Stéphane Mallarmé particulièrement l’a discerné, qui écrivait à l’auteur : « … Peu d’œuvres jeunes sont le fait d’un esprit qui ait été, autant que le vôtre, de l’avant », et il lui prodigua les conseils, attirant son attention sur L’Harmonie contenue en ces vers de la Légende d’âme et de sang, « et ainsi, disait dernièrement Ghil, me jeta dans la voie, ma voie, selon un sens harmonique très développé en moi, qui me fait écrire en compositeur plus qu’en littérateur ».
En 1664, on voit la société des quatre amis devenir plus étroite, à mesure que leur talent se développe.
Malgré les difficultés qui se présentoient dans un Discours dont le but est de développer le chaos des temps, de suivre, pour ainsi dire, pas à pas la marche de la Sagesse divine, de rapprocher les événemens pour en faire connoître les ressorts & le terme, de présenter enfin le tableau du genre humain dans sa naissance, dans ses erreurs, dans ses crimes, dans le progrès de ses lumieres, dans sa législation, dans la réformation de ses mœurs, dans les révolutions des Empires ; le génie de Bossuet est toujours égal au sujet qu’il embrasse, & embellit les objets que leur propre grandeur sembloit mettre au dessus de l’esprit de l’homme.
C’est en vain qu’on abuse ; les regles développées par le goût, sont appuyées sur des principes invariables.
Au reste, il nous semble que Zaïre, comme tragédie, est encore plus intéressante qu’Iphigénie, pour une raison que nous essayerons de développer : ceci nous oblige de remonter au principe de l’art.
. : on ne peut plus s’occuper que d’elle ; on en est possédé, enivré : on la retrouve partout ; tout en retrace les funestes images ; tout en réveille les injustes désirs : le monde, la solitude, la présence, l’éloignement, les objets les plus indifférents, les occupations les plus sérieuses, le temple saint lui-même, les autels sacrés, les mystères terribles en rappellent le souvenir32. » « C’est un désordre, s’écrie le même orateur dans la Pécheresse 33, d’aimer pour lui-même ce qui ne peut être ni notre bonheur, ni notre perfection, ni par conséquent notre repos : car aimer, c’est chercher la félicité dans ce qu’on aime ; c’est vouloir trouver dans l’objet aimé tout ce qui manque à notre cœur ; c’est l’appeler au secours de ce vide affreux que nous sentons en nous-mêmes, et nous flatter qu’il sera capable de le remplir ; c’est le regarder comme la ressource de tous nos besoins, le remède de tous nos maux, l’auteur de nos biens34… Mais cet amour des créatures est suivi des plus cruelles incertitudes : on doute toujours si l’on est aimé comme l’on aime ; on est ingénieux à se rendre malheureux, et à former à soi-même des craintes, des soupçons, des jalousies ; plus on est de bonne foi, plus on souffre ; on est le martyr de ses propres défiances : vous le savez, et ce n’est pas à moi à venir vous parler ici le langage de vos passions insensées35. » Cette maladie de l’âme se déclare avec fureur, aussitôt que paraît l’objet qui doit en développer le germe.
Nous aurions à développer amplement ce qu’il y a d’excessif dans l’opposition qu’il leur fait.