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335. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

Ce sont là des considérations bien mesquines, et qui doivent évidemment être écartées dans un débat institué entre esprits sincères, uniquement préoccupés de l’intérêt des bonnes études secondaires si étroitement lié au prestige et à l’avenir de la patrie. III. — La restauration des études classiques offrirait même à mes yeux une utilité dépassant la sphère des intérêts nationaux. […] Dans l’intérêt vital de notre langue, il est non seulement utile, il est urgent que l’enseignement du latin soit rétabli. […] Mais laissons la plaisanterie, et déplorons, une fois de plus, que notre pays soit infecté par la politique à tel point que toute question d’intérêt national y soit immédiatement considérée comme une affaire de parti. […] Quel intérêt voulez-vous qu’ils y prennent et que voulez-vous qu’ils vous répondent ?

336. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Certes, malgré le peu d’intérêt qu’inspire Bovary, l’adultère est hideux dans la maison de ce pauvre homme, et M.  […] Est-il assez fort pour soutenir l’intérêt au-delà d’une première lecture ? […] Il y avait pourtant un moyen de relever ces peintures africaines et de leur donner l’intérêt qui leur manque : c’était d’opposer à la barbarie orientale cette civilisation gréco-latine qui devait accueillir plus tard si naturellement la lumière de l’Évangile, et qui déjà en ces siècles sombres était le salut du genre humain. […] Flaubert, si l’intérêt moral est nul, en admirerai-je du moins les parties extérieures ? […] où est l’intérêt ?

337. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Sieyès. Étude sur Sieyès, par M. Edmond de Beauverger. 1851. » pp. 189-216

Quand on les médite plein du seul désir de l’intérêt public, on est obligé à chaque page de se dire que la saine politique n’est pas la science de ce qui est, mais de ce qui doit être. […] C’est que les faits du clergé le touchent, et qu’en cette matière l’intérêt personnel l’avertit de ne pas s’en remettre à la théorie pure. […] Fertile en découvertes d’exécution, sachant se taire et attendre, ne concevant point de plans chimériques, et alliant la dextérité à la constance, personne ne sait mieux, lorsqu’un grand intérêt l’exige, conserver de l’empire sur lui-même et en obtenir sur les autres. […] à ceux qui ont un grand intérêt et une grande responsabilité de gloire : à vous et à moi, par exemple !  […] Le sentiment intérieur, l’amour des hommes, appellent l’intérêt, les larmes ; bientôt je m’indigne, je frémis, j’en veux aux tyrans, et je finis, non par m’apaiser, mais par me distraire.

338. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Quoique nous pliions sous l’influence de Goethe qui a replacé, prétend-on, les anciens dans leur vraie lumière, nous, c’est-à-dire tous, n’avons ni pour Virgile, ni pour aucun ancien, excepté Tacite qui se rapproche de nous par la haine éternelle du pouvoir chez l’homme et l’insultante manière de juger nos maîtres, l’intérêt animé et sincère qui répond par un frémissement ou une palpitation à chaque coup de scalpel porté dans l’œuvre du grand écrivain-Les raisons de cette indifférence sont nombreuses. […] Des gens qui, comme nous, s’américanisent chaque jour davantage de ton, d’intérêts et de mœurs, répugnent naturellement à la simplicité du génie antique, à ce génie statuaire, c’est-à-dire nu, même en vers. […] C’était pour son article qu’il conversait, cet homme qui n’aimait pas tant la conversation qu’on l’a dit, si ce n’est dans les intérêts de son article. […] À l’exception de quelques piètres romans, écrits uniquement pour ce que la copie rapporte aux faiseurs, il n’y a pas une œuvre d’haleine dans la littérature actuelle, et jamais le dessèchement cérébral n’a été plus complet que sous cette République qui n’est ni celle de Périclès, ni celle d’Auguste, ni celle des Médicis… Les lettres donc, la correspondance, cette littérature de tout le monde, est le seul intérêt d’esprit qui reste à ce monde de portiers qu’est devenue, la société française. […] Mais moi, j’aurais jeté au feu ce paquet par intérêt pour Sainte-Beuve, dont je comprends la réputation mieux que vous !

339. (1875) Premiers lundis. Tome III « Instructions sur les recherches littéraires concernant le Moyen Âge »

Monsieur, en vous associant à la recherche et à la publication des monuments inédits relatifs à l’Histoire de France, j’ai appelé d’abord votre attention sur ce qui concerne l’histoire politique et civile ; mais les monuments qui se rapportent aux divers développements de l’intelligence humaine dans notre patrie, sont nombreux aussi et dignes de notre intérêt ; c’est vers les monuments de ce genre, vers les travaux et les manuscrits relatifs aux sciences, à la philosophie, à la littérature et aux arts, que je viens aujourd’hui diriger particulièrement votre zèle. […] Il est certain (et il le dit lui-même) qu’il avait fait des leçons sur toutes les parties de la philosophie : ce seraient ces leçons qu’il y aurait un grand intérêt à retrouver, ne fussent-elles rédigées que par quelqu’un de ses élèves. […] Vous ne rechercherez pas avec moins d’intérêt ce qui se pourrait découvrir en fait de miracles, mystères, moralités, farces, soties, dialogues et débats, plets, etc., en un mot tout ce qui se rapporte aux compositions et représentations dramatiques de ces temps.

340. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La diplomatie au xviie  siècle »

Les négociations racontées dans ce premier volume sont celle de Parme, commencée sous le ministère de Richelieu, et celle de Rome, au conclave de 1656, qui ne finirent, ni l’une ni l’autre, dans le sens, d’abord voulu, des intérêts français. […] Otez les fragments des dépêches de Lionne, qui ont leur intérêt, mais qu’on aimerait mieux intégrales que coupées, quelle que soit l’intelligence des ciseaux, et vous n’avez plus rien que les quelques petits verres d’eau de réflexions dont Valfrey les arrose ! […] Eux seuls peuvent mettre dans le compte rendu de celles dont ils furent chargés et dont ils s’acquittèrent le quelque chose d’humain, de passionné, de dramatique, inhérent à des démêlés et des complications d’intérêts qui eurent certainement leur sérieux, leur tragique, leur comique, leur variété, leur inattendu, comme toutes les choses de ce monde.

341. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

À une autre époque que la nôtre, dans un temps où l’on n’eût pas interverti l’ordre de tous les problèmes sociaux, on ne se fût peut-être pas tant préoccupé des conséquences d’une mesure plus haute que des intérêts matériels, et on eût souri du chirurgien, non de la dernière heure, mais de l’heure passée, qui aurait pris avec tant de soins les dimensions qu’il n’a pas à guérir, mais qu’il veut montrer. […] Ce reproche, qui s’applique sans nul doute à la guerre de la succession d’Espagne, montre combien la faculté politique est muette chez Weiss ; car c’est un fait maintenant acquis, et grâce à des travaux récents très complets, que sur cette question de la succession d’Espagne Louis XIV soutint la seule politique qui convînt à la nature des choses, au droit européen et à l’intérêt de la France. […] Sans préjugé à cet égard, Weiss les a bravement exposés à sa lumière ; il n’a pas craint que l’esprit qui lira son livre, accoutumé à l’intérêt grandiose et dramatique de l’histoire, ne trouve bien chétifs et parfois bien insignifiants les renseignements personnels à tant de familles qui n’ont d’autre titre à l’attention de l’historien que d’avoir été expulsées de France, où elles travaillaient à quelque industrie qu’elles sont allées porter ailleurs.

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