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927. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre V. Observations philosophiques devant servir à la découverte du véritable Homère » pp. 268-273

Le langage se composait encore d’images, de comparaisons, faute de genres et d’espèces qui pussent définir les choses avec propriété ; ce langage était le produit naturel d’une nécessité, commune à des nations entières. — C’était encore une nécessité que les premières nations parlassent en vers héroïques (livre II, page 158). — 15.

928. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Dans la série des espèces intellectuelles, le Moraliste occupe une place nettement circonscrite. […] Leconte de Lisle a empruntée à la science, et qui se développe dans ses poèmes parallèlement à la première, est celle de l’unité des espèces de la nature. […] Les espèces zoologiques résultent de ces différences… Je vis que, sous ce rapport, la société ressemble à la nature. […] … » Ces variétés humaines, ces espèces sociales apparurent au grand écrivain comme une matière à une peinture aussi variée qu’elles-mêmes. […] C’est ainsi que le poème épique et la tragédie, la comédie de mœurs en vers et le drame historique peuvent être aujourd’hui considérés comme des espèces à demi vaincues, tandis que le roman, par exemple, et le poème lyrique sont des espèces triomphantes.

929. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Les espèces zoologiques résultent de ces différences. » Et il continue : « Pénétré de ce système, je vis que la société ressemble à la nature. […] … Il a donc existé, il existera de tout temps des espèces sociales comme il y a des espèces zoologiques. […] Si Geoffroy Saint-Hilaire est un de ses guides dans son rapprochement des espèces sociales et des espèces zoologiques, Saint-Martin, le « philosophe inconnu », et Swedenborg, sont ses maîtres dans l’ordre spirituel. […] Mais c’est un de ces comédiens d’une espèce déconcertante, qui sont à la fois fourbes et sincères. […] Il a donc existé, il existera de tout temps des espèces sociales comme il y a des espèces zoologiques. » Ce génial observateur eût admiré dans le maréchal Joffre un représentant supérieur de l’espèce militaire.

930. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Les premières pièces de Piron, espèces de vaudevilles, joués au théâtre de la Foire et qui lui valurent de Voltaire le sobriquet de Gilles Piron, avaient titre opéras-comiques, et c’étaient en effet les opéras-comiques du temps. […] c’est la plus rare espèce d’homme qu’il y ait. […] Piron est un excellent préservatif contre l’ennui ; mais il s’en va dans huit jours, et je vais retomber dans mes langueurs. » L’abbé, dans sa citation, soit malice, soit inadvertance, oublia la dernière ligne et s’arrêta après le mais, en ajoutant un et cætera qui laissait le lecteur libre de remplir la phrase de toute espèce de malice. […] Quand il se trouvait en face de Voltaire, lui grand, robuste, un colosse de verve et de gaîté, et qu’il avait devant lui ce corps maigre, chétif, tout esprit et vif-argent, mais armé à la légère, il se disait en lui-même, et il disait aux autres : « Je le roulerai quand je voudrai. » Dans cette espèce de duel qu’il engagea plus d’une fois, et où la riposte, bonne ou mauvaise, suffit si elle est roide et prompte, il avait ses avantages, et Voltaire le craignait avec raison ; hors de là, Voltaire méprisait, et il en avait bien un peu le droit, un esprit, un génie même, mais si confiné, si localisé, qui, pourvu qu’il eût ses coudées franches, se complaisait à demeure dans un assez bas étage et ne sentait pas le besoin d’en sortir. […] Cette originalité de Piron, si verte et si vigoureuse, qui tenait plus encore à sa personne qu’à ses écrits, a reçu sa récompense, telle quelle, et a triomphé : tous le connaissent, il est devenu populaire et ce qu’on appelle un type courant ; il est le premier de son espèce.

931. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

C’est enfin toute la moralité de l’espèce humaine ; car nulle part les vertus et les crimes, vertus et crimes à longue échéance en politique, ne reçoivent une plus lente, mais une plus infaillible rétribution que dans l’histoire. […] Nous disons d’avance, avec la même franchise, que ces qualités n’existent pas pour nous dans son premier livre de l’Histoire de la Révolution, livre superficiel et jeune, où rien n’est pesé, où rien n’est approfondi, où rien n’est senti, où rien n’est peint ; espèce d’estampe mal coloriée de l’esprit, des choses, des hommes de la Révolution française, semblable à ces portraits de fantaisie que l’on colporte à la foule sur nos places publiques, et qu’on lui donne pour l’image de ses grands capitaines, de ses grands orateurs ou de ses grands événements. […] Toutes les histoires techniques de l’univers ne donneront pas un atome de moralité à l’espèce humaine. […] Thiers, c’est l’excès de nationalisme ; c’est une espèce de patriotisme littéraire qui compte la patrie pour tout et le monde pour peu ; c’est, en conséquence, un engouement irréfléchi de militarisme empanaché, qui, voyant toujours le droit où est la patrie, et la patrie à travers la fumée de tous les champs de bataille, à quelque distance qu’ils soient de nos frontières, s’enivre non comme un historien, mais comme un combattant, de poudre et de gloire, ne voit plus dans la nation qu’une armée, et dans le chef d’armée qu’un maître du monde par droit de discipline et de victoire. […] Elle se rappelait à ce sujet la singulière prédiction d’une femme, espèce de pythonisse alors en vogue, qui lui avait dit : “Vous occuperez la première place du monde, mais pour peu de temps.”

932. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

Cette espèce de travail incessant, qu’on fait sur soi, sur ses sensations, sur les mouvements de son cœur, cette autopsie perpétuelle et journalière de son être, arrive à découvrir les fibres les plus délicates, à les faire jouer de la façon la plus tressaillante. […] À propos de cette lumière, de cette espèce de gloire entourant la Mercier, et la faisant nager dans un rayonnement, je me demandais, — cela me rappelle tellement les effets de Rembrandt ; — je me demandais si Rembrandt usait de la bête d’habitude de faire poser ses modèles dans un atelier éclairé par la lumière du nord, ainsi que tous nos peintres. […] Les filles de Gautier ont un charme singulier, une espèce de langueur orientale, des regards lents et profonds, voilés de l’ombre de belles paupières lourdes, une paresse et une cadence de gestes et de mouvements qu’elles tiennent de leur père, mais élégantifiées par la grâce de la femme : un charme qui n’est pas tout à fait français, mais mêlé de toutes sortes de choses françaises, de gamineries un peu masculines, de paroles garçonnières, de petites mines, de moues, de haussements d’épaules, d’ironies montrées avec les gestes parlants de l’enfance ; toutes choses qui en font des êtres tout différents des jeunes filles du monde, de jolis petits êtres personnels, d’où se dégagent franchement, et d’une manière presque transparente, les antipathies et les sympathies. […] La maladie, avant de tuer quelqu’un, apporte à son corps de l’inconnu, de l’étranger, du non lui, en fait une espèce de nouvel être, dans lequel il faut chercher l’ancien… celui dont la silhouette animée et affectueuse n’est déjà plus. […] Une espèce de docteur Tant-mieux, à mine rabelaisienne, le dernier porteur de la culotte, des bas, des boucles de souliers en acier, un bon vivant qui buvait dur, et auquel on était obligé de rationner le vin dans les maisons où il mangeait ; — du reste parfaitement lucide, et la raison aussi vive et plus nette que jamais, en plein vin.

933. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Jules Sandeau » pp. 322-326

Vitet s’est attaché à répondre à cette espèce d’étonnement du récipiendaire et à justifier l’Académie.

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