Les Savans de toutes les Nations éprouverent sa liberalité, & la plupart furent appelés à sa Cour.
Pour se tirer d’un pareil sujet, il eût fallu la force d’idées, de couleurs, et d’imagination de Rubens, et tenter une de ces machines que les Italiens appellent opera da stupire.
Il a le scorbut ou les humeurs froides ; j’en appelle à Bouvart, mais vous me direz que Bouvart voit cette maladie partout.
ne les appelle hors de leur boutique pour exercer leurs bras charnus. […] Ce qu’on appelle nature dans l’homme, c’est l’homme tel qu’il est avant que la culture et la civilisation l’aient déformé et réformé. […] Je l’appellerai. — Oh ! […] Tout ce que nous appelons proportion et commodité fait défaut ; ils ne s’en embarrassent pas, ils n’en ont pas besoin. […] chère princesse, le sablier de ma vie n’a plus guère que quelques minutes à couler ; le sable est épuisé ; je sens les avertissements d’un messager intérieur et sûr qui m’appelle pour partir vite… Un remède ?
C’est ce que nous observons sur nous-mêmes dans l’évolution de cette tendance spéciale que nous appelons notre caractère. […] Le développement divergent des deux règnes correspond-il à ce qu’on pourrait appeler métaphoriquement l’oubli, par chaque règne, d’une des deux moitiés du programme ? […] Une telle définition ne s’appliquerait pas aux instincts que Romanes a appelés « secondaires », et plus d’un instinct « primaire » y échapperait. […] Cette inadéquation de l’acte à la représentation est précisément ici ce que nous appelons conscience. […] Notre attention est-elle appelée sur le changement interne d’un de ces états ?
Elles l’appelaient le plus beau des dix mille, le Fils unique de Dieu, le prophète du Dieu très-haut, le Roi d’Israël, le Fils éternel de la justice, le Prince de la paix, Jésus, celui en qui l’espoir d’Israël réside. […] Après qu’il l’eut considérée un peu de temps, il appela un homme pour la balayer. […] Il n’a point de peine à les appeler ou à les former. […] Et tous les habitants de la cité les appelaient les saints, les rachetés du Seigneur. — Et s’approchant de la cité, ils en eurent une vue encore plus parfaite. […] Pour y entrer, il ne reste à franchir qu’un courant profond où l’on perd pied, où l’eau trouble la vue, et qu’on appelle la rivière de la Mort.
Il est celui de tous nos Poëtes qui paroît avoir le mieux réussi dans ce qu’on appelle le grand monde.
Si ce qu’il appelle ses Idylles, renfermoit autant de sentiment qu’on y remarque d’esprit & de délicatesse, on pourroit regarder ces petits Poëmes comme des chef-d’œuvres.
Ce nom est destiné sans doute à figurer à la tête de tout ce qui s’appelle Dictionnaire ou Compilation.
Languet ait figuré avec avantage dans un parti contraire au sien, si l’on doit appeler parti, celui de l’Eglise, auquel M.
Rosny a en haine ce qu’on appelait les parvenus. […] Il a horreur des mésalliances, et il appelle de ce nom les mariages des enfants de la noblesse d’épée « aux fils et filles de ces gens de robe longue, financiers et secrétaires, desquels les pères ne faisaient que de sortir de la chicane, de la marchandise, du change, de l’ouvroir et de la boutique ». […] Cette fortune ressemble à ces grands arbres qu’il a plantés, appelés des Rosny, et qui ont été des siècles à prendre leurs dimensions et leur beauté majestueuse.
