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227. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

Suite : l’image tactile, la perception externe et l’idée du drame L’intensité plus grande est le principal caractère qui rapproche de la parole extérieure les variétés vives de la parole intérieure. […] 2° Telles étant les idées religieuses de Socrate, il ne pouvait guère être séduit à l’hallucination par d’autres images que celles de l’ouïe ; encore le phénomène, pour ne pas éveiller son ironie, devait-il être discret : Socrate eut douté d’un dieu trop évident ou trop bruyant. […] Nous avons déjà remarqué que Socrate avait du désigner par la voix du divin tantôt une véritable parole intérieure, tantôt un sentiment subit intérieurement inexprimé ; dans le second cas, le mot voix était une image. […] Joyeuse est un homme d’imagination : quand la parole intérieure devient vive en lui, elle n’est pas seule, elle s’environne d’images visuelles, elle fait sa partie dans un drame complet ; puis cette parole intérieure n’est pas toujours la sienne ; elle prend successivement plusieurs timbres, elle est un dialogue. […] Mais il n’est pas besoin qu’un interlocuteur soit prochain ou récent pour que notre parole intérieure prenne le ton du dialogue et s’accompagne de l’image vague d’un ami. « Au moment où j’écris, dit M. 

228. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Sainte Thérèse l’inventait en sens inverse vers le même temps en Espagne, appliquant à l’amour divin les extases, les expressions, les images de l’amour terrestre. […] On m’a apporté de votre part une médaille antique qui représente l’image de César ; si cette médaille avait pu parler, que ne vous aurait-elle pas dit pour vous empêcher de faire une retraite si honteuse ! […] Il rendait pleine justice à la vigueur du pinceau du chantre de l’Enfer et du Paradis ; mais il trouvait obscurité, scolastique, cynisme et quelquefois obscénité dans les images et dans le style. […] » Quelle pénétrante familiarité de détails, de sentiments, d’images domestiques dans cette lettre de Boccace ! […] Son amour devient génie par la constance de ce jeune poète à chercher dans deux langues qui luttaient alors, le latin et l’italien, les expressions, les rythmes, les images les plus capables d’honorer éternellement celle qu’il aime.

229. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

Ce beau volume, chef-d’œuvre de typographie, qui s’offre à nous encadré, illustré d’ornements en tête et à la fin des chapitres, parsemé d’images sur bois figurant les Évangélistes ou les scènes des Évangiles, a cela de remarquable qu’il a été composé et imprimé en très peu de temps ; on avait dit qu’on n’irait pas à l’Exposition de Londres, que l’Imprimerie Impériale n’y serait pas représentée cette fois. […] Ce serait moins que jamais aujourd’hui le moyen de se débarrasser des difficultés, puisqu’elles ont surgi et qu’elles ont éclaté ; de toutes parts puisque des attaques, des négations philosophiques radicales ont eu lieu, telles que celle de Strauss en première ligne ; la meilleure manière pour se retracer l’image de la personne réelle et vivante de celui dont la venue a changé le monde est d’en revenir avec bonne foi et réflexion aux récits originaux qui nous ont conservé la suite de ses actes et de ses paroles. […] considérez comment croissent les lis des champs… etc. » Nous savons tous dès l’enfance ces belles paroles, nous sommes nourris de ces innocentes et virginales images ; l’idée pourtant qui y est exprimée ou plutôt touchée si légèrement, le conseil qui y est donné d’un air si aisé et d’un si engageant appel, n’est pas seulement un renchérissement sur la nature, c’est plutôt un renversement de cette nature humaine tout égoïste et du sens commun ordinaire, en vue d’une idéale et surnaturelle perfection. […] Qu’on imagine un Tertullien évangéliste, avec ses antithèses et ses cliquetis de mots ou d’images ; est-ce possible ? […] Une question s’est posée dans la presse au sujet des images et dessins qui accompagnent le texte.

230. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre I. Le Bovarysme de l’individu et des collectivités »

Or dans tous ces cas, ce que l’esprit distingue toujours avec netteté, ce qui continue de se montrer comme la marque caractéristique du phénomène, c’est ce pouvoir de se concevoir autre, cette sensibilité par laquelle l’être humain offre prise aux images, nous enseignant qu’il peut être par elles déplacé, entraîné hors du lieu psychologique où il est présentement situé. […] Par le pouvoir de la notion chaque individu se conçoit d’une façon supérieure autre qu’il n’est, il voit se refléter dans sa conscience individuelle l’image abstraite de la pensée humaine tout entière. […] Toute une part de l’humanité va la prendre pour idéal, se concevoir à son image, faire effort pour la posséder. […] Se conçoit-il au contraire à l’image d’un modèle absolument différent, le voici encore destiné à périr. […] À préciser par une image cette importance du facteur de la durée, concevons qu’un bloc d’argile demeure propre à recevoir toutes les formes tant qu’un statuaire, le pétrissant sans cesse, lui conserve son élasticité.

231. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

C’est, renouvelée par de belles images inédites, la grande poésie romantique. […] Bloy est un des plus grands créateurs d’images que la terre ait portés ; cela soutient son œuvre, : comme un rocher soutient de fuyantes terres ; cela donne à sa pensée le relief d’une chaîne de montagne. […] Elskamp sous la forme d’images significatives ; sa poésie est emblématique. […] Telle image avoue son origine ; que d’autres frappent par l’impudeur de leur beauté neuve ! […] Pleine d’images, cette tragédie est pleine d’idées ; le solitaire « a un compagnon partout : sa propre parole » ; « le sang, l’homme doit le répandre comme la femme, son lait » ; et toutes, images et idées, créatures d’une magnifique richesse de sang, de cheveux, de peau, vivantes et belles, se meuvent et fleurissent dans la forêt somptueuse d’une tragédie surhumaine.

232. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Pour l’être doué du sens de la vue, le souvenir est une série de tableaux, c’est-à-dire d’images et de couleurs ; ces images se tiennent et s’appellent l’une l’autre. […] Dans la poésie, l’image fournie est le produit de la coopération de tous nos sens et de toutes nos facultés. […] C’est encore une image qui devient une idée générale et philosophique : elle y gagne une beauté supérieure. […] Hugo, devant l’harmonie de la phrase musicale et la puissance de l’image. […] L’image, comparaison ou métaphore, n’est qu’un moyen de nous faire voir et sentir l’idée, conséquemment de la mettre en action ; toutes les fois que l’image n’est pas cherchée, elle ne complique donc pas, elle simplifie.

233. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 9, comment on rend les sujets dogmatiques, interessans » pp. 64-66

Virgile ne s’est pas même contenté de ces images répanduës avec un art infini dans tout l’ouvrage. […] Il est si vrai que ce sont ces images qui sont cause qu’on se plaît tant à lire les georgiques, que l’attention se relâche sur les vers qui donnent les preceptes que le titre a promis.

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