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1112. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Sous le masque de César et d’Alexandre, on aperçoit l’homme de peu, et l’enfant de petite famille. » Quoi qu’il en soit, Bonaparte ce jour-là, pour son coup d’essai, n’eût pas si mauvais goût en littérature en faisant préconiser dans son journal officiel l’œuvre de Chateaubriand. […] Tout se trouve dans les rêveries enchantées où nous plonge le bruit de la cloche natale : religion, famille, patrie, et le berceau et la tombe, et le passé et l’avenir. […] La famille de l’homme n’est que d’un jour ; le souffle de Dieu la disperse comme une fumée.

1113. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Ses Quinze Joies, de mariage dérobent la dérision cynique de la famille sous le même ton d’innocente malice. […] la fade sentimentalité qui encore aujourd’hui partage les applaudissements avec la grosse ordure dans nos cafés-concerts, d’innocentes mièvreries émanées de la haute littérature allégorique, et qui une fois sur vingt échappent à la puérilité, une fois sur cent atteignent l’exquise délicatesse : avec cette poésie de rêve, la réalité sans voiles, dans toute sa brutalité, dérision du mariage et de la famille, âpre désir des jouissances grossières, filles qui partent avec les gens d’armes, soudards avides de pillage, accourant comme des bêtes de proie aux provinces où il y a guerre : en somme, le plus complet nihilisme moral adouci par les tons chauds d’une verve robuste. […] Mais il hantait la pire société, fils de famille endettés, clercs débauchés ; de la Pomme de Pin à l’hôtel de lu Grosse Margot, il n’était cabaret, et pire, qu’il ne connût.

1114. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Dans _Rosmersholm_, Rosmer, descendant d’une vieille famille très fermement religieuse, a recueilli chez lui une jeune fille libre penseuse et révolutionnaire, Rébecca, dont il subit l’influence jusqu’à renier ses anciennes croyances et embrasser, comme on dit, les « idées nouvelles ». […] Un rêveur, un apôtre croit rendre service à une famille qui vivait tranquillement dans un déshonneur inconscient, en lui révélant son ignominie, en essayant d’éveiller en elle la conscience morale : et cela n’aboutit qu’aux plus tristes et aux plus inutiles catastrophes  Et, de même, dans Solness le constructeur, il nous fait voir l’orgueil intellectuel induisant un homme de génie à manquer de bonté, à faire souffrir tout autour de lui, et le poussant finalement à une mort ridicule et tragique. […] Seulement, chez l’écrivain polaire, c’est une jeune fille qui soutient publiquement cette thèse, devant sa famille, devant des hommes.

1115. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Les timbres et leurs combinaisons peuvent être variés comme on le veut, aucune forme ne les régit, sinon leur classement par familles, analogues aux familles des couleurs ; l’artiste les dispose à son gré, d’après son instinct : ils sont donc plus subjectifs ; mais, s’ils s’affirment aussi dans la durée, il est superflu de démontrer qu’ils n’ont point de mouvement propre. […] Il use d’assonances multipliées, de voyelles logiquement unies et les déduit les unes des autres, au moins rudimentairement, par familles de sons.

1116. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Il est le premier de cette famille de poètes qui n’a aucune des petites vertus de la vie civile, et pour lesquels on a épuisé les comparaisons de lions, d’aigles et autres espèces d’animaux fiers et solitaires. […] Ce sont des membres de la famille héroïque dont Corneille est le père. […] D’ailleurs assez peu poète ; le poète de la famille est André.

1117. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

Haïe des autres dieux, diffamée et détestée aux Enfers, par qui sera-t-elle vengée, si les Vengeresses de la famille l’abandonnent ? […] Le père était le roi de la famille antique, son pontife et presque son dieu. […] Cette civilisation des vieilles lois barbares, lentement accomplie par le progrès des siècles, Eschyle l’a concentrée dans la tragique légende que sa trilogie met en scène. — Une famille réprouvée est vouée au crime perpétuel par un premier crime.

1118. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1878 » pp. 4-51

Pélagie, les mains et les pieds enveloppés de ouate, se traîne avec des gestes gauches, se demandant si jamais l’adresse des mouvements lui reviendra, et moi, la poitrine déchirée par des quintes de toux qui me font vomir, je me demande si je pourrai, ce soir, au sortir de mon lit, m’asseoir à la table de famille des Lefebvre de Béhaine. […] Dimanche 27 janvier Daudet s’écrie : « Je suis un être tout subjectif… je suis traversé par des choses… je ne puis rien inventer… Déjà toute ma famille y a passé… Je ne peux plus aller dans le Midi… » Lundi 28 janvier La femme, l’amour : c’est toujours la conversation d’une réunion d’intelligences, en train de boire et de manger. […] Ce garçon, originaire du Poitou, et sorti d’une famille de la magistrature, en ce temps de sensualisme grossier, était un type du sensuel délicat, et du curieux dans les choses du boire et du manger.

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