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1538. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VII. D’Isocrate et de ses éloges. »

Très jeune encore, comme les trente oppresseurs qui régnaient dans sa patrie faisaient traîner au supplice un citoyen vertueux, il osa seul paraître pour le défendre, et donna l’exemple du courage quand tout donnait l’exemple de l’avilissement. […] Il faut en vérité estimer bien peu l’art d’écrire et de parler aux hommes pour donner de pareilles leçons. […] Isocrate ajoute qu’il eut le talent de gouverner ; qu’avant lui les habitants de l’île de Chypre, entièrement séparés des Grecs, étaient tout à la fois efféminés et sauvages, ignorant également la guerre et les arts, et joignant la barbarie à la mollesse ; que ce roi leur donna et le courage qui élève l’âme, et les arts qui l’adoucissent ; qu’il créa parmi eux un commerce et une marine, et de ces barbares voluptueux, fit tout à la fois des guerriers et des hommes instruits. […] Sans cesse il y compare Lacédémone et sa patrie ; il n’est pas nécessaire de dire à qui il donne la préférence : l’âme de l’orateur n’était pas susceptible d’enthousiasme pour Sparte.

1539. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

La préface de son nouveau livre est loin de nous donner des renseignements complets sur ce sujet important. […] Je pense donc que le personnage de Louis de Rohan est conçu d’après une donnée fausse. […] Pour donner à son livre une couleur historique, M.  […] Sue, qu’il s’est donné le plaisir de rédiger une notice sur la plupart de ses personnages. […] Étant donnée la simplicité des acteurs, il est facile de prévoir et d’affirmer la simplicité de l’action.

1540. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — III. (Fin.) » pp. 175-194

Il était en cela du même système monarchique que son maître, qui n’a jamais demandé de conseil à ces corps que pour l’apparence, et qui s’est fâché sérieusement en quelques cas, lorsque les compagnies se furent émancipées à donner avis sans en être requises. […] Cette charge de grand maître ne lui fut pas donnée encore pour le moment, et il commença par se livrer tout entier aux finances. […] Henri IV, au siège d’Amiens, avait songé à la lui donner à la mort de Saint-Luc ; mais, ne voulant pas trop faire à la fois, et vaincu par les sollicitations de la belle Gabrielle, il avait accordé la place au père de celle-ci, M. d’Estrées, homme parfaitement incapable. […] Que si par vanité vous vous les rendiez incompatibles, vous me donneriez sujet de ne vous laisser que la dernière. […] C’est cette indignation généreuse qui donna naissance à ses Mémoires, et qui lui inspira la pensée de les faire entreprendre sous ses yeux pour rectifier tant de fausses et mensongères notions qu’on était en train d’accréditer.

1541. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

Le chancelier Séguier, qui après la mort du grand cardinal avait donné asile dans son hôtel à l’Académie errante, était célébré comme l’hôte des « anges visibles de la science ». […] Il y avait dans cette fin de discours des choses d’ailleurs assez honorables sur les impôts, sur la paix dont l’orateur exprimait le vœu ; mais il s’y perdait de plus en plus dans des phrases qui, dès qu’elles n’amusaient plus, allaient donner de l’ennui. […] L’éclat d’une maison qui a donné par ses alliances augustes tant de princes à la France, tant de saints à l’Église, tant de souverains à de grands pays, semble encore au-dessous de la gloire d’avoir acquis un si rare mérite par votre propre application. […] Leur texte de Dangeau me paraît très bien donné, et on y a joint, par des extraits du Mercure et autres journaux du temps, ce qui peut l’éclairer et le relever à propos sans le surcharger. […] Au milieu des plus heureux traits, il ne se donne pas le temps de mettre sur pied ses phrases.

1542. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Je ne prétends pas donner pour vraies toutes les idées que Vauvenargues émet dans ses lettres à Mirabeau. […] Je donnerai de cette lettre, qui est à lire tout entière, ce qui m’en paraît de plus saillant : À Verdun, le 16 janvier 1740. […] Sachons seulement qu’il ne se replie si fortement sur lui-même que parce qu’il ne lui a pas été donné de se déployer : « Il était dans sa destinée, a très bien dit M.  […] J’ai dit que le plus jeune frère de Mirabeau servait dans le régiment du roi ; Vauvenargues était quelquefois prié de le surveiller, de lui donner des conseils : « Ayez soin du petit », lui écrivait le fougueux aîné devenu père de famille. […] C’est pour n’avoir pas eu présents alors les détails que je donne ici, que je me suis demandé si ce nom de Mirabeau que je rencontrais était bien exact.

1543. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Et lié comme je le suis de plus en plus envers la divine Bonté par tant de bienfaits de chaque jour, qu’ai-je à lui donner en retour, si ce n’est moi-même ? […] Une phrase a dû nous frapper dans le passage de Casaubon que j’ai donné : il se plaint que les lettres, les muses trouvent à peine quelque part un asile, un coin où se caser ; et ce n’est pas là une plainte banale. […] Le récit qu’en donne Casaubon dans son journal concorde avec celui que de Thou, également présent et l’un des juges, a consigné dans son Histoire. […] Ô souverain maître du monde, tu m’as donné, il est vrai, la volonté de diriger ma vie selon tes préceptes ; mais, au moment où je cherche ton propre vouloir, quelquefois je me sens incertain entre les variétés merveilleuses des opinions des hommes. […] Sa femme cependant accouche toujours, et comme pour remplacer Jean, cet aîné que le père n’a pas pour cela cessé d’aimer, elle lui donne un petit Jacques, qu’on nomme ainsi parce que le roi veut bien faire aux parents l’honneur de le tenir au baptême.

1544. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Maurice et Eugénie de Guérin. Frère et sœur »

Plongé dans la réalité, il est l’opposé du dilettante, et ne donnera jamais trente sous du plus magnifique tableau de paysage. […] On n’en connaissait jusqu’ici qu’une très faible partie, un Mémorandum imprimé à Caen en 1855, et pour quelques amis seulement ; mais ce peu qu’on avait vu d’elle, chez ceux à qui il avait été donné d’en être confidents, avait excité un vif désir d’en avoir et d’en savoir davantage. […] « Après avoir donné au petit Antoine tout ce qu’il a voulu, je lui ai demandé une boucle de ses cheveux, lui offrant une des miennes. […] Moi, je vivrais d’aimer : soit père, frères, sœur, il me faut quelque chose. » Ce Journal même où elle s’écoule, et qui ne laisse pas de lui donner, de temps en temps, de petits scrupules à cause du plaisir qu’elle y prend, ne lui suffit pas. […] Son voyage de Paris fut un grand événement dans sa vie : elle dut, selon son expression, y être fréquemment tentée ; son intelligence si ouverte put y donner plus d’un secret assaut à sa foi ou du moins à son cœur.

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