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1787. (1886) Le roman russe pp. -351

Nous retrouverons dans le Reviseur cette gaieté cruelle, assaisonnement ordinaire de la comédie russe, qui semble toujours une protestation : mais l’œuvre de Griboïédof est, à mon avis, bien supérieure à celle de Gogol, à la fois plus large et plus fouillée ; la verve est d’une qualité plus fine. […] Le signalement physique du personnage est purement négatif ; rien en lui que d’ordinaire et d’indéterminé. […] Ingrat est le sort de l’écrivain qui ose mettre en évidence tout ce qui passe à chaque minute sous nos yeux, tout ce que ne remarquent pas ces yeux distraits : tout l’affreux et dégoûtant limon de petites misères où notre vie est empêtrée, tout le dessous de ces caractères tièdes, ordinaires, hachés menu, qui encombrent et ennuient notre route terrestre… Il ne recueillera pas les applaudissements de la foule ; le juge contemporain traitera ses créations d’inutiles et de basses, on lui assignera une place dédaignée entre les écrivains diffamateurs de l’humanité, on lui refusera tout, âme, cœur, talent. […] Pour ce qui est de Dieu, l’humble femme sait qu’il a d’autres affaires que ce petit malheur ; elle le prie comme à son habitude, sans insister autrement, avec la piété ordinaire d’une paysanne, fort étrangère à la mysticité.

1788. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

De taille ordinaire, cambrée, il était demeuré svelte sans maigreur, avec une sorte de correction et de grâce nette et mesurée de tous les mouvements du corps. […] Comme pour le Vers dont sont multipliés les hauteurs, les longueurs et les dessins d’ondes, pour la Strophe l’on doit s’arroger le droit d’interligner plus ou moins selon le plan des idées, et de rompre, les éloignant, les rapprochant, l’ordre des rimes, et de ne commencer les vers par l’ordinaire capitale. […] Il faut trouver cette âme qui apparaît au contact d’autres mots, qui éclate et éclaire certains livres d’une lumière inconnue. »84 Jusqu’au paradoxe, oui, (comme souvent, car le paradoxe est un Jeu, et Mallarmé a compris souvent la poésie comme un Jeu qui se complaît en soi-même), allait cet amour de l’emploi des mots les plus ordinaires dans le poème le plus hermétique.

1789. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Henri Heine, dans son livre charmant des Reisebilder, jette en passant cette jolie esquisse : « Il était encore de très bonne heure quand je quittai Gœttingue, et le savant Eichhorn était certainement encore étendu dans son lit, où il faisait peut-être son rêve ordinaire : qu’il se promenait dans un beau jardin, sur les plates-bandes duquel il ne poussait que de petits papiers blancs chargés de citations, qui brillaient d’un doux éclat au soleil, et dont il cueillait plusieurs çà et là, qu’il transportait laborieusement dans une planche nouvelle, pendant que les rossignols réjouissaient son vieux cœur de leurs accents les plus doux. » Ce jardin vous l’avez reconnu : c’est celui de la philologie. — La philologie aura donc son jour, le samedi, auquel je n’ose convier que les humanistes, ceux qui aiment à étudier les textes de près, et à se promener dans ce beau jardin tout à loisir. […] Le jeune auteur cherche donc évidemment ce qu’on nomme aujourd’hui l’actualité : il retrace les scènes ordinaires les tableaux quotidiens de cette Galerie, les conversations des marchands et des passants ; c’est une veine neuve et heureuse, un essai ou une intention de ce qu’on nomme à présent réalisme, mais sans les excès du genre. […] Les pensées de la première des deux sont quelquefois trop spirituelles pour partir de personnes fort affligées ; mais, outre que je n’ai fait que la paraphraser de l’espagnol, si nous ne nous permettions quelque chose de plus ingénieux que le cours ordinaire de la passion, nos poèmes ramperaient souvent, et les grandes douleurs ne mettraient dans la bouche de nos acteurs que des exclamations et des hélas. […] Elle était, à ce qu’il paraît, des plus simples et des plus ordinaires. […] Je te livre mes pièces : fais-en ce que tu fais des bonnes choses : sois injuste et stupide à ton ordinaire.

1790. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

L’expérimentateur doit alors disparaître ou plutôt se transformer instantanément en observateur ; et ce n’est qu’après qu’il aura constaté les résultats de l’expérience absolument comme ceux d’une observation ordinaire, que son esprit reviendra pour raisonner, comparer et juger si l’hypothèse expérimentale est vérifiée ou infirmée par ces mêmes résultats. […] Rien n’est plus ordinaire, et c’est même le procédé le plus simple pour commencer un travail scientifique. […] En recherchant comment s’éliminaient par le sang qui sort du rein les substances que j’avais injectées, j’observai par hasard que le sang de la veine rénale était rutilant, tandis que le sang des veines voisines était noir comme du sang veineux ordinaire. […] Je fis pour cela passer un courant d’hydrogène dans du sang veineux rutilant pris sur un animal empoisonné par l’oxyde de carbone, mais je ne pus déplacer, comme à l’ordinaire, de l’oxygène. […] Je devrai obtenir alors un refroidissement par la paralysie des nerfs vasculaires sans que le mouvement ni la sensibilité aient disparu, puisque j’aurai laissé intacts les nerfs moteurs et sensitifs ordinaires.

1791. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Cet anachronisme et cette discordance, qui n’appartiennent pas à la manière des Fragments et d’Antigone, et que nous signalons en grand dans l’Orphée, ont pénétré quelquefois jusque dans la diction, d’ordinaire si pure, de M.

1792. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre (2e partie) » pp. 5-80

Ses interlocuteurs ordinaires dans ses derniers jours étaient M. de Chateaubriand, M. de Bonald, M. de Lamennais, plumes irritées alors contre l’esprit moderne, qui faisaient écho à ses colères.

1793. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

Ces poissons, qui excèdent rarement cinq ou six pouces en longueur, n’en ont d’ordinaire que de quatre à cinq, sur un ou deux de large.

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