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1034. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

. — Et à ce propos des affaires romaines, il avait une maxime qui résultait sans doute de son expérience, et qui rentre bien dans ce tour de paradoxe sensé qu’il affectionnait : « Pour faire un bon secrétaire d’État à Rome, il faut prendre un mauvais cardinal. » 16.

1035. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

À défaut de la foi, et après un désabusement aussi avoué sur des points importants crus vrais durant de longues années et prêchés avec certitude, ce qu’on a droit d’exiger du nouveau croyant pour son rôle futur de charité et d’éloquence, c’est, ce me semble, un léger doute parfois dans l’attaque ou dans la promesse : en un mot quelque chose de ce qu’on appelle expérience humaine, tempérant et guidant la fougue du génie. « Il y a, — lui-même le confesse excellemment, — une certaine simplicité d’âme qui empêche de comprendre beaucoup de choses, et principalement celles dont se compose le monde réel.

1036. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Le propre de cette faculté, d’ordinaire, en ceux qui la possèdent à quelque degré, est de ne pas se limiter, comme la faculté lyrique, aux années de la jeunesse, et de récidiver bien avant, moyennant les acquisitions variées de l’expérience.

1037. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

Ce qu’il trouvera, ce ne sera pas sans doute ce que nous savons déjà sur la façon et sur l’artifice du livre, sur ces études de l’atelier si utiles toujours, sur ces secrets de la forme qui tiennent aussi à la pensée : il est bien possible qu’il glisse sur ces choses, et il est probable qu’il en laissera de côté plusieurs ; mais sur le fond même, sur l’effet de l’ensemble, sur le rapport essentiel entre l’art et la vérité, sur le point de jonction de la poésie et de l’histoire, de l’imagination et du bon sens, c’est là qu’il y a profit de l’entendre, de saisir son impression directe, son sentiment non absorbé par les détails et non corrompu par les charmes de l’exécution ; et s’il s’agit en particulier de personnages historiques célèbres, de grands ministres ou de grands monarques que le poëte a voulu peindre, et si le bon esprit judicieux et fin dont nous parlons a vu de près quelques-uns de ces personnages mêmes, s’il a vécu dans leur familiarité, s’il sait par sa propre expérience ce que c’est que l’homme d’État véritable et quelles qualités au fond sont nécessaires à ce rôle que dans l’antiquité les Platon et les Homère n’avaient garde de dénigrer, ne pourra-t-il point en quelques paroles simples et saines redonner le ton, remettre dans le vrai, dissiper la fantasmagorie et le rêve, beaucoup plus aisément et avec plus d’autorité que ne le pourraient de purs gens de lettres entre eux ?

1038. (1892) Boileau « Chapitre VII. L’influence de Boileau » pp. 182-206

Car je ne sais pas si les principes de Boileau — tels qu’on peut les définir — sont des lois générales et souveraines de la création littéraire : mais il se pourrait faire et l’expérience semble indiquer que, dans leur signification essentielle et profonde, ils représentent les exigences fondamentales et permanentes du goût français.

1039. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

L’action s’engage ici entre Rosine, le comte et Figaro, auxquels s’ajoutent Suzanne et Chérubin : le comte, un mari décent d’ancien régime, détaché de sa femme, et jaloux pourtant, parce que, l’amour n’étant qu’un accident, l’amour-propre est le fond de sa nature, libertin blasé qui répète avec toutes les femmes la comédie du sentiment, par habitude et par curiosité : la comtesse, une charmante femme qui a tenu toutes les promesses de Rosine, encore amoureuse de son mari, mais en train de devenir amoureuse de l’amour, parce qu’elle approche de la trentaine, parce qu’elle est délaissée, parce qu’elle s’ennuie, toute disposée déjà par de troublantes rêveries aux expériences dangereuses, et glissant langoureusement du marrainage à l’adultère.

1040. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

Car, outre que sa vie voyageuse lui a surtout fait connaître des hommes du peuple, des matelots, la satiété des impressions passionnelles, la misanthropie qui naît de l’excès d’expérience et le sentiment très net, chez un homme qui a vécu en dehors des cités, de ce qu’il y a d’artificiel, de misérable et d’inutile dans nos civilisations, lui font aimer et embrasser avec une ardente sympathie les êtres simples, plus intacts et plus beaux que nous, plus proches de cette terre dont il a parcouru la face et qu’il adore.

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