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579. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 299

Nous pourrions demander ici, où est la liberté qui doit régner dans la République des Lettres ?

580. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Quel terrible spectacle que celui d’un état dont on assassine le chef sous le prétexte de la liberté, et qui tombé dans les horreurs de l’anarchie et du brigandage ! […] Sur ces mots : la passion de la liberté, le nouvel éditeur de Corneille, Palissot, a fait une courte note, où il dit que dès lors la passion de la liberté n’était pas étrangère aux Français, et qu’elle avait essayé de lutter contre ledespotisme de Richelieu . Cette note est bien vague et bien peu exacte : le Français, naturellement généreux, a toujours aimé la liberté ; mais le propre de la passion est d’égarer, et la passion de la liberté, mal dirigée, conduit à l’esclavage ; c’est ce qui est arrivé aux Français. […] Si le traité de paix l’avait forcée de se départir de ce juste sentiment de reconnaissance, la liberté qu’on lui rendait la rejetait dans cette obligation. […] Le jeune Attale, protégé par les Romains, et l’unique objet des crimes d’Arsinoé, augmente l’intérêt du dénouement, lorsqu’il se montre digne frère de Nicomède, et lui sauve, par un coup inattendu, la liberté et la vie.

581. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — I. » pp. 431-451

Il relit lui-même son éducation avec liberté et méthode. […] Ainsi considéré, Virgile, dans ses Géorgiques, n’est plus seulement un poète, il s’élève à la fonction d’un civilisateur et remonte au rôle primitif d’un Orphée, adoucissant de féroces courages. — Touchant, en passant, les travaux de Pouilly et de Beaufort qui, bien * avant Niebuhr, avaient mis en question les premiers siècles de Rome, Gibbon s’applique à trouver une réponse, une explication plausible qui lève les objections et maintienne la vérité traditionnelle : « J’ai défendu avec plaisir, dit-il, une histoire utile et intéressante. » Celui qui exposera le déclin et la chute de l’Empire romain se retrouve ici, comme par instinct, défendant et maintenant les origines et les débuts de la fondation romaine. — En ce qui est de l’usage que les poètes ont droit de faire des grands personnages historiques (car Gibbon, dans cet Essai, touche à tout), il sait très bien poser les limites du respect dû à la vérité et des libertés permises au génie : selon lui, « les caractères des grands hommes doivent être sacrés ; mais les poètes peuvent écrire leur histoire moins comme elle a été que comme elle eût dû être ». […] L’Histoire de la liberté des Suisses, l’Histoire de la république de Florence sous les Médicis, le tentent tour à tour, et il se lance même quelque peu dans la première.

582. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Mais l’homme dur et rigide, l’homme tout d’une pièce, plein de maximes sévères, enivré de sa vertu, esclave des vieilles idées qu’il n’a point approfondies, ennemi de la liberté, je le fuis et je le déteste… Un homme haut et ardent, inflexible dans le malheur, facile dans le commerce, extrême dans ses passions, humain par-dessus toutes choses, avec une liberté sans bornes dans l’esprit et dans le cœur, me plaît par-dessus tout ; j’y joins, par réflexion, un esprit souple et flexible, et la force de se vaincre quand cela est nécessaire : car il ne dépend pas de nous d’être paisible et modéré, de n’être pas violent, de n’être pas extrême, mais il faut tâcher d’être bon, d’adoucir son caractère, de calmer ses passions, de posséder son âme, d’écarter les haines injustes, d’attendrir son humeur autant que cela est en nous, et, quand on ne le peut pas, de sauver du moins son esprit du désordre de son cœur, d’affranchir ses jugements de la tyrannie des passions, d’être libre dans ses idées, lors même qu’on est esclave dans sa conduite. […] L’on ne mesure bien, d’ailleurs, la force et l’étendue de l’esprit et du cœur humains que dans ces siècles fortunés ; la liberté découvre, jusque dans l’excès du crime, la vraie grandeur de notre âme ; là, la force de la nature brille au sein de la corruption ; là, paraît la vertu sans bornes, les plaisirs sans infamie, l’esprit sans affectation, la hauteur sans vanité, les vices sans bassesse et sans déguisement.

583. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Tout considéré, et sauf quelques ombres, quelques grains plus marqués çà et là dans la physionomie, nous verrons le même Catinat, le vrai Catinat déjà connu, le plus vertueux des hommes de guerre de son temps, obéissant pourtant à sa consigne, et docile de point en point à Louis XIV, à Louvois ; puis, le guerrier une fois quitte de son service, nous aurons le philosophe et le sage, non pas absolument celui qu’on a arrangé au xviiie  siècle, et sur lequel on avait répandu une légère teinte de liberté de pensée, mais enfin un modèle de modestie, de raison, de piété morale, et un bon citoyen, celui qui disait ; « J’aime mon maître et j’aime ma patrie. ». […] Sa Majesté ne donnerait pas cette liberté à un autre qu’à vous, mais elle est bien persuadée que vous ne souffrirez pas qu’on en abuse. » Il importait aussi de favoriser la désertion dans les troupes de la garnison de Mons, de faire semer des billets aux environs et, s’il était possible, jusqu’à l’intérieur de la ville, pour assurer aux déserteurs, s’ils voulaient venir à Saint-Ghislain, une prime de cinq écus qu’ils toucheraient argent comptant : « que ceux qui voudraient prendre parti trouveraient emploi, et que ceux qui voudraient retourner dans leur pays auraient des passe-ports pour y aller librement. ». […] « Vous jugez bien, lui écrivait Louvois, que pour que le projet de Sa Majesté réussisse, il faut que les déserteurs de Mons soient effectivement payés des quinze livres qu’on leur promettra, qu’ils aient la liberté de se retirer chez eux, s’ils ne voulaient pas prendre parti.

584. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

On me permettra donc de revenir sur ce conflit de jugements en toute liberté et sincérité. […] Ainsi, en réservant à l’égard de l’un de leurs ancêtres toute notre liberté de jugement, nous n’avons pas même à demander excuse ; nous ne faisons qu’user du droit de l’histoire. […] Autres, en effet, sont les devoirs et les convenances d’un historiographe publiant des pièces d’État, autres sont nos libertés à nous ; nous avons nos coudées plus franches.

585. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

C’est dans un article du Correspondant, de mai 1868, sur la Liberté de l’enseignement, que M. de Montalembert, s’emparant d’une phrase d’un de mes discours au Sénat, m’accuse de renier la liberté, et, poussant selon sa tactique les choses à l’extrême, de reprendre à mon compte la souveraineté du but proclamée par Barbès en 1848, « époque, ajoute-t-il, où M. […] « Pour populariser l’erreur, il abusait du vocabulaire de la liberté. » C’est le mot de quelqu’un qui l’a bien connu, d’un de ses anciens collègues et compagnons d’armes à la Chambre des pairs, le comte d’Alton-Shée.

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