Mézeray, nous racontant la Saint-Barthélemy et le contrecoup de cette nuit sanglante dans les provinces, me fait l’effet d’un historien qui raconterait les massacres de Septembre après en avoir recueilli toutes les circonstances dans les auteurs originaux et de la bouche de quelques témoins survivants : un historien qui déroulerait aujourd’hui, comme il le fait, la longue traînée de forfaits qui s’alluma à ce signal dans les provinces, la bande de massacreurs en bonnets rouges à Bordeaux, les massacres des prisons à Rouen en dépit du gouverneur, « si bien qu’il y fut assommé, tué ou étranglé six ou sept cents personnes qu’ils appelaient par rôle les uns après les autres », les scènes de Lyon qui surpassèrent tout le reste en horreur, arquebusades, noyades dans le Rhône, le tout par le commandement de Pierre d’Auxerre, homme perdu de débauche, arrivé tout exprès de Paris, le Collot d’Herbois de ce temps-là ; — un historien qui écrirait, de nos jours, ces mêmes pages de Mézeray, paraîtrait avoir voulu faire des allusions aux personnages et aux événements de la Révolution française : et c’est en cela que le récit de Mézeray me paraît préférable à tous autres et d’un intérêt inappréciable, en ce que l’historien, encore à portée de ces temps, a résumé dans son propre courant tous les narrateurs originaux du xvie siècle, et qu’en nous rendant naïvement les faits et les impressions qu’ils excitent, il nous en fait sentir l’expérience toute vive, sans soupçon de complication ni de mélange. […] Ce fut le Journal des savants, imaginé par M. de Sallo, et bientôt dirigé par l’abbé Gallois, qui se chargea de remplir imparfaitement une partie du programme de Mézeray, qu’il faut peut-être appeler aussi bien le programme de Colbert. […] Il s’était pris d’amitié dans les dernières années pour un cabaretier de La Chapelle-Saint-Denis nommé Le Faucheur ; il l’appelait son compère, et fit de lui en mourant son héritier.
L’année suivante (1670), il fut appelé à prêcher l’Avent en présence de Louis XIV, puis le Carême en 1672, et depuis lors il reparut dix fois à la Cour avec le même succès65. […] C’est la merveille à laquelle a su atteindre celui que ses contemporains appelaient le grand Bourdaloue, et que nous nous obstinons à ne plus appeler que l’estimable et judicieux Bourdaloue.
Lorsque Bourdaloue parut dans la chaire (1670), un grand événement excitait au plus haut degré l’intérêt dans l’Église de France : les querelles envenimées entre ceux qu’on appelait jansénistes et le pouvoir temporel et spirituel, l’espèce de proscription qui avait mis quelques-uns des principaux chefs du parti à la Bastille, et qui avait dispersé les autres en tous sens, venaient tout d’un coup de s’apaiser ; Rome elle-même avait donné le signal de cette indulgence ; il y avait la paix de l’Église, qui ne devait être qu’une trêve. […] À travers cette sévérité apparente et en partie réelle, il s’attachait à reconnaître ceux qu’il appelait des esprits superbes, ceux « qui se regardaient et se faisaient un secret plaisir d’être regardés comme les justes, comme les parfaits, comme les irrépréhensibles ; … qui de là prétendaient avoir droit de mépriser tout le genre humain, ne trouvant que chez eux la sainteté et la perfection, et n’en pouvant goûter d’autre ; … qui, dans cette vue, ne rougissaient point, non seulement de l’insolente distinction, mais de l’extravagante singularité dont ils se flattaient, jusqu’à rendre des actions de grâces à Dieu de ce qu’ils n’étaient pas comme le reste des hommes : Gratias tibi ago, quia non sum sicut cœteri hominum ». […] Admettez que tous les Jésuites aient ressemblé à Bourdaloue pour la doctrine, ce qu’on a appelé jansénisme devenait inutile et n’avait plus de raison d’être.
Il appartenait à la même bourgeoisie parlementaire, étant le fils, mais le fils naturel, d’un maître des comptes appelé L’Huillier. […] Tout cela, malgré ce qu’on y appelait esprit, est détestable. […] On appela les charpentiers… Comme le roulis m’empêchait de dormir, je m’étais jeté sur mon lit en bottes et en robe de chambre : mon chien paraissait saisi d’un effroi extraordinaire.
Regardons en haut : comment se fait-il que nous ignorions si aisément ce qu’on peut appeler la géographie des cieux ? […] Bientôt l’accès en est devenu facile aux commençants eux-mêmes, par la découverte de cette nomenclature précise comme l’algèbre, pure et sonore comme une langue antique, qu’on aime à entendre appeler la nomenclature française. […] Pour moi, simple rapporteur et jusqu’ici très peu juge en ces matières, j’ai été amené naturellement à m’en occuper, au moment où des devoirs nouveaux m’appellent à un enseignement imprévu52.
