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291. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

Samuël, le roi du sacerdoce, s’en aperçoit et rejette Saül de son cœur ; ce prophète reçoit de l’inspiration l’ordre de sacrer secrètement un roi plus docile. […] « Lorsqu’elle aperçut David, dit le poème, elle descendit de son âne, s’inclina, agenouillée sur la pierre du chemin, et, adorant le jeune chef, elle lui dit : “Remettez à Nabal son iniquité et sa démence, et, s’il s’élève un jour un homme qui vous persécute et qui recherche votre vie, votre âme sera préservée parmi les âmes des vivants, et l’âme de vos ennemis sera agitée comme la pierre tournoyante lancée en l’air par la fronde ! […] Enfin il aggrave ses crimes par l’ingratitude et la perfidie la plus odieuse dans ses amours avec Bethsabée, qu’il aperçoit au bain, qu’il arrache de sa demeure, et dont il fait tuer le mari pendant que ce guerrier se dévoue pour lui sur le champ de bataille. […] « Et, pendant qu’elle articulait à voix basse ses prières qui se pressaient sur ses lèvres, le grand prêtre aperçut cette femme.

292. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Cependant peu à peu la curiosité de ces enfants s’éveilla : des rois, des princesses, des seigneurs, ayant reçu une instruction supérieure pour le temps, aperçurent l’intérêt de ces études cléricales : des clercs ne désespérèrent pas d’être utiles à leur prochain, ou à eux-mêmes, en communiquant quelque chose de la science que jusque-là la langue latine avait dérobée à la connaissance du vulgaire. […] Je crois que derrière les allégories scolastiques qu’il fait mouvoir, il aperçoit et s’efforce d’atteindre la réalité concrète de la vie. […] Le paupérisme, et l’inégalité des biens, la nature du pouvoir royal, l’origine de l’État et des pouvoirs publics, la justice, l’instinct, la nature du mal, l’origine de la société, de la propriété, du mariage, le conflit du clergé séculier et du clergé régulier, des mendiants et de l’Université, l’œuvre de création et de destruction incessantes de la nature, les rapports de la nature et de l’art, la notion de la liberté et son conflit avec le dogme et la prescience divine, l’origine du mal et du péché, l’homme dans la nature, et son désordre dans l’ordre universel, toutes sortes d’observations, de discussions, de démonstrations sur l’arc-en-ciel, les miroirs, les erreurs des sens, les visions, les hallucinations, la sorcellerie et jusque sur certain phénomène de dédoublement de la personnalité, voilà un sommaire aperçu des questions que traite Jean de Meung, outre tous les développements de morale et de satire qui tiennent plus directement à l’action du roman, etje ne sais combien de contes mythologiques extraits d’Ovide ou de Virgile, tels que les amours de Didon et l’histoire de Pygmalion. […] Jean de Meung n’aperçoit pas que sa pensée le met hors de l’Église, et en ruine les fondements.

293. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

XXII Je demande pardon au lecteur pour mille aperçus partiellement exagérés qu’il ne manquera pas de découvrir dans ce qui précède et je le supplie de juger ce livre, non par une page isolée, mais par l’esprit général. […] Le critique est celui qui prend toutes les affirmations et aperçoit la raison de toute chose. […] Au plus humble degré est le dogmatisme absolu des ignorants et des simples, qui affirment et croient par nature et n’ont pas aperçu les motifs de douter  Quand l’esprit, longtemps bercé dans cette foi naïve, commence à découvrir qu’il a pu être le jouet de sa croyance, il entre en suspicion et s’imagine que le plus sûr moyen pour ne pas être trompé, c’est de rejeter toute chose : premier scepticisme qui a aussi sa naïveté (sophistes, Montaigne, etc.)   […] Ce qu’il y a de sûr, c’est que les bergers et les mages l’apercevront encore les premiers, c’est que le germe est déjà posé et que, si nous savions voir le présent avec les yeux de l’avenir, nous démêlerions dans la complication de l’actuel la fibre imperceptible qui portera la vie à l’avenir.

294. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

On comprendra pourtant qu’on les ait pu faire, si on veut bien entrer dans les aperçus de style que nous indiquons. […] Et, en effet, Bussy avait été excellent, dans le principe, pour mettre sa jolie cousine en humeur et en veine de style épistolaire : il était l’homme qu’il lui fallait pour lui renvoyer le volant, comme on dit ; mais il ne s’apercevait pas, en avançant, qu’elle pouvait très bien se passer de lui, dire à d’autres les mêmes jolies choses, en répandre de tous côtés et en retrouver sans cesse, et qu’il n’était plus lui-même assez vif et assez alerte pour ne pas perdre au vis-à-vis devant cette grâce supérieure et naturelle. […] On ne tarde pas à s’apercevoir que c’est là son idée fixe de convaincre le monde qu’il n’est pas trop malheureux ; il sait le cas que le monde fait des malheureux ; il craint qu’on ne le plaigne ou qu’on ne sourit de lui là-bas en le nommant. […] Je fus huit jours fort content de ma cour, après lesquels je m’aperçus que le roi évitait de me regarder ; lorsque j’eus fait encore deux mois durant de pareilles observations, je voulus éprouver si je ne m’éclaircirais pas davantage en parlant à Sa Majesté.

295. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Il semble n’avoir aperçu dans l’égalité qu’une augmentation de bien-être parmi les hommes, et presque toujours il réduit la démocratie au développement du bien-être. […] Si de la question de principe nous passons à la question de fait, nous trouverons que Tocqueville n’a peut-être pas aperçu complètement ni tous les périls ni tous les avantages de la démocratie. […] Il aperçoit bien quelques écoles utopiques qui rêvent l’égalité des biens ; mais il ne voit là que le rêve de quelques individus, et non un fait social de quelque importance. […] Si l’on cherche maintenant à quelle conclusion la méthode précédente a conduit M. de Tocqueville, on verra qu’en dehors des vues particulières, qui sont très-nombreuses dans ses écrits, il a mis en pleine lumière cette loi aperçue par quelques auteurs, mais que nul n’avait encore développée comme lui.

296. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Il n’en voit plus les joies ; il en aperçoit mieux les peines et les inégalités, qu’il exagère ou qu’il ne supporte plus. […] J’en aperçois deux raisons. […] Madeleine regarde ses cheveux, etc. » Il n’en demeure pas moins certain qu’il y a des fragments de chefs-d’œuvre dans cette œuvre inégale, et que ces fragments peuvent être compris de tous, et qu’ils sont d’une beauté que tout esprit humain peut apercevoir. […] Tout au plus seront-ils, en face des clartés et des harmonies de la phrase, comme ces marins et ces paysans, incapables de raisonner de la beauté de la campagne ou de la mer, mais qui l’aperçoivent obscurément, et l’aiment jusqu’à ne pouvoir s’en passer.

297. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Il a raconté, dans des pages publiées après sa mort, et qui n’ont été que légèrement affaiblies par l’éditeur, la crise morale qu’il subit à l’âge de vingt ans, le moment plein d’effroi, où lui, élevé dans ses montagnes et dans la foi des patriarches, il s’aperçut tout d’un coup qu’il ne croyait plus : Je n’oublierai jamais, écrivait-il, la soirée de décembre où le voile qui me dérobait à moi-même ma propre incrédulité fut déchiré. […] Les heures de la nuit s’écoulaient et je ne m’en apercevais pas ; je suivais avec anxiété ma pensée, qui de couche en couche descendait vers le fond de ma conscience, et dissipant l’une après l’autre toutes les illusions qui m’en avaient jusque-là dérobé la vue, m’en rendait de moment en moment les détours plus visibles. […] C’est alors qu’on apercevrait, j’imagine, combien les mailles du filet, toutes bien faites qu’elles sont, se trouvent trop larges et laissent souvent passer le poisson.

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