Mais suffit-il d’une réprimande placée à la fin de l’ouvrage pour détruire l’impression pernicieuse qu’il a pu causer ? […] Mme de Beaumont confiait au papier ses pensées et ses impressions. […] Dans son voyage en Italie, quelles furent ses impressions ? […] Il ne se compose que de quelques impressions fugitives, et de souvenirs qui ne peuvent rendre la réalité disparue ! […] Son âme, ouverte, à toutes les impressions, de quelque part qu’elles vinssent, s’est confondue avec l’âme de toute une génération.
Je n’ai jamais vu mieux rendre l’impression que m’a faite à moi-même Rulhière et son procédé d’histoire classique appliqué à des temps modernes, ce genre honorable, mais froid, mais artificiel, et qui a l’inconvénient de ne laisser aucune trace profonde : « Le bruit des violons (d’un bal voisin) a été couvert par notre lecture de l’Histoire de Pologne par Rulhière. […] Quelques jours après, on a la suite des impressions : « À propos de cela, nous avançons dans l’Histoire de Pologne ; Mme de Coigny se passionne à présent pour Caetan Soltick, et aussi pour Poniatowski, qui ressemble à d’Alvimar. […] Cette différence naturelle entre les impressions de Mme de Coigny et celles de la jeune fille qui a en elle une étincelle de Mab et d’Oberon est piquante et n’a rien qui choque ; c’est plutôt une opposition qu’un désaccord. […] L’impression encore ici est double entre la jeune fille et la marquise : celle-ci, qui songe d’abord au blason, voit une image des arbres généalogiques là où l’autre, sensible comme une dryade, a vu surtout une fatigue de respiration et une souffrance. […] ) Mais elle a mieux fait que de traduire ces vers comme je viens de l’essayer ; elle a rencontré la même impression que le poète, et l’a vraiment égalé dans cette note si fidèle et si harmonieuse, trouvée à quelques jours de là : Il fait aujourd’hui un de ces jours grisâtres où la nature est silencieuse, le paysage terne, les nuages presque immobiles ; en un mot, un de ces temps modestes où l’on craint de faire du bruit, de peur de réveiller le vent ou d’amener le soleil.
Mais l’esquisse que j’aurais à tracer de lui donnerait une toute autre impression que l’idéal proposé par M. […] On était injuste, je le crois ; on était sévère comme la jeunesse ; on ne raisonnait pas son impression, et l’on ne songeait pas trop à s’expliquer pourquoi, en présence d’une intelligence si éminente, se produisait cette moindre estime. […] C’est un ouvrage qui laisse une impression pénible, mais très en harmonie avec l’état où l’on est quand on n’aime plus, état peut-être le plus désagréable qu’il y ait au monde, excepté celui d’être amoureux. […] Lanfrey trouve d’une sévérité expéditive et sommaire, n’a fait que rendre l’impression du monde d’alors, du cercle des Royer-Collard et des de Broglie68. […] C’était l’impression de bien d’autres.
Élevé à Juilly, au collège de l’Oratoire, puis venu à Paris pour ses études de droit et répandu alors dans des sociétés diverses, particulièrement dans le monde parlementaire, M. de Barante père garda toujours ses premières impressions contre le coup d’État Maupeou. […] Il touchait à sa vingtième année ; un voyage qu’il fit à cette époque en Auvergne, et durant lequel il perdit sa mère, apporta une impression décisive dans sa vie morale, et détermina l’homme en lui. […] On peut dire que, pour bien des esprits distingués, c’était un compte rendu de leurs impressions et de leurs jugements sous une forme nette qu’ils durent vite adopter et reproduire9. […] Ce spectacle des pays conquis et de l’odieuse administration qui pesait sur eux, frappa vivement son âme équitable et compatissante ; il n’en put contenir l’impression en écrivant à son père. […] Rien alors ne se fait sans eux, et les plus grands coups, ce sont souvent eux qui les donnent19. » Quoi qu’il en soit des vues nouvelles que ce coin de la question, tardivement démasqué, ne peut manquer d’introduire dans l’histoire finissante de la maison de Bourgogne, l’effet des beaux récits de Jean de Muller et de M. de Barante subsiste ; l’impression populaire d’alors y revit en traits magnifiques et solennels que le plus ou le moins de connaissance diplomatique ne saurait détruire.
Et de là dans la sécheresse de son récit, ces brèves impressions qui y sont comme des points lumineux : c’est Gaza, « la cité fermée de hauts murs et de hautes tours : et vainement eussiez-vous demandé une plus belle, plus forte ni plus riche » : nette et claire silhouette qui se détache comme du fond d’un tableau de primitif. […] Ce meurtre, en un tel jour, en un tel lieu, cette audacieuse entreprise de la force brutale contre la sainteté du caractère ecclésiastique, firent sur les esprits une impression profonde. […] Deux ou trois impressions, sèches, sinon faibles, ou réprimées rapidement, piquent à peine quelques traits pittoresques sur la grave démonstration de la conduite de la quatrième croisade : Joinville regarde tout, s’émerveille de tout, et dit tout. […] Par là, si inférieur qu’il soit à Hérodote en intelligence, en réflexion, en sens esthétique, ce chevalier inhabile à penser a dans son récit enfantin des impressions d’une fraîcheur, d’une vivacité qui font penser au premier des historiens grecs. […] Après un demi-siècle, il retrouve les sentiments complexes du jour du départ, l’allégresse, l’anxiété, le regret, tout ce que le connu que l’on quitte, et l’inconnu où l’on va, peuvent mêler d’agitations morales aux impressions physiques de l’œil et de l’oreille.
Au reste, il est moins intéressant de chercher, dans le développement d’un esprit supérieur, la trace de toutes les influences qui y ont aidé, qu’il ne résulte utile de considérer cet esprit dans ce qu’il a été et ce qu’il a produit ; puisque, aussi bien, — quelles qu’aient pu être les premières impressions d’un écrivain, ce n’est que grâce à un pouvoir intrinsèque d’en conserver en soi l’empreinte qu’il aura réussi à s’en organiser. […] Mais nous ne l’avons pas, au contraire, appelé charmeur, exprimant ainsi cette impression ineffable de prédilection qu’ont éprouvée, pour tout ce qui est sorti de cette plume experte, ceux qui l’ont pu suivre, sans songer à ce que ses sujets offrent de vitalité intense, au souci qu’ils accusent du cas compliqué et à l’intelligence qu’ils révèlent de la difficulté sentimentale. […] Il est manifeste que, pour avoir été replacés en face de la même impossibilité de contrôler, dans la pratique, la métrique des impressions, et d’en fixer la modalité, en deçà comme au-delà des événements, nous nous rendons mieux compte que l’esprit humain transforme tout en idées ; que c’est là le plus sûr résultat de notre supériorité spécifique ; que ce résultat même indique combien nous voyons les choses d’une certaine manière, qui n’est pas la vraie, tant s’en faut ; qu’enfin nous devons uniquement à notre besoin de connaître, de nous être attribué un droit de savoir, dont l’expression est aussi caractéristique de notre humanité qu’elle restera accablante pour notre enfantine insoumission. Et donc, aujourd’hui comme hier, pénétrer dans les replis les plus intimes de l’âme, atteindre à la formule de cette somme d’impressions monochromes et diverses, qui s’alignent en synchroniques théories de contrastes dans les vallées de notre for intérieur et en constituent l’ordre normal, reste une tâche inouïe. […] Mais encore ne nous dit-on pas d’où nous vient notre impression.
L’imitation de la nature consiste à faire éprouver aux autres l’impression reçue par le spectacle de la nature. […] Le poète transmet l’impression sans peindre l’objet par des effets puisés dans les moyens techniques de l’art. […] Ceux qui se croient poètes, et qui ne le sont pas, au lieu de transmettre l’impression reçue, ont imaginé de peindre imparfaitement l’objet lui-même. […] L’autre imitation, qui est celle que nous faisons des anciens, devrait consister non point à les copier, non point à imiter leur manière la forme de leur style, la tournure de leurs phrases, leur système de composition, mais à imiter la nature, comme ils l’ont imitée, c’est-à-dire à peindre les objets par l’impression reçue. […] Le sentiment moral, le sentiment religieux, le sentiment de l’infini : telle est l’impression générale qui doit résulter de toute poésie.