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1717. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

La mer caresse et menace ; elle prend toutes les nuances, elle parle toutes les voix, elle reflète le ciel, ce ciel d’où nous vient aussi un souffle d’éternité qui ne nous semble pas étrangère, tandis qu’à l’aspect de la sombre et morne forêt, avec son lugubre silence ou ses sourds et longs gémissements, l’homme sent plus irrésistiblement pénétrer dans son cœur la conscience de son néant. […] Mais, malgré cette douce émotion, il se sentait la conscience troublée.

1718. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

Quel malheur, que ces croquis soient condamnés par l’éditeur, à des réductions minuscules, qui vont tuer la vérité naturiste de ces dessins, faits avec une conscience, qu’on rencontre bien rarement chez l’illustrateur d’un livre de maintenant. […] On le peignait désagréable de rapports, humoreux, despote, mais ayant une véritable conscience d’artiste.

1719. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Ce qui manque justement aux groupes récents, c’est cette haute conscience, ce sentiment de l’héroïque et du divin. […] La poésie novatrice prend de jour en jour une plus juste conscience d’elle-même et, malgré les ̃« néo-classiques » ou les « romans », elle reste synthétique et symboliste (ce qui est tout autre chose qu’allégorique, quoi qu’en dise le chimiste Strindberg).

1720. (1925) Portraits et souvenirs

Une fois la part faite aux justes récriminations de l’égoïsme, l’éducateur n’est-il pas récompensé de son sacrifice quotidien par la conscience du rôle qu’il accomplit et de la mission qui lui est confiée ? […] Certes, aucune des considérations que je viens d’esquisser ne dut être étrangère à un homme de haute et délicate conscience comme l’était le poète Stéphane Mallarmé, dont le hasard des circonstances fit, pendant trente ans, un professeur d’anglais ; mais il est hors de doute que cette longue pratique de l’enseignement, bien qu’il en eût accepté délibérément la charge, ne fut jamais pour lui qu’un fardeau imposé par la nécessité. […] Doué des plus heureuses qualités de l’esprit, secondé par les circonstances les plus propices, Lucien Muhlfeld eût pu ne demander au métier des lettres que les agréments qu’il comporte, mais il avait un sentiment trop vif et trop fin de la dignité de l’art pour ne le pas exercer dans toute sa rigueur et toute sa conscience.

1721. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Il s’est bien gardé, malgré la différence des opinions, de traiter avec légèreté celles d’une femme aussi respectable, qui, dans sa prison, n’a d’autres consolateurs que Dieu et sa conscience. […] La conscience a-t-elle une autre voix ; obéira-t-elle à d’autres oracles ? […] Il cherche les tableaux sublimes plus que les raisonnements victorieux ; il sent et ne dispute pas ; il veut unir tous les cœurs par le charme des mêmes émotions, et non séparer les esprits par des controverses interminables : en un mot, on dirait que le premier livre offert en hommage à la religion renaissante fut inspiré par cet esprit de paix qui vient de rapprocher toutes les consciences.

1722. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Par exemple, « l’esprit classique » ne s’était déterminé qu’en achevant de se libérer, lui, nous avec lui, et notre littérature avec nous, de toute influence étrangère, mais, on vient de le voir, c’est au contraire en se mettant à l’école du « philosophisme anglais », que l’« esprit encyclopédique » a pris conscience de lui-même. […] Car, nos sentiments c’est nous-mêmes, ou plutôt, chacun de nous n’est soi qu’autant que ses sentiments s’expriment en toute liberté, et c’est cette liberté même qui est la nature : « Nous naissons tous sensibles… Sitôt que nous avons, pour ainsi dire, conscience de nos sensations, nous sommes disposés à rechercher ou à fuir les objets qui les produisent. […] Au moins pouvons-nous dire que, comme Ronsard, il a été tout latin et tout grec ; et comme Ronsard, mais avec une conscience plus claire des raisons de son choix, c’est aux érotiques latins, c’est aux poètes d’Alexandrie que son industrieuse imitation est allée.

1723. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

Je n’ai sur la conscience que quatre loups et un renard ; vous les verrez rue Ampère, où nous nous retrouverons vers le 3 novembre. […] Si vous avez seulement un peu conscience de votre valeur, vous comprendrez mon enthousiasme. […] Je vous dis que vous me prêtez des infamies, mais, comme ma conscience est pure, je n’en suis pas émue.

