/ 1833
1248. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

Voici que, de ce point de départ superficiel, l’auteur arrive, par un langage, presque abstrait et objectif, à nous donner une impression vive de l’état de conscience de son héros : « Cela descendit dans les profondeurs de son tempérament et devenait presque une manière générale de sentir, un mode nouveau d’exister272. » 4° Transposition des images et sentiments en actions : « Je m’en irai vers lui, il ne reviendra pas vers moi273. » Beaucoup d’actions sont une condensation de pensées sous une forme concrète et elles peuvent donner lieu à des méditations sans fin, tout comme de hautes formules métaphysiques. […] Il va soumettre son scrupule à l’Académie, qui rassure sa conscience, Racine ayant dit aussi dans les Plaideurs :             Et je veux rien ou tout. […] Et science sans conscience n’est que ruine de l’ame, Il te convient servir, aimer, et craindre Dieu, Et en luy mettre toutes tes pensées et tout ton espoir ;   Et, par foy formée de charité,                     Estre luy adjoinct, En sorte que jamais n’en sois désemparé par peché.

1249. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Ce caractère et cet esprit, une fois constitués, se trouvent plus ou moins enclins à la discipline ou à l’indépendance personnelle, plus ou moins propres au raisonnement fin ou à l’émotion poétique, plus ou moins disposés à la religion de la conscience, ou de la logique, ou de l’habitude, ou des yeux. […] Il y avait contre eux « douze mille plaintes », et ils sentaient si bien leur conscience, qu’à l’arrivée des juges « ce fut une fuite presque générale de toute la noblesse du pays ». […] L’esprit, à ce moment, part d’un essor subit ; cette force imprévue dont il n’avait pas conscience, et qui depuis longtemps s’était accumulée en lui sans qu’il la sentît, se déploie, et l’emporte à travers toutes les pensées, toutes les vérités et toutes les erreurs. […] La force véritable fait la fierté légitime, et, avec le sentiment de son énergie, on acquiert la conscience de son droit. Avec cette force et cette énergie, on avait perdu à Rome cette fierté et cette conscience ; avec cette force et cette énergie, on a gardé en France cette conscience et cette fierté.

1250. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

Maurice Martin du Gard, tirant de ses Nouvelles littéraires, des « portraits contemporains », n’avait peut-être pas tout à fait conscience que Francis de Miomandre — en tête de volume — n’accèderait jamais à la notoriété d’un Giraudoux : peu importe, l’essentiel est qu’il ait eu l’intuition d’un découvreur de talents. […] Il définit enfin son livre: un examen de conscience, un moyen de détruire, avec le système d’avant-guerre, l’habitude de la méfiance et des accusations réciproques. […] Simon, c’est « la conscience » dans une classe, c’est « la tendresse » dans une amitié, dans un amour. Au lycée de Châteauroux, il doit décider tout ce que tranche une conscience : « S’il fallait reculer la composition, ouvrir une fenêtre, si Tibulle vraiment l’emporte sur Properce. » Une vie large, une âme sans bornes… Simon les doit, affirme-t-il aussitôt, à ses fragiles professeurs : « Je leur devais, en voyant un bossu, de penser à Thersite, une vieille ridée à Hécube ; je connaissais trop de héros pour qu’il y eût pour moi autre chose que des beautés ou des laideurs héroïques. […] Ses réactions contre l’académisme en littérature datent de ses débuts à Paris, quand il fréquentait vers 1900 le salon d’Édouard Rod, romancier suisse que la Revue des Deux Mondes accaparait alors, et qui traitait pour un certain public des sujets inoffensifs, sans jamais se permettre de l’éclat ou de la fantaisie, dût sa conscience littéraire en souffrir.

1251. (1930) Le roman français pp. 1-197

On ne voit même pas apparaître un personnage qu’on s’attendait bien pourtant à voir intervenir : le confesseur, le directeur de conscience. […] De tout cela, le romantisme qui venait sinon de naître   il était né avec Jean-Jacques, et, parvenu, avec Chateaubriand, à une magnifique adolescence, se proclamait littérairement révolutionnaire — avait la conscience très forte, quoique obscure. […] En conscience, je ne saurais être de cet avis : si La Débâcle de Zola est de la littérature, si nul n’en a douté quand ce roman fut publié, si du moins le procès à cet égard est encore en suspens de nos jours, Le Conscrit de 1813 en est aussi, car il est supérieur d’intérêt et de vérité à La Débâcle avec un « naturel » que n’a pas celui-ci. […] Mais il avait tort pourtant : dans le cas d’une guerre, on doit rester, quoiqu’il en coûte à sa conscience, de l’équipe, du team de son pays. […] Écrivain volontaire, intelligent, plus intelligent qu’artiste, l’homme était admirable de probité, de conscience littéraire.

1252. (1911) Nos directions

Rostand possèderait « des qualités indéniables de verve gaie, de grâce déjà apprêtée, de banalité heureuse », mais présenterait « un grave défaut aussi, le manque de conscience ». […] Il se développe amplement d’acte en acte, dans une continuelle pénétration des deux éléments dramatiques ; le cas particulier de Dom Marc, drame de conscience ; le sort du Cloître, drame de mœurs et de réactions psychologiques. […] Seul de tous ses contemporains, il aura abordé la scène sans parti pris de romantisme, avec la double conscience de la valeur de l’œuvre primitive et de sa valeur propre à lui, l’une devant compléter l’autre, et l’effort de ce novateur nous apparaît surtout classique. […] Du moins, regagnera-t-elle en conscience ce qu’elle aura perdu en aveuglement traditionnel. […] Cette comédie poétique révèle des qualités indéniables de verve gaie, de grâce déjà apprêtée, de banalité heureuse : un grave défaut aussi, le manque de conscience.

1253. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

On alloit lui en demander la raison, lorsqu’en soupirant, il laissa tomber ces mots : Peut-on, en sureté de conscience, être cordelier & porter cette sorte d’habit. […] Il crut, aussi bien que son épouse qui étoit dévote, que c’étoit conscience de ne pas mettre les nouveaux réformés à couvert de la persécution. […] Lanuza lui-même, dont on a si vivement sollicité la canonisation, étant provincial des dominicains, crut devoir, en conscience, présenter à Philippe II cette requête injurieuse aux jésuites, dans laquelle on s’exprime ainsi à leur sujet. […] Enfin, elles ne signèrent point, alléguant toujours leur conscience pour raison. La conscience étoit également l’excuse ordinaire de leurs ennemis.

1254. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

Cette raison grave, cette conscience parfaite, ne traçait autour d’elle aucun cercle factice pour s’y enfermer. […] Les lettres xii et xiii, d’une grande beauté philosophique, démontrent les principes de conscience et de raison sur lesquels elle fonde le devoir, et expliquent comment tout son soin est de faire apparaître et se dessiner par degrés la règle à la raison de l’enfant, pour qu’il y dirige librement de bonne heure, et dans les proportions de son existence, sa jeune volonté. — Faire régner de bonne heure autour de ces jeunes esprits une atmosphère morale, où ils se dirigent par le goût du bien, les faire gens de bien le plus tôt possible, c’est là son but, son effort, et, à moins de préjugés très-contraires, on lui accorde, en l’entendant, qu’elle a et qu’elle indique les vrais moyens de réussir.

/ 1833