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165. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 5-64

— Monte, mon enfant, dit la fiancée, c’est une bénédiction du bon Dieu que de trouver une occasion de charité à la porte de la ville, un jour de noce et de joie, comme est ce beau jour pour nous. […] CXLIX Ces récits du jeune bouvier, qui m’avaient laissée d’abord distraite et froide, me firent tout à coup tressaillir, rougir et pâlir quand il était venu à parler de geôle, de geôlier, de cachots et de prisonniers ; car l’idée me vint tout à coup que la maison où allait se réjouir cette noce de village était peut-être précisément celle où l’on aurait jeté sur la paille le pauvre Hyeronimo, et que la Providence me fournirait peut-être par cet évanouissement de douleur sur la route et par cette fortuite rencontre, une occasion de savoir de ses nouvelles, et, qui sait, peut-être de parvenir jusqu’à lui. […] non, dit-il, nous étions assez de monde à la maison sans lui pour soigner les animaux et pour servir de valets de ferme au père ; mon frère aîné était entré depuis deux ans, comme porte-clefs de la prison, dans la maison du bargello ; notre aïeule l’avait ainsi voulu, pour que sa filleule, la fille du bargello, et son petit-fils, mon frère, eussent l’occasion de se voir tous les jours et de s’aimer ; car elle avait toujours eu ce mariage dans l’esprit, voyez-vous, et les grand-mères, qui n’ont plus rien à faire dans la maison, ça voit de loin et ça voit mieux que les autres. […] La famille du bargello était très aimée dans le peuple des boutiques et des places de Lucques, parce que, malgré ses fonctions, le bargello, chargé des prisons, était doux et équitable, et qu’il avait dans ses fonctions même de police mille occasions d’être agréable à celui-ci ou à celui-là. […] lui répondis-je, toute rouge de l’idée qu’elle allait peut-être me proposer la place du gendre qui venait de la quitter, et pensant à toutes les occasions que j’aurais ainsi de voir, d’entendre et de servir celui que je cherchais.

166. (1707) Discours sur la poésie pp. 13-60

J’examinerai cet enthousiasme, ce beau désordre qu’on exige sur-tout dans l’ode héroïque, et même le sublime qui en doit être toujours l’objet ; et enfin comme une partie de cet ouvrage consiste en des imitations des anciens poëtes lyriques, j’en prendrai occasion de dire un mot de leur caractére ; à quoi je n’ajouterai que quelques réflexions sur les poëtes françois qui ont travaillé dans le même genre. […] La fiction est encore un détour qu’on pourroit croire inutile ; car pourquoi ne pas dire à la lettre ce qu’on veut dire, au lieu de ne présenter une chose, que pour servir d’occasion à en faire penser une autre ? […] Pindare ne pouvoit choisir d’occasion plus éclatante pour ses vers, ni plus utile pour lui, que les jeux olympiques. […] J’aurai occasion dans la suite de parler plus au long de Pindare et d’Horace. […] Enjoüé dans sa morale, il instruit d’ordinaire sans paroître y penser ; et hors quelques occasions où il s’emporte contre les vices des romains avec la véhémence d’un censeur, ses préceptes sont toujours accompagnés d’un agrément qui ne contribue pas peu à les faire goûter.

167. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Dans son testament, Duclos a pris soin de mettre cet article épigrammatique : « Je donne à l’Académie mon buste du roi en bronze, et je la prie de me donner pour successeur un homme de lettres. » Personne, du reste, n’a joui plus agréablement que lui dans ses voyages, et en toute occasion, de l’avantage social qu’il y avait alors à être le confrère des gouverneurs de provinces, des archevêques et des ambassadeurs. […] Ce ne serait, du reste, que dans quelques occasions où il était en lutte, qu’il aurait eu ce calcul et cette ruse : la plupart du temps, il est évident qu’il s’abandonnait. […] J’entrai dans quelques explications, et je finis par donner à l’auteur les éloges que mérite son projet, qui peut être l’occasion d’une réforme dans le Code criminel.

168. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Au moment où le corps de la Dauphine est exposé dans sa chambre, avant l’autopsie, il s’est commis une irrégularité dont le narrateur ne manque pas de nous avertir : « Mme la Dauphine a été à visage découvert jusqu’à ce qu’on l’ait ouverte, et on a fait une faute : c’est que pendant ce temps-là, les dames qui n’ont pas droit d’être assises devant elle pendant sa vie, n’ont pas laissé d’être assises devant son corps à visage découvert. » Les choses se passent plus correctement en ce qui est des évêques : « Il a été réglé, nous dit Dangeau, que les évêques qui viennent garder le corps de Mme la Dauphine auront des chaises à dos, parce qu’ils en eurent à la reine ; l’ordre avait été donné d’abord qu’ils n’eussent que des tabourets. » L’acte de l’adoration de la croix, le jour du vendredi saint, est avant tout, chez Dangeau, l’occasion d’une querelle de rang, d’un grave problème de préséance : « Ce matin, les ducs ont été à l’adoration de la croix après les princes du sang. […] Parti le 17 mai de Versailles, il s’en revient à la fin de septembre sans avoir rencontré ni fait naître d’occasion, sans avoir rien tenté de mémorable. […] Dangeau, pas plus en cette dernière occasion qu’en aucune autre, ne se permet le moindre commentaire : mais ce qu’il y a d’un peu lourd ou de peu svelte jusque dans la force et la grandeur de Louis XIV, paraît bien dans le détail journalier de sa relation.

169. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

Je ne lis jamais de poète, ni d’ouvrage d’éloquence, qui ne laisse quelques traces dans mon cerveau ; elles se rouvrent dans les occasions, et je les couds à ma pensée sans le savoir ni le soupçonner ; mais lorsqu’elles ont passé sur le papier, que ma tête est dégagée, et que tout est sous mes yeux, je ris de l’effet singulier que fait cette bigarrure, et malheur à qui ça tombe ! […] Lorsque Vauvenargues, après avoir quitté le service, se décide, faute de mieux, à se faire imprimer et à devenir auteur (tout en gardant encore l’anonyme), il écrit à Saint-Vincens (décembre 1745) : Je vous enverrai mon ouvrage dès que je trouverai une occasion. […] On sent dans cette lettre qu’il aurait pu, ce jour-là même, tracer le caractère de Sénèque ou l’orateur chagrin, l’orateur de la vertu, qui commence en ces termes : Celui qui n’est connu que par les lettres, n’est pas infatué de sa réputation, s’il est vraiment ambitieux ; bien loin de vouloir faire entrer les jeunes gens dans sa propre carrière, il leur montre lui-même une route plus noble, s’ils osent la suivre : Ô mes amis, leur dit-il, pendant que des hommes médiocres exécutent de grandes choses, ou par un instinct particulier, ou par la faveur des occasions, voulez-vous vous réduire à les écrire ?

170. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Qu’il y ait eu un peu de faiblesse physique, de la mauvaise santé dans cette disposition à se méfier de soi-même, je le crois ; mais il y a autre chose encore ; on est obligé d’y voir un trait essentiel de son caractère qui reparaîtra en toute occasion décisive de sa vie, et que Saint-Cyr nous a révélée s’accusant et redoublant avec une persistance étrange dans la nuit de perplexité qui précéda la glorieuse mort du jeune général. […] Il m’est impossible, dans l’occasion, de ne pas suivre l’impulsion naturelle ; il faut se montrer. Mais je vous assure que je désire n’avoir plus occasion de guerroyer, et encore une fois que le repos seul est l’état que je désire et dont j’ai besoin.

171. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Lettres de Madame de Sévigné »

Monmerqué, le plus instruit et le plus aimable des amateurs, le plus riche en documents, en pièces de toutes sortes, si au fait des sources et si porté à les indiquer, n’avait pas en lui l’esprit de critique et d’exacte méthode qui mène à terme et pousse à la perfection un travail de ce genre ; il fallait qu’un philologue de profession et à la fois ouvert à toutes les belles-lettres, un homme qui a fait ses preuves dans l’érudition antique la plus délicate et la plus ardue, et qui sait, à l’occasion, en sortir, apportât dans cette étude moderne les habitudes de la critique véritable et classique, pour que toutes les garanties, celles de la fidélité et du goût, se rencontrassent réunies : j’ai nommé M.  […] Mais non point de paresse, cela vaut mieux ; recommençons, rafraîchissons-nous toujours ; obligés de contrôler, de défendre ou de modifier tant soit peu les beautés connues, n’y voyons qu’une occasion d’en retrouver la sensation plus vive et toujours nouvelle ; ne nous figeons pas dans le classique, baignons-nous-y toujours. […] J’ai acquis une grande réputation dans cette occasion ; je suis du moins comme l’apothicaire de Pourceaugnac, expéditive.

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