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239. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (5e partie) » pp. 65-128

Est-ce une apothéose, que ces pages : XI « Telle fut la catastrophe méritée du parti girondin ; il mourut comme il était né, d’une sédition légalisée par la victoire. […] Ce parti tomba de faiblesse et d’indécision, comme le roi qu’il avait renversé. […] On se demande, après la disparition de ce parti, quelle était son idée et s’il en avait une. […] Quel parti pouvait légitimement alors invoquer la loi ? […] À mesure que la Révolution se dépouille de ses obscurités et que chaque parti lègue en mourant ses confidences à l’histoire, la mémoire du duc d’Orléans se dépouille des trames, des complicités, des trahisons, des crimes et de l’importance qu’on lui a prêtés.

240. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Pour la politique même et le gouvernement, ni les plus hauts esprits, ni les volontés les plus efficaces n’ont été toujours servis par le talent oratoire, et les partis eux-mêmes seront loin d’être représentés ici selon leur force ou leur influence. […] Ce théoricien de l’absolutisme faisait à son parti l’effet d’un jacobin. […] Ainsi procède Proudhon, faisant une oeuvre qui avait chance de déplaire à tous les partis parce qu’il conservait quelque chose de toutes les doctrines : logicien vigoureux, écrivain passionné et parfois déclamatoire, théoricien réputé inconsistant, encore que sur les choses essentielles il ait suivi une direction assez constante. […] Sans s’être classé dans aucun parti, et siégeant, comme il disait, au plafond, Lamartine s’était donné le rôle de jeter, au travers de la discussion des intérêts, toutes les nobles idées de justice, d’humanité, de générosité, sans esprit et sans ambition de parti, faisant simplement sa fonction de poète, tâchant d’élever les consciences, et versant sur les politiciens toute la noblesse de son âme en larges nappes oratoires. […] Edgar Quinet707, mêlant Herder à Chateaubriand, jugeant parfois très bien son temps et son parti, connaissant et pressentant l’Allemagne comme peu de Français ont fait, anticlérical et religieux, savant et poète, prophète par-dessus le tout et faiseur d’apocalypses, esprit large et intelligent, avec quelque chose d’incohérent et de nuageux, artiste insuffisant en dépit ou en raison des placages de sentiment ou de couleur par lesquels il croyait se donner un grand style, — Quinet n’a pas réussi à faire une œuvre : on peut lire ses Lettres.

241. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

Moyennant les distinctions de de Pure, le titre de précieuse fut accepté par les femmes les plus distinguées du parti que j’appelle de la décence et de l’honnêteté. […] On ne peut prendre sa place sans profanation. » Somaise observe au mot Maxime, que la morale des précieuses est d’attirer dans leur parti toutes tes personnes de qualité, pour primer sur les autres cercles. […] Une précieuse fait l’éloge de Corneille, une autre qui préfère Benserade, poète plus galant et homme de cour, une troisième prend le parti de Chapelain. […] Sa ruelle devint pour le parti le centre de ralliement, l’école normale, le château fort des précieuses de mauvais goût. […] « C’était, à tout prendre, comme l’a dit Boileau, une fille qui avait beaucoup de mérite, et passait pour avoir encore plus d’honneur et de probité que d’esprit. » Un certain mérite est toujours nécessaire à qui veut être à la tête d’un parti ; et, après tout, le ridicule de la préciosité n’était pas ignoble.

242. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — II. (Suite.) » pp. 155-174

Sur quoi Rosny piqué répliqua que tout ce procédé conduisait à la grandeur du roi de Navarre bien plus qu’à sa ruine, et il en revint, selon son usage, à rappeler ce que son diable de précepteur La Brosse lui avait prédit ; puis il sortit brusquement, quittant sans autre façon la compagnie et le parti devenu contraire, pour se mettre en devoir de rejoindre le sien. […] Il ne dira pas de bien soit des protestants zélés, plus attachés que lui à la cause des Églises et à l’esprit religionnaire, soit des catholiques devenus royalistes à leur corps défendant, soit du tiers parti et de ces hommes politiques qui « nagent tant qu’ils peuvent », dit-il, « entre deux eaux », Villeroi, Jeannin. […] Un homme du parti royaliste passa alors menant en main un cheval, un petit courtaud qu’il avait pris ; Rosny offrit à cet homme cinquante écus qu’il avait dans sa pochette : « car vous aviez cette coutume de porter toujours de l’or sur vous lorsque vous alliez aux combats ». […] Je le croirais volontiers : il n’en reste pas moins vrai que Rosny devançait et acceptait le parti le plus juste, le seul possible et le seul suivant l’intérêt de l’État.

243. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Lorsque Bourdaloue parut dans la chaire (1670), un grand événement excitait au plus haut degré l’intérêt dans l’Église de France : les querelles envenimées entre ceux qu’on appelait jansénistes et le pouvoir temporel et spirituel, l’espèce de proscription qui avait mis quelques-uns des principaux chefs du parti à la Bastille, et qui avait dispersé les autres en tous sens, venaient tout d’un coup de s’apaiser ; Rome elle-même avait donné le signal de cette indulgence ; il y avait la paix de l’Église, qui ne devait être qu’une trêve. […] Un des gentilshommes les plus instruits et des plus beaux esprits de ce temps-là, M. de Tréville, issu d’une noble famille du Languedoc, élevé avec Louis XIV, cornette de la première compagnie des mousquetaires, était de la société intime de Madame Henriette ; il fut si frappé de sa mort soudaine qu’il quitta le monde le lendemain et prit le parti de la dévotion. […] Il y avait, parmi les partisans et les amis de la cause dite janséniste et au nombre de ses patrons les plus déclarés, plus d’un prélat et d’un abbé qui savaient très bien concilier un reste de facilité et de relâchement dans la discipline (un cumul de bénéfices, par exemple), avec le zèle pour le parti ostensiblement austère qu’ils épousaient. […] Bourdaloue, qui songe sans doute, en décrivant cette forme subtile d’une dévotion orgueilleuse, à diminuer une des victoires et des conquêtes du parti contraire, se tient pourtant selon le point de vue convenable dans une peinture plus large, tout à fait permise et non moins ressemblante.

244. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. (Suite et fin) »

Louis XIV ne fait rien sans se rendre compte, sans peser toutes les raisons ; quand divers partis lui sont proposés, il choisit ordinairement le meilleur. […] Peut-on admettre qu’il n’ait fait preuve de ce bon jugement que pour bien connaître les hommes, et qu’une fois choisis, ce jugement l’ait abandonné pour le livrer à leur merci sur les choses, sur les partis combinés à l’avance et désirés par eux ? […] A vrai dire, Boileau a raconté la chose aussi bien, aussi élégamment qu’un fait d’armes aussi compliqué peut se décrire en vers ; mais comme on a toujours affaire à des moqueurs, il n’a pas assez songé au parti qu’on tirerait contre son héros de cet éloge un peu fastueux où il l’a représenté comme inactif et immobile : « Louis, les animant du feu de son courage, Se plaint de sa grandeur qui l’attache au rivage. » Boileau, sans le vouloir, a porté par là préjudice à Louis XIV devant la postérité. […] Je fis passer brusquement des troupes, afin de fortifier le corps du prince de Condé ; je fis travailler diligemment à un pont de bateaux sur le Rhin, et je demeurai avec mon frère, le vicomte de Turenne, et le reste de l’armée sur les bords du Rhin, pour m’opposer au prince d’Orange, en cas que, sur l’avis du passage forcé du Rhin, il eût pris le parti de passer brusquement l’Yssel et de marcher à moi pour tomber sur l’armée à demi passée et attaquer mon arrière-garde », Vous aurez remarqué ces mots : « le passage qui fut glorieux pour la nation… » ; Louis XIV ne se donne que comme ayant été présent et reporte la gloire sur la nation même.

245. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

Ces mots d’opposition et de motions sont établis comme au Parlement d’Angleterre, avec cette différence que lorsqu’on passe à Londres dans le parti de l’opposition, on commence par se dépouiller des grâces du roi, au lieu qu’ici beaucoup s’opposent à toutes les vues sages et bienfaisantes du plus vertueux des maîtres, et gardent ses bienfaits. […] Je crains aussi que le public (ne) nous force à prendre un parti beaucoup plus humiliant pour les ministres et beaucoup plus fâcheux pour nous, en ce que nous n’aurons rien fait d’après notre volonté. […] Je crois que ce parti était nécessaire ; mais je crains en même temps qu’il n’entraîne dans bien des malheurs vis-à-vis des Parlements. […] Elle serait disposée à le mieux comprendre et à tirer de lui meilleur parti que Louis XVI qui n’entend rien à cette nature puissante d’homme public, de tribun éloquent, et au double rôle qu’elle est obligée de jouer dans le temps même où elle se donne.

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