Quand on songe que Moïse est le plus ancien historien du monde ; quand on remarque qu’il n’a mêlé aucune fable à ses récits ; quand on le considère comme le libérateur d’un grand peuple, comme l’auteur d’une des plus belles législations connues, et comme l’écrivain le plus sublime qui ait jamais existé ; lorsqu’on le voit flotter dans son berceau sur le Nil, se cacher ensuite dans les déserts pendant plusieurs années, puis revenir pour entrouvrir la mer, faire couler les sources du rocher, s’entretenir avec Dieu dans la nue, et disparaître enfin sur le sommet d’une montagne, on entre dans un grand étonnement. […] Aucun écrivain n’a poussé la tristesse de l’âme au degré où elle a été portée par le saint Arabe, pas même Jérémie, qui peut seul égaler les lamentations aux douleurs, comme parle Bossuet. […] Job est la figure de l’humanité souffrante, et l’écrivain inspiré a trouvé assez de plaintes pour la multitude des maux partagés entre la race humaine. […] Il entre dans son récit à la manière des anciens historiens ; vous croyez entendre Hérodote : « 1º Comme plusieurs ont entrepris d’écrire l’histoire des choses qui se sont accomplies parmi nous ; » 2º Suivant le rapport que nous en ont fait ceux qui dès le commencement les ont vues de leurs propres yeux, et qui ont été les ministres de la parole ; » 3º J’ai cru que je devais aussi, très excellent Théophile, après avoir été exactement informé de toutes ces choses, depuis leur commencement, vous en écrire par ordre toute l’histoire. » Notre ignorance est telle aujourd’hui, qu’il y a peut-être des gens de lettres qui seront étonnés d’apprendre que saint Luc est un très grand écrivain, dont l’Évangile respire le génie de l’antiquité grecque et hébraïque.
Ils devraient dire tout au plus : Voilà à quoi s’expose le philosophe qui n’a pas ce qu’il faut pour être poète ; ils devraient sentir et reconnaître, pour ne pas citer d’autres exemples, quel prix la philosophie ajoute à la versification brillante du plus célèbre de nos écrivains. […] Un grand poète est un écrivain d’un ordre supérieur aux autres ; quand on a cette prétention, il est juste de la payer. […] Et quel est l’écrivain qui, soit paresse, soit impuissance de mieux faire, ne se surprend pas lui-même mille fois en faute, ne se voit pas mille petites taches dont il se garde le secret, et qu’il espère dérober aux autres ? […] Mais les beautés supérieures d’un écrivain font oublier les critiques les plus justes ; et voilà par quelle raison, pour le dire en passant, les Aristarques et les Zoïles de l’antiquité ont également disparu ; perspective assez peu consolante pour leurs successeurs.
“Il est peu d’Ecrivains dans l’antiquité, dit Dom Ceillier, dont les ouvrages ayent été si généralement estimés que ceux de Josephe. […] Ce célébre Ecrivain laissa son ouvrage au vingtiéme volume. […] Ce savant Ecrivain s’étoit chargé de revoir l’ouvrage du P. […] Mais il n’y faut pas chercher l’histoire de tous les Ecrivains ecclésiastiques ; on n’y en trouve qu’une trentaine, & l’auteur finit à St. […] Cologne 1694. : livre curieux attribué au Baron de Huissen, écrivain très-médiocre, mais homme instruit.
Capefigue n’est pas, certes, le plus mauvais des écrivains qui ont pris pour leur idéal le xviiie siècle. […] Capefigue, — quelles que fussent d’ailleurs les opinions politiques de l’homme privé et la portée de l’écrivain, — était resté un historien qui voyait plus haut que l’intérêt des partis et même des dynasties. […] Tel, pendant toute sa vie, avait été l’honneur de sa pensée, et voilà ce qui rachetait à nos yeux les défauts d’un écrivain sur lequel notre sympathie ne nous a jamais fait illusion ! […] tout ceci est plus grave que le livre même et que l’historien ; mais que ce soit du moins pour nous une occasion de proclamer bien haut l’imprudence des écrivains qui seraient tentés de l’imiter, en essayant d’identifier les mœurs d’un peuple avec sa gloire. […] Ils ont leurs raisons et ils en ont la logique, mais que des écrivains de religion et de monarchie comme M.
L’écrivain qui s’ajuste si bien à ce monde-là n’est, ni par le trait, ni par le style, d’une ligne au-dessous ou au-dessus. […] Seulement, la raison qui a fait écrire : Un mariage dans le monde à Octave Feuillet, est une raison qui tient à sa personnalité d’écrivain. […] Il n’est pas, il ne fut jamais, il ne pourrait pas être, un grand écrivain de nature humaine, qui la prend aux entrailles et la secoue avec puissance, mais il est très bien l’écrivain d’une petite société incapable de fortes sensations. […] ce qui tient à la constitution même de l’écrivain. […] Voilà le vrai sur cet écrivain, voilà le vrai sans épigramme et sans satire.
Hors du naturalisme point de salut, ni pour les écrivains ni même pour les gouvernements. […] Mais ce que maint bachelier pourrait lui dire, c’est que les artistes aussi bien que les écrivains, depuis qu’il y a au monde des écrivains et des artistes, ont toujours eu la prétention de faire usage du « document humain », et de s’inspirer de la réalité. […] Un écrivain n’est pas devenu un savant pour s’être barbouillé de quelques livres de médecine qu’il a compris par à peu près et dont il a retenu quelques termes baroques qu’il place ensuite, au hasard le plus souvent. […] Les écrivains utiles à la France, ceux aussi qui prendront sur elle un durable empire, ceux qui l’aideront à se relever et auront place dans sa reconnaissance, ce sont les écrivains qui lui referont une âme virile. […] Peut-être y aura-t-il alors encore, après le désastre du système littéraire, un écrivain que le grand naufrage n’aura point emporté, auquel les amis de la littérature, presque également attirés et repoussés par lui, feront une place dans leurs bibliothèques.
Depuis quand le patriotisme est-il solidaire de la réputation d’un médiocre écrivain ? […] Justement dans ces périodes lointaines de l’histoire, qui ne relèvent pas de l’Académie française ; et non seulement dans les grands écrivains de l’époque classique, mais encore dans les écrivains du moyen âge ; non seulement dans les écrivains, mais dans les chartes, mais dans les diplômes, mais dans les « documents d’archives », ainsi qu’on les appelle ; mais dans les débris enfin des anciens dialectes et jusque dans la formation des langues sœurs ou dans la corruption de la langue mère. […] Buffon y a réussi le premier, et il y a réussi en vraiment grand écrivain. […] Un grand écrivain, c’est celui qui, concevant une semblable ambition, trouve en lui ce qu’il faut pour la réaliser ; et Buffon, pour l’histoire naturelle, quand il n’aurait pas d’autre mérite, aurait encore celui d’être ce grand écrivain. […] Ai-je tort ou raison de penser que, depuis quelques années, les jeunes écrivains s’y efforcent ?