1724. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

Cet esprit rêveur, toujours occupé à s’interroger lui-même, ce trouble d’une conscience sévère aux premiers avertissements d’un devoir encore douteux, cette fermeté calme et sans incertitude dès que le devoir est certain, cette sensibilité profonde et presque douloureuse, toujours contenue dans la rigueur des plus austères principes, cette douceur d’âme qui ne disparaît pas un seul instant au milieu des plus cruels offices de la vertu, ce caractère de Brutus enfin, tel que l’idée nous en est à tous présente, marche vivant et toujours semblable à lui-même à travers les différentes scènes de la vie où nous le rencontrons, et où nous ne pouvons douter qu’il n’ait paru sous les traits que lui donne le poëte. […] Macbeth se montra enfin tel qu’il était ; et le même sentiment de sa situation qui l’avait porté à rechercher la faveur publique par la justice changea la justice en cruauté ; « car les remords de sa conscience le tenaient dans une crainte continuelle qu’on ne le servît de la même coupe qu’il avait administrée à son prédécesseur ». […] Parvenu à une grande vieillesse, et l’âge ayant affaibli sa raison, Leir voulut s’enquérir de l’affection de ses filles, dans l’intention de laisser son royaume à celle qui mériterait le mieux la sienne. « Sur quoi il demanda d’abord à Gonerille, l’aînée, comment bien elle l’aimait ; laquelle appelant ses dieux en témoignage, protesta qu’elle l’aimait plus que sa propre vie, qui, par droit et raison, lui devait être très-chère ; de laquelle réponse le père, étant bien satisfait, se tourna à la seconde, et s’informa d’elle combien elle l’aimait ; laquelle répondit (confirmant ses dires avec de grands serments) qu’elle l’aimait plus que la langue ne pouvait l’exprimer, et bien loin au-dessus de toutes les autres créatures du monde. » Lorsqu’il fit la même question à Cordélia, celle-ci répondit : « Connaissant le grand amour et les soins paternels que vous avez toujours portés en mon endroit (pour laquelle raison je ne puis vous répondre autrement que je ne pense et que ma conscience me conduit), je proteste par-devant vous que je vous ai toujours aimé et continuerai, tant que je vivrai, à vous aimer comme mon père par nature ; et si vous voulez mieux connaître l’amour que je vous porte, assurez-vous qu’autant vous avez en vous, autant vous méritez, autant je vous aime, et pas davantage. » Le père, mécontent de cette réponse, maria ses deux filles aînées, l’une à Henninus, duc de Cornouailles, et l’autre à Magtanus, duc d’Albanie, les faisant héritières de ses États, après sa mort, et leur en remettant dès lors la moitié entre les mains. […] Le caractère de Faulconbridge est une de ces créations du génie de Shakspeare où se retrouve la nature de tous les temps et de tous les pays : Faulconbridge est le vrai soldat, le soldat de fortune, ne reconnaissant personnellement de devoir inflexible qu’envers le chef auquel il a dévoué sa vie et de qui il a reçu la récompense de son courage, et cependant ne demeurant étranger à aucun des sentiments sur lesquels se fondent les autres devoirs, obéissant même à ces instincts d’une rectitude naturelle toutes les fois qu’ils ne se trouvent pas en contradiction avec le vœu de soumission et de fidélité implicite auquel appartient son existence, et même sa conscience : il sera humain, généreux, il sera juste aussi souvent que ce vœu ne lui ordonnera pas l’inhumanité, l’injustice, la mauvaise foi ; il juge bien les choses auxquelles il se soumet, et n’est dans l’erreur que sur la nécessité de s’y soumettre ; il est habile autant que brave, et n’aliène point son jugement en renonçant à le suivre ; c’est une nature forte que les circonstances et le besoin d’employer son activité en un sens quelconque ont réduite à une infériorité morale dont une disposition plus calme et des réflexions plus approfondies sur la véritable destination des hommes l’auraient vraisemblablement préservée.

1725. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Vous ne sauriez avoir l’idée du fanatisme d’orgueil et d’insatiabilité qui règne dans cette nation-ci. » Pour lui, il se multipliait et faisait en toute conscience son métier de négociateur auprès d’une puissance aussi parlementaire, dans une crise de violente fermentation ; sa frêle machine n’y suffisait pas ; il était littéralement sur les dents : Mon cher ami, écrivait-il au comte de Choiseul (9 octobre), je ne vous dirai rien ici de plus, sinon que je suis tout à fait borgne.

1726. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

J’ai envoyé ma démission au nouveau gouvernement de toutes mes fonctions diplomatiques, délices et orgueil de ma jeunesse, et même la démission des droits à la pairie que le refus de serment de mon père m’ouvrait, et que le serment exigé interdit à ma conscience.

1727. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

» On voit que tout repose, dans cette philosophie, sur les doctrines du Phédon, qui supposent l’âme créée par Dieu, avec des idées innées et fatales qui forment sa conscience, sa nature comme sa morale, doctrines que nous croyons aussi vraies que celles qui attribuent à la matière ou au corps des instincts ou des lois absolues qui font sa nature, et au-dessus de toute discussion.

