Edmond Haraucourt C’est l’éternel refrain d’amour, mais qui, dans sa forme, apparaît moderne en ceci, qu’il constitue un type de cette condensation, de cette synthèse qui sont devenues le besoin moderne… Toi, c’est l’éternelle fiancée, celle qui meurt avec chacun de nos baisers, et qui revit avec chacun de nos désirs, le mirage consolant vers lequel nous marchons sans lassitude, qui fait notre désert moins nu et notre solitude presque aimée.
Pour lui, l’intelligence trouve à la fois son « éclipse » et sa « preuve » dans le mystère éternel, qu’elle ne peut pénétrer et que cependant elle conçoit. […] Nous sommes les flocons de la neige éternelle Dans l’éternelle obscurité. […] Enfin, comme Aristote, Hugo identifie la beauté, l’harmonie éternelle des choses, avec une volonté élémentaire du bien répandue en tout. […] L’homme éternel, voilà ce que l’homme comprend. […] Spinoza : Nous sentons, nous éprouvons que nous sommes éternels.
Beauclair, Henri (1860-1919) [Bibliographie] L’Éternelle Chanson (1884). — Les Horizontales (1884). — Pentecôte (1885). — Les Déliquescences, avec Gabriel Vicaire. […] Rodolphe Darzens Il débuta par une plaquette, l’Éternelle chanson (1884), qui contient des triolets d’une jeune et saine gaîté ; puis parurent les Horizontales (1884), recueil de parodies humoristiques ; enfin Pentecôte (1885), poème rustique plein de saveur.
Là, tu me réprésentes les esprits de révolte étendus sur le lac enflammé ; leur Chef porte sur son front cicatrisé l’empreinte de la foudre ; j’entends les blasphêmes respectueux qu’il vomit dans son audace, aussi étonnante que coupable ; soudain tu me ravis aux Cieux, je vois les légions aîlées qui entourent le trône de l’Eternel ; il parle, tout s’ébranle ; les milices du Dieu vivant s’élancent pour venger sa puissance outragée. Le Ciel & l’Enfer se choquent ; l’Enfer a soulevé ses feux, le Ciel a fait pleuvoir ses foudres, la victoire est suspendue dans ce combat terrible ; mais quel moment formidable ; le char du fils de l’Eternel franchit les plaines de l’immensité ; les carreaux vengeurs qui partent de ses mains, précipitent, écrasent & poursuivent ces innombrables légions de rébelles ; ô Milton ! […] Baçon emprisonné sous la voûte d’un cachot, commandoit à son ame de franchir ces murs épais, elle méditoit l’ordre éternel de l’Univers, le mélange inévitable de bien & de mal, la succession nécessaire du plaisir & de la douleur. […] Tu serois un secours toujours présent contre l’ennui & contre l’infortune ; les mortels désabusés ne connoîtroient plus d’autre ambition que celle de reculer les bornes de l’esprit humain ; attendris par vos leçons, ils ne deviendroient sensibles qu’aux charmes éternels du beau. […] Doit-on être l’objet de vos éternelles vengeance pour oser courir la même carrière ou vous vous rencontrez ?
Avant la création du monde, Dieu, principe éternel des choses, s’ignorait lui-même au sein de la matière cosmique disséminée dans l’espace. […] Seuls, ces sentiments sont pathétiques, et seuls, ils sont les motifs éternels de la tragédie177. […] Le tragique, c’est la guerre des Dieux dans l’Humanité, c’est la discorde de ce petit nombre de sentiments pathétiques que j’ai tous nommés, et qui constituent le fond divin de la nature humaine. — Les Dieux sont unis dans l’Olympe, où Hébé leur verse, avec l’ambroisie et l’éternelle jeunesse, l’éternelle sérénité. […] Ils tombèrent dans le scepticisme, et les idées, qui sont le fondement éternel de la Famille et de la Société, furent analysées, discutées et quelquefois raillées sur la scène irréligieuse. […] La Vérité morale reste inébranlable et intacte à côté des débris de tout ce qui s’enfle pour singer ou parodier sa puissance éternelle.
Cependant le remords, le dégoût ou l’ennui d’une forme fausse qui n’a point été tirée d’où les poètes puissants tirent la leur, c’est-à-dire des entrailles, s’emparent, vers le milieu de son volume, de ce moderne, dont les langes furent sans doute parfumés de ce christianisme de nos mères qui tomba sur tous nos berceaux ; et voilà que, lassé et des éternels marbres de Paros et de toutes les rondeurs païennes qui sont les globes de ses horizons, il s’écrie… à la fin : ……… pauvre muse égarée ; Nous souffrirons encore et ne nous plaindrons pas. […] Le poète des Impressions, dans les rares pièces où il a touché, en passant, et d’un doigt beaucoup trop léger, cette corde chrétienne qui est la fibre universelle maintenant et désormais éternelle, n’est pas encore le poète qui tire une note à lui, une note bien à lui, neuve et inexprimée, de cette corde tendue d’un bout du monde à l’autre bout, au doigt multiple du genre humain, et dans laquelle l’infini dort ! […] n’a pas que les détails d’une œuvre à juger ; elle en a à juger l’inspiration même, la pensée fondamentale et première, — car c’est là qu’est le poète, — l’originalité, la vitalité, l’éternité du poète (s’il est éternel !). […] Le monde, le monde sur lequel le poète opère, existait et avait son prix (et son prix éternel) avant d’être pétri par la main du poète, avant d’être animé de son souffle : il vivait, et vivait si bien que le poète n’a qu’augmenté sa vie en lui donnant la sienne, en lui versant, comme une vie nouvelle, sa propre individualité.
Je suis le dieu sans nom aux visages divers, Mon âme il illimitée est le palais des êtres ; Je suis le grand aïeul qui n’a pas eu d’ancêtres, Dans mon rêve éternel flottent sans fin les deux ; Je vois naître en mon sein et mourir tous les dieux. […] Il n’y a que le Tout qui soit parfait et qui n’ait rien au-dessus de lui : il n’y a donc que le Tout qui puisse avoir plaisir à être éternel. […] Et encore : Père, engloutis-moi donc, sois donc bien mon tombeau ; Et, si je participe à ta vie éternelle, Que ce soit sans penser, tel que la goutte d’eau Que la mer porte et berce inconsciente en elle.