Il l’avertit plus d’une fois combien il importe, en cas d’événement imprévu, qu’il soit au fait de toutes les choses qui concernent l’État, il ne cesse enfin de considérer en lui son héritier présomptif ; car un des caractères philosophiques de Frédéric, c’est de penser habituellement à la mort, mais d’y penser en homme-roi et en vue de pourvoir à la sûreté de l’État après lui. […] Dans tous les cas, il n’était nullement jaloux de Henri, quoi qu’en aient dit les partisans de ce prince. […] Il a besoin de toute sa rhétorique pour imprimer cette doctrine dans la tête du prince Henri, et, lui rappelant la fable des deux médecins Tant-pis et Tant-mieux : « J’ai, lui disait-il, un malade à traiter, qui a une fièvre violente : dans un cas désespéré, je lui ordonne de l’émétique, et vous voulez lui donner des anodins. » Les défauts du prince Henri, tempérés ou, pour mieux dire, stimulés pendant la guerre de Sept Ans par tant d’aiguillons, par ce qu’il avait de jeunesse et par l’impérieuse nécessité des conjonctures, apparaîtront plus à nu et se prononceront sans réserve lorsqu’il vieillira et durant la campagne de 1778. […] C’est ce qui, malgré mes autres chagrins, ne laisse pas de me faire un sensible plaisir, et ce qui était fort à désirer pour l’avantage de l’État, surtout pour celui des pauvres orphelins qui me sont confiés. » Il lui parle toujours alors comme à un tuteur naturel indiqué pour la chose publique et pour les siens, dans le cas où il disparaîtrait lui-même.
Le public a droit de se plaindre, dans ce cas, de l’application du droit de propriété littéraire ; et si ce droit s’étend, comme plusieurs personnes le désirent, le cas se reproduira souvent. […] Il a, dans tous les cas, de bien grandes et fortes paroles sur le silence dont là-bas on l’accueille, sur le sentiment de cette immobilité invincible, de ce peu de réponse et d’écho, de cette neutralité si prolongée qui était sans doute une sagesse relative, mais qui différait tant de la grande sagesse et de la haute politique d’autrefois : « Combien de temps Dieu permettra-t-il encore qu’on se taise là ? […] Dans le Constitutionnel, en effet, pour lequel ces articles ont été écrits, j’ai pu en bien des cas marquer le ton un peu plus que cela n’eût été convenable dans le Moniteur, journal officiel, où j’écrivais précédemment.
Je fais grâce de l’horrible et acharnée description, à laquelle il ne manque ni les songes et les hallucinations des affamés moribonds, ni aucun des symptômes pathologiques rigoureusement observés en pareil cas, ni, au moral, les hideuses révélations de tendresse qui se déclarent à l’heure suprême entre les Hercule et les Hylas de ces bandes dépravées : de fait, après une pareille extermination, complétée par l’irruption et le choc des éléphants numides, la guerre est finie ; on a le bouquet. […] Salammbô, en comparaison, n’est que bizarre, et si masquée, si affublée, si fardée, qu’on ne se la figure pas bien, même au physique ; et, au moral, si peu entraînée ou entraînante que, malgré la complicité naturelle au lecteur en pareil cas, on ne prend nul plaisir à lui voir faire ce qu’elle fait. En présence de ce roman ou de ce poème tout archéologique, c’est le cas ou jamais de le redire : l’art, nonobstant toute théorie, l’art dans sa pratique n’est pas une chose purement abstraite, indépendante de toute sympathie humaine : et je prends le mot de sympathie dans son acception la plus vaste. […] Il n’a pas conquis ni dompté l’Afrique, c’est le cas de Charles-Quint et de bien d’autres ; mais il ne sort pas, en somme, amoindri et diminué, de cette expédition ou de cette aventure.
On sait, en effet, que Talleyrand fut toujours très attentif à faire disparaître toute trace écrite de son intervention dans certains événements, bien sûr ensuite de pratiquer à l’aise la maxime : « Tout mauvais cas est niable. » Ainsi en 1814, dès qu’il se vit chef du gouvernement provisoire, il n’eut rien de plus pressé que de faire enlever des archives du cabinet de l’Empereur tout ce qui pouvait le compromettre. […] Dans tous les cas, il est terrible pour la moralité d’un homme qu’on ne puisse opposer de meilleure raison à son active intervention dans un cas de cette nature, que le peu d’intérêt qu’il y avait. […] Talleyrand, dans les deux cas, parla au général en avocat d’office et médiocrement convaincu.
On voudrait encore que l’auteur nous donnât sa parole d’honneur que le fait est vrai et que les caractères sont vrais, auquel cas on lirait ces livres comme des livres scientifiques rapportant des observations toutes nouvelles et tout étranges et plus intéressants que tous les autres en effet, car ce n’est point un cas classique de fièvre muqueuse qui intéressera un médecin ; mais la parole d’honneur du romancier n’est point de ces choses qui nous puissent mettre en pleine assurance. Le moyen le plus usité et le meilleur assurément qu’emploient les romanciers qui savent leur métier est d’entourer le cas exceptionnel d’un bon nombre de faits d’observation très courante au contraire et bien connus. A ce compte nous leur faisons confiance, parce que nous voyons qu’ils savent bien observer ce que nous observons nous-mêmes et nous les respectons comme bons observateurs et nous supposons qu’ils l’ont été aussi des cas exceptionnels qu’ils nous rapportent ; et ce cas exceptionnel bénéficie, en quelque sorte, de l’exactitude de tout ce qui l’entoure.
Et l’induction est apodictique, puisqu’elle est étendue à tous les cas possibles. […] Boussinesq admet qu’il existe des cas où l’état initial d’un système ne détermine pas entièrement la marche que doit prendre le phénomène. […] Il détermine la quantité et la direction du mouvement qui, dans chaque cas, doit être réalisé. […] On vit, dans la loi d’équivalence du travail et de la chaleur, un cas de la loi générale de transformation des forces naturelles. […] En ce cas, la science que l’on constituera sera aussi légitime que les autres.
Glaire en effet à cette simplicité bourgeoise, à ce phlegme incorruptible, qui mieux que la philosophie du grand monde le garantissait des illusions, qui lui faisait dire à Voltaire dont, à la lecture de Pellisson, les yeux se remplissaient de la splendeur de Louis XIV : « Mon cher, vous n’êtes qu’un enfant, qui aimez les babioles et rejetez l’essentiel ; vous faites plus de cas des pompons qui se font chez mesdemoiselles Duchappe que des étoffes de Lyon et des draps de Van-Robais. » ou bien encore qui lui faisait comparer un état épuisé qui donne des fêtes pour mettre l’argent en circulation à une vieille comtesse ruinée qui ouvre brelan et donne à souper avec l’argent des cartes ! […] Il pensait fermement que plus on lit plus on a d’esprit ; il lisait tout, même le Cyrus ; il y apprenait sinon les mœurs des Perses, du moins celles de l’hôtel de Rambouillet ; il faisait beaucoup de cas de Balzac et fort peu de Voiture ; il croyait qu’une science dont on connaît l’histoire est une science à peu près connue ; il se vantait d’avoir lu Don Quichotte plus de vingt fois en sa vie.