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433. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

Je ne dormis pas non plus, mais je priai pendant la nuit tout entière pour que mon bon ange et ma patronne intercédassent auprès de Dieu, et pour que le jour suivant me fît sa sposa, et pour qu’ils me donnassent le surlendemain, jour fixé pour sa mort, la force et l’adresse de mourir pour lui. […] Je remontai doucement dans ma tourelle, et je tombai à genoux, au pied de mon lit, pour remercier Dieu de la plus grande de ses grâces de vivre un jour la sposa d’Hyeronimo et de mourir le second jour pour lui avec la confiance de lui préparer son lit nuptial dans le paradis. […] Dieu me préserve de m’en souvenir seulement ! […] Que Dieu le leur rende à leur dernier jour, ils ont bien prié, et pour moi sans le savoir ! […] En passant sur la grande place, devant la façade du palais du duc, voisin des remparts où j’allais mourir, je vis une femme, une belle femme, qui tenait un mouchoir sur ses yeux, agenouillée sur son balcon, et qui rentra précipitamment dans l’ombre de son palais, comme pour ne pas voir le meurtrier pour lequel elle priait Dieu.

434. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

tonnerre de Dieu ! […] Je suis charmé que le naturalisme soit venu : il a fait une besogne utile et peut-être nécessaire ; mais quelle horreur et quel ennui, Dieu juste ! […] Je sais bien que, grâce à Dieu, sa puissante imagination vivifie ses vieilles notes et ses souvenirs défraîchis et qu’il invente terriblement ! […] … Mais tu vas te faire assommer. » — « Nom de Dieu… ! […] Eût-il été d’un bon exemple que Dieu permît à l’auteur de Pot-Bouille et de Nana de raconter innocemment une histoire innocente ?

435. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

Je ne sais que trop votre inclination à la retraite, et plût à Dieu que vous voulussiez vous séquestrer un peu moins du commerce des hommes ! […] Il vaudrait mieux ne songer qu’à la guerre, à vaincre les ennemis, et penser qu’en le faisant, on suit la volonté de Dieu. […] Le roi et la reine d’Espagne, auxquels elle s’est donnée, ont des sentiments élevés, « aussi élevés que le rang où Dieu les a mis ; ils sont incapables de faire des bassesses. […] Mme de Maintenon aspirait à en sortir comme une femme et comme beaucoup trop d’hommes alors, comme une femme de sens qui voit de près le mal, qui en souffre en elle et pour ceux auxquels elle est attachée, qui n’a rien d’une héroïne, qui est toute résignée et chrétienne, qui voit la main de Dieu non seulement dans les revers redoublés et les défaites, mais encore plus directement dans les fléaux naturels, dans les hivers tels que celui de 1709 (dont on n’avait point eu d’exemples depuis plus d’un siècle), et dans la famine qui s’ensuivit. […] Je conviendrai facilement avec vous qu’il ne faut chercher la stabilité qu’en Dieu.

436. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Grand Dieu ! […] Cet Être Suprême est Dieu. […] C’est là que les époux s’unissent, c’est là que les chrétiens se prosternent au pied des autels : le faible pour prier le Dieu de force, le coupable pour implorer le Dieu de miséricorde, l’innocent pour chanter le Dieu de bonté. […] S’il doit souffrir encore, ô Dieu ! […] Ne manquez à aucun de vos devoirs, surtout envers Dieu.

437. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Chaque chose est organe de Dieu. Chaque être est expression de Dieu. […] Sans compter que cela permet d’aimer Dieu et sollicite à l’aimer. […] « Cette lutte pour la vie, c’est Dieu ; cette effroyable oppression du faible par le fort, c’est Dieu ; cet égorgement cosmique, cette tuerie à la Frédégonde, cette terreur universelle, ce 93 éternel, c’est Dieu ; la “perfection morale de l’univers” est une ineptie, et l’Univers c’est Dieu. […] Mais nos naturalistes qui de la lutte pour la vie concluent pour Dieu, contre Dieu, ou pour Dieu tourné d’autre façon, raisonnent exactement de la même manière.

438. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Dans cette intuition nous verrions Dieu s’épanouir en Idées. […] La première l’eût conduit à la négation du libre arbitre chez l’homme et du véritable vouloir en Dieu. […] En posant Dieu, on pose nécessairement aussi toutes les vues possibles sur Dieu, c’est-à-dire les monades. […] Il est vrai qu’après avoir concentré en Dieu la totalité du réel, il leur devenait difficile de passer de Dieu aux choses, de l’éternité au temps. […] Dieu était ici la synthèse de tous les concepts, l’idée des idées.

439. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

« Dieu d’abord, dit M.  […] A vous qui, lasse de l’hommage Qu’on vous prodigua tant de fois, Avez tout quitté pour l’image, La sainte image de la Croix ; Et bien loin des routes mortelles Dont l’éclat vous séduisait peu, Avez replié vos deux ailes Près du tabernacle de Dieu ! […] Étoile, serais-tu — mon âme le devine —     Si chère au penseur agité, Parce que Dieu te garde en sa droite divine    Comme clef de l’Éternité ! […] Voici, par exemple, une petite pièce qui a un bouquet d’anthologie chrétienne, autant qu’en un genre tout contraire une petite épigramme de l’anthologie grecque peut sentir son Hymette et son Musée : Le pèlerin Regardant une étoile au ciel épanouie, Un jeune homme marchait ; son léger manteau bleu Diminuait toujours : ce manteau, c’est la vie, Le voyageur c’est l’âme, et l’étoile c’est Dieu, Mais les essais de vers blancs, qui terminent le volume, ne sont pas heureux ; mais on n’échappe jamais tout à fait, dans cette langue française adoptive, à des accents du premier terroir.

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