Est-ce là ce qu’on appelle de la philosophie ? […] Je ne suis pas entêté de mes opinions politiques à ce point. » Parmi ses correspondants illustres, deux surtout, par le contraste, appellent le regard : Lamennais, Chateaubriand. […] Cependant, on se serait rapproché dans le détail, et on se serait entendu pour ce qui est de l’exécution littéraire ; car il est le premier à reconnaître que les idées les plus utiles, sans l’art qui les met en œuvre, sont comme non avenues : « La perfection du style doit être recherchée de tous ceux qui se croient appelés à répandre des idées utiles.
Montaigne, retiré vers l’âge de trente-huit ans dans son château et dans sa tour seigneuriale, s’était amusé à tracer ou à faire tracer sur les poutres et chevrons supérieurs de la pièce qu’il appelait sa librairie ou bibliothèque quelques inscriptions morales et philosophiques, reproduisant les maximes ordinaires de sagesse qu’il tenait à avoir constamment devant les yeux. […] Je suis obligé d’en sortir, et le public, dès qu’on lui a nommé Montaigne, nous appelle sur un terrain plus étendu. […] J’appelle Montaigne « le Français le plus sage qui ait jamais existé. » 22.
Quelles furent les causes qui amenèrent un politique si profond, si ambitieux, si habile, émancipé et souverain depuis l’âge de quinze ans, initié dès lors aux plus grandes affaires, qui avait reçu coup sur coup en héritage des royaumes et des mondes, avait brigué et obtenu l’Empire, qui défendait, la Catholicité et aux frontières contre les mécréants, et au cœur contre les hérétiques, qui avec toutes ses couronnes recommençait presque la grandeur et l’universalité de la puissance de Charlemagne (moins, il est vrai, ce quartier du milieu qu’on appelle la France), — quelles raisons, dis-je, quels motifs véritables ramenèrent un jour à renoncer à tout cela en plein démêlé, en plein écheveau d’affaires, à se démettre à l’âge de cinquante-cinq ans, à se confiner dans un cloître, à vouloir y mourir ? […] il viendra, quelques années après, un sage appelé Montaigne qui remettra tout à sa place et à son rang dans l’estime, et qui ayant à développer cette idée, qu’un père sur l’âge, « atterré d’années et de maux, privé par sa faiblesse et faute de santé de la commune société des hommes, se fait tort et aux siens de couver inutilement un grand tas de richesses, et que c’est raison qu’il leur en laisse l’usage puisque la nature l’en prive », ajoutera pour illustrer sa pensée : « La plus belle des actions de l’empereur Charles cinquième fut celle-là, à l’imitation d’aucuns Anciens de son calibre, d’avoir su reconnoître que la raison nous commande assez de nous dépouiller, quand nos robes nous chargent et empêchent, et de nous coucher quand les jambes nous faillent : il résigna ses moyens, grandeur et puissance à son fils, lorsqu’il sentit défaillir en soi la fermeté et la force pour conduire les affaires avec la gloire qu’il y avoit acquise : Solve senescentem… » Mais entrons un peu plus avant dans les raisons qui persuadèrent à une de ces âmes d’ambitieux, si aisément immodérées, d’en agir si sensément et prudemment. […] Soyons un peu juges nous-mêmes : « Un jour (nous dit dans sa Relation naïve un bon moine de Saint-Just), l’empereur étant très satisfait de sa santé et de la bonne disposition où il était, fit appeler le père Fray Juan Regia, son confesseur, et lui dit : “Fray Juan, il m’a paru à propos de faire faire les obsèques et funérailles de mes parents, ainsi que de l’impératrice, puisqu’en ce moment je me porte bien et n’éprouve aucune douleur : que vous en semble ?”
