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221. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

Quoique la correction soit une qualité si essentielle qu’il est inutile de la recommander, l’orateur ne doit pas néanmoins s’en rendre tellement esclave qu’elle nuise à la vivacité nécessaire du discours ; de légères fautes sont alors une licence heureuse ; c’est un défaut d’être incorrect ; mais c’est un vice d’être froid. […] On demandera sans doute comment une langue sujette à ce défaut importun, timide d’ailleurs, sourde et peu abondante, a fait dans l’Europe une si prodigieuse fortune ? […] Deux raisons contribuent à ce défaut, le plus insupportable de tous aux bons esprits ; les fausses idées qu’on donne de l’éloquence dans nos collèges, en apprenant aux jeunes gens à noyer une pensée commune dans un déluge de périodes insipides ; et si l’on ose le dire, l’exemple de Cicéron, quelquefois un peu trop verbeux. […] Il est vrai que Cicéron fait oublier ce défaut par les autres qualités de l’orateur qu’il possède au suprême degré. Mais les défauts des grands écrivains sont tout ce que les auteurs médiocres en imitent.

222. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Taraval » pp. 282-283

Exemple excellent du défaut d’unité. […] Mais, me direz-vous, ces défauts sont peut-être rachetés par un faire merveilleux ?

223. (1883) La Réforme intellectuelle et morale de la France

Elle consiste à se corriger de ses défauts, et parmi ses défauts à se corriger justement de ceux qu’on aime, de ce défaut favori qui est presque toujours le fond même de notre nature, le principe secret de nos actions. Quel est pour la France ce défaut favori, dont il importe avant tout qu’elle se corrige ? […] Une assemblée a les défauts qui chez un souverain sont les plus rédhibitoires : bornée, passionnée, emportée, décidant vite, sans responsabilité, sous le coup de l’idée du moment. […] La France en tout cas est plus sûre d’avoir sa revanche, si elle la doit à ses défauts, que si elle est réduite à l’attendre de qualités qu’elle n’a jamais eues. […] La France va-t-elle s’appliquer à corriger ses défauts, à reconnaître ses erreurs ?

224. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

L’auteur avait d’abord écrit ainsi cette phrase : « Les rois de France, Sire, ont toujours regardé l’amour des Français comme d’un prix égal à leurs plus grands bienfaits. » Cette Dédicace, avant d’être imprimée, fut soumise à Louis XVIII qui la lut et qui se donna le plaisir de faire remarquer que le mot de bienfaits, trop rapproché, rimait avec Français, et que de plus ce membre de phrase : comme d’un prix égal à leurs plus grands bienfaits, faisait un vers alexandrin dans une phrase de prose, ce qui est réputé un défaut. […] L’image et le style lui font défaut. […] La pointe finale est purement fortuite et due au hasard du nom ; elle porte à faux et n’atteint pas le faible du talent, car si Loyson a un défaut, ce n’est pas la lourdeur, c’est la pâleur. […] Mais, ces points obtenus, l’ensemble fait défaut ; la juste proportion des choses et des hommes n’y gagne pas.

225. (1785) De la vie et des poëmes de Dante pp. 19-42

Mais il est temps de nous occuper du poëme de l’Enfer en particulier, de son coloris, de ses beautés et de ses défauts. […] Enfin, du mélange de ses beautés et de ses défauts, il résulte un poëme qui ne ressemble à rien de ce qu’on a vu, et qui laisse dans l’âme une impression durable. […] J’ai donc pensé qu’elles devraient servir également à la gloire du poëte qu’on traduit, et au progrès de la langue dans laquelle on traduit ; et ce n’est pourtant point là qu’il faut lire un poëte, car les traductions éclairent les défauts et éteignent les beautés ; mais on peut assurer qu’elles perfectionnent le langage. […] C’est un des grands défauts du poëme, d’être fait un peu trop pour le moment : de là vient que l’auteur, ne s’attachant qu’à présenter sans cesse les nouvelles tortures qu’il invente, court toujours en avant, et ne fait qu’indiquer les aventures.

226. (1903) Zola pp. 3-31

Mais il faut qu’on sente chez le satirique un désir vrai, sincère et vif de corriger ses concitoyens en leur peignant leurs défauts ou leurs vices ; et il faut bien avouer que dans les livres de Zola on ne le sentait nullement, mais seulement une haine cordiale et un mépris de parti pris pour ceux dont il avait le malheur d’être né le compatriote, ou à peu près le compatriote ; et cela ne laisse pas d’être un peu désobligeant et un peu coupable. […] D’abord, c’est à cause de ses défauts ; ensuite, c’est un peu à cause de ses qualités ; car il en a. C’est à cause de ses défauts. La force brutale et le défaut de mesure ont sur les hommes à demi lettrés, ou qui ne sont point lettrés du tout, un prestige incomparable.

227. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

Il suit de là qu’aux yeux du spectateur mis au fait de la prétention du personnage, tous les actes de celui-ci font apparaître, au moyen d’une, intuition directe, la contradiction qu’il porte en lui, le défaut d’équilibre et d’harmonie dont son énergie est atteinte et qui la rend boiteuse. […] L’un constitue un Bovarysme par excès d’énergie, et l’autre un Bovarysme par défaut. […] VI L’homme de génie se conçoit autre qu’il n’est par excès d’énergie, le snob fait de même par défaut. […] Un zézaiement, un grassaiement, quelque autre défaut de prononciation ont, en d’autres temps, tenu le même office.

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