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220. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Le pape se fit accompagner au concile de Constance par Côme de Médicis, dont la présence et le crédit devaient imposer le respect à ses ennemis. […] Une légère insurrection de Bernardo Nardi, réprimée par Petrucci et par Ginori, citoyen de Florence, écrasa dans l’œuf cette première tentative des ennemis des Médicis. […] Son monopole, acquis par les voies loyales de trafic, fut reconnu et servi même par ses ennemis. […] Politien, génie vraiment antique et digne d’Horace ne s’enivra pas de cette faveur ; il était né d’une bonne famille à Montepulciano, petite ville de la Toscane, comme Flaccus, en Calabre ; c’est de là qu’il prit son nom. « Je ne me sens pas plus enorgueilli des flatteries de mes amis, ou humilié des satires de mes ennemis, disait-il, que je ne le suis par l’ombre de mon corps ; car, quoique mon ombre soit plus grande le matin ou le soir qu’elle ne l’est au milieu du jour, je ne me persuaderai point que je sois plus grand moi-même dans l’un ou l’autre de ces moments que je ne le suis à midi. » XI Le pape étant mort en ce temps-là, Laurent de Médicis fit un voyage à Rome, pour recommander Julien, son jeune frère, à Sa Sainteté, dans le but de le faire élire au cardinalat. […] Le principal ennemi des Médicis était François Pazzi, un des chefs de cette illustre maison.

221. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Ainsi se dressent entre l’amant et l’amante deux groupes contraires, les alliés, Courtoisie, Bel Accueil, les ennemis, Danger (l’orgueil de la pureté féminine), Honte, Peur. […] Et tout le monde extérieur, ennemi naturel de la joie des amants, se ramasse en deux groupes symboliques, la curiosité maligne et bavarde des indifférents, Malebouche, et l’hostilité soupçonneuse de ceux qui ont puissance sur la femme, Jalousie. […] Jean de Meung qui admet le Temple et l’Hôpital, les chanoines de Saint-Augustin et l’ordre de Saint-Benoît, est un des plus terribles ennemis que les moines mendiants aient rencontrés. […] il est en révolte contre la nature, ennemi de Dieu, dont il aspire à détruire pour sa part la création. […] L’Église (et non pas seulement les moines) est ennemie de la Nature : et Jean de Meung, qui ne s’attaque qu’aux moines, le voit bien obscurément.

222. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

Or, ces salons qui appelaient Byron un être immoral et satanique, ont caressé toutes ses vanités par leurs fureurs comme par leurs admirations ; Pouchkine, ennemi du despotisme, trouva dans l’empereur Nicolas un censeur de ses poésies aussi bienveillant que Mécène eût pu l’être pour Horace1. […] Les ennemis de Pouchkine lisaient, entre les lignes de ses poèmes, une foule de choses impies, immorales, révolutionnaires. […] Surtout ne vous avisez pas de vous moquer des hypocrites et des faux philanthropes, vous vous feriez trop d’ennemis. […] Mais ses ennemis ne se bornèrent pas à noircir son caractère : ils prétendirent qu’il n’écrivait pas le russe purement. […] Ne sommes-nous pas allés là-bas fouler durement, dans une vengeance de terrible colère, les traîtres ennemis du tsar ?

223. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre quatrième. Les émotions proprement dites. L’appétit comme origine des émotions et de leurs signes expressifs. »

L’acte de serrer les poings et de montrer les dents a été primitivement volontaire au moment de combattre l’ennemi ou pour le défier ; puis cet acte s’est associé peu à peu au sentiment de la colère et est devenu machinal ; enfin il s’est transmis par hérédité, et aujourd’hui encore nous serrons les poings dans la colère, même si l’ennemi est absent. Un des exemples les plus frappants de l’hérédité est l’action de découvrir la canine d’un seul côté de la bouche, comme font les chiens qui découvrent la canine voisine de leur ennemi. Chez l’homme, ce mouvement, joint à l’inclinaison de la tête en arrière, marque le ricanement de défi ou de souverain mépris, quoique nous n’ayons plus l’intention d’attaquer l’ennemi à coup de dents. […] Selon Darwin, ces mouvements bienveillants sont l’antithèse des mouvements agressifs, qui se trouvent être différents chez le chien et le chat : en effet, le chien tend et raidit son corps pour attaquer et courir sur l’ennemi ; le chat se couche, s’aplatit, fait onduler son corps pour prendre son élan. — Cette explication de Darwin est peu satisfaisante. […] « Ce phénomène, prétend Darwin, concourt, avec certains mouvements volontaires, à leur donner un aspect formidable pour leurs ennemis.

224. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Des avantages attachés à la profession de révolutionnaire. » pp. 200-207

. — Comme les héros des chansons de gestes voyaient le monde divisé en deux camps : les chrétiens, qui sont les bons, et les païens, qui sont les méchants ; ou comme saint Ignace, dans un de ses « exercices », partage l’humanité en deux armées : celle du bien et celle du mal, ou celle des amis des Jésuites et celle de leurs ennemis, ainsi pour l’esprit révolutionnaire la nation se divise exactement en prolétaires et en bourgeois. […] Je crois que les bourgeois s’exagèrent beaucoup les dissensions de leurs ennemis.

225. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « I. Historiographes et historiens » pp. 1-8

Ils laissèrent l’histoire à leurs ennemis, et l’on sait comment leurs ennemis s’en servirent… Plus tard, non plus, l’empereur Napoléon Ier, qui prenait et relevait les idées d’ordre partout où il les trouvait renversées, sans se soucier de l’opposition et des indignes cris de l’esprit révolutionnaire, Napoléon, qui fit un Grand-Juge, ne refit point d’historiographe.

226. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Je ne regrettais pas pour lui un plus somptueux monument : en fait de tombe, la plus ignorée est la plus désirable ; les survivants chers savent la trouver, les indifférents la profanent, les ennemis l’outragent. […] Je gémis sur le sort de ma fille, qui malheureusement pour elle reste vivante, jeune, sans direction, entre les mains de ses ennemis, sans autre ami que son misérable père, pauvre, âgé, loin d’elle et disgracié de la fortune. […] « Je fais les derniers efforts, ajoute-t-il, pour arracher ma pauvre fille des mains de ses ennemis, pour qu’il ne lui arrive pas ce qui est arrivé à sa malheureuse mère, laquelle (je le tiens pour avéré) a été empoisonnée par ses frères pour se libérer de sa dot. » « Je sais », dit-il dans une lettre à sa sœur Afra, la nonne de Bergame, « que plus j’adorai cette jeune femme, moins je devrais m’affliger de sa perte, puisque la mort est la fin de toutes les adversités dans l’océan desquelles elle était incessamment plongée à cause de moi. […] Nous n’avons plus d’amis à Naples, nos parents y sont nos ennemis ; et, à cause de ces circonstances, chacun craint de nous tendre la main… Mon angoisse est telle, excellente dame, que le désordre de mon esprit se communique à mes paroles ; c’est à Votre Excellence à se représenter l’excès des peines qu’il m’est impossible d’exprimer !  […] L’approche de l’armée des Impériaux qui venaient assiéger Rome, et la crainte de tomber dans les mains des Espagnols, ses ennemis, chassèrent Bernardo de ce dernier asile ; il envoya son fils à Bergame aux soins d’un prêtre de ses parents, pour achever son éducation.

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