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1839. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Mais ne nous ferait-il pas tout aussi bien comprendre comment notre propre volonté est capable de vouloir pour vouloir, et de laisser ensuite l’acte accompli s’expliquer par des antécédents dont il a été la cause ? […] Mais le déterministe ne se tiendra pas pour battu, et posant la question sous une nouvelle forme : « Laissons de côté, dira-t-il, les actions accomplies, considérons seulement des actes à venir. […] On laisse alors la nature propre de ces phénomènes dans l’ombre, mais on affirme qu’en leur qualité de phénomènes ils restent soumis à la loi de causalité. […] Pour le physicien, la même cause produit toujours le même effet ; pour un psychologue qui ne se laisse point égarer par d’apparentes analogies, une cause interne profonde donne son effet une fois, et ne le produira jamais plus. […] Mais laissons de côté l’histoire.

1840. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre II. De la reconnaissance des images. La mémoire et le cerveau »

La première enregistrerait, sous forme d’images-souvenirs, tous les événements de notre vie quotidienne à mesure qu’ils se déroulent ; elle ne négligerait aucun détail ; elle laisserait à chaque fait, à chaque geste, sa place et sa date. […] De ces deux mémoires, la première est véritablement orientée dans le sens de la nature ; la seconde, laissée à elle-même, irait plutôt en sens contraire. […] Essentiellement fugitifs, ils ne se matérialisent que par hasard, soit qu’une détermination accidentellement précise de notre attitude corporelle les attire, soit que l’indétermination même de cette attitude laisse le champ libre au caprice de leur manifestation. […] Pour que le souvenir du mot se laisse évoquer par le mot entendu, il faut au moins que l’oreille entende le mot. […] Le second, laissé à lui-même, tend à donner un souvenir actualisé, de plus en plus actuel à mesure que le courant s’accentuerait.

1841. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Mais je laisse à l’auteur de ce livre le soin d’en parler. […] Chacun a laissé dans l’autre la moitié d’elle-même. […] En même temps, certains d’entre eux se laissaient hanter par le parfum troublant des Fleurs du Mal. […] Mais les trois amis du collège Sainte-Barbe se laissaient séduire, Maeterlinck plus que les autres, par l’art de Stéphane Mallarmé. […] Vanderkindere laisse, en outre, une Histoire de la Formation territoriale des principautés belges au Moyen Âge.

1842. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

Je ne veux pas dire que l’écrivain goûté et dévoré du public doive renoncer à des profits légitimes pour laisser un libraire s’enrichir à ses dépens. […] L'éclectisme, qui touche à tout, n’a pas mis jusqu’ici le doigt sur le grand ressort de rien. — Quant à ce que pourrait objecter d’autre part une philosophie originale et convaincue contre cette manière de prendre un peu à un siècle et un peu à un autre pour se composer une doctrine raisonnable, nous ne nous en chargeons pas et nous laissons ce soin aux doctes Allemands de Berlin ou de Kœnigsberg, et aux professeurs comme Rosenkranz, qui sont en train de s’en acquitter à merveille.

1843. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Un cas de pédanterie. (Se rapporte à l’article Vaugelas, page 394). »

Je laisse à des grammairiens plus délicats que lui à juger si quittions n’est pas ici très-légitime, puisque le désir auquel on répond n’est pas seulement au passé, mais qu’il dure et persiste jusqu’au dernier moment. […] Dans tous les cas, je suis de ceux qui, placés entre une légère faute grammaticale qui disparaît dans le débit, et une faute de goût qui, au contraire, choquerait tout le monde, se laisseraient plutôt aller à la première ; et quittassions eût été une faute de goût, une parole choquante.

1844. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De l’amitié. »

Un jour heureux, un être distingué rattachent à ces illusions, et vingt fois on revient à cette espérance après l’avoir vingt fois perdue ; peut-être à l’instant où je parle, je crois, je veux encore être aimée, je laisse encore ma destinée dépendre toute entière des affections de mon cœur ; mais celui qui n’a pu vaincre sa sensibilité, n’est pas celui qu’il faut moins croire sur les raisons d’y résister ; une sorte de philosophie dans l’esprit, indépendante de la nature même du caractère, permet de se juger comme un étranger, sans que les lumières influent sur les résolutions, de se regarder souffrir, sans que sa douleur soit allégée par le don de l’observer en soi-même, et la justesse des méditations n’est point altérée par la faiblesse de cœur, qui ne permet pas de se dérober à la peine : d’ailleurs, les idées générales cesseraient d’avoir une application universelle, si l’on y mêlait l’impression détaillée des situations particulières. […] Pour juger de l’amitié même, il faut l’observer dans les hommes qui ne parcourent ni la carrière militaire, ni celle de l’ambition, et peut-être verra-t-on alors que ce sentiment est le plus exigeant de tous dans les âmes ardentes ; on veut qu’il suffise à la vie, on s’agite du vide qu’il laisse, on en accuse le peu de sensibilité de son ami, et quand on éprouverait l’un pour l’autre un sentiment semblable, on serait fatigué mutuellement de l’exigence réciproque.

1845. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De l’étude. »

Toutes les époques de la vie sont également propres à ce genre de bonheur ; d’abord, parce qu’il est assez démontré par l’expérience, que quand on exerce constamment son esprit, on peut espérer d’en prolonger la force ; et parce que, dut-on ne pas y parvenir, les facultés intellectuelles baissent en même-temps que le goût qui sert à les mesurer, et ne laissent à l’homme aucun juge intérieur de son propre affaiblissement. […] Bientôt il est saisi d’un insurmontable dégoût pour les pensées étrangères à celle qui l’occupe ; elles ne s’enchaînent point dans sa tête, elles ne laissent point de trace dans sa mémoire.

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