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1257. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Que les ouvriers deviennent artistes, que les rimeurs deviennent poètes, et nous serons des premiers à battre des mains. […] Au lieu de réhabiliter celui qui la trompait, elle devient pour lui un objet de pitié. […] Elle est libre, elle pourrait devenir la femme d’Amaury ; mais le voluptueux demande deux années de répit. […] Quand l’adultère se consomme, il est devenu nécessaire. […] Ses tempes se creusent et son sang ne se refroidit pas : il devient fou.

1258. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

Sur quelques-uns de ces points d’innovation, il devient lui-même la transition et la nuance d’intervalle, comme il convient à un esprit si modéré. […] M. de Fontanes, que nous savons poëte, devient un critique au Mercure. […] Poëte d’avant 89, critique de 1800, il va devenir orateur impérial. […] Dans ses vers, si les griefs exprimés contre Bonaparte restèrent secrets, les éloges, prodigués tout à côté, ne devinrent pas publics. […] Il dit qu’il ne prend rien, et la manière dont il le dit devient à l’instant cette fine perle qu’il a l’air de ne plus chercher.

1259. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Il doit devenir cendre. […] ta présence ici pourrait te devenir fatale. […] … Pour maudire les Moscovites, puis mourir et devenir poussière ! […] Il était devenu inquiet et questionneur. […] Cet ancien ami de M. de Latouche était devenu le mien.

1260. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

si tu pouvais exhaler et fixer sur le papier cette vie qui coule en toi avec tant d’abondance et de chaleur, en sorte que le papier devienne le miroir de ton âme, comme ton âme est le miroir d’un Dieu infini ! […] Ainsi le village de Gaubenheim est devenu Wahlheim. […] Il y devint l’ami de Goethe, qu’il eut le mérite d’apprécier du premier jour à sa valeur ; et ce qui est vrai encore, c’est que pendant toute cette belle saison de 1772, Goethe, accueilli par lui, adopté par Charlotte et par toute la famille, mena une vie d’exaltation, de tendresse, d’intelligence passionnée par le sentiment, d’amour naissant et confus, d’amitié encore inviolable, une vie d’idylle et de paradis terrestre impossible à prolonger sans péril, mais délicieuse une fois à saisir. […] Une autre conclusion également imprévue qui s’y rattache, c’est que dans l’année qui suivit celle de la publication de Werther, Goethe devint l’ami du jeune duc de Saxe-Weimar, et bientôt son principal conseiller, son ministre. […] Il me semble cette fois que l’ombre de Kestner lui-même y a souri, et qu’il a pardonné enfin sans aucune réserve à ce glorieux ami dont il devient, bon gré mal gré, le compagnon dans l’immortalité.

1261. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Du Bellay, pendant qu’il composait cette Préface qui se développait sous sa plume et qui allait devenir tout un petit livre, s’aperçut, dit-il, qu’on lui avait dérobé une copie de ses vers, et il s’empressa de les livrer à l’imprimeur et de les « jeter tumultuairement en lumière ». […] Or la poésie française ne devait point en rester à Marot : elle avait la noble ambition de s’élever, de se créer un instrument plus savant, une harpe ou une lyre ; et, lorsqu’on songe à tout ce qu’il fallut de labeur et d’effort à Malherbe pour réussir à dresser quelques strophes incomparables, on devient indulgent pour ceux qui y préludèrent et qui, les premiers, essayèrent de quelques cordes nouvelles. […] Il désapprend, dit-il, à parler français, et cela le mène à composer des vers latins (lui qui en a tant médit) : il fait comme Marc-Antoine Muret et comme les beaux esprits de son temps devenus citoyens romains : il faut bien parler à Rome le langage qu’on entend le mieux à Rome ! […] Le mouvement de la Renaissance était si vif, si puissant et si sincère, que ceux qui s’y inspiraient directement devenaient poètes dans la langue des Anciens. Du Bellay, venu à Rome par hasard, antipathique et rebelle par système à la poésie latine, y fut pris et devint lui-même une preuve de cette fascination de la Renaissance.

1262. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre II. Lois de la renaissance et de l’effacement des images » pp. 129-161

Plusieurs médecins ont cité l’histoire d’une fille de vingt-cinq ans, très ignorante et ne sachant pas même lire, qui, devenue malade, récitait d’assez longs morceaux de latin, de grec et d’hébreu rabbinique, mais qui, une fois guérie, parlait tout au plus sa propre langue. […] Si l’air est très beau et nous a touchés très fort, nous ajoutons que nous avons été transportés, enlevés, ravis, que nous avons oublié le monde et nous-mêmes, que pendant plusieurs minutes notre âme était comme morte et insensible à tout, saut aux sons. — Et, de fait, il y a des exemples nombreux où, sous l’empire d’une idée dominante, toutes les autres sensations, même violentes, deviennent nulles ; telle est l’histoire de Pascal, qui, une nuit, pour oublier de grandes douleurs de dents, résolvait le problème de la cycloïde ; telle est celle d’Archimède, qui, occupé à tracer des figures géométriques, n’avait pas entendu la prise de Syracuse. […] La première impression, si précise devient la deuxième fois moins précise. […] Mais comme les sensations sont nombreuses, et à chaque instant remplacées par d’autres, sans trêve ni fin, jusqu’au terme de la vie, il y a conflit de prépondérance entre ces images, et, quoique toutes tendent à renaître, celles-là seules renaissent qui possèdent les prérogatives exigées ; par les lois de la renaissance ; toutes les autres demeurent inachevées ou nulles, selon les lois de l’effacement. — Incessamment, en vertu de cette double loi, des groupes d’aptitudes efficaces deviennent inefficaces, et les images retombent de l’existence réelle dans l’existence possible. […] Sa mémoire était devenue table rase.

1263. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

— Nous voilà devenus suspects pour vouloir en revenir aux études logiques, à la connaissance des origines de notre langue, de sa lente formation ! […] Puisque tout est bien et doit rester en état, voici un ministre dont la fonction est devenue inutile ; qu’on le supprime. […] Reste à savoir si ce n’est pas le latin qui a eu de la chance de se mêler à notre évolution pour devenir la langue de Paul-Louis Courier, au lieu de devenir bêtement italien. […] Mais d’abord je le suis, au moins à ma façon, et si je ne l’étais pas, je crois bien que, lui et ses confrères du Parlement, des bureaux de la rue de Grenelle et de « la nouvelle Sorbonne », dont parle si bien Agathon, me feraient devenir tel. […] Que les études latines soient nécessaires à notre amélioration littéraire, c’est une incontestable vérité : on l’aperçoit ou non, toute discussion sur ce point devient oiseuse.

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