Ses Péroraisons sur-tout sont vives, fortes & pathétiques, selon les différentes matieres qu’il traite.
Roucher, [N.ABCD] né à Montpellier, s'est fait connoître par un Poëme en douze Chants, intitulé les Mois, fort vanté avant l'impression, & oublié presque aussi-tôt qu'il a été exposé au grand jour.
Il y a de lui d’autres morceaux qui sont fort inférieurs à celui-ci.
L’historien de Jeanne d’Arc et de Du Guesclin, le chroniqueur grandiose des guerres des xive et xve siècles dans le pays dont vous êtes présentement l’honneur et qui est notre pays à tous les deux, ces livres robustes et sensés, écrits avec toutes les qualités de l’esprit de la forte race à laquelle vous appartenez, seront jugés plus tard et prochainement, mais aujourd’hui ce que je vous offre n’est pas le témoignage de la justice, c’est le témoignage de la sympathie.
Fort aimée de sa mère, fort sérieuse, intelligente, mais sans vivacité décidée, assez maladive, la jeune Pauline passa ses premières années dans ce monde dont elle recevait lentement une profonde empreinte, plus tard si apparente ; c’était comme un fond ingénieux, régulier et vrai, qui se peignait à loisir en elle, et qu’elle devait toujours retrouver. […] Avec tant de qualités délicates et ingénieuses, qui faisaient d’elle une dernière héritière de Mme de Lambert, elle avait des qualités fortes ; la polémique ne l’effrayait pas ; les coups qu’elle y portait, dans sa politesse railleuse, étaient plus rudes que ceux que le poëte attribue à Herminie. — Que de fois elle s’est plu à rabattre, avec gaieté et malice, la cuistrerie de Geoffroy et consorts, même sur le latin qu’elle savait un peu98 ! […] etc. » Voilà bien la femme saintement pénétrée des idées de devoir et de travail, telle que la société nouvelle de plus en plus la réclame, telle que Mme Guizot sera toute sa vie ; sortie des salons oisifs et polis du dix-huitième siècle, et l’exemple de la femme forte, sensée, appliquée, dans le premier rang de la classe moyenne. […] Cette sensibilité de qui elle avait dit si délibérément dans sa jeunesse : « La sensibilité épargne plus de maux qu’elle n’en donne, car elle détruit d’un coup les chagrins de l’égoïsme, de la vanité, de l’ennui, de l’oisiveté, etc., » cette sensibilité à qui elle dut tant de pures délices, fut-elle toujours pour elle une source inaltérable ; et, en avançant vers la fin, ne devint-elle pas, elle, raison si forte et si sûre, une âme douloureuse aussi ?
Cette application de l’esprit d’examen, toute nouvelle et audacieuse à son heure, qui aurait été écrasée et foudroyée au moyen âge, qui l’avait été en la personne de quelques individus novateurs ou même de sectes en masse (comme celle des Albigeois), cette application, dis je, trouvant des esprits plus préparés, une autorité romaine moins forte et moins reconnue, très-compromise même moralement par ses vices qui avaient fait scandale, réussit et rallia en divers pays de nombreux adhérents. […] La discussion a été fort longue, mais les gens raisonnables ont eu, comme de coutume, le dessous. […] Car je le demande à tout homme sensé, et qui ne vit pas sous l’empire d’une révélation religieuse, comment peut-on être sûr et certain de ces points si fort controversés qui ont fait le doute et quelquefois le tourment des plus grands esprits ? […] Sée est de religion juive ; et en général, messieurs, une fraction exaltée et intolérante en voulait fort (car nous en sommes là) à cette promotion de professeurs faite en décembre 1866. […] elle n’eut pour effet que de classer fort haut Hippolyte Royer-Collard dans l’estime de ses juges et de ses condisciples.
Tant que je vivrai, je me souviendrai de certaines heures de l’été que je passais couché sur l’herbe dans une clairière des bois, à l’ombre d’un vieux tronc de pommiers sauvages, en lisant la Jérusalem délivrée, et de tant de soirées d’automne ou d’hiver passées à errer sur les collines déjà couvertes de brouillards et de givre, avec Ossian ou Werther pour compagnon ; tantôt soulevé par l’enthousiasme intérieur qui me dévorait, courant sur les bruyères comme porté par un esprit qui empêchait mes pieds de toucher le sol, tantôt assis sur une roche grisâtre, le front dans mes mains, écoutant, avec un sentiment qui n’a pas de nom, le souffle aigu et plaintif des bises d’hiver, ou le roulis des lourds nuages qui se brisaient sur les angles de la montagne ; ou la voix aérienne de l’alouette que le vent emportait toute chantante dans son tourbillon, comme ma pensée plus forte que moi emportait mon âme. […] Ses vers qui endorment ou exaltent l’imagination de l’Arabe autant que la fumée du tombach dans le narguilé1 retentissaient en sons gutturaux dans le groupe animé de mes Saïs et quand le poète avait touché plus juste ou plus fort la corde sensible de ces hommes sauvages, mais impressionnables, on entendait un léger murmure de leurs lèvres ; ils joignaient leurs mains, les élevaient au-dessus de leurs oreilles, et inclinant la tête, ils s’écriaient tour à tour : Allah ! […] Nous avancions lentement au pas de nos chevaux fatigués, les yeux attachés sur les murs gigantesques, sur les colonnes éblouissantes et colossales qui semblaient s’étendre, grandir, s’allonger, à mesure que nous en approchions ; un profond silence régnait dans toute notre caravane ; chacun aurait craint de perdre une impression de cette scène en communiquant celle qu’il venait d’avoir ; les Arabes même se taisaient et semblaient recevoir aussi une forte et grave pensée de ce spectacle qui nivelle toutes les pensées. […] Tout à coup, comme une plainte douce et amoureuse, comme un murmure grave et accentué par la passion sortit des ruines derrière ce grand mur percé d’ogives arabesques et dont le toit nous avait paru écroulé sur lui-même ; ce murmure vague et confus s’enfla, se prolongea, s’éleva plus fort et plus haut, et nous distinguâmes un chant nourri de plusieurs voix en chœur, un chant monotone, mélancolique et tendre qui montait, qui baissait, qui mourait, qui renaissait alternativement et qui se répondait à lui-même : c’était la prière du soir que l’évêque arabe faisait avec son petit troupeau, dans l’enceinte éboulée de ce qui avait été son église, monceaux de ruines entassées récemment par une tribu d’Arabes idolâtres. […] Les cloches sonnèrent de toutes parts l’heure du recueillement et des offices du soir ; les unes avec la voix forte et vibrante des grands vents sur la mer, les autres avec les voix légères et argentines des oiseaux dans les champs de blé ; celles-ci plaintives et lointaines comme des soupirs dans la nuit et dans le désert ; toutes ces cloches se répondaient des deux bords opposés de la vallée, et les mille échos des grottes et des précipices se les renvoyaient en murmures confus et répercutés, mêlés avec le mugissement du torrent, des cèdres, et les mille chutes sonores des sources et des cascades dont les deux flancs des monts sont sillonnés.