Non content, dans ses ouvrages, de reproduire et de décrire les objets et les scènes qui étaient à sa portée, il s’est attaché d’une égale ardeur à rechercher curieusement dans le passé les maîtres desquels il pouvait relever, et qui, en suivant la même route, avaient laissé des traces remarquables dans les divers arts ; et c’est ainsi qu’en remontant dans l’École française de peinture, après avoir traversé les brillantes séries du xviiie siècle, où la nature elle-même, la plus simple, la plus inanimée ou la plus bourgeoise, a son éclat et sa vivacité de couleur dans les toiles de Chardin, il est allé s’arrêter de préférence devant des artistes bien moins en vue et moins agréables, devant les frères Le Nain, appartenant à la première moitié du xviie siècle, qui lui ont paru chez nous les premiers peintres en date de ce qu’il appelle la réalité. […] « On peut donner une façon matérielle de reconnaître les tableaux des Le Nain, à l’entassement de chaudrons, écuelles, légumes, qui se trouvent souvent sur le premier plan… « Ce sont des peintres de pauvres gens. » Théorie vraie, mais un peu absolue toutefois ; car, sans compter les tableaux de sainteté qui, par leur nature, sortent du programme, il faut toujours faire exception pour celui des trois frères qu’on appelait le chevalier Le Nain, le gros monsieur et le grand seigneur de la famille, celui qui peignait Cinq-Mars et Anne d’Autriche. […] Il te faut encore, et c’est là le plus beau triomphe, il te faut, tout en étant observée et respectée, je ne sais quoi qui t’accomplisse et qui t’achève, qui te rectifie sans te fausser, qui t’élève sans te faire perdre terre, qui te donne tout l’esprit que tu peux avoir sans cesser un moment de paraître naturelle, qui te laisse reconnaissable à tous, mais plus lumineuse que dans l’ordinaire de la vie, plus adorable et plus belle, — ce qu’on appelle l’idéal enfin.
»… Mais il fait beau, le temps sourit, l’été est radieux et splendide, tout vous appelle : jeune homme, laissez ces choses à ceux du métier, et si le trop de loisir ou d’activité vous tente, si le sang vous chatouille, dépensez votre zèle ailleurs ; allez à Ems, allez à Spa, et laissez-nous le soin, par ce soleil d’août, d’ajuster nos phrases qui nous clouent à notre fauteuil. […] C’est un exposé des raisons qui décidèrent La Rochefoucauld (qu’on appelait encore à cette date le prince de Marsillac) à se jeter dans la Fronde et à déclarer la guerre à Mazarin. […] Pour l’un, c’est la littérature morale et haute, sévère et abstraite, ce qu’il appelle l’esprit pur, qui lui fait illusion ; pour l’autre, c’est la littérature négligente, aimable et facile, la seule joyeuse et vraiment heureuse ; pour un autre, c’est la marotte d’une noble cause dont il se figure être la personnification vivante et le représentant tout chevaleresque.
Le mot de Cour chez lui revient assez à ce qu’on a appelé depuis la bonne société. […] En les indiquant sans les nommer, Vaugelas les salue encore avec respect et les appelle nos maîtres ; car il est toujours poli jusque dans sa contradiction et dans la critique qu’il fait des personnes et des auteurs. […] D’un tout autre avis que Malherbe et que Platon qui, lui aussi, appelait le peuple son maître de langue, s’il se confine trop au ton des salons, il tâche du moins de retendre et de le fortifier par le contrôle des bons livres.
Chaucer, le premier en date des poètes et conteurs anglais, est un disciple des trouvères et auteurs de fabliaux : il y joint pourtant, dans le tour et la façon, quelque chose de bien à lui ; il a déjà de ce qu’on appellera l'humour et une grande vivacité naturelle de description : on l’a heureusement comparé à une riante et précoce matinée de printemps. […] J’aimerais en littérature à proportionner toujours notre méthode à notre sujet et à entourer de soins tout particuliers celui qui les appelle et qui les mérite. […] Tout enfant, doué d’un doux regard, doué surtout de la plus douce voix, on l’appelait « le petit rossignol ».
C’est l’histoire de Jean-Jacques et de tant d’autres qui valaient moins que lui. » Voilà ce que j’appelle des jugements irréfragables, de première main, et qui tous concourent dans une même impression. […] En un mot, il lui aurait fallu cette grande foire humaine et à marché ouvert qu’on appelle le Directoire ; toutes les ambitions, toutes les compétitions, toutes les cupidités à nu ; et les plaisirs à l’avenant : une Régence. […] Elle lui prêtait de son rayon, et, en l’aimant, elle restait fidèle encore à son programme de jeune fille : « Dans les âmes honnêtes et délicates, l’amour ne se présente jamais que sous le voile de l’estime. » Je viens de relire les Mémoires de Buzot ou ce qu’on appelle ainsi, les pages d’apologie écrites par lui au milieu de sa proscription : elles sont assez véhémentes et animées d’une vertueuse indignation, mais ternes, sans intérêt pour nous aujourd’hui, sans un éclair.
