Un héros de roman qui se porte bien et qui jouit de toutes ses facultés dans leur parfait équilibre est une chose infiniment rare et presque un phénomène. Autrefois, le phénomène existait.
Je rends grâce au ciel de m’avoir fait vivre jusqu’à ce jour, où, par la main d’un grand homme, le voile du sanctuaire a été déchiré et les secrets de Dieu révélés au grand jour, car cet homme, enflammé d’une si immense ambition, cet homme dont le nom retentit depuis ma naissance dans le monde lettré, cet homme devant qui les savants de tous les pays s’inclinent en lui rendant hommage, ne peut pas être un homme ordinaire, un jongleur, un charlatan, un joueur de gobelets pleins de vide, un nomenclateur spirituel prenant les noms pour des choses ; il doit savoir mieux que moi qu’un dictionnaire n’est pas un livre, qu’un procès-verbal n’est pas une logique, qu’en nommant les phénomènes on ne les définit pas, qu’on recule la difficulté sans la résoudre par des dénominations savantes, et qu’en réalité la vraie science ne consiste pas à connaître, mais à comprendre l’œuvre du Créateur. […] Alexandre partit avec Forster et sa femme pour les bords du Rhin et la Hollande, afin d’y étudier les phénomènes de la nature purement matérielle. […] Humboldt consacra là de saints loisirs au souvenir de la patrie. » Il étudia tout en marchant les phénomènes locaux nouveaux pour lui, hauteur des montagnes, mœurs des Indiens demi-civilisés par les moines ; volcans, tremblements de terre, grottes, forêts, et revint à Cumana sans avoir fait aucune découverte. […] Il revient encore une fois à la Havane, renonce à d’autres excursions sur le continent américain, se rembarque et rentre à Bordeaux, ne rapportant de ce voyage soi-disant autour du monde que quelques calculs trigonométriques vulgaires, quelques études insignifiantes sur des phénomènes étudiés mille fois avant lui, et quelques phrases prétentieuses où la légèreté des aperçus et la brièveté des excursions étaient déguisées avec art par la sonorité grandiose des mots. […] Je sollicitai la permission de me joindre à lui pour aller observer de près, pendant une de ces nuits solennelles, le phénomène du volcan en éruption, pour entendre, de sa bouche savante et éloquente, les observations du Pline allemand sur cette illumination du volcan ; il eut la bonté de me l’accorder.
L’Un n’existe et n’est perceptible qu’en se développant en diversité, c’est-à-dire en phénomènes. […] Il n’est pas de mot dans le langage philosophique qui ne puisse donner lieu à de fortes erreurs, si on l’entend ainsi dans un sens substantiel et grossier, au lieu de lui faire désigner des classes de phénomènes. […] Les mots de corps et d’âme restent parfaitement distincts, en tant que représentant des ordres de phénomènes irréductibles ; mais faire cette diversité toute phénoménale synonyme d’une distinction ontologique, c’est tomber dans un pesant réalisme et imiter les anciennes hypothèses des sciences physiques, qui supposaient autant de causes que de faits divers et expliquaient par des fluides réels et substantiels les faits où une science plus avancée n’a vu que des ordres divers de phénomènes. Certes il est bien plus absurde encore de dire avec exclusion : l’homme est un corps ; le vrai est qu’il y a une substance unique, qui n’est ni corps ni esprit, mais qui se manifeste par deux ordres de phénomènes, qui sont le corps et l’esprit, que ces deux mots n’ont de sens que par leur opposition, et que cette opposition n’est que dans les faits.
Il faut remarquer de plus, pour bien le comprendre, qu’à un autre aspect, c’est-à-dire vu par le dehors et par l’entremise de la perception extérieure, il est un mouvement moléculaire des centres nerveux, et rentre ainsi dans la classe des phénomènes physiques. […] Le patient aspira un moment et présenta ensuite tous les phénomènes qu’éprouverait une personne qui viendrait de prendre une poudre sternutatoire. » — Pareillement, « dites à une personne convenablement disposée par l’hypnotisme qu’elle mange de la rhubarbe, qu’elle mâche du tabac ou quelque autre substance désagréable au goût… et l’effet suivra vos paroles. […] « Mon convalescent, dit Esquirol, s’en distrait par le plus court entretien, par la plus courte lecture ; mais alors il juge ces symptômes comme je les jugeais moi-même ; il les regarde comme un phénomène nerveux et exprime sa surprise d’en avoir été dupe si longtemps. » — « Rien de plus fréquent, ajoute M. […] Tous les termes par lesquels les hommes ont désigné le phénomène aboutissent par l’étymologie au même sens. — Conception (cum capere, la chose devenue interne). — Représentation (rursus præsens, la chose présente de nouveau, quoique en fait absente). — Idée (eidos, la figure, l’image, le semblant, l’apparence de la chose, au lieu de la chose elle-même). — De même en allemand, Begriff, Vorstellung, etc.
Série de phénomènes plutôt que filiation d’hommes. […] L’histoire véridique, l’histoire vraie, l’histoire définitive, désormais chargée de l’éducation du royal enfant qui est le peuple, rejettera toute fiction, manquera de complaisance, classera logiquement les phénomènes, démêlera les causes profondes, étudiera philosophiquement et scientifiquement les commotions successives de l’humanité, et tiendra moins compte des grands coups de sabre que des grands coups d’idée. […] Dans cette crue indéfinie de clarté qu’on nomme la civilisation, des phénomènes de réduction et de mise au point s’accomplissent. […] Ils s’éteignent lentement, les voilà qui touchent l’horizon, ils sont mystérieusement attirés par l’obscurité ; ils ont des similitudes avec les ténèbres ; de là leur descente fatale ; leur ressemblance avec les autres phénomènes de la nuit les ramène à cette unité terrible de l’immensité aveugle, submersion de toute lumière.
VI], nous devons résoudre une question préjudicielle : ces deux phénomènes se distinguent-ils ou non dans le temps ? […] 2° Dans l’invention intellectuelle, l’ordre des phénomènes est renversé. […] Sur ce point, comme dans toute sa théorie du langage, Bonald prend pour l’état primitif et constant des phénomènes un état idéal et parfait qui n’est pas même leur état actuel. […] Dans le phénomène de la lecture, l’existence d’un intervalle de temps entre le signe et l’idée est plus évident encore.
Pour d’autres, elle vient de ce que l’état cérébral et l’état psychologique entrent respectivement dans deux séries de phénomènes qui se correspondent point à point, sans qu’il soit nécessaire d’attribuer à la première la création de la seconde. […] Dans la seconde hypothèse, leur réalité intime est constituée par leur solidarité avec tout ce qui est derrière l’ensemble de nos autres perceptions ; et, par cela seul que nous considérons leur réalité intime, nous considérons le tout de la réalité avec lequel ils forment un système indivisé : ce qui revient à dire que le mouvement intracérébral, envisagé comme un phénomène isolé, s’évanouit, et qu’il ne peut plus être question de donner pour substrat à la représentation tout entière un phénomène qui n’en est qu’une partie, et une partie découpée artificiellement au milieu d’elle.