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244. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Malgré les difficultés, que nous connaissons trop bien, de juger du fond en des matières si complexes et d’oser apprécier la forme en des hommes si honorés de nous, cette fois nous nous sentons presque à l’aise vraiment ; nous avons affaire à une destinée droite et simple qui, en se développant de plus en plus et en élargissant ses voies, n’a cessé d’offrir la fidélité et la constance dans la vocation, la fixité dans le but ; il est peu d’exemples d’une pareille unité en notre temps et d’une rectitude si féconde. […] Ils étaient très-convaincus à l’avance de l’impossibilité radicale qu’il y aurait pour les Bourbons à accepter les conditions du gouvernement représentatif, du moment que ces conditions s’offriraient à eux dans toute leur rigueur, c’est-à-dire le jour où une majorité parlementaire véritable voudrait former un cabinet et porter une pensée dirigeante aux affaires. […] Tous ceux qui, sans mettre le doigt aux affaires du monde, aiment à tout en comprendre, doivent savoir un gré infini à M.Mignet. […] Politique avisé autant qu’homme aimable, plein d’expédients et de ressources, fertile, infatigable, possédant à fond les affaires et les portant avec légèreté et grâce, les égayant presque toujours dans le ton, il était le chef de cette école de diplomates dont Chaulieu avait connu de brillants élèves, et dont il a fait un groupe à part dans son Élysée : Dans un bois d’orangers qu’arrose un clair ruisseau Je revois Seignelai, je retrouve Béthune, Esprits supérieurs en qui la volupté Ne déroba jamais rien à l’habileté, Dignes de plus de vie et de plus de fortune ! […] Sa perte fut préparée avec une lenteur calculée par Philippe II, « qui traînait en longueur ses disgrâces comme toutes les autres choses. » Le caractère de ce sombre monarque, son indécision tortueuse, compliquée des rancunes mortelles de son humeur et comme des intermittences de sa bile, ne se révèle nulle part plus profondément que dans cette lugubre affaire et dans les suites opiniâtres qu’il y donna.

245. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

Je vous aimois, vous m’aimiez fort ; Cela n’est plus, sortons d’affaire. […] Des Houlières, qui reprit du service et vécut fort peu à ses côtés, elle ne put jamais relever ses affaires de fortune, dérangées par une longue absence, et sa vie se passa dans des gênes continuelles, que l’agrément de la société ne recouvrait qu’à demi. […] Elle fut très-sensible à l’amitié ; on la trouve entourée de mille noms alors en vogue, dont quelques-uns ont pâli sans doute ; mais, pour la douceur de la vie, il n’est pas nécessaire d’avoir affaire aux seuls immortels. […] Il eut fort souvent affaire aux coquettes et s’en vengea : on vient de voir ce qu’il dit à l’une ; voici pour une autre Le changement vous est si doux, Que, quand on est bien avec vous, On n’ose s’en donner la gloire. […] Vous pouvez y mettre ordre, et nos intérêts sont si fort mêlés qu’on ne peut me faire une affaire, sans détruire celle qui vous donne tant d’impatience, et qui se terminera bientôt.

246. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

Les Considérations, sans nous enseigner le contraire, nous cachent souvent nos torts ou diminuent notre part de devoirs dans les fortunes de notre patrie : elles nous disposent à juger, du haut de notre innocence, ceux qui portent le fardeau des affaires publiques. […] J’en vois une preuve entre autres dans ce jugement sur les Pères de l’Église, auxquels il reproche d’avoir censuré les lois d’Auguste sur les mariages, « sans doute, dit-il, avec un zèle louable pour les choses de l’autre vie, mais avec trop peu de connaissance des affaires de celle-ci87. » Sans parler de la science de l’homme, qui est la plus grande partie de la science des affaires, est-il donc vrai que les Pères, si profonds dans la première, aient été si inexpérimentés dans la seconde ? Quels hommes furent plus mêlés aux affaires de leur temps ? […] Que n’a pas su saint Augustin des affaires de cette vie ?

247. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

Elle lui apprend que la chevalerie n’a qu’un défaut, comme la cavale de Roland, celui d’être morte, et elle l’exhorte à se lancer dans la bataille des affaires, à la conquête des millions. […] Le petit Roblot, un apprenti boursier, né pour les affaires, comme un lévrier pour la chasse, rôde dans le salon, à la recherche d’une commandite : Jean lui confie sa nouvelle fortune et se fait, d’emblée, l’associé de cet aigrefin. […] Ses toilettes et ses équipages font un dégât affreux dans les affaires de son mari. […] Bernard résiste, il se défend : on ne fait pas du sentiment en affaires. […] Les huit cent mille francs de madame Fourchambault ne lui ont rapporté que la tyrannie d’une union sans intimité, les aigreurs et les avanies d’un caractère acariâtre, des enfants dévoyés par une éducation insouciante, la ruine de ses affaires et de son crédit : elle a été la plaie et le désordre dans son intérieur.

248. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Son véritable talent, qui est, à mon avis, le plus estimable à la guerre, était de rétablir une affaire en méchant état. […] Pour commenter en quelque sorte, et démontrer cette supériorité distinctive du talent de Turenne, qui consistait à tirer bon parti d’une affaire déjà compromise, et à la rétablir à force d’habileté de détail, de ténacité et de prudence, Bussy, dans ses Mémoires, se plaît à exposer en ce sens les opérations de la campagne de Flandre de 1656, pendant laquelle Turenne fit preuve de toutes ces qualités combinées qui caractérisent sa première manière militaire. Bussy tient à honneur de nous faire entrer dans l’esprit de cette campagne, l’une des plus glorieuses pour Turenne, quoiqu’il y en ait eu de bien plus brillantes : Il ne tiendrait qu’à moi de ne rien dire de cette action, écrit-il au sujet d’une des affaires de cette campagne ; et peut-être que les flatteurs du maréchal ne l’ont pas sue ou n’ont pas été assez habiles pour la remarquer ; mais ni l’amitié ni la haine ne me feront jamais manquer à ce que je dois à la vérité.  […] En l’année 1648, Bussy s’était lancé dans une singulière affaire, et qui n’avait pas peu contribué à sa réputation d’aventurier et d’audacieux en amour comme en toute chose. […] En 1673, le roi lui permit de venir passer quelque temps à Paris pour ses affaires.

249. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « André Chénier, homme politique. » pp. 144-169

