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304. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

« Ceux qui ont dit « qu’une fatalité aveugle a produit tous les effets que nous voyons dans le monde » ont dit une grande absurdité ; car quelle plus grande absurdité qu’une fatalité aveugle qui aurait produit des êtres intelligents ? […] Ce qui fait que, dans d’autres pays, on revient si difficilement des abus, c’est qu’ils n’y sont pas des effets d’abord sensibles ; le prince n’y est pas averti d’une manière prompte et éclatante comme il l’est à la Chine. […] « Dans le feu des disputes entre les patriciens et les plébéiens, ceux-ci demandèrent que l’on donnât des lois fixes, enfin que les jugements ne fussent plus l’effet d’une volonté capricieuse ou d’un pouvoir arbitraire. […] J’ai vu les opéras d’Angleterre et d’Italie : ce sont les mêmes pièces et les mêmes acteurs ; mais la même musique produit des effets si différents sur les deux nations, l’une est si calme et l’autre si transportée, que cela paraît inconcevable ; ce n’est pas la même musique. […] C’est un effet qui dérive de sa cause naturelle.

305. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

Sans doute leurs chapitres ne se suivent pas tout à fait au hasard : outre qu’ils se tiennent par l’unité du but, qui est la description de tel ou tel monde, on devine le plus souvent dans quelle intention délicate, pour quel effet de symétrie, de redoublement du d’opposition ils ont été disposés comme on les voit : leur désordre, est lui aussi, « un beau désordre ». […] Et c’est pour cela sans doute que, dans leur développement, dans la série de leurs états moraux, on remarque des lacunes, on surprend des effets qui paraissent sans causes, tout au moins des choses insuffisamment préparées et qui étonnent. […] Le détail est infini, menu, extrêmement cherché ; mais il est un, j’entends subordonné à un effet d’ensemble. […] On dirait souvent qu’ils nous livrent le travail préparatoire de leur style, non leur style même, parce que l’impression de l’artiste se fait sentir plus immédiate et plus vive dans l’ébauche intempérante que dans la page définitive, et qu’ils craignent, en châtiant et terminant l’ébauche, d’en amortir l’effet. […] On se demande si l’effet de ces mots nouveaux ou de ces tournures inusitées n’est pas tout entier dans leur nouveauté même, et si, la nouveauté passant, l’effet ne disparaîtrait pas du même coup.

306. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

C’est là surtout qu’on peut contempler l’humanité dans sa liberté, dans sa personnalité, dans sa vie vraiment humaine : beau et dramatique spectacle d’un effet esthétique et d’un enseignement moral admirables. […] On reconnaît dans les chefs et les soldats des guerres médiques les fils des héros de l’Iliade ; c’est une histoire tout épique, une chronique héroïque mêlée d’anecdotes qui en redoublent l’effet moral. […] Périclès, Démosthène, Alexandre, Caton, César, ne doutent point, dans leur action politique ou militaire, des effets de leur éloquence, de leur courage, de leur vertu, de leur génie. […] La doctrine de la nécessité a pour effet d’énerver le sens moral et l’initiative personnelle aussi bien dans la vie publique que dans la vie privée. […] Les œuvres de la nécessité n’ont rien de cette pureté et de cette noblesse, alors même qu’elles ont un effet bienfaisant.

307. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

L’émulation multiplie ses effets dans un grand nombre de petites sphères ; mais on ne juge pas, mais on ne critique pas avec sévérité, lorsque chaque ville veut avoir des hommes supérieurs dans son sein. […] Cette vérité dans les expressions de l’amour et les tableaux de la nature, à travers toutes les inventions les plus bizarres, produit un effet remarquable. […] Néanmoins ils ont aussi pour système de mettre en contraste la nature vulgaire avec la nature héroïque, et ils diminuent ainsi l’effet d’un très grand nombre de leurs plus belles pièces. […] Il se trouve sans doute un résultat philosophique à la fin de ses contes ; mais l’agrément et la tournure du récit sont tels, que vous ne vous apercevez du but que lorsqu’il est atteint : ainsi qu’une excellente comédie, dont, à la réflexion, vous sentez l’effet moral, mais qui ne vous frappe d’abord au théâtre que par son intérêt et son action.

308. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

Quel que soit le fond dernier de notre être (ce qui est une question de métaphysique), ses déterminations caractéristiques sont, ou natives par l’effet de l’organisation, ou acquises par l’association des représentations et par la mémoire, qui tient elle-même à l’organisme. […] Le moi est prolongé par l’imagination dans un temps incertain, avec un ensemble d’activités également incertaines dans leurs effets, comme dans leur nature et dans leur degré de développement. […] L’unité que nous mettons dans nos sensations, l’ordre que nous leur imposons, cette fameuse « fonction synthétique » de la pensée, c’est en grande partie une fonction « sociale », un effet de l’action et de la réaction mutuelles entre l’individu et tous les êtres plus ou moins semblables à lui-même avec lesquels la nécessité de vivre le met en constante relation. […] Si la sensation croît par l’effet de l’unité, la conscience ne peut pas ne point s’accroître dans la même mesure.

309. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

Et croyez-vous produire ces effets sans éloquence ? […] L’effet de cette éloquence, on ne peut se le dissimuler, est donc plus difficile, et le succès plus incertain. […] Ce qui eût produit autrefois un grand effet, n’est plus aujourd’hui que lieu commun. […] Qu’un homme se livre à un de ces mouvements, l’effet est prévu, il ne produit rien ; on croit voir quelqu’un qui s’échafaude pour étonner, et cette espèce d’appareil fait rire ; quelques hommes même ont pris ces formules pour de l’éloquence : autre source de ridicule.

310. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Baudelaire.] » pp. 528-529

— Je connaissais quelques-uns de vos vers pour les avoir lus dans divers recueils ; réunis, ils font un tout autre effet. Vous dire que cet effet général est triste ne saurait vous étonner ; c’est ce que vous avez voulu.

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