Il mourut en 1821, dans ce même appartement qui avait servi d’asile à son retour des pays étrangers. […] « Les étrangers ont bien voulu en traduire les mots par les mots de leur langue, et leurs pays m’ont ainsi prêté l’oreille. […] On dirait qu’il assiste en étranger à ce qui se passe en lui-même, tant cela est imprévu et céleste ! […] Mais le pouvoir déclare qu’il ne protège que les intérêts positifs, et qu’il est étranger à l’intelligence, dont il a ombrage ; et cela hautement déclaré et imprimé, il répond : Que ferais-je de vous ? […] ne laissez entrer en vous aucun chagrin étranger à votre paisible famille.
« Tu me fais chef des peuples ; « Les fils de l’étranger me servent et m’exaltent. […] « Je suis devenu inconnu à mes frères ; oui, étranger aux fils de ma mère ! […] « Comment chanterions-nous les chants de Jéhovah à la terre étrangère ? […] Quelque étranger que l’on puisse être aux rites ou aux cultes qui ont adopté ce lyrique pour leur prophète, toutes les âmes modernes l’ont adopté pour leur poète. […] J’en saisis quelques-uns au passage de la brise et je les répétai à voix basse, quoique étranger à ce deuil, avec la consonance compatissante qui associe l’étranger, enfant de douleurs, comme dit le poète, à toutes les douleurs de ses frères inconnus !
Les habitants d’un vaisseau recherchent la vue d’un homme étranger ; ils voudraient entendre le son de la parole d’une bouche étrangère, venant d’un autre pays… c’est donc un événement qui saisit de joie, quand vient à passer un autre navire ; on se précipite sur le pont, on s’appelle, on se demande son nom, son pays, on se salue et bientôt on se voit réciproquement disparaître à l’horizon. […] L’arbre sous l’ombre duquel il était assis, les insectes reluisants qui voltigeaient dans l’air, les constellations qui brillaient vers le Sud, tout lui rappelait vivement l’éloignement de la patrie, et, lorsque, au milieu de cette nature étrangère, s’élevait tout à coup du sein de la vallée le bruit du grelot d’une vache ou le mugissement d’un taureau, la pensée se reportait aussitôt vers le sol natal. […] « Son accueil était toujours poli, quelquefois gracieux ; il s’asseyait à sa table de travail en face de l’étranger. […] Une bienveillance inexprimable brillait sur sa physionomie, quand il reconnaissait dans une personne étrangère un homme d’esprit. […] à l’occasion d’une supposition fondée sur ses relations personnelles, qui lui attribuait une opinion qui lui était étrangère, avec Arago faire une pénible expérience.
Mais la richesse de la séve et la fraîcheur alpestre du teint répandaient sur cette figure une jeunesse et un éblouissement qui suppléaient au dessin par le coloris : on croyait voir une vigoureuse fille des neiges de la Suisse, mais étrangère au milieu de l’aristocratie de Paris. […] Nous ne jouâmes point comme des enfants ; elle me demanda tout de suite quelles étaient mes leçons, si je savais quelques langues étrangères, si j’allais souvent au spectacle. […] On reconnut dans le portrait la manière du modèle ; on y reconnut surtout une certaine audace d’idées et une certaine indépendance de jugements qui rappelaient la séve étrangère et qui marquaient alors toutes les œuvres écrites au bord du lac de Genève. […] Quand il vit sa propre vie menacée par les séditions croissantes à Paris, il abandonna enfin le timon qui ne gouvernait déjà plus qu’au gré des tempêtes, et il se réfugia avec sa femme et sa fille dans son château de Coppet, à l’abri de la révolution, sur une terre étrangère. […] Le premier de ces deux opuscules avait pour but de convaincre les puissances étrangères qu’il fallait pactiser avec la république française sous peine de l’irriter jusqu’à la frénésie et de lui faire révolutionner l’Europe.
. — Contrecoup de la Révolution sur les imaginations françaises et étrangères. — Lebrun. — André Chénier. — Coleridge. — Génie anglais dans l’Inde. — L’évêque de Calcutta. […] Quand la France se soulevait de sa base antique pour repousser les armées étrangères, quand le cri d’alarme avait retenti du Nord au Midi, sous les flammèches qui sortaient de toutes les bouches, le feu prit au cerveau d’un jeune conscrit ; et, dans une nuit, il fit ce chant de la Marseillaise, dont les paroles, la musique et l’action sur les champs de bataille peuvent nous dire ce qu’était la poésie grecque. […] Comme Alfieri, comme Monti, comme d’autres étrangers enivrés du premier vin de la Révolution française, il est plus déclamateur qu’éloquent, il a plus d’emphase que de poésie. […] Pendant que sur le bocage, le bétel si sauvage et si beau agite sa cime dans l’air, le faisan magnifique, avec sa queue traînante et ses ailes étendues, s’élance d’un rapide essor, et aussi le volatile aux cent couleurs, dont les dames d’Ava prisent tant le plumage. » Peut-être, lecteur français, ces noms étrangers, cet amas de vives couleurs, vous semblent-ils monotones, comme les cieux qu’ils rappellent ; mais l’âme du poëte va reparaître dans quelques vers tout anglais de sentiment et de paysage : « Jamais si riches ombrages et pelouses, si verdoyantes n’ont tressailli aux pas de nos danses britanniques.
Les Anglais cependant se soumettront le plus tard possible au bon goût général ; leur liberté étant fondée sur l’orgueil national plus encore que sur les idées philosophiques, ils repoussent tout ce qui leur vient des étrangers, en littérature comme en politique. […] Je n’ai pas cité les ouvrages anglais qui traitent de la littérature anglaise, et en particulier la Rhétorique du docteur Blair, parce que le but et les idées de ces écrivains n’avaient aucun rapport avec le plan général que je m’étais proposé dans cet ouvrage, ni avec l’indépendance que je voulais porter dans mes jugements sur les écrivains étrangers. […] D’ailleurs le docteur Blair n’aurait pu juger en Angleterre Shakespeare avec l’impartialité d’un étranger ; il n’aurait pu comparer la plaisanterie anglaise avec la plaisanterie française : ses études ne le conduisaient pas à ce genre d’observations ; il aurait pu encore moins, par des raisons de convenance relatives à son état, parler des romans avec éloge, et des philosophes anglais avec indépendance.
Henri Estienne, dénonçant par la bouche de son Celtophile tous ces vocables étrangers qui supplantaient les bons et natifs français, procéda à une épuration nécessaire : il fut de ceux qui amenèrent l’opinion à cet état où le succès de Malherbe était assuré. […] Sur la fin de son commandement, toutefois, après la Saint-Barthélemy, il se décida à révéler au roi Charles IX les conclusions de son expérience : à force de pendre et de tuer, il en était venu à penser que le roi, pour rétablir son autorité et la paix, devait accorder la liberté de leur culte aux protestants, en détacher peu à peu la noblesse ambitieuse en réservant la faveur et les emplois aux catholiques, enfin user la turbulence de ses sujets dans la guerre étrangère : ce n’est pas là le discours d’un fanatique. […] C’est le peintre de l’individualisme du siècle, étranger à toute grande idée, à tout sentiment universel, notant avec une égale sympathie, une égale chaleur de style les fortunes amoureuses des dames, et les hautaines entreprises des hommes de guerre ; rien ne le touche que la vie.