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215. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre III »

Que d’images pleines de grâce dans ces noms que le peuple donna aux fleurs ! Ainsi l’adonis aestivalis ou autumnalis est appelé : goutte de sang, sang de Vénus, sang de Jésus ; l’anémone nemorosa est la pâquerette, la demoiselle, la Jeannette, la fleur des dames ; la pulsatilla vulgaris est la coquelourde, la coquerelle, le coqueret, la coquerette, la clochette, le passe-velours, la fleur du vent.

216. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

Je ne sais point l’âge de Mme Blocqueville, mais elle me fait l’effet d’avoir une bien longue lecture, et peut-être a-t-elle tué sous cette longue lecture quelque petite fleur d’originalité qui voulait naître. […] Mais l’idéal amphigouri, car il est idéal, qui est le caractère spécial du livre de Mme de Blocqueville, dissimule bien mieux l’imitation que tous les jasmins de la terre, en pleine plate-bande, ou en pot, en fleurs ou en pommade ! […] Il y en a « de gaze lilas, brodés de fleurs de jasmins blancs, accompagnés d’un voile de dentelles blanches sur la tête », pour les jours « d’agitation languissante ».

217. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

Il n’a pas d’esprit, et peu importe pour nous, d’ailleurs, qu’on l’eût trouvé sans conversation à l’hôtel de Rambouillet, s’il avait eu la délicatesse, cette fleur des âmes bien nées qui vaut mieux que l’intelligence ! […] D’ailleurs, ce grand faucheur, qui avait pris au sérieux la méthode de Tarquin, n’abattit point de fleurs innocentes ; toutes, plus ou moins, étaient empoisonnées, et si « les successeurs de Richelieu — nous dit Renée dans un dernier trait — n’eurent pas besoin de cette politique de sang pour réussir », c’est que la besogne avait été bien faite. […] Le talent d’Amédée Renée a été perméable à l’âme de madame de Montmorency, et il la respire comme ces haleines de femme qui gardent l’odeur de la fleur qu’elles ont respirée.

218. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXI. Sainte Térèse »

Légère comme la robe qu’elle portait, et dont elle aimait l’éclat ou la grâce, vaine comme les romans qu’elle lisait, heureuse de plaire, inclinant, comme la fleur au vent, aux conversations frivoles, elle avait les défauts de son sexe, ces défauts presque impersonnels, mais dont elle s’accuse dans sa Vie comme s’ils n’appartenaient qu’à elle seule ! […] comme une Célimène en fleur ! Mais l’herbe fut coupée bien tendre ; mais la fleur fut coupée à peine entrouverte, et toutes deux, à ras de terre, par une faux qui est celle de l’amour, — de cet amour fort comme la mort et qui tranche l’âme comme la mort tranche la vie.

219. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

Au fond, Saint-Maur est, de tempérament, assez poète pour se passer de littérature, pour ne pas avoir besoin de cette impalpable et brillante poussière de la fleur des autres qui colore quelquefois ses ailes et que j’aurais voulu n’y pas retrouver· III Et, en effet, c’est un poète, Saint-Maur, et un poète involontaire. […] Il l’a gardée dans un de ces vases « à corsage bleu » dont il nous parle en ses sonnets : J’ai cueilli des sonnets, — belles fleurs de Tantale, — J’ai fait luire une perle à leur triple pétale, Mis à leur gorgerette un anneau de saphir. […] Le Romantisme, rectifié et purifié en lui par la plus charmante des natures, lui a laissé ce qu’il avait de bon : le sentiment de l’idéal, les tendresses vives ou rêveuses, les touches chrétiennes, ici et là, adorables à plusieurs places dans son livre (voir ses Fleurs de Missel), et la race de son esprit a ajouté à tout cela la verve joyeuse, l’observation inattendue et piquante, la bonhomie et le comique enfin.

220. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

Féval a cette fleur de l’amusement qui n’est pas toujours, que dis-je ? qui n’est presque jamais l’intérêt profond, passionné, à impression ineffaçable, que donnent les livres forts et grands ; mais il a cette fleur de l’amusement qu’on respire et qu’on jette aussi (rarement pour la reprendre) après l’avoir respirée ! […] Féval est même tout un buisson de cette fleur-là… C’est un amuseur.

221. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Arthur de Gravillon »

. — les parfums, la musique et les fleurs. […] Abeille de sottise, il y va comme l’autre abeille — celle qui n’est pas bête — à la fleur ! […] Séducteur pour le compte de la tombe, Gravillon est un poète, et son imagination est une Armide qui nous enlace dans des guirlandes de fleurs funèbres.

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