1728. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Le vieux livre où je faisais mes examens de conscience était l’innocence même.

1729. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Nous aurons l’occasion d’y revenir65 ; en attendant, je voudrais montrer encore quelques-unes des contraintes dont la question d’argent ligotte le talent et parfois la conscience des écrivains.

1730. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

., et vous servira d’intermédiaire en conscience. — Célérité et discrétion.

1731. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IV »

C’est pour des raisons d’un ordre supérieur que je m’abstiens, avec la conscience d’avoir agi exclusivement en artiste, et avec la certitude d’être approuvé par tous les honnêtes gens.

1732. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

— Retour perpétuel et involontaire d’un même fait dans une conscience.

1733. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

Conçue dans le système objectif de Renan, cette conscience momie, aux procédés froids, Madame Gervaisais n’est pas une étude plus vraie de la conversion d’une âme devenue chrétienne que l’histoire de Jésus-Christ, par Renan, n’est son histoire.

1734. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Un personnage de tragédie ne changera rien à sa conduite parce qu’il saura comment nous la jugeons ; il y pourra persévérer, même avec la pleine conscience de ce qu’il est, même avec le sentiment très net de l’horreur qu’il nous inspire.

1735. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Dans l’appréciation d’ouvrages de ce genre (comme dans la plupart des actes et des états de conscience dont se compose ma vie terrestre) « je sens deux hommes en moi ». […] Elle le sait, sa conscience ne lui reproche rien. […] », soupire-t-il quand Marthe lui dit que la comtesse a fait son éloge) ; enfin, ce qui reste encore de conscience dans son entrainement, jusqu’à ce que l’ivresse d’aimer, d’être aimé, emporte ses derniers scrupules et ses suprêmes prudences, tout cela a été exprimé par M.  […] ) ce flibustier a les sentiments les plus délicats, les plus raffinés scrupules de conscience. […] Mais ce que je vous en dis, c’est pour l’acquit de ma conscience, et je ne veux point bouder contre mon plaisir.

1736. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Il n’y a peut-être de différences entre le sens commun et le sens social que celle-ci, que le sens social est le sens commun qui a pris conscience de lui-même et que le sens commun est le sens social sans le savoir, le sens social instinctif, le sens social inconscient ou subconscient. […] Et il ne faut pas manquer de remarquer enfin que Don Juan, en tout cas, n’est pas si illogique et ne change pas du recto au verso, puisque ce langage de la dévotion ; ce n’est pas la première fois qu’il l’emploie : il sa employé dès le premier acte avec Elvire : Je vous ai quittée, dit-il, « non point par les raisons que vous pouvez vous figurer, mais par un pur motif de conscience et pour ne croire pas qu’avec vous davantage je puisse vivre sans péché. […] Il en veut à la ligne collatérale : on l’attaque plus impunément ; il est la terreur des cousins et des cousines, du neveu et de la nièce, le flatteur et l’ami déclaré de tous les oncles qui ont fait fortune ; il se donne pour l’héritier légitime de tout vieillard qui meurt riche et sans enfants ; et il faut que celui-ci le déshérite, s’il veut que ses parents recueillent sa succession : si Onuphre ne trouve pas jour à les en frustrer à fond, il leur en ôte du moins une bonne partie : une petite calomnie, moins que cela, une légère médisance lui suffit pour ce pieux dessein ; et c’est le talent qu’il possède à un plus haut degré de perfection ; il se fait même souvent un point de conduite de ne le pas laisser mutile : il y a des gens, selon lui, qu’on est obligé en conscience de décrier ; et ces gens sont ceux qu’il n’aime point, à qui il veut nuire, et dont il désire la dépouille. […] Tartuffe d’abord flatte sa manie ce qui est beaucoup, ce qui est quasi tout et avec quoi on mène un homme en laisse et ensuite il est pour lui l’homme qui tient ouvertes pour lui les portes du ciel ; donc il est sa conscience et il est son âme » Orgon est littéralement suggestionné. […] La différence c’est que paysan qui singe le médecin et valets qui singent les précieux font la parodie consciemment et que Monsieur Jourdain la fait en pleine conscience.

