que quelques personnes osent comparer un si petit ouvrage avec l’histoire de notre illustre de Thou ?
Ceci me plut particulièrement et son existence, en se déroulant dans mon imagination (je n’oserais dire par l’effet de ma volonté, tant ces rêves me parurent bientôt se formuler d’eux-mêmes), m’offrit une série d’épreuves, de souffrances, de persécutions et de martyres… Le rêve arriva à une sorte d’hallucination douce, mais si fréquente et si complète parfois que j’en étais comme ravie hors du monde réel. » L’imagination de l’enfant s’exalte ; elle dresse un autel à l’objet secret de son adoration. […] Mais c’est peut-être pour cette raison même que le poète ose confier au vers des pensées si intimes, des sentiments si personnels, qu’il hésiterait à exprimer dans la langue commune.
Il ne faut point s’étoner si les figures, quand elles sont employées à propos, donent de la vivacité, de la force, ou de la grace au discours ; car outre la propriété d’exprimer les pensées, come tous les autres assemblages de mots, elles ont encore, si j’ose parler ainsi, l’avantage de leur habit, je veux dire, de leur modification particuliére, qui sert à réveiller l’atention, à plaire, ou à toucher. […] De plus, les idées accessoires ne jouent point, si j’ose parler ainsi, dans le langage des précieuses de Moliére, ou ne jouent point come elles jouent dans l’imagination d’un home sensé : le conseiller des graces, pour dire le miroir : contentez l’envie qu’a ce fauteuil de vous embrasser, pour dire asséyez-vous.
Taine à son insu, pour le suivre longtemps du regard, sans oser jamais ni l’aborder ni même le saluer. […] Mais Racine met en scène une princesse, habituée par son rang et par le souvenir de sa naissance à tout oser, et cette belle-mère n’hésite pas à déclarer sa passion au fils de son mari.
Cependant elles sont en lui, il les sent en lui, il les poursuit, il les évoque, il ne les trouve pas, et c’est alors, dans cette âme à la fois démente et lucide, des envahissements d’un désespoir auquel on n’ose penser. […] Dans ce vagabondage de ses lectures et de ses curiosités, il est visible que Joseph Delorme avait ses préférences déjà et ses points de durée, de fixation, oserai-je dire. […] Une sympathie de race, j’ose dire, devait vous attirer vers Pascal.
Il suffit pourtant que les habitants d’une ville aient un avantage à ne pas faire un détour pour que l’on perce une rue et que l’on n’hésite pas à chasser des propriétaires de leurs demeures et à abattre celles-ci ; mais si toute la civilisation a intérêt à ne plus ignorer telle œuvre d’art ou de science, contre le propriétaire de ce texte inédit, dont il n’est pas l’auteur, personne ne peut rien, on n’ose pas sévir ; ce propriétaire-là, celui-là seul, a le droit de se conduire comme un fou, de déchirer le manuscrit en petits morceaux et de le manger.
Je n’aurais pas osé le dire, mais puisqu’il l’a dit ! […] Il semble que, par quelque détour de la loi qui conserve la quantité d’énergie, la matière doive toujours, en fin de compte, se retrouver à sa place, qui est la première. « Materia prima, — (enseigne à Sara dans son sermon l’Archidiacre d’Axël) — a dit l’Ange de l’École, proposition soixante-quinzième, et souviens-toi que la bulle de Clément V frappe d’excommunication quiconque osera rêver le contraire ! […] Flaubert rêvait et commença un Dictionnaire des Idées reçues, dont il disait : « Il faudrait qu’une fois qu’on l’aurait lu, on n’osât plus parler, de peur de dire naturellement une phrase qui s’y trouve112. » Il semble que toujours Mallarmé sur sa table ait, pour le glacer, la place de ce Dictionnaire : « On ne doit s’attarder même à l’éternel plus que l’occasion d’y puiser ; mais, je précise, atteindre tel style propre autant qu’il faut pour illustrer un des aspects et ce filon de la langue : sitôt recommencer, autrement, en écolier, quand le risque gagnait d’un pédant, — ainsi déconcertant au haussement d’épaules la génuflexion par certains essayée113. » Certes, ce renouvellement perpétuel n’a rien d’humain. […] Je n’oserais dire que Mallarmé lui-même s’en soit expliqué, mais enfin il a voulu s’en expliquer, et il s’est défendu d’avoir réalisé une poésie de mots.