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1900. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

Ce Parnasse est représenté par une montagne d’une belle forme & un peu escarpée. […] C’est un Drame mixte qui tient à la Comédie par le fond, & qui s’approche de l’opéra pour la forme. […] Benserade a fait plus de deux cents fables en quatrains, & il y en a quelques-uns d’heureux, parce que le sujet s’y est prêté ; mais pour s’être mis à l’étroit en s’assujettissant à cette forme, le reste est aussi méprisé que ses métamorphoses en rondeau. […] Mais si le fond est presque toujours le même, la forme est bien différente.

1901. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Son emploi étant donné un peu pour la forme et par complaisance au jeune M. de Barbezieux, le roi, qui se fait comme son tuteur et son garant, s’applique plus que jamais au travail ; il devient son propre ministre à lui-même : Vendredi 31 août (1691), à Marly. — Le roi se promena tout le matin dans ses jardins ; il travailla beaucoup l’après-dînée, comme il fait présentement tous les jours. […] Le roi nous a dit qu’il n’avait jamais vu une si belle relation, et qu’il nous la ferait lire. » Les éditeurs ont eu l’heureuse idée de nous faire le même plaisir que Louis XIV à ses courtisans, c’est-à-dire de nous donner le texte même de la relation de M. de Luxembourg, conservée au Dépôt de la guerre, et de laquelle s’étaient amplement servis les historiens militaires du règne ; mais dans sa première forme et dans son tour direct, elle a quelque chose de vif, de spirituel, de brillant et de poli qui justifie bien l’éloge de Louis XIV, et qui en fait de tout point une page des plus françaises.

1902. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

Une très-large part appartiendra toujours à la critique de première lecture et de première vue, à la critique mondaine, aux formes démonstratives, académiques. […] Tel autre, poète, historien, orateur, quelque forme brillante ou enchantée qu’il revête, ne sera jamais que ce que la nature l’a fait en le créant, un improvisateur de génie.

1903. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

Cependant Hamilcar, sans qu’on s’explique trop comment, reprit encore une fois le dessus, et après une suite de marches et d’actions habilement ménagées, il fit si bien qu’il enferma les étrangers dans un lieu, dans une espèce de champ clos appelé La Hache, parce que le terrain offrait assez la forme de cet instrument ; il les y réduisit d’abord à une telle famine qu’ils se virent contraints de se dévorer les uns les autres ; et finalement, après s’être saisi de la personne de leurs chefs, qui étaient venus parlementer auprès de lui, il écrasa avec ses éléphants ou tailla en pièces toute cette armée, dont pas un soldat ne réchappa : elle n’était pas moindre que de quarante mille hommes. […] Elle n’adore la déesse voluptueuse et féconde que sous sa forme la plus éthérée, la plus pure, celle de la lune ; c’est une Elvire sentimentale, qui a un pied dans le Sacré-Cœur : « Personne encore ne la connaissait.

1904. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Si on ne lit pas tout, presque tout, dans cette quantité de productions qui ont chacune leur qualité, si l’on a manqué le moment où elles passent pour la première fois sous nos yeux, on est en peine ensuite pour rétablir le point de vue ; un mouvement si compliqué, si divers, si fécond, et dans un genre indéfini qui menace de devenir la forme universelle, demande à être suivi jour par jour ; faute de quoi l’on ne sait plus exactement les rapports, les proportions des talents entre eux, la mesure d’originalité ou d’imitation, le degré de mérite des œuvres, ce qu’elles promettent au juste et ce que l’auteur peut tenir. […] Feuillet arrivera plus tard à la franchise de l’expression dans Dalila ; mais jusque-là il y a quelques impropriétés, des tours assez peu naturels, sous une forme toujours élégante d’ailleurs et polie.

1905. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Tout différait entre eux et, sous les politesses de forme, tendait à faire glace au fond : origines, sphères d’idées, tour et qualité d’esprit, ton et habitudes morales, politique enfin. […] C’était, d’ailleurs, un homme d’un caractère doux, de formes très aimables.

1906. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Ces trois existences si diverses, successivement racontées et finement décrites, donnent beaucoup à penser et à réfléchir sur la forme que revêtent l’esprit et le cœur en trois pays et trois sociétés si dissemblables, sur les directions que parvient à se frayer la spontanéité humaine à travers des contraintes et des pressions si différentes. […] Notre âme s’étend sur ce qu’elle voit ; elle change comme les horizons, elle en prend la forme… » C’est joli et gracieux sans doute, remarque le critique anglais ; mais quelle différence avec le pinceau de Maurice peignant la nature en traits profonds, trouvés et neufs, disant au retour d’une course où il a vu les rives de la Loire, Chambord, Blois, Amboise, Chenonceaux, les villes des deux bords, Orléans, Tours, Saumur, Nantes et l’Océan grondant au bout : « De là je suis rentré dans l’intérieur des terres jusqu’à Bourges et Nevers, pays des grands bois, où les bruits d’une vaste étendue et continus abondent aussi. » Et ailleurs il parle de ce beau torrent de rumeurs que roule la cime agitée des forêts.

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