1737. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Il faut pénétrer très avant dans le secret des consciences, et en même temps, comme disent les psychologues, il faut faire grande attention de ne pas détruire, en s’y prenant trop brutalement, le sujet même de l’observation. […] Moins bonhomme qu’on ne l’a dit, Prévost avait la conscience large… N’insistons pas, — de peur de faire trop de peine à ceux qui l’ont assis dans le « quarante et unième » fauteuil de l’Académie française ; et plutôt, imitant la réserve de Sainte-Beuve, contentons-nous de renvoyer les curieux aux Mélanges de Bois-Jourdain. […] Mais, au contraire, ce qui fait la rare valeur de Manon Lescaut, ce qui met l’œuvre de Prévost au rang de Paul et Virginie, qui ne lui ressemble guère, ou de Roméo et Juliette, qui lui ressemble encore moins, c’est ce qu’il y a de peu ordinaire et, en ce sens, de peu « naturel », dans ce roman d’une fille et d’un aventurier, c’est ce qu’il y a en Manon, et surtout en des Grieux, de supérieur ou d’étranger à eux-mêmes, dont ils n’ont pas conscience, mais dont Prévost a conscience pour eux et qu’il a, en un jour de bonheur et d’inspiration, admirablement démêlé. […] Moraliste ou prédicateur, mais par-dessus tout romancier, Richardson sut tourner au profit de son art une expérience consommée de psychologue, requise dans cette profession de directeur de consciences qu’il avait pratiquée presque dès son enfance ; et ce goût de psychologie, ou de casuistique même, que ses chefs-d’œuvre introduisirent, le roman moderne jusqu’ici n’a pas pu réussir ni cherché sérieusement d’ailleurs à s’en déshabituer. […] J’indiquerai pour les curieux, dans Cléveland et dans le Doyen de Killerine, des accents d’une mélancolie si moderne que nul, depuis Prévost, ne devait les retrouver avant Chateaubriand ; et jusqu’à des personnages — Cléveland lui-même, par exemple, ou le Patrice du Doyen — dont l’âme incertaine, inquiète et farouche, n’a vraiment pris conscience d’elle-même que de nos jours, dans celle des René, des Obermann, des Bénédict.

1738. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Boileau le trouva dans sa conscience : Aimez donc la vertu : nourrissez-en votre âme130 . […] Boileau ne s’adresse plus au poète ni au juge des écrits, mais à l’homme ; non plus au goût, mais à la conscience.

1739. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

Il s’inspira de leur pantomime et dota la scène de ces drôles alertes, agiles comme des acrobates, les jambes fendues et la conscience élargie, Scapins et Sbriganis, propres à tous les travestissements et à toutes les escalades. […] Tout le visage d’ailleurs exprime un bouillonnement intérieur, une soif de lutte, une certaine appréhension, l’émotion de la veillée des armes, mais aussi la conscience même de la force. […] Je tiens d’ailleurs à le répéter en achevant ces rapides études sur un des hommes que notre pays doit le plus admirer : — l’heure est venue où la France, condamnée à répudier pour un moment la force, ou du moins à la chercher dans les triomphes intellectuels, doit puiser dans ces souvenirs de gloire littéraire une nouvelle conscience de sa valeur, de sa puissance morale, de son rôle, et une espérance nouvelle dans son avenir.

1740. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

Trois signes indiquaient déjà que ses forces physiques avaient rapidement décliné, peut-être plus que son esprit ferme et soutenu par l’ardeur de l’étude n’en avait lui-même conscience ou ne voulait se l’avouer.

1741. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Nulle part cependant les suites graves des travers les plus légers ne sont absentes : étudiez les Précieuses, et vous saisirez comment le faux bel esprit mène aux pires aberrations de la conscience et de la conduite, par quelle pente nos héroïnes en idée arriveront à n’être que des aventurières.

1742. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

On songe moins à arrêter les lecteurs sur la beauté d’un esprit particulier, qu’à raffermir leur conscience troublée par la contradiction, et à conserver intact le dépôt de la doctrine.

1743. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Je puis même dire que, de mes trop nombreux ouvrages, c’est peut-être cet enfantillage qui m’a donné le plus de conscience anticipée de mes forces.

1744. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XII : Distribution géographique (suite) »

J’ai déjà dit que je ne saurais, en conscience, admettre les hypothèses de Forbes sur les anciennes extensions continentales, hypothèses dont les conséquences légitimement déduites conduiraient à admettre que pendant la durée de la période actuelle toutes les îles qui existent ont été jointes à quelque autre terre.

1745. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Un tel résultat peut être obtenu systématiquement ou même sans conscience de l’effet produit : il suffit que, sans avoir aucunement la pensée d’altérer la race, chacun conserve de préférence les individus qui, à toute époque donnée, lui sont le plus utiles.

1746. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Prenez, ajoutait-il, prenez le passage qui au premier abord semble le plus enchevêtré et le plus mal écrit, ces vers de Tartuffe, par exemple : Ce fut par un motif de cas de conscience. […] Par où ma conscience eût pleine sûreté À faire des serments contre la vérité. […] comme chaque mot porte et est bien à sa place : conscience, sûreté, serments, vérité. […] A-t-il beaucoup de fredaines sur la conscience ? […] Il a assez d’autres défauts sur la conscience, ce misérable monologuiste, pour qu’on ne le charge pas de ceux dont il n’est pas responsable.

