A la suite des Œuvres complètes de chacun de ces auteurs célèbres, il devrait y avoir un album, un recueil d’estampes représentant quelques-uns des types de ces femmes-là, à la fois celles que l’auteur a peintes dans ses livres et celles qui se sont après coup modelées sur lui, autant de prêtresses ou de dévotes vouées chacune à leur saint ou à leur dieu. […] on y sent comme un double coup de fouet. […] Tout à coup, étant tombée sur deux ou trois prières particulières qui lui parurent bizarres et de mauvais goût, elle ne put s’empêcher de le dire ; et comme Mme de Genlis se hasardait à lui représenter qu’en fait de prières Dieu s’attachait sans doute à l’intention plutôt qu’aux paroles et au ton : « Eh bien ! […] C’était une allusion au mot bien connu de cet esprit fort qui faisant gras en carême et, qui pis est, un jour de Vendredi-Saint, je crois, et entendant tout à coup le tonnerre éclater dans un orage, se mit à dire entre ses dents : « Voilà bien du bruit pour une omelette au lard. » Le mot était devenu proverbial dans la bonne compagnie.
La mort de Mirabeau, survenue le 2 avril 1791, dut en effet donner le coup de cloche, et l’on crut peut-être avoir trouvé cette occasion propice dans la discussion qui s’éleva sur les principes de la liberté religieuse. […] Le premier paragraphe rétrograde sur les maux, les excès de la révolution, rembrunit tout à coup les figures ; on se dresse, on se regarde, on s’indigne ; mais on s’attend à des retours aux bienfaits, aux grands résultats de régénération sociale. […] Ce qu’on peut dire de mieux après coup à la décharge de Raynal, c’est que, s’il était modifié et repenti, du moins il ne s’était pas totalement retourné et qu’il avait gardé de bons restes de lui-même jusque dans sa retraite en arrière. […] Il put continuer d’être cher à ses amis et leur tenir de fort beaux propos, leur prodiguer de généreux sentiments, et gémir plus haut que personne en se promenant avec eux le soir dans les allées du Luxembourg97 ; mais l’homme public ne comptait plus, il s’était brisé du même coup et devant ses contemporains et devant la postérité.
Quoi qu’il en soit, c’était faire preuve d’un esprit bien subtil ou bien inquiet que de voir dans la simple histoire de ce bon Lépreux, à côté de passages reconnus pour touchants, beaucoup d’autres où respire une sorte d’aigreur farouche : voilà des expressions tout d’un coup extrêmes. […] Parmi les ancêtres du Lépreux, en remontant vers le moyen âge, je ne rappellerai que le touchant fabliau allemand du Pauvre Henry : c’est le nom d’un noble chevalier tout d’un coup atteint de lèpre. […] Mérimée pourrait envier ce personnage d’Ivan, de ce brave domestique du major, à la fois si fidèle et si féroce, et qui donne si lestement son coup de hache à qui le gêne, en sifflant l’air : Hai luli, hai luli ! […] Ainsi, par exemple, quand il nettoie machinalement le portrait, et que son âme, durant ce temps, s’envole au soleil, tout d’un coup elle en est rappelée par la vue de ces cheveux blonds : « Mon âme, depuis le soleil où elle s’était transportée, sentit un léger frémissement de plaisir ;… » en imposer pour imposer ; sortir de sa poche un paquet de papier… Mais c’est assez : je tombais l’autre jour sur une épigramme du spirituel poëte épicurien Lainez, compatriote du gai Froissart et contemporain de Chapelle, qu’il égalait au moins en saillies ; il se réveille un matin en se disant : Je sens que je deviens puriste ; Je plante au cordeau chaque mot ; Je suis les Dangeaux à la piste ; Je pourrais bien n’être qu’un sot.
Non, il n’est pas vrai que l’amour, en des cœurs complets, soit comme un je ne sais quoi qu’un rien a fait naître et qu’un rien aussi fait évanouir ; que cette passion la plus élevée et la plus belle soit comme un cristal précieux que tôt ou tard un accident détruit, et qui d’un coup se brise à terre, sans plus pouvoir se réparer. […] L’amour, comme tout ce qui tient à la pensée, ne saurait être à la merci d’un jeu du dehors, d’un tort sans intention ; il ne se brise pas comme le verre dont le cadre neuf a tout d’un coup joué sous un rayon ardent, ou sous une pluie humide. […] On était donc à s’étendre asse complaisamment à l’article des sollicitations de Mme de Pontivy, quand Mme de Tencin, qui venait de la complimenter sur son redoublement de beauté, ajouta tout d’un coup, comme saisie d’une inspiration lumineuse : « Mais que ne voit-elle M. le Régent ? […] ce n’est pas l’automne, c’est un coup de soleil, disait-il ; c’est ce pauvre arbuste des îles qui se dépouille avant l’heure. » Mais, le soir, quand les nuages eurent fui, et qu’il vit vers les collines, sur un horizon transparent et froid, la lune naissante, il comprit que c’était l’automne, venu cette année-là plus tôt, et il en tirait présage, se demandant et demandant à ce croissant, à ce ciel pâli, à la nuit, si c’était déjà aussi l’automne de l’amour.
Et cela ne veut nullement dire qu’il n’ait été très loin du premier coup, puisque c’est à l’ampleur du saut qu’il doit d’avoir été remarqué, ni qu’observateur né, s’il en fut, et sachant tirer des choses tout ce qu’elles peuvent en apprendre à qui est spécialement conformé pour en condenser le sens, dans son esprit, en formules d’une généralisation savante, il n’ait révélé une intelligence extraordinairement précoce, et ouverte à un degré d’universalité, si tant est que, comme il arrive fatalement aux natures compliquées, cette intelligence est restée passive, en ce qu’elle a reçu et démêlé, sans que, par spécialisation de génie, elle ait réussi à créer par là-dessus. […] Quelque chose de lui s’est renoncé, à coup sur, quand il décida de se ranger dans une catégorie sociale. […] * * * Ce n’aura pas été le moindre prestige de cette physionomie complexe et si riche, que de s’être comme à demi idéalisée dans d’inappréciables persévérances méditatives, grâce auxquelles ce qu’elle a longtemps exprimé d’une vie intérieure aussi aride que résignée, a pu tout à coup nous apparaître susceptible d’une indéfinie perfectibilité. […] Que ce soit à la lumière de semblables phénomènes d’existence que doive résolument s’éclairer le mystère de notre constitution essentielle, quoi malheureusement de moins certain, si rien n’est à coup sur plus souhaitable.
On empruntera aux Italiens concetti, lazzi, opéra, le mot et la chose du même coup. […] Vous croyez qu’il va se fâcher et rendre coup pour coup ? […] En notre siècle aussi, comment faire l’histoire de la chanson sans aller la chercher dans les nids où elle gazouillait avant de s’élancer à travers l’espace, dans le Caveau, séjour de la gaudriole au temps de Désaugiers et de Béranger, et, naguère, dans les cabarets de Montmartre où elle a donné tant de bons coups de bec et de gosier ?
Il y a dans chaque siècle des temps marqués, des coups d’archet, ou, si l’on veut, des coups de tonnerre. Ces coups de tonnerre au xviie siècle, c’était Descartes, c’était Pascal ; ce coup d’archet qui remettait l’orchestre en mesure, c’était Despréaux.