Ils font à leur tour un siècle qui s’appellera de leurs noms. […] Ainsi s’est fait l’Esprit des lois, « l’enfant né sans mère », comme Montesquieu l’appelle lui-même, voulant dire qu’il n’avait eu ni guide ni devancier. […] Cette littérature lui découvre les ressorts de ces sociétés, explique et compare leurs constitutions, leurs lois, les causes de leur fragilité ou de leur durée, l’invite à se faire juge de toutes ces choses par sa raison, désormais appelée à faire partie d’une puissance nouvelle qui se nommera l’opinion publique. […] De plus, le voilà en possession d’une faculté nouvelle : il appelle les rois, les ministres, les gouvernements à son tribunal ; il ne pense plus guère qu’à juger, à décider, à charger tout le monde des devoirs dont il s’exempte. […] Montesquieu, homme bienfaisant, le bonhomme, comme on l’appelait, par un double hommage à sa bonté et à sa manière d’être bon, Montesquieu avait cette morale dans le cœur : il n’a pas pu, chose singulière, la faire passer de son cœur dans son esprit.
Le marquis, homme supérieur, mais orgueilleux, féodal, antique à la fois et au coup d’œil prophétique, d’une de ces races sans mélange dont l’heure finale avait sonné, éprouvait pour ce fils, qui penchait vers les courants du siècle, vers ce qu’il appelait la canaille philosophique, encyclopédique, plumière, écrivassière et littéraire, une sorte d’étonnement, d’admiration même, antipathique et répulsive, et qui, par moments, ressemblait fort à de l’effroi et à du dégoût. […] Voilà des injures, et, sous toutes les raisons de famille qui seraient inextricables à débrouiller, il entrait dans sa persécution contre son fils quelque chose de ce sentiment de haute précaution publique et sociale qui lui aurait fait enfermer et coffrer en leur temps, s’il en avait eu le pouvoir, ces mauvais sujets qui s’appelaient Retz ou César. […] Ces Dialogues, qui se passent tantôt entre lui et Sophie, tantôt entre Sophie et une amie (Mme de Saint-Belin), sont écrits avec pureté et fermeté, dans ce que j’appellerai le bon style de Rousseau, le style des lettres et des conversations de La Nouvelle Héloïse. […] L’ambition vous appelle et vous séduira… Objections éternelles, et que la raison d’une femme (pour peu qu’elle en ait) fait aisément à son cœur, mais que celui-ci toujours réfute ou étouffe non moins aisément ! […] Pendant neuf mois Mirabeau, caché à Amsterdam avec Sophie, mena une vie de labeur, une vie d’homme de lettres à la solde des libraires, et qu’il a appelée à la fois disetteuse et heureuse, la plus heureuse, disait-il, qu’il eût jamais connue.
Ce jeune homme s’appelait Georges-Maurice de Guérin du Cayla. […] Nous avons tous une beauté divine, la seule qu’on doive aimer, la seule qu’on doive conserver pure et fraîche pour Dieu qui nous aime. » Simple et profonde manière de se voir et de s’accepter qu’elle eut toute sa vie et qui aurait sauvé Mme de Staël, qu’on appelle une laide de génie, de ses tristesses sans grandeur ! […] Ceci terminé, elle écrivait jusqu’à cinq heures, si son père ne l’appelait pas auprès de lui. » (C’est probablement à cette heure que la fée de l’esprit, succédant à la fée des mains, elle traça cette foule de lettres et de pensées qui touchent à trop d’âmes et à trop de vies pour qu’on puisse les publier, et parmi lesquelles furent choisies scrupuleusement celles qui ne souffrent pas du demi-jour et qui n’en font souffrir personne.) […] Cette monotonie sublime dans les habitudes et les œuvres, qui dura trente ans de facultés vigoureuses et saines, et qui, avant la mort, ne s’interrompit qu’une seule fois, on pourra donc l’appeler, nous le savons bien, d’un nom qui la ravale. […] Androgyne de mère et de sœur, Mlle Eugénie de Guérin, les années venues, resta l’une et l’autre, comme à l’époque où, mignonne fillette, elle avait la charmante majesté maternelle des quelques années de plus que le frère qu’elle appelait son enfant.
J’appelle « simultanées » deux perceptions instantanées qui sont saisies dans un seul et même acte de l’esprit, l’attention pouvant ici encore en faire une ou deux, à volonté. […] Mais si notre science n’atteint ainsi que de l’espace, il est aisé de voir pourquoi la dimension d’espace qui est venue remplacer le temps s’appelle encore du temps. […] Même, ce que nous appelions l’écoulement du temps n’était que le glissement continu de l’écran et la vision graduellement obtenue de ce qui attendait, globalement, dans l’éternité. […] Mais une ligne ne devra s’appeler du temps que là où la juxtaposition qu’elle nous offre sera convertible en succession ; ou bien alors ce sera arbitrairement, conventionnellement, que vous laisserez à cette ligne le nom de temps : il faudra nous en avertir, pour ne pas nous exposer à une confusion grave. […] J’admets que le physicien trouve commode de les appeler encore du temps ; — on en verra tout à l’heure la raison.
Elle ne crée rien ; son rôle est au contraire d’éliminer de l’ensemble des images toutes celles sur lesquelles je n’aurais aucune prise, puis, de chacune des images retenues elles-mêmes, tout ce qui n’intéresse pas les besoins de l’image que j’appelle mon corps. Telle est du moins l’explication très simplifiée, la description schématique de ce que nous avons appelé la perception pure. […] Que toute réalité ait une parenté, une analogie, un rapport enfin avec la conscience, c’est ce que nous concédions à l’idéalisme par cela même que nous appelions les choses des « images ». […] Mais pour comprendre le mécanisme de ces associations et surtout la sélection en apparence capricieuse qu’elles opèrent entre les souvenirs, il faut se placer tour à tour sur ces deux plans extrêmes que nous avons appelés le plan de l’action et le plan du rêve. […] Ce qui est donné, ce qui est réel, c’est quelque chose d’intermédiaire entre l’étendue divisée et l’inétendu pur ; c’est ce que nous avons appelé l’extensif.
Jules Jouy, dont les succès ont commencé dans cette officine artistique qui s’appelle le petit théâtre de la rue Victor-Massé, et qui a produit les Caran d’Ache, Willette, Mac-Nab, Oscar Méténier et tant d’autres que le Chat-Noir revendique justement comme ses nourrissons. […] il est de leur race, car ces vieux s’appellent Désaugiers, Béranger, Charles Gille, Pierre Dupont, Darcier, et j’ajoute : Auguste Barbier.
Il ne peut voir dans ceci qu’une trame telle quelle qui ne demande pas mieux que de se dérober sous cette riche et éblouissante broderie qu’on appelle la musique. […] Le libretto de cet opéra avait deux auteurs : l’un s’appelait Poquelin de Molière, l’autre Pierre Corneille.