1747. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LA FAYETTE » pp. 249-287

Mme de La Fayette connut Du Guet, qui commençait à prendre un grand rôle spirituel pour la direction des consciences, et qui, dans cette décadence de Port-Royal, n’en avait que les traditions justes et intimes, sans rien de contentieux ni d’étroit.

1748. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

Le vieux duc mourut en se taisant encore ; le jeune duc, fils présumé de la belle Élisabeth, avait une délicatesse de conscience et d’honneur qui ne lui permettait pas de se substituer sciemment aux droits des héritiers légitimes.

1749. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

« Par délicatesse de conscience, il ne se crut pas autorisé de demander dispense pour conserver un bénéfice ecclésiastique de cent écus, qu’il tenait de la générosité du Pape.

1750. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

Il y a respiré, avec l’air chargé des émanations de la végétation primitive, ce respect de la dignité, cette conscience de l’énergie humaine qui ne l’ont jamais quitté.

1751. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre neuvième »

La comédie voulait pourtant qu’il y eût du ridicule dans la pièce : Molière l’a mis tout entier du côté des dupes de Tartufe ; mais, comme pour ajouter à la force du préservatif, ce ridicule est à la fois si honteux et si odieux, qu’il a désormais contre lui notre conscience et notre vanité.

1752. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1884 » pp. 286-347

On se demande si l’on ne serait pas par hasard ramolli, sans en avoir la conscience.

1753. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Herbert Spencer (Principes de psychologie) a consacré à ce phénomène mental, il est exposé que fondamentalement un sentiment diffère d’une perception, d’une connaissance, d’une idée, en ce qu’il dérive des choses une impression immédiate et continue, non la notion de leurs rapports avec le reste des êtres, non une notion classificatrice, un jugement, mais une pure sensation pendant laquelle l’objet seul apparaît dans la conscience, la flatte ou la heurte selon qu’il lui est bienfaisant ou malfaisant.

1754. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIIe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset » pp. 409-488

En conscience nous ne croyons pas que la nature humaine ait jamais réuni dans un seul homme, tant de talent, tant de légèreté, tant de poésie, tant de grâce à tant d’innocente perversité.

1755. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre I : Variations des espèces à l’état domestique »

Certains ouvrages d’horticulture s’étonnent de la merveilleuse habileté des jardiniers qui ont produit de si magnifiques résultats avec d’aussi pauvres matériaux ; mais aucun d’eux n’a eu la conscience des transformations lentes qu’il contribuait à opérer.

1756. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Sa conscience est volée et vexée.

1757. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

« Ô Père, sois-moi propice ; donne-moi d’observer toujours ce grand culte ; écarte loin de moi les fautes, le en épurant ma conscience de toute mauvaise pensée, afin que je rende gloire à Dieu, levant vers lui des mains innocentes, que je bénisse le Christ, et qu’agenouillé, je le supplie de me recevoir pour serviteur, quand il viendra comme roi.

1758. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

— « Réveil surprenant de la conscience !  […] En punition de sa chute volontaire, il souffrira de toutes les misères terrestres et sera condamné à mourir et à revivre plusieurs fois au cours des siècles humains, jusqu’à ce que, dans cette lente expiation, purifié par la souffrance acceptée, remontant peu à, peu par son propre effort à l’état de pureté primitive, il recouvre enfin toute sa conscience, longtemps obscurcie, d’être supérieur, et retrouve le ciel, parce qu’il l’aura refait dans son cœur. […] L’humanité, dans l’incertitude de sa conscience incomplète, et dans le conflit de ses instincts contradictoires, hésite et flotte entre l’animalité qui est au-dessous d’elle et la divinité qui est au-dessus. […] La profondeur de la chute, la stupeur de l’intelligence supérieure brusquement noyée dans la boue des régions basses, l’âme aveuglée dans la matière qui l’a saisie, et la conscience obscurcie dans le mal, tout cela est indiqué fortement plutôt que rendu avec pleine lumière. […] Comme il arrive toujours, l’artiste a transformé en procédé la (acuité innée, facile et féconde, à laquelle il a dû ses créations les plus belles, sur laquelle il a pris l’habitude de compter, et dont, maintenant, il a trop conscience.

