il est plus merveilleux encore que l’action et les caractères ! […] N’était-ce pas, avant tout et surtout, un homme d’action bien plus que de parole ? […] En essayant de réunir dans un même roman les trois actions que je viens d’indiquer, M. […] L’élégie, l’hymne et le verset répugnent également à l’action. […] Mais l’analyse sans l’action n’est pas moins impuissante que l’action sans l’analyse.
Au contraire, il en est un des plus beaux ornements, s’il se mêle à l’action sans l’interrompre, et s’il s’y incorpore comme un des membres animés de la fable. […] Une quantité de circonstances et d’actions particulières influe sur le résultat général, et souvent le prépare et le produit. […] Boileau ne permet point que, par de stériles ornements d’élocution, on ralentisse l’action commencée. […] Est-ce une action vive et soudaine que veut peindre Boileau dans le lutrin ? […] À quoi bon, d’ailleurs, un long adverbe qui retarde une action rapide, et ce verbe, tourner, qui ne marque pas assez la promptitude ?
Dans la première partie sont de curieuses citations, notamment celle-ci de Herder : « Si le musicien ordinaire qui met orgueilleusement la Poésie au service de son art, descendait de ses hauteurs, il s’appliquerait, autant du moins que le permet le goût de la nation pour laquelle il compose, à traduire dans sa musique les sentiments des personnages, l’action du drame et le sens des mots. Mais il se borne à imiter ses prédécesseurs en les surpassant selon ses moyens ; et bientôt un autre le laissera loin derrière lui en renversant toute la boutique des opéras à clinquant et en elevant un monument lyrique dans lequel la Poésie, la Musique, l’action et les decors seront combinés en vue d’un effet commun. » Mais c’est avec Hegel que sont les rapprochements les plus nombreux et les plus importants. […] De même encore, Hegel et Wagner sont tous deux extrêmement préoccupés de l’action de l’art dramatique sur le public : le premier, dans le parallèle qu’il établit entre la poésie dramatique chez les anciens et chez les modernes, a marqué, dans le drame ancien « le caractère général éleve du but que poursuivent les personnages » en opposition avec la passion personnelle qui « fait l’objet principal » du drame moderne ; ailleurs, il assigne à l’art, une mission nationale. […] L’obscurité profonde où se trouve le spectateur, l’invisibilité complète de l’orchestre dont l’action musicale possède une si grande précision tant par l’exactitude de l’expression que par la puissance des combinaisons sonores, semblent destinées, par le prodigieux tact physiologique de ce tout puissant artiste, à « désorienter » dans le sens scientifique de ce mot, le spectateur et l’auditeur. […] Ce résidu musical du déterminisme dramatique qu’est l’orchestre wagnérien, cette force physiologique qui associe si profondément notre organisme sensitif au devenir de l’action vivante, nous ignorons d’où elle sort, nos sens sont en désarroi, car cette musique semble ne plus avoir d’existence objective, elle nous semble aussi bien être le propre mouvement de notre pensée qu’un enchaînement orchestral : aucun point d’appui qui nous permette de le décider.
Tout, au contraire, est varié dans l'Iliade, tout y respire, tout y est en action. […] Quel que soit le nom qui lui convienne, le Lutrin lui est, sans contredit, très-supérieur, du côté de l'invention, & l'emporteroit à tous égards, si les Personnages qui y figurent étoient plus nobles, & l'action plus importante. […] Tous les caracteres, toutes les actions, toutes les conjectures, toutes les réflexions, ne tendent qu’à favoriser ce principe. […] D’ailleurs, est-ce d’un ton d’aisance qui annonce plus l’oubli des égards que la supériorité du génie, est-ce par chapitres, que les grands Historiens nous ont transmis les Annales des Nations ou les actions des Princes ? […] Il est sans doute permis aux Poëtes de personnifier les Passions & même les Êtres abstraits ; mais pour conserver la vraisemblance & l'illusion, ils doivent leur donner un corps visible & naturel, dès qu'ils s'en servent comme d'agens destinés à influer essentiellement sur l'action.
Si grande que soit la difficulté, il faut l’affronter. — Considérant la littérature comme une expression de la vie, nous allons distinguer par elle, par son mode de réalisation, quelques éléments essentiels de la vie, quelques forces dont l’action se combine en d’infinies variations. […] Il y a une action combinée. […] L’action réciproque de contiguïté et d’affinité, dont je parlais plus haut, est parfaitement évidente. — La réalisation de ce double principe amène la réaction, et la deuxième ère. […] En participant ainsi, d’une façon quelconque, à l’action du principe, l’individu agit lui-même sur l’évolution ; grâce à un élément psychologique qui lui est particulier, et dont je parlerai bientôt, l’homme devient une cause après avoir été un effet. […] Il s’impose à l’humanité dans son ensemble comme une direction générale ; il s’impose encore, de façon variable, aux individus ; mais son action recule peu à peu devant les progrès de la conscience ; sa logique même le fait aboutir à la liberté.
Son public, ses amitiés, ses actions, ses luttes aboutissent au même effet. […] D’ailleurs l’action est chez eux toute barbare. […] Pareillement leurs intrigues sont trop maigres, trop réduites à une action unique et privées de l’accompagnement des petites actions secondaires. […] Ainsi, pervers de volonté, impuissant d’action, — il suivait les factions, qui ne le suivaient pas770. […] La flamme qui d’une seule illumination les révélait s’est éteinte ; il remarque des qualités, il note des points de vue, il classe des groupes d’actions, il juge et il raisonne.
Et ce ne fut pas tout : après Mallet-Dupan, longtemps après Mallet-Dupan, tué par le royalisme et qui n’était, après tout, qu’un écrivain resté sur les hauteurs de la pensée, le royalisme tua, mais sur le terrain de l’action, des hommes de gouvernement comme le duc de Richelieu, de Serres, Villèle et Martignac, ministres parlementaires, renversés par d’indignes coalitions de Parlement, qui en même temps, du coup, tuèrent la monarchie que ces ministres essayaient de fonder. […] C’est qu’il croit à l’action de cette réunion, comme il doit croire à l’action politique de tout groupe parlementaire. […] Ils n’auront pas à le ramasser… Nous lui devrons, pour dédommagement des malheurs et des hontes dont il n’a pas su nous préserver, sinon de nous faire rentrer, par le clair spectacle de son impuissance, dans notre tradition historique, — car l’Histoire a de ces interruptions qui, comme les arcades rompues du Colysée, doivent rester béantes pour l’éternité, — au moins de nous replacer dans notre tempérament, dans notre vérité de peuple sentant et pensant… Le gouvernement du bavardage éternel, du sophisme, de la subtilité, de la chicane, de l’intrigaillerie de couloir, nous aura réappris le gouvernement de l’action, rapide et droite, qui fut notre génie !