Pendant de longues années, la sombre imagination anglaise, saisie de terreurs religieuses, avait désolé la vie humaine. […] Ils ne s’inquiétaient guère des vraisemblances ; on pouvait les promener en un instant sur des forêts et des océans, d’un ciel à l’autre, à travers vingt années, parmi dix batailles et tout le pêle-mêle des aventures. […] Donnez-lui une peinture exacte de la vie ordinaire, des événements plats et probables, l’imitation littérale de ce qu’il fait, et de ce qu’il est ; mettez la scène à Londres, dans l’année courante ; copiez ses gros mots, ses railleries brutales, ses entretiens avec les marchandes d’oranges, ses rendez-vous au parc, ses essais de dissertation française. […] Il mêle les anecdotes aux conseils techniques ; il y en a une sur le roi Charles II, qui a loué le climat de l’Angleterre par-dessus tous les autres, disant que c’est celui où l’on peut rester en plein air sans malaise le plus de jours dans l’année ; sur l’évêque de Munster, qui, ne pouvant avoir dans son verger que des cerises, en avait rassemblé toutes les espèces et si bien perfectionné les plants qu’il pouvait en manger depuis mai jusqu’en septembre. […] VI Quatre écrivains principaux établissent cette comédie ; Wycherley, Congrève, Vanbrugh, Farquhar628, le premier grossier et dans la première irruption du vice, les autres plus rassis, ayant le goût de l’urbanité plutôt que du libertinage, tous du reste hommes du monde et se piquant de savoir vivre, de passer leur temps à la cour ou dans les belles compagnies, d’avoir les goûts et la carrière des gentilshommes. « Je ne suis pas un écrivain, disait Congreve à Voltaire, je suis un gentleman. » En effet, dit Pope, « il vécut plus comme un homme de qualité que comme un homme de lettres, fut célèbre pour ses bonnes fortunes, et passa ses dernières années dans la maison de la duchesse de Marlborough. » J’ai dit que Wycherley, sous Charles II, était un des courtisans les plus à la mode.
« Ainsi il vécut auprès des chefs, — telle est la vérité, — dans le pays de Gunther une année tout entière, sans avoir vu la femme si digne d’amour, par qui lui vint ensuite beaucoup de bonheur et beaucoup d’affliction. […] Trois années se passent dans cette douleur, puis elle se venge […] « La cour et le pays vivaient si honorablement, qu’en tout temps on y trouvait des divertissements suivant le goût et l’humeur de chacun, par l’effet de la générosité du roi et de la bonté de la reine. » XVIII « Ils vécurent ensemble avec grand honneur jusqu’à la septième année.
Ses quelques dernières années, libérées de l’enseignement, furent paisibles, reposées, peut-être un peu mélancoliques. […] Dans ce propos nature, on reconnaît le délicieux mépris d’un petit garçon de dix ans pour les chiffons du sexe que deux ou trois années encore il estimera inférieur5. […] « Dans l’année, ma saison favorite ce sont les derniers jours alanguis de l’été, qui précèdent immédiatement l’automne, et, dans la journée, l’heure où je me promène est quand le soleil se repose avant de s’évanouir, avec des rayons de cuivre jaune sur les murs gris et de cuivre rouge sur les carreaux22. » L’Azur nous révèle peut-être sincèrement sa fatigue maladive du « vénéneux printemps23 ». […] Le poète lyrique ne dit pas que l’année à peine à fini sa carrière. […] Je lis cela à la lumière d’une leçon que j’entendais, il y a quelques années, de M.
Cette forme régnante de pensée s’impose à tous les écrivains, depuis Waller jusqu’à Johnson, depuis Hobbes et Temple jusqu’à Robertson et Hume ; il y a un art auquel ils aspirent tous ; le travail de cent cinquante années, pratique et théorie, inventions et imitations, exemples et critique, s’emploie à l’atteindre. […] Walsh déclarait que « ce n’était point flatterie de dire qu’à cet âge Virgile n’avait rien fait d’aussi bon. » Quand plus tard elles parurent en volume1102, le public fut ébloui. « Vous avez déplu aux critiques, écrivait Wycherley, en leur plaisant trop bien. » La même année, le poëte de vingt et un ans achevait son Essay on Criticism, sorte d’art poétique ; c’est le poëme qu’on fait à la fin de sa carrière, quand on a manié tous les procédés et qu’on a blanchi dans la critique ; et dans ce sujet qui réclame, pour être traité, l’expérience de toute une vie littéraire, il se trouvait d’emblée aussi mûr que Boileau.
Escorté par des hommes portant des torches, Napoléon parcourut le front des troupes, parla aux officiers et aux soldats, leur expliqua la position des deux armées, leur démontra que les Prussiens étaient aussi compromis que les Autrichiens l’année précédente ; que, vaincus dans cette journée, ils seraient coupés de l’Elbe et de l’Oder, séparés des Russes, et réduits à livrer aux Français la monarchie prussienne tout entière ; que, dans une telle situation, le corps français qui se laisserait battre ferait échouer les plus vastes desseins et se déshonorerait à jamais. […] Ce même homme, deux années auparavant revenu d’Autriche, ayant réfléchi un instant à la leçon d’Essling, avait songé à rendre la paix au monde et à son empire, à donner à son trône la stabilité de l’hérédité, à son caractère l’apparence des goûts de famille, et dans cette pensée avait contracté un mariage avec l’Autriche, la cour la plus vieille, la plus constante dans ses desseins.
Il importe assez peu, en définitive, que nous vivions quelques années de plus ou de moins, avec un peu plus ou un peu moins de plaisir ou de souffrance ; ce qui importe, c’est d’accomplir notre destinée, c’est d’aimer et de penser, c’est de rendre un grand témoignage de notre humanité. […] Paris a cru prendre la succession romaine et ç’a été le rêve de quelques années.
Voyez ces outrages, et combien je devrai gémir durant des années innombrables ! […] Quand Perséphone sortait ; chaque année, du Tartare, après six mois de claustration souterraine, c’était Hermès qui la ramenait à sa mère, dans la moisson renaissante.