1759. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Veut-on se convaincre bien de cette même pénétration qu’il exerçait sur lui, de sa rare sensibilité, de son indulgente sagesse et de la conscience scrupuleuse de ses jugements : un trait unique dans la vie des hommes, toujours aveuglés en leur propre cause, attestera sa clairvoyance intérieure, et son impartialité sur ses plus chers intérêts. […] « Ce colosse arrondi, grondant, sourd, et sans yeux, « Premier auteur des arts cultivés sous les cieux, « Seul roi des volontés, tyran des consciences, « Et maître ingénieux de toutes les sciences  ? […] Cette dure nécessité contraint bientôt les prêtres eux-mêmes et le grand sacrificateur, tout saints qu’ils se disent, à quitter les autels de Jupiter pour brûler l’encens et chanter les hymnes au dieu de l’or, tout puissant sur leurs consciences. […] N’aurait-il pas, au défaut de ceux-là, ces jurisconsultes novateurs, qui s’exemptent du soin d’éluder les lois en les renversant et en en décrétant d’autres ; ces légistes de circonstance, qui, sautant par dessus les entraves de l’équité, convertissent l’arbitraire en maximes de droit, et la ferme conscience en contravention rebelle ?

1760. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

Si nous faisons si bon marché de nos théories et de nos lois, c’est que nous avons conscience de leur imperfection. […] Aujourd’hui, en physiologie, cette tendance systématique est des plus malheureuses pour la science, qu’elle retarde ; et quant aux hommes dont je parle, il ne saurait faire en ce cas preuve d’une supériorité d’esprit généralisateur ; ils prouvent uniquement qu’ils n’ont pas le sentiment de la nature de la science qu’ils cultivent, ni la conscience de l’état dans lequel elle se trouve. […] Les organes de nutrition, sans conscience de leur rôle, exécutent leurs fonctions propres, quand ils en ont les éléments nécessaires, et qu’ils y sont sollicités par une cause excitante ; mais on ne saurait placer là aucune intelligence spéciale à l’organe.

1761. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

On était tenté de lui en vouloir par moments de cet excès de conscience et de l’invariable obstination qu’il mettait en toute rencontre à maintenir son opinion et son idée, même lorsqu’il était seul contre tous, ce qui lui arrivait quelquefois.

1762. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

L’âme n’est perceptible que par la conscience qu’elle a d’exister ; elle ne perçoit les impressions du monde extérieur que par ses sens, impressions qu’elle communique à son tour au monde extérieur par l’intermédiaire de ces mêmes organes appelés sens.

1763. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

Tu fais passer en revue devant moi la foule de tout ce qui a vie ; tu m’apprends à reconnaître mes frères dans le buisson silencieux, dans l’air, dans les eaux ; et lorsque la tempête mugit et gronde dans la forêt, roulant les pins gigantesques, secouant avec fracas leurs branches et déracinant leurs souches ; lorsque le bruit de leur chute fait retentir de coups sourds l’écho des montagnes, alors tu me conduis dans l’asile paisible des grottes, et les merveilles de ma propre conscience se révèlent par la réflexion à moi ; et la lune pure et sereine monte à mes yeux, apaisant sous ses rayons toutes choses… « Oh !

1764. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Notre vie commune était belle ; c’était l’époque à laquelle je commençais à avoir la conscience de moi-même.

1765. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Ce n’était pas là de la politique de conscience, c’était de la politique de situation.

1766. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

Un crime, c’est trop pour un pouvoir qui ne dure que quelques années, et qui souille éternellement la conscience en pervertissant la liberté par un mauvais exemple.

1767. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Je ne suis pas trop sûr cependant, dans mon âme et conscience, que toutes ces interruptions n’aient bien eu leur influence sur l’ensemble du poème et qu’il n’ait l’air un peu décousu.

1768. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (2e partie) » pp. 161-239

Et comme j’avais conscience de le valoir tout au moins, et d’avoir en plus mon chien pour me seconder, je lui répondis que je voulais bien le suivre.

1769. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

Il a une conscience naïve de sa gloire qui ne peut déplaire parce qu’il est occupé de tous les autres talents, et si véritablement sensible à tout ce qui se fait de bon, partout et dans tous les genres.

1770. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Pendant la représentation, nous sommes bien réellement sur la scène, non pas une fois, mais plusieurs fois ; notre conscience ne s’y trompe pas.

1771. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Mais le crime n’est crime que quand il est commis avec une parfaite conscience.

1772. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Mais que si la maîtresse a été frottée d’un peu de monde, d’un peu d’art, d’un peu de littérature, et qu’elle veuille s’entretenir de plain-pied avec notre pensée et notre conscience du beau, et qu’elle ait l’ambition de se faire la compagne du livre en gestation ou de nos goûts ; elle devient pour nous insupportable comme un piano faux, — et bien vite un objet d’antipathie.

1773. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Je me demande, comment toutes les plumes, tous les talents, toutes les indignations ne sont pas soulevées contre cet axiome blasphématoire, comment toutes les idées de justice, semées dans le monde par les philosophies anciennes, le christianisme, la vieillesse du monde, n’ont pas protesté contre cette souveraine proclamation de l’injustice, comment il n’y a pas eu insurrection contre cette intrusion du darwinisme en la réglementation contemporaine, et peut-être future de l’humanité, comment enfin, toutes les langues de l’Europe ne se sont pas associées, dans un manifeste de la conscience humaine, contre ce nouveau code barbare des nations.