Ce n’est pas qu’il ne l’eût jugé au moral et littérairement : Pour moi, dit-il, ouvrant les yeux autour de moi au sortir de l’enfance, je vis que l’argent et l’intrigue sont presque la seule voie pour aller à tout ; je résolus donc dès lors, sans examiner si les circonstances me le permettaient, de vivre toujours loin de toute affaire, avec mes amis, dans la retraite et dans la plus entière liberté. […] Et se retournant contre le maire Pétion qui, dans une lettre à ses concitoyens, avait répondu avec une « astuce niaise et une bénignité captieuse » que cette fête, si on n’y avait vu que ce qui était, n’avait qu’un caractère privé, « innocent et fraternel », et que l’esprit public s’élève et se fortifie au milieu des « amusements civiques », André Chénier l’enferme dans ce dilemme : « Dans un pays qui est témoin d’une telle fête, de deux choses l’une : ou c’est l’autorité qui la donne, ou il n’y a point d’autorité dans ce pays-là. » Le même sentiment militaire d’André Chénier, déjà si noblement irrité dans l’affaire des Suisses, s’anime de nouveau et éclate par les plus beaux accents, à l’occasion de l’assassinat du général Dillon, massacré après un échec par ses propres soldats près de Lille, en avril 1792. […] Une lettre de lui, écrite à la date du 28 octobre 1792, nous le montre désormais « bien déterminé à se tenir toujours à l’écart, ne prenant aucune part active aux affaires publiques, et s’attachant plus que jamais, dans la retraite, à une étude approfondie des lettres et des langues antiques. » Sa santé s’était altérée ; il allait de temps en temps passer à Versailles des semaines vouées à la méditation, à la rêverie, à la poésie. […] Voilà en quelles mains ce charmant génie (comme toute la France) était tombé, voilà à quels hommes il eut affaire. […]   A lui demandé commant il sapelloit A répondu quil senomoit André Chenier natife de Constentinoble âgé de trente et un ans demeurant à Paris rue de Clairy section de Brutus A lui demandé de quelle ané il demeuroit rue de Clairy A lui répondue depuis environ mil sept cent quatre vingt douze au moins A lui demandé quel son ses moyent de subsisté A lui répondu que de puis quatre vingt dix quil vie que de que lui fait son père12 A lui demandé combien que lui faisoit son père A répondu que son père lui endonnoit lorsquil luy endemandoit A lui demandé s’il peut nous dire a combien la somme quil demande à son pere par an se monte A repondu quil ne savoit pas positivement mais environ huit cent livre à mille livre par année A lui demandé sil na auttre chose que la somme quil nous déclare cy-dessus A repondu qu’il na pas d’auttre moyent que ce quil nous a déclarée A lui demande quelle manierre il prend son existance A repondu tenteau chez son père tenteau chez ses amis et tentot chez des resteaurateurs A lui demandé quel sont ses amis ou il va mangé ordinairement A répondu que cetoit chez plusieurs amis dont il ne croit pas nécessaire de dire lenom A lui demandé s’il vien mangé souvent dans la maison ou nous lavons aretté A repondu quil ne croyoit n’avoir jamais mangé dans cette maison ou il est aresté, mais il dit avoir mangé quelque foy avec les mêmes personnes apparis chez eux A lui demandé sil na pas de correpondance avec les ennemis de la République et la vons sommé de nous dire la vérité A repondu au cune A lui demandé sil na pas reçue des lettre danglaitaire depuis son retoure dans la République A repondu quil en a recue une ou deux ducitoyent Barthelemy àlorse ministre plénipotensiêre en Anglaitaire et nen avoir pas reçue dauttre A lui demandé à quelle épocque il a recue les lettre désigniés sy dessus sommé a lui denous les representés A répondue quil ne les avoit pas A lui demandé ce quil en àfait et le motife quil lat engagé à sendeffaire A repondu que ce netoit que des lettre relative à ses interrest particulier, comme pour faire venire ses livres et auttre effest laissé en Anglaitaire et du genre de celle que personne ne conserve A lui demandé quel sorte de genre que personne ne conserve et surtout des lettre portant son interest personnelle13 sommé de nous dire la vérité A répondu il me semble que des lettre qui énonce l’arrivé des effest désigniés cy-dessus lorsque ses effest son reçue ne son plus daucune valeure A lui representé quil nest pas juste dans faire réponse, dautant plus que des lettre personnelle doive se conserver pour la justification de celui qui à En voyé les effet comme pour celui qui les à reçue A repond quil persite à pensé quand des particulier qui ne mettre pas tant dexactitude que des maison de commerce lorsque la reception des fait demandé est accusé toute la correspondance devient inutisle et quil croit que la plus part des particuliers en use insy A lui représenté que nous ne fond pas des demande de commerce sommé à lui de nous répondre sur les motifes de de son arestation qui ne sont pas affaire de commerce14 A repondu quil en ignorest du faite A lui demandé pourquoy il nous cherche des frase et surquoy il nous repond cathegoriquement15 A dit avoir repondue avec toute la simplicité possible et que ses reponse contiene lexatte veritté A lui demandé sil y à longtemps quil conoit les citoyent ou nous l’avons aresté sommé a lui de nous dire depuis quel temps A repondu quil les connaissoit depuis quatre ou cinqt ans A lui demandé comment il les avoit conu A repondu quil croit les avoir connu pour la premiere fois chez la citoyene Trudenne A lui demandé quel rue elle demeuroit alors A repondu sur la place de la Revolution la maison à Cottée A lui demandé comment il connoit la maison à Cottée16 et les-citoyent quil demeuroit alors A repondu quil est leure amie de l’anfance A lui represanté quil nest pas juste dans sa reponse attendue que place de la Revolution il ny a pas de maison qui se nome la maison à Cottée donc il vien de nous déclarés A repondue quil entandoit la maison voisine du citoyent Letems A lui représentes quil nous fait des frase attandue quil nous a repettes deux fois la maison à Cottée A repondue quil a dit la vérité A lui demandée sil est seul dans lappartement quil occuppe dans la rue de Clairy nº quatre vingt dix sept A repondue quil demeuroit avec son père et sa mère et son frère ainée A lui demandée sil na personne pour le service Il y à un domestique commun pour les quatre qui les sere A lui demandée ou il étoit a lepoque du dix aoust mil sept cent quatre vingt douze A répondue a paris malade d’une colique nefretique A lui demandee sy cette colique le tient continuellement et sil elle tenoit le jour du dix aoust quatre vingt douze A répondue quil se rétablissoit a lors d’une attaque et que cette maladie le tiend presque continuellement depuis lage de vingt ans plus ou moins fortes A lui demandés quelles est cette malady et quelle est le chirurgient quil le traitoit alors et sy cest le même qui letraitte en core A repondu le médecin Joffroy latraitté au commancement de cette maladie et depuis ce temps jai suis un régime connue pour ses sorte de meaux A lui demandée quelle difference il fait d’une attaque de meaux ou de maladies.

250. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VI. Autres preuves tirées de la manière dont chaque forme de la société se combine avec la précédente. — Réfutation de Bodin » pp. 334-341

. — Voici la formule éternelle dans laquelle l’a conçue la nature : lorsque les citoyens des démocraties ne considèrent plus que leurs intérêts particuliers, et que, pour atteindre ce but, ils tournent les forces nationales à la ruine de leur patrie, alors il s’élève un seul homme, comme Auguste chez les Romains, qui se rendant maître par la force des armes, prend pour lui tous les soins publics, et ne laisse aux sujets que le soin de leurs affaires particulières. […] à des solitaires, qui, tels que le Polyphème d’Homère, se tenaient dans leurs cavernes avec leur famille, sans se mêler des affaires d’autrui ?

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