Son Poëme est plutôt une histoire décharnée, parsemée de quelques traits de Morale & de Philosophie, qu’un véritable Poëme. […] Nous avons de Brebeuf d’autres Poésies qui ne sont point à dédaigner, tels que ses Entretiens solitaires, où la piété, la morale profonde, la poésie, les pensées énergiques, font éprouver au Lecteur des sentimens aussi favorables à l’esprit du Poëte, qu’à ses bonnes mœurs & à sa Religion.
Ce que deviennent ensuite ces rocambolades, l’impression morale qui doit en rester, le bien ou le mal qu’elles sont susceptibles de produire, la part plus ou moins forte qu’elles risquent d’avoir à la perversion des consciences et du goût publie : voilà des points qui ne les touchent guère. […] Que ces Contes soient écrits le mieux possible, que la morale et la décence n’y soient pas trop offensées : voilà ce qu’il nous est permis de souhaiter. […] Enfin, et en tout cas, quelle meilleure application de la morale que d’exiger de l’ouvrier de lettres qu’il fasse de son mieux et que l’œuvre qu’il nous livre soit vraiment de sa façon, et non le témoin d’une escroquerie ? […] Pour accomplir l’œuvre rêvée : un roman conforme, si peu que ce soit, à un certain idéal d’art, de logique, de psychologie, et de bonne influence morale et sociale, en même temps que tout à fait compréhensible et captivant pour un public illettré, il fallait un immense génie. […] Frédéric Loliée, qui s’est chargé d’approfondir l’état actuel du mal, des penseurs romanciers et journalistes éminents ont bien voulu à leur tour éclaircir, à différents points de vue, ce problème des plus importants pour notre grandeur morale.
C’est contre ce dessèchement des sources mêmes de la vie morale et intellectuelle que M. […] On ne saurait critiquer ou discuter sa morale ; il n’en a point ; c’est un sens qui lui manque absolument ; et chaque fois qu’il a énoncé une morale quelconque (cela lui arrive souvent), il s’est moqué de nous. […] — Les morales se succèdent l’une à l’autre en un incessant conflit ; mais la morale est une réalité en devenir constant. […] Je tiens à répéter que l’art n’a pas à se préoccuper de la morale. […] Le xviie siècle français ne fut point, selon moi, une époque dramatique, c’est-à-dire de crise morale et sociale.
Austère, scrupuleux en morale, dépourvu d’une jeunesse entraînante, dévoré d’une sensibilité vague qu’il désespérait de fixer sur un choix enchanté, désireux avant tout de s’asseoir dans une existence indépendante et rurale, M. de Sénancour se laissa dire, et se crut délicatement engagé : on peut saisir quelques traits de ces circonstances personnelles sous l’histoire de Fonsalbe, au tome second d’Oberman. […] Un éloquent professeur de psychologie morale exprime volontiers par une plainte mélancolique l’insuffisance de cette contemplation familière. […] Son idée se traduit constamment sous la forme morale ; c’est tout au plus si de loin en loin il la couronne de quelque grande image naturelle. […] Les circonstances déterminent nos affections ; mais les sentiments expansifs sont naturels à l’homme dont l’organisation morale est parfaite. […] Que les Parsis, les Hindous, les races d’Orient, se soient rencontrés dans certaines croyances, diversement produites, de chute et de réparation, de sacrifice et d’attente, de baptêmes, de confessions, de nativités singulières, cela lui suffit encore, mais cette fois pour rejeter ; de sorte que la conformité d’opinion de quelques sages lui paraît une preuve déterminante en morale, et que la convergence universelle des peuples vers certaines croyances ou pratiques lui paraît une objection victorieuse contre toute religion.
Sans doute, il continue à se soumettre extérieurement aux lois de la société ; il révère les dogmes de la religion ; il se fait une morale provisoire empruntée aux opinions moyennes des mieux sensés : tout cela est de sens commun ; mais c’est la moindre partie de lui-même que Descartes abandonne ainsi. […] Nul peuple n’a conçu ce genre de drame, dont l’action est toute morale, qui néglige tous les accidents secondaires de la vie, tous les événements extérieurs, toutes les formes changeantes de l’humanité, pour peindre l’homme en général et surtout l’homme aux prises avec lui-même dans ce grand combat de la passion et de la vertu. […] En effet, la lutte morale est ce qui donne à la vie humaine un aspect noble et imposant. […] Le principal objet de ce drame étant la lutte morale, cette lutte est d’autant plus intéressante qu’elle est plus concentrée ; de là l’unité d’action. […] Nisard a si bien pénétré le vrai caractère de notre génie dramatique : c’est on cherchant dans le drame, non la vérité extérieure ou la vérité de costume, mais la vérité morale, idéale, éternelle, qu’il nous a montré combien ce théâtre est beau.
J’ai plus de cinquante-cinq ans, je suis censé très grave aux yeux de quelques-uns ; je viens de terminer un gros livre à demi théologique et d’analyse morale sur Port-Poyal et les Solitaires ; je suis professeur dans une école supérieure et, comme tel, investi de la confiance d’un ministre ami64, à laquelle j’ai à cœur de répondre dignement, et que je tiens à honneur de justifier. […] Je me fais ces questions, je reste ouvert et attentif aux réponses qui m’arrivent de temps en temps du dehors, et je ne me laisse pas détourner par cette fin de non recevoir très à la mode depuis quelques années, la morale et le beau. La morale, qu’on met sans cesse aux prises avec l’art, ne me paraît point devoir lui être si constamment opposée et confrontée. […] » En France et dans notre société, c’est moins encore l’idée de beauté que celle de morale qui fait ce même office de pavé accablant, et dont on s’arme sans cesse, qu’on jette à la tête de tout nouveau venu, avec une vivacité et une promptitude qui ne laissent pas d’être curieuses, si l’on songe à quelques-uns de ceux qui en jouent de la sorte.
Il n’y a pas de danger qu’on se méprenne sur ce mot Éloge : il ne saurait s’appliquer qu’au grand écrivain toujours debout et subsistant ; l’homme et le caractère sont dorénavant trop connus, trop percés et mis à jour pour que l’éloge puisse y prendre pied décidément, et quoique les appréciations de ce genre soient sujettes à de perpétuelles vicissitudes, quoiqu’il semble qu’en littérature et en morale les choses ne se passent point comme dans la science proprement dite et que ce soit toujours à recommencer, je pense toutefois qu’il y a, dans cet ordre d’observations aussi, de certaines conclusions acquises et démontrées sur lesquelles il n’y a pas lieu pour les bons esprits à revenir. La science morale, bien comprise, bien appliquée aux individus, a, comme toutes les sciences, ses jugements définitifs et ses résultats. […] Je croirai aisément que vous et moi, et nous tous, avons le droit de condamner en lui beaucoup de choses ; notre morale et l’amitié nous en donnent le droit ; mais ce droit, faudra-t-il aussi l’accorder à d’autres hommes qui certainement ne le valent pas ? […] Je finis sur ce chapitre, j’en ai parlé longtemps, trop longtemps, mais je ne sais par quelle fatalité il arrive que je ne peux rien vous dire en peu de mots ; c’est que j’aimerais à vous dire tout ce que je pense… » Je n’exagère pas, et chacun maintenant est juge ; mais c’est, on en conviendra, un événement biographique que la production d’une semblable pièce d’anatomie morale.