1774. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

En d’autres termes, la critique est la recherche et la manifestation de cette règle logique et intime qui préside et doit présider à toute création de notre intelligence ; sorte de conscience de l’esprit qui, au lieu de nous dire : Cela est bien, cela est mal, nous dit avec la même autorité : Cela est beau, cela est laid ; cela est proportionné, cela est disproportionné ; cela est dans la mesure, cela est dans l’excès ; cela est dans la vérité, ou cela est dans la chimère.

1775. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

Laissez-nous donc analyser lourdement et péniblement cette double ivresse, l’une saine, l’autre malsaine qui sort des coupes et des fleurs de ce charmant poète, et si nous sommes trop sévères, trop délicats, trop froissés par le mauvais pli d’une feuille de rose comme le Sybarite, ne vous y trompez pas, ce n’est pas mollesse, c’est conscience ; rien de ce qui froisse l’âme ou de ce qui ternit la pudeur ne doit être pardonné à celui qui écrit pour la jeunesse, ce printemps de la pureté.

1776. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Sa conscience, sans cesse et scrupuleusement examinée, était son seul horizon ; le monde extérieur n’existait pas pour lui ; sa piété toute littérale n’avait ni épanchement, ni onction, ni jouissance.

1777. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Pour notre part, nous nous sommes renfermé dans une simple biographie, et depuis trente-huit ans que notre première édition a été publiée, presque chaque jour, en dépit de la conscience de nos recherches et par suite de leur persévérance, nous avons trouvé un fait à rectifier ou à compléter. […] Boursault, qui sans doute avait la conscience d’avoir été peu bienveillant pour Molière et son École, crut ou feignit de croire à la clef, à sa mise en scène, et en témoigna un dépit que nous allons voir éclater. […] — La raison de cela, répondit le prince, c’est que la comédie de Scaramouche joue le ciel et la religion, dont ces messieurs ne se soucient point ; mais celle de Molière les joue eux-mêmes, et c’est ce qu’ils ne peuvent souffrir. » Le légat et les principaux prélats, consultés par le monarque, pour la sécurité de sa conscience, sur le danger prétendu de cette comédie, partagèrent ses dispositions favorables ; mais les tartuffes redoublèrent d’efforts. […] Croyant acheter une paix durable, Molière consentit avec résignation à tout ce que demandait la conscience timorée du Roi. […] « Je sais combien cette erreur m’a été avantageuse, dit Subligny ; mais je n’ai pas le front d’en profiter plus longtemps, et, dût-on ne trouver plus ma comédie si belle, je fais conscience d’exposer davantage cet homme illustre aux reproches que méritent, à ce qu’on dit, les faiseurs de Critiques.

1778. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Mais, en conscience, est-ce donc là parler grec en français ? […] C’est à l’un d’eux que Ronsard disait : Tes escrits sont témoins que tu m’as desrobé, Du fardeau du larcin ton dos est tout courbé ; Tu en rougis de honte, et en ta conscience, Père tu me cognois d’une telle science. […] Mais comme il vint à examiner sa conscience, et à considérer le peu d’édification ou plutôt le scandale que pouvoit causer cet ouvrage s’il advenoit qu’il fût un jour publié, il se résolut de le supprimer, d’autant plus que son dévot confesseur faisoit difficulté de lui donner l’absolution.

1779. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Nous revenions, probablement d’une visite à mes parents, mais je ne m’en souviens pas, tout est obscur autour du point brillant qu’a marqué dans ce lointain passé ce premier frisson de conscience. […] quelle tranquillité de conscience… Précoce anarchiste, je rétablissais l’équilibre, je travaillais pour la justice ! […] Quand c’était mon tour de confesser mes péchés, je mettais mon orgueil à en avoir beaucoup et de très damnables, et comme en somme, mon examen de conscience ne m’en fournissait que d’assez piètres, j’en inventais de plus importants.

1780. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

Et pour faire l’examen de conscience des autres. […] Et pour tenir constamment son propre examen de conscience. […] Je vois que la pensée chrétienne, exprimée dans une des plus vieilles et des plus traditionnelles formules de l’enseignement de l’Église, et la pensée bergsonienne, exprimée partout dans l’œuvre de notre maître, et notamment dans Matière et Mémoire, (essai sur la relation du corps à l’esprit), et dans l’Essai sur les données immédiates de la conscience, procèdent par une démarche à ce point parallèle, pénètrent dans les réalités spirituelles, par un approfondissement à ce point parallèle et parent que nous ne sommes entrés dans le plein de l’intelligence de cette vieille formule de l’enseignement de l’Église qu’armés du plein du sens et de l’intelligence et de l’éclairement de la pensée bergsonienne. […] Nulle sûreté de conscience, même intégrale, ne suffit à Polyeucte.

