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979. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Tu viens me déclarer la guerre ! […] Mais pourquoi ce titre superbe : la Guerre ? […] Auraient-ils voulu nous inculquer cette idée neuve, que la guerre est chose atroce et inhumaine ? […] Et puis voilà que, sans y songer, ces ennemis de la guerre nous étalent tout le long de leur drame une foule de beaux sentiments qui sans la guerre n’auraient point l’occasion de se produire, qui vivent de la guerre et s’en nourrissent, comme d’orgueilleuses fleurs, des lis candides sur un charnier. […] La guerre élève et purifie les âmes.

980. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

Elle se souvient de la Guerre. […] Impatient du joug de l’injustice, il déclara la guerre aux lois, souvent injustes. […] Pendant ce temps, autour d’eux, une force supérieure à leurs menues combinaisons décide de la paix ou de la guerre, détermine les ruptures, prépare les amitiés, procure les alliances. […] Elles ont vu les guerres médiques. […] C’est contre ces duperies que les érudits sont partis en guerre.

981. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Celle-là n’a jamais craint d’escalader les hauteurs difficiles de la religion ; le ciel lui appartient, comme l’enfer, comme la guerre, comme l’Olympe, comme la volupté. […] Le livret dit simplement : Guerre de Crimée, Fourrageurs. […] C’est une idylle traversée par la guerre. […] Méphisto et son ami Faust, invincibles et invulnérables, traversent au galop, l’épée haute, tout l’orage de la guerre. […] Les Maux de la guerre !

982. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Voilà, je crois, l’Europe en guerre pour dix ou douze ans. […] Voltaire, un jour, a un peu trop ricané : il a écrit au cardinal-archevêque une lettre gaie et même bouffonne pour ses étrennes (22 décembre 1766) ; en lui envoyant à lire sa tragédie des Scythes, il ajoutait : Pour moi, chétif, je fais la guerre jusqu’au dernier moment : jansénistes, molinistes, Fréron, Pompignan, à droite, à gauche, et des prédicants, et J.

983. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Il est à croire, puisqu’ils voulaient perdre notre Europe et la remettre en friche par les dissensions et par les guerres, que les dieux, dans leur indulgence, préparaient un asile aux peuples fugitifs, et que c’est à cette fin qu’aux approches de ce siècle, du sein des vastes mers, ils ont fait jaillir un monde : — un monde vierge, humide encore, qui d’abord ne pouvait, dit-on, supporter qu’à peine les traces légères de quelques races errantes, et où maintenant le sol facile appelle la charrue, où les champs illimités n’attendent qu’un maître. […] Telles étaient les inspirations senties et touchantes que le spectacle des premières guerres civiles dont allait s’embraser toute la dernière moitié du siècle, faisait naître dans les nobles âmes, et qu’Étienne de La Boétie exhalait en des vers qui n’ont contre eux que de n’être point en français.

984. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Dans cette disposition où il se trouvait quelquefois de prier le ciel pour que les maux de fortune allassent encore plus loin, il était néanmoins obligé de convenir que la Convention, par certains de ses décrets (notamment par son décret final sur la contribution de guerre), lui laissait bien peu à désirer, et qu’elle agissait exactement comme si elle eût voulu combler ses intentions et ses souhaits d’un dépouillement absolu de chacun54. […] — Qu’il y ait en tout ceci une pointe exagérée de polémique et d’insulte à l’égard de Condillac, on le voit sans peine, mais elle était de bonne guerre et de généreuse audace en plein camp ennemi.

985. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Ce n’est pas faire l’histoire d’une guerre que de donner les états de service de chaque soldat ou caporal. […] Avoir le cœur séparé de soi-même, être maintenant en paix, ores en guerre, ores en trêves ; couvrir et cacher sa douleur ; changer visage mille fois le jour ; sentir le sang qui lui rougit la face, y montant, puis soudain s’enfuit, la laissant pâle, ainsi que honte, espérance ou peur nous gouvernent ; chercher ce qui nous tourmente, feignant de le fuir, et néanmoins avoir crainte de le trouver ; n’avoir qu’un petit ris entre mille soupirs ; se tromper soi-même ; brûler de loin, geler de près ; un parler interrompu ; un silence venant tout à coup : ne sont-ce tous signes d’un homme aliéné de son bon entendement ? 

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