conscience, il donnait décidément la préférence à ce dernier, « parce que, disait-il, c’est toujours le mieux et le plus utile qu’il désire atteindre, tandis que l’autre peut être l’instrument aveugle d’un méchant ou d’un insensé ». […] Certes, de tels morceaux d’observateur qui unissent à la fois la finesse et l’élévation, peuvent se citer et tiennent leur place à côté des pages les plus sévères de Volney, ou des plus brillantes de Chateaubriand.
Il y a un mal terrible et rebelle à guérir, une maladie non décrite et qui n’a pas pris place encore dans les livres de médecine ; je l’ai peu observée directement, je l’ai entrevue toutefois, et je me la suis fait raconter par des témoins, et presque par des malades eux-mêmes : je puis en donner un léger aperçu que de plus experts compléteront. […] L’espoir des grandes actions vous tente et vous soutient, j’aime à le croire : en attendant, les actions vaines ne prennent pas moins de place.
Le tableau n’est plus une rue, une place publique, un temple ; c’est un théâtre. […] Place entre l’un et l’autre une bonne grosse paysanne qui allaite un enfant, et je reconnaîtrai la Population.
Homme d’observation sur place ou sur souvenir, — c’est du moins ainsi qu’il s’est donné et qu’on l’accepte, — l’auteur des Païens innocents n’a point cette force d’invention qu’eut Balzac dans ses nouvelles les plus courtes, mais il est vrai de dire qu’il s’applique à peindre des milieux beaucoup plus que des caractères. […] Cette sensibilité ondoyante, dont parfois les impressions sont justes et vraies, et d’autres fois injustes et fausses, cette sensibilité qui, dans les Lettres satiriques, tourne si brusquement de la haine à l’amour et de l’amour à la haine, tient évidemment trop la place de l’étude attentive d’une conscience sévère, et Babou en a donné une preuve particulièrement malheureuse, et que je me permettrai de citer, parce que je le dois.
La parcelle d’univers où nous vivons et que nous n’avons pas faite influe sur nous, et aussi l’entourage immédiat que nous nous sommes donné : notre maison, les objets dont elle est ornée, les ombres habituelles de ses murailles et les clartés de ses fenêtres, le bruit encore avec lequel la vie nous berce, bruit de la rue et de la place, murmure des eaux, murmure du vent, voix d’enfants, voix de femmes, voix chères dont les mots ne parviennent pas toujours à l’oreille, dont l’accent va toujours au cœur, bourdonnement du travail dans l’atelier voisin, silence même de la nuit, où passe l’accord de mille bruits apaisés et confus. […] Le peintre établira son chevalet dans une clairière de forêt, je suppose ; il dessinera les troncs et les branches des arbres, les buissons, les places d’ombre et de lumière ; il s’ingéniera à peindre ces dégradations de teintes des frondaisons qui s’éloignent et qui, vertes d’abord, se perdent bientôt dans le bleu.