1781. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Palissot confond une secte ennemie de la société ; Voltaire insulte un homme de lettres qui n’a d’autre crime que de ne pas tout admirer et tout croire dans ses ouvrages : Palissot dénonce à la nation d’affreux principes, une doctrine désolante et meurtrière ; Voltaire, n’ayant rien à reprocher à celui qu’il outrage, que son zèle à défendre le gouvernement et le culte de son pays, se trouve réduit a d’infâmes impostures, à d’atroces calomnies que les lois punissent dans tous les états policés : Palissot se nomme, comme le doit tout accusateur honnête ; Voltaire se cache comme un lâche calomniateur, comme un vil libelliste ; il a recours à toutes ces honteuses fourberies, à tous ces déguisements méprisables d’un criminel que sa conscience condamne. […] Fréron succombant victime de son devoir, dédaigné du gouvernement qu’il a soutenu, en butte à la rage des sophistes dont il a dévoilé les complots, sans autre consolation que sa conscience, me paraît bien supérieur à Voltaire applaudi, triomphant, célébrant sa victoire au milieu d’une troupe de sectaires et de conjurés armés contre les lois et les mœurs de leur pays. […] Argire est un vieillard imbécile ; mais son gendre Orbassan n’est pas si sot : il prend toujours à son compte les biens de Tancrède, et se contente de dire pour le soulagement de sa conscience : Ces biens sont à l’état, l’état seul peut les prendre ; Je n’ai point recherché cette faible faveur. […] Il est vrai qu’il ne se propose pas de séduire une jeune femme, mais d’épouvanter une vieille reine qui a empoisonné son mari pour régner, et qui depuis quinze ans s’est endurci la conscience par l’habitude de la gloire et par les plus brillantes conquêtes : une telle femme doit être au-dessus des terreurs vulgaires ; il faut pour l’ébranler tout l’attirail de la sorcellerie, comme qui dirait un mort qui, dans son tombeau, pousse des soupirs aussi gros que les sons d’un cor de chasse ; soupirs, en un mot, si terribles, que le jeune Arsace, vaillant et intrépide guerrier qui revient de l’armée, en est effrayé comme un enfant.

1782. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Et finalement, par l’intermédiaire du symbole, dont il a ressaisi la destination première, — qui est d’exprimer la parenté non moins certaine que confuse de l’idée pure et de la forme plastique, — toutes ces pièces, ou plutôt tous ces poèmes, ont ramené la poésie à la conscience de son objet et de sa fonction sociale. […] C’est donc ainsi qu’une platitude héritée des idéologues ou des encyclopédistes, et qui s’étale ingénument, sans horreur ni conscience d’elle-même, dans la prose d’un Villemain, par exemple, et souvent même d’un Guizot ; une liberté qu’un Musset, un Lamartine, et en s’en vantant, ont poussée plus d’une fois jusqu’à l’incorrection ; une incohérence de métaphores, qui nous gêne presque dans quelques-uns des chefs-d’œuvre d’Hugo : Quand notre âme en rêvant descend dans nos entrailles, Comptant dans notre cœur qu’enfin la glace atteint ; Comme on compte les morts sur un champ de batailles, Chaque douleur tombée et chaque songe éteint ; des enchevêtrements de tours et de phrases qui font souvent de la prose de Sainte-Beuve, et notamment dans son Port-Royal, un modèle de préciosité ; une lourdeur puissante, mais aussi une vulgarité de manières, si l’on peut ainsi dire, une familiarité de mauvais ton qui rendent pour quelques délicats, La Cousine Bette ou Le Lys dans la vallée, si difficiles à lire, — rien de tout cela ne se retrouve ni dans les Poèmes barbares, ni dans l’Histoire de la littérature anglaise, ni dans Madame Bovary, ni dans la Vie de Jésus. […] Mais, sous l’action et dans le conflit apparent de tant d’influences du dehors, ceux qui ont craint que le génie français n’y perdît quelques-unes de ses qualités et la conscience même de son pouvoir, comment les ont-ils combattues ?

1783. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Pour moi, je ne puis que jeter de la poudre sur l’écriture de ces deux grands hommes, j’en bois fort peu ; et néanmoins ce sera une débauche, mais philosophique, et peut-être quelque chose davantage, pour être tous trois guéris du loup-garou et du mal des scrupules, qui est le tyran des consciences.

1784. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Je crois seulement que je ne crois à rien ; je me trompe cependant, je crois à ce qu’on appelle conscience, soit instinct, soit mauvaise habitude d’idées, soit effet de préjugés et de respect humain.

1785. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

Son discours pour le Portugal est l’œuvre d’une grande conscience.

/ 1833