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431. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

François de Sales n’était encore que coadjuteur de l’évêque de Genève ; Henri IV ne négligea rien pour se l’attacher : « Il me fit des semonces d’arrêter en son royaume qui étaient capables de retenir, non un pauvre prêtre tel que j’étais, mais un bien grand prélat. » François de Sales fit alors, tant à Fontainebleau devant le roi que dans les principales chaires de Paris, des prédications nombreuses ; il fut choisi pour prononcer l’oraison funèbre du duc de Mercœur, qui mourut vers ce temps-là. […] La réponse de saint François de Sales est admirable de sagesse et de prudence : « Vous requérez de moi, répond-il à cette dame, une chose également difficile et inutile » ; et il montre en quoi la solution est difficile, non pas tant en soi et pour les esprits simples qui la cherchent par le chemin de la charité, mais parce qu’en cet âge qui abonde « en cervelles chaudes, aiguës et contentieuses », il est malaisé de dire une chose qui n’offense pas ceux qui, « faisant les bons valets soit du pape, soit des princes, ne veulent jamais qu’on s’arrête hors des extrémités ». […] Voilà la vraie grâce de l’écrivain chez saint François de Sales ; il n’y aurait, ce semble, qu’à arrêter sa plume à temps pour que ce fût parfait.

432. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Il erre, en tâtonnant, des roses de la Ciguë à l’éventail de l’Aventurière et s’arrête en route, pour polir les lunettes d’or des bourgeois arriérés de Gabrielle. […] Par instants, des spasmes convulsifs l’agitaient ; puis la respiration cessait, le pouls s’arrêtait, on eût cru que la vie s’était retirée de l’illustre agonisant. […] » Et Augier s’arrêtait pour éclater de son large rire gaulois.

433. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Cependant ils n’ont point de symbole arrêté ; ils n’ont encore que quelques idées vagues et incohérentes qu’ils s’efforcent de donner pour des opinions réduites en système, et quelques mots de ralliement qu’ils ne sont pas sûrs de comprendre, mais au moyen desquels ils se reconnaissent dans la foule. […] Qu’ils y arrivent, et il sera temps alors pour nous de les combattre, de leur démontrer que ces règles contre lesquelles on se mutine, sont pourtant les seules bases sur lesquelles puisse être assis le système dramatique d’un peuple éclairé, et qu’elles sont elles-mêmes fondées sur les résultats de l’expérience, lentement convertis en axiomes ; qu’elles ne sont pas, comme on a l’air de le croire, des lois imposées à l’imagination par le caprice d’un vieux philosophe grec du temps d’Alexandre, et que l’auteur de la Poétique n’a pas plus inventé les unités, que l’auteur de la Logique n’a créé les syllogismes ; que ces lois, établies pour les intérêts de tous, font seules du théâtre un art, et de cet art une source d’illusions ravissantes pour le spectateur et de succès glorieux pour le poète ; qu’elles ont le double avantage d’élever un obstacle contre lequel le génie lutte avec effort pour en triompher avec honneur, et une barrière qui arrête l’invasion toujours menaçante de la médiocrité aventureuse ; qu’on peut quelquefois essayer de reculer les limites de l’art, et quelquefois même, comme a dit Boileau, tenter de les franchir, mais qu’il ne faut jamais les renverser ; et qu’enfin, il en peut être de la littérature comme de la politique, où quelques concessions habilement faites à la nécessité des temps, préservent l’édifice de sa ruine, et le rajeunissent, tandis qu’une révolution complète, renversant tout ce qu’elle rencontre, bouleversant tout ce qu’elle ne détruit pas, plaçant le crime au-dessus de la vertu, et la sottise au-dessus du génie, engloutit dans un même gouffre la gloire du passé, le bonheur, du présent, et les espérances de l’avenir. […] Ils savent que, dans les arts, la partie la plus noble de nous-mêmes veut autre chose que l’imitation de ce qui tombe sous nos sens ; que, dans la poésie particulièrement, l’âme et l’imagination demandent, pour aliment de leur dévorante activité, ces sentiments profonds et en quelque sorte infinis, dont la religion et l’amour sont les deux principales sources ; et que l’esprit même ne saurait être entièrement captivé qu’à l’aide de cet art délicat, qui consiste à ne pas arrêter avec trop de fermeté les formes de certains objets, et à étendre sur quelques autres un voile qui les laisse entrevoir ou seulement soupçonner.

434. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

Il s’arrêtait plus loin ; ils le connaissaient tous, et il avait un mot pour chacun d’eux. […] Il faut bien que je m’arrête ; rien que pour le mois de septembre 1915 (affaires de Champagne), j’ai dans les mains cent cinquante-six dossiers individuels de prêtres et de religieux morts au champ d’honneur ; pour les batailles de 1916 à Verdun, deux cent six dossiers d’ecclésiastiques glorieusement morts ; et j’ai à ma disposition (au début de 1917) les textes officiels de trois mille sept cent cinquante-quatre citations de membres du clergé et des congrégations, parmi lesquels plusieurs ont jusqu’à six ou sept étoiles ou palmes. […] Le jeune Roland Engerand me raconte :‌ « Nous nous étions arrêtés un jour dans le village de Mareuil avant de relever le 20e corps dans les tranchées de Neuville-Saint-Vaast.

435. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Voici d’abord ce que vous appeliez son grimoire : « Il y a immédiation entre l’aperception immédiate de la force constitutrice du moi et ridée de la notion de mon être au titre de force absolue, par la raison que je pense et entends la réalité absolue de mon être de la même manière que j’aperçois ou sens immédiatement l’existence individuelle et actuelle du moi. » La phrase est rude : Force constitutrice du moi, idée de la notion de mon être au titre de force absolue, réalité absolue de mon être, immédiation entre l’aperception et l’idée ; ce sont là autant de broussailles qui arrêtent l’esprit tout court. […] Vous couriez à droite, à gauche, entre deux partis contraires ; vous voilà arrêté. […] La résolution est la tendance arrêtée, fixée, finale, prépondérante, définitive.

436. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

Une imagination, égale peut-être à celle d’Homère, s’arrête captive dans les lacets subtils de la dialectique argutieuse qu’avait tissée l’oisiveté d’Athènes. […] Le poëte saisit une grande image terrestre ; mais il n’a plus rien au-delà, et s’arrête au bord de l’infini, sans amour et sans espérance. […] Mais tu t’arrêtes, et le jour s’éloigne ; avance, nouvelle épouse.

437. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

D’ailleurs, que d’embarras qui vous arrêtent ; il semble que plus on est pressé, plus on trouve d’obstacles. […] Il n’y a point de prince, qui par des circonstances critiques, ne se trouve forcé de faire arrêter quelque coupable sur-le-champ. […] Combien de fois ne les a-t-on pas arrêté, en les menaçant…. […] Il avoit essayé son vol, & pour ne pas tomber, il fut s’arrêter…. […] Il ne faut que le moindre coup d’autorité pour l’arrêter ou pour l’effrayer….

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