Le Conseil se réunit au sortir de là ; il venait de s’ouvrir lorsqu’un officier de service entra, s’approcha du roi et lui parla à voix basse : le roi, appelé par la reine, sortit, et en rentrant il ajourna la délibération, disant qu’elle serait reprise à Versailles. […] MM. de Breteuil et de La Vauguyon seront demain appelés au Conseil. […] C’est par de telles inconséquences et tergiversations, on ne doit jamais l’oublier, que cette Cour imprudente et inconsistante se vit amenée à un conflit déclaré avec cette ingrate nation : ces deux imputations opposées, ingrate et inconsistante, appliquées chacune à qui de droit, s’appellent et se répondent ; il serait injuste de faire aller l’une sans l’autre.
Après tout, en parlant ainsi, c’est pour leurs goûts et leurs préférences, c’est pour leur art favori, c’est pour leur maison qu’ils plaident : « Lire les auteurs anciens, quelques centaines de volumes, en tirer des notes sur des cartes, faire un livre sur la façon dont les Romains se chaussaient, ou annoter une inscription — cela s’appelle l’érudition ; on est un savant avec cela ; on est de l’Institut, on est sérieux, on a tout : mais prenez un siècle près du nôtre, un siècle immense ; brassez une mer de documents, trente mille brochures, deux mille journaux, tirez de tout cela non une monographie, mais le tableau d’une société, vous ne serez rien qu’un aimable fureteur, un joli curieux, un gentil indiscret. […] Non-seulement ils aiment le xviiie siècle par excellence, le nôtre, mais en général ils aiment tous les xviiies siècles et les préfèrent décidément à ce que j’appellerai les xviies siècles, c’est-à-dire aux âges d’un goût plus large et plus simple, d’une autorité plus légitime et plus établie. […] Dans son volume de Louis XV, un de ses moins bons d’ailleurs, un de ceux où l’auteur abuse le plus de ce que j’appellerai l’illuminisme de l’histoire.
Il n’était pas sans un certain goût pour les vers, les couplets, ce qu’on appelle les choses de l’esprit. […] Ce sont des aménités de cet ancien régime où les meilleurs d’entre les grands seigneurs et les gentilshommes avaient peine à se défendre (même quand ils n’y aidaient pas) du zèle de ceux qu’ils appelaient mes gens. […] A ce dernier trait prévu, l’aimable nièce de M. de Feletz baissait les yeux, le spirituel vieillard lançait un vif éclat de rire, et toute la table faisait écho. — Et c’est là ce que j’appelle du bon xviiie siècle.
de Talleyrand : « Ce ministre, qui posséda si éminemment, dit-il, l’art de la société, et qui en a si souvent usé avec succès, tantôt pour imposer à ceux qu’on voulait détruire, en leur faisant perdre contenance, tantôt pour attirer à lui ceux dont on voulait se servir, fit à M. de Senfft un accueil assez froid (avril 1806). » Ce ne fut qu’un peu plus tard, lorsque M. de Talleyrand eut quitté le ministère et perdu la faveur, que Mme de Senfft, personne distinguée et généreuse, — ce qu’on appelle une belle âme, — se sentit prise pour lui d’une sorte d’attrait et de beau zèle, d’un mouvement admiratif qui n’échappa point au personnage et qui fixa pour l’avenir l’agrément de leurs relations. […] Il eut même un retour marqué de faveur lors du voyage d’Erfurt, où il fut appelé et très employé sous main par Napoléon auprès de l’empereur Alexandre (septembre-octobre 1808). […] » Voilà certes ce qui peut s’appeler une revanche de l’esprit sur le génie.
Jasmin (ou plutôt qu’il nous permette, pour toute familiarité, de l’appeler Jasmin tout court, comme nous disons Béranger), Jasmin donc n’est pas un laboureur ni un berger ; c’est un coiffeur d’Agen, déjà un peu connu ici par un article très-flatteur de Charles Nodier. […] Jasmin, en effet, était un libéral de la Restauration, et aujourd’hui il est ce qu’on appelle un homme du mouvement. […] Si Agen a été appelé l’œil de la Guyenne, Jasmin écrit dans le pur patois agenais ; il y a là quelque chose d’attique, en un certain sens.
