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759. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

De loin, les portraits de Lesdiguières ressemblent à ceux de Louis XIII ; mais, en approchant, la figure belle et vide du faible fils de Henri IV fait place à la physionomie astucieuse et souriante du grand général dauphinois qui fut d’ailleurs un des plus beaux hommes de son temps. […] On ne peut d’ailleurs se ressembler moins que Beyle et M. de Balzac. […] En continuant littérairement avec originalité et avec une sorte d’invention la postérité française des Chamfort, des Rulhière, de ces hommes d’esprit qu’il rappelle par plus d’un trait ou d’une malice, Beyle avait au fond une droiture et une sûreté dans les rapports intimes qu’il ne faut jamais oublier de reconnaître quand on lui a dit d’ailleurs ses vérités.

760. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

Les hommes éminents et zélés qui avaient présidé à l’Instruction publique pendant ces années, d’ailleurs florissantes, n’avaient pas été sans songer à l’inconvénient et sans prévoir le danger. […] Des juges, d’ailleurs équitables, ont cru trouver trop de régularité et de mécanisme dans l’indication stricte des heures, des minutes consacrées à chaque portion des devoirs dans les classes ; mais il semble qu’en se représentant avec une précision si parfaite les exercices de chaque groupe successivement, le ministre ait voulu ne pas s’en tenir à une idée prise de loin et de haut, comme cela est trop ordinaire ; qu’il ait voulu communiquer aux maîtres le sentiment de l’importance qu’il met à un parfait accord entre les facultés diverses. […] Si j’osais faire un rapprochement qui n’est qu’exact, c’est ainsi, dans un livre célèbre, que Ponocrates, devançant le progrès des temps, en agissait avec son élève, et qu’il l’exerçait aux notions pratiques de la vie, tout en le maintenant d’ailleurs en commerce étroit et familier avec les grands auteurs de l’Antiquité, avec Hippocrate comme avec Homère.

761. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

Ne lui demandons point d’ailleurs un idéal qui n’est pas son fait, — ni le véritable idéal qui ennoblit la condition humaine et cherche à lui donner toute la beauté dont on la croit susceptible à de certaines heures, — ni ce faux idéal qui ne s’attache qu’aux apparences et qui se prend aux illusions ou ne songe qu’à s’en décorer. […] Honnête homme, il a, à certains égards, les mœurs de son temps ; et ce n’est pas de ce qu’il a fait à la rencontre que je m’étonne : ce qui me passe un peu, c’est qu’il ait songé par endroits à l’écrire, à le consigner exactement dans ses cahiers d’observations et de remarques : il n’a pas la pudeur ; il parle de certains actes comme un pur physiologiste, notant, sans d’ailleurs y prendre plaisir, le cas qui lui paraît rare et la singularité. […] Le garde des sceaux Chauvelin, qui avait fort contribué à cette mesure, avait pris d’ailleurs d’Argenson en grande estime et amitié ; il voulait lui servir comme de père, disait-il, et faire sa fortune politique.

762. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — I » pp. 395-413

La margrave, d’ailleurs, est déjà mariée ; Frédéric se trouve l’être aussi, malgré lui. […] Avant cette mort, il y a bien quelques plaisanteries encore, quelques allusions aux manies du roi et à ce qu’on en sait d’ailleurs. […] La margrave engage son frère à lui faire une épitaphe satirique ; Frédéric ne s’y prête que pour lui obéir, et le moins possible : « Si M. de Grumbkow, dit-il, ne m’avait jamais fait de mal, je pourrais lui faire une épitaphe ; mais tout ce que je pourrais en dire sentirait trop la prévention, et d’ailleurs je crois que ce serait trop d’honneur. » Quand on a lu dans les mémoires de la margrave ce qu’ils eurent l’un et l’autre à souffrir de Grumbkow, on trouvera qu’ils en parlent ici avec bien de la douceur et sans rancune.

763. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

D’ailleurs il était infiniment aimable et gai ; en voilà plus qu’il n’en fallait pour m’y attacher. […] Lorsqu’il eut fait nommer Amelot, ministre de la Maison du roi, à la place de Malesherbes, il était le premier à dire à qui voulait l’entendre : « On ne dira pas que j’aie pris celui-là pour son esprit. » Un jour Besenval avait à se plaindre du ministre de la guerre, M. de Saint-Germain, qui ne l’avait point porté sur la liste des lieutenants généraux employés, ce qui d’ailleurs lui était assez égal, il a le soin de nous le dire (car c’est bien son genre, sa conclusion finale favorite, de dire de toutes choses : Ça m’est égal) ; il alla trouver M. de Maurepas, et se mit à lui parler en détail du singulier ministre de la guerre qu’il s’était choisi : Je démontrai à M. de Maurepas ses fautes (les fautes de M. de Saint-Germain), sa mauvaise administration, enfin son incapacité. […] Il est intéressant d’ailleurs et précieux à consulter pour un historien sur le personnel d’alors, sur les Castries, les Ségur, M. de Lamoignon, M. de Calonne.

764. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

Leurs tableaux de sainteté rentrent eux-mêmes d’ailleurs assez bien, par l’exécution et la manière de faire, dans la définition générale de M.  […] Autre tableau d’intérieur : — le fond est un grand manteau de cheminée ; ce fond d’ailleurs est très-sombre ; le feu s’éteint. […] Champfleury d’ailleurs, dans cette sorte de vie conjecturale des Le Nain, qu’il tire par induction de l’étude et de la comparaison prolongée de leurs œuvres, a de la chaleur, de la verve, et un accent de sympathie qui sort du cœur ; on sent que c’est bien pour ses maîtres d’adoption et presque pour ses saints qu’il prêche : « Qu’ils soient trois ou quatre frères, dit-il, les archivistes le découvriront peut-être un jour16.

765. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Elle s’en séparait, sans avoir d’ailleurs l’intention de la maudire, car il n’y a que le fanatisme qui maudit : la France du XIXe siècle, dans ce qu’elle avait d’inspiration directe et naturelle, et si on ne la faisait, pas dévier, entendait bien profiter du XVIIIe siècle, en hériter sous bénéfice d’inventaire, lui laissant, à sa charge, les impiétés grossières, les énormités elles témérités antisociales, déjà senties et jugées sur la fin par ses hommes d’esprit les plus éclairés. C’est ainsi que Rivarol, blâmant les forfanteries de l’impiété dans la jeunesse, disait : « L’impiété est la plus grande des indiscrétions. » Mais ce n’était pas seulement en ce sens trop fin et malin que la France du XIXe siècle entendait blâmer les licences de ses pères ; elle les réprouvait en elles-mêmes comme fausses et funestes, et contraires au bon régime des sociétés humaines ; elle comptait bien, d’ailleurs, emprunter au XVIIIe siècle tout ce qui était progrès, résultat utile, lui prendre ses méthodes, mais pour les perfectionner ou les rectifier, à la lumière des grands événements historiques qui avaient éclairé son berceau : elle entendait le continuer en le corrigeant, en se garantissant avec soin surtout de ses conclusions tranchantes et précipitées. […] des choses impossibles sans doute, et d’ailleurs fort diverses.

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