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468. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 269-270

Il est aisé de juger, par les dix volumes de ses Entretiens, qu'elle avoit, pour le moins, autant de savoir que de fécondité, de métaphysique, de politesse ancienne, & de babil.

469. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Après cet éclair de raison, Voltaire, aveuglé par l’amour-propre, retombe aussitôt dans les sophismes : de cette incertitude dans l’opinion publique il conclut que les journaux ne doivent pas juger les pièces, parce qu’ils ne savent pas si le public à la longue jugera comme eux . […] Voltaire ne s’est pas cru assez fort pour corriger son siècle ; il a jugé qu’il était plus facile et plus sûr de le flatter. […] Avant de pouvoir décider entre Euripide et Racine, il faudrait décider entre Athènes et Paris ; il faudrait avoir comparé les mœurs des Grecs avec les mœurs des Français, et juger quelles sont les meilleures. […] En attendant, il attaqua par l’amour ceux qu’il n’avait pu subjuguer par la terreur : il jugea prudemment qu’il valait mieux offrir au public une jeune et jolie sultane, qu’un vilain fantôme. […] Quoique j’eusse alors vingt et un ans, et que, d’après les études que j’avais faites, je ne fusse pas tout à fait incapable de juger, je ne jugeai point ; je m’abandonnai aveuglément aux sensations que j’éprouvais.

470. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier après les funérailles »

Être un esprit littéraire, ce n’est pas, comme on peut le croire, venir jeune à Paris avec toute sorte de facilité et d’aptitude, y observer, y deviner promptement le goût du jour, la vogue dominante, juger avec une sorte d’indifférence et s’appliquer vite à ce qui promet le succès, mettre sa plume et son talent au service de quelque beau sujet propre à intéresser les contemporains et à pousser haut l’auteur. […] Pour nous qui ne le jugions que par le dehors, il ne nous a jamais paru plus fécond d’idées, plus inépuisable d’aperçus, plus sûr de sa plume toujours si flexible et si légère, qu’en ces dernières années et dans les morceaux mêmes dont il enrichissait nos recueils, fiers à bon droit de son nom.

471. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIII » pp. 237-250

« On se moquait à la cour, dit madame de Caylus, de ces sociétés de gens oisifs, uniquement occupés à développer un sentiment et à juger d’un ouvrage d’esprit. […] Cependant, on voit par une multitude de lettres adressées par le duc de La Rochefoucauld à madame de Sablé, dans le temps qu’il complétait, corrigeait, soumettait à la critique les Maximes qu’il a publiées en 1665, que madame de Sablé les jugeait, et les modifiait très judicieusement ; on voit de plus qu’elle les soumettait au jugement d’autres femmes célèbres, de ses amies, notamment à la maréchale de Schomberg, Marie d’Hautefort, alors âgée d’environ 49 ans, anciennement l’objet de cette passion religieuse de Louis XIII, qui a été tant célébrée, et à son amie la comtesse de Maure ; qu’elle rédigeait elle-même des maximes, ou, pour parler plus exactement, des observations sur la société et sur le cœur humain, observations dont il paraît que le recueil de La Rochefoucauld renferme quelques-unes ; et enfin que cette dame avait de la fortune, une bonne maison, une excellente table, citée alors pour son élégante propreté ; qu’elle donnait des dîners dans la maison qu’elle occupait à Auteuil ; et que le duc de La Rochefoucauld allait souvent l’y voir.

472. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Société française pendant la Révolution »

En effet, si nous en jugeons par le titre de leur ouvrage l’Histoire de la Société française pendant la Révolution 14, ils n’ont pas craint d’aborder pour leur début un de ces sujets dont l’importance et la difficulté eussent pu désespérer beaucoup d’esprits d’une vigueur déjà éprouvée. […] Il vous reste juste leur livre : des miettes historiques tombées de quelques corbeilles, de quelques pamphlets, de quelques journaux, — des miettes historiques, des atomes, de la poussière de documents qui en eux-mêmes ne sauraient changer le caractère jugé de la Révolution, mais que de grands artistes broieraient seulement dans les couleurs de leur palette pour donner plus d’éclat et plus de vie à cette grande fresque d’une histoire qu’on ne fera jamais au pointillé.

473. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

Comment est-il possible de juger un homme, si on ne se sépare pas de lui dans une atmosphère quelconque, — si on ne se place pas plus haut que lui pour l’embrasser mieux et le voir tout entier ? […] C’est donc sa vraie place ; mais elle est mauvaise pour les juger.

474. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ch. de Barthélémy » pp. 359-372

Ces hommes qui se sont vantés d’avoir mis la liberté dans le monde, ces charlatans et ces menteurs, ces Tartufes de philosophie, agirent hideusement contre l’homme qui les jugea, toute sa vie, avec une indépendance lumineuse… Ils l’insultèrent ; ils le jetèrent au donjon de Vincennes ; ils finirent par faire supprimer son Année littéraire, et ils tuèrent, par là, l’œuvre et l’homme, car il en mourut… Et quand leur révolution triomphante eut passé sur cet assassinat, le xixe  siècle, qui n’avait dans ses grandes oreilles d’âne que le bruit des choses de la Révolution, Pavait oublié, et il fallut… quoi ? […] C’était une espèce de Boileau en prose, élargi et vaste, avec plus de chaleur au cœur que Boileau et plus heureux, car les dindons auxquels il eut affaire toute sa vie ne purent jamais l’émasculer… Il a même jugé Boileau, qu’il respectait, de manière à faire croire qu’il le dominait par le sens critique.

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