remy, qui préconise uniquement chez les Anciens une certaine ingénuité et simplicité qu’on ne conteste pas, mais qu’il exagère, oublie tout à fait une autre qualité qu’ils n’ont pas moins, le tenuem spiritum, comme l’appelle Horace ; ce qui faisait dire encore à Properce dans une élégie que tout à l’heure nous rappellerons : Exactus tenui pumice versus eat. […] Chénier a eu d’abord et il n’a pas du tout perdu une qualité que les Grecs prisaient fort et qu’ils ne cessent d’exprimer, de varier, d’appliquer à toutes choses, je veux dire la jeunesse, la fraîcheur et la fleur, le èáëåñüí, si l’on me permet de l’appeler par son nom, le novitas florida de Lucrèce. […] La jeunesse l’aime, elle lui sourit ; cette vogue, qui passe si vite pour les auteurs, se renouvelle pour lui depuis déjà bien des printemps ; l’heure de réaction que vous appelez, et contre laquelle nul autre en nos jours n’est garanti, n’a pas encore sonné, ne vous en déplaise.
Mais, vers le même temps, il se faisait en elle, tout au dedans, un grand travail de soumission religieuse et de piété ; elle n’avait jamais été ce qu’on appelle dévote dans le courant de la vie ; elle arrivait aux sources élevées par réflexion, par refoulement solitaire, en vertu de toutes les puissances douloureuses qui l’oppressaient. […] De la lecture rapide qu’il m’a été donné de faire de l’un de ces ouvrages (Olivier), j’avais pris en note quelques pensées, notamment celles-ci : « Il y a des êtres dont on se sent séparé comme par ces murs de cristal dépeints dans les contes de fées : on se voit, on se parle, on s’approche, mais on ne peut se toucher. » « Il en est des maladies de l’âme comme de celles du corps : celles qui tuent le plus sûrement sont celles qu’on porte avec soi dans le monde ; il y a des désespoirs chroniques (si on osait le dire) qui ressemblent aux maux qu’on appelle ainsi : ils rongent, ils dévorent, ils détruisent, mais ils n’alitent pas. » « Le désaccord dans les mouvements du cœur irrite comme le désaccord en musique, mais fait bien plus de mal. […] Contrairement à ceux qui, n’approuvant plus une révolution et cessant de rien accepter d’une assemblée, s’abstiennent, se retirent plus ou moins, et émigrent à quelque degré, il y a ceux qui restent dedans, contestent à haute voix, disputent pied à pied, et meurent quand il le faut, mais en proférant des mots qui retentissent ; en regard du système de l’émigration, il y a le système qui se personnifie en Kersaint et qu’on pourrait appeler de son nom.
Il y a un sentiment fin et juste de la couleur, si l’on peut dire, des expressions et des langues dans la démonstration que Boileau entreprend ; mais la gaucherie de la forme est plus sensible que la vérité du fond, et l’on ne peut s’empêcher de sourire, quand on voit Boileau alléguer Thalès, Empédocle et Lucrèce, pour faire valoir la dignité de l’eau dans l’antiquité, quand il ne veut pas qu’Homère ait parlé du « boudin » : un « ventre de truie », à la bonne heure, voilà qui est noble ; ou quand enfin il aime mieux mettre aux pieds de Télémaque une « magnifique chaussure » que de « beaux souliers », et maintient obstinément qu’il ne faut pas appeler « cochons » ou « pourceaux » les animaux de nom « fort noble », en grec, dont avait soin le « sage vieillard » Eumée, qui n’était pas un « porcher ». […] Il y a même des genres de poésie que les Latins n’ont pas connus, comme « ces poèmes en prose que nous appelons romans ». […] Boileau ne le fit pas, et n’alla point au-delà des idées littéraires proprement dites : il ne regarda point les réalités psychologiques qui se cachent derrière ces abstractions, une langue, un genre : il n’y vit point les expressions de ces consciences collectives qu’on appelle des peuples, et ne se rendit pas compte que chaque nation façonne sa langue à son image, et que l’apparition et la disparition, la perfection et la décadence de ces formes organiques qui sont les genres, représentent la succession des états d’âme, la diversité des aptitudes intellectuelles et des aspirations morales des divers groupes de l’humanité.
C’est précisément ce qui est arrivé par l’introduction dans notre langue d’une forme de style que nous appellerions volontiers comparaison symbolique, ou, pour être plus bref, symbole. […] Après cela, mille causes accessoires y ont concouru : on a pris goût au style poétique de la Bible, qui était pour Voltaire un sujet d’ineffables risées ; on a pris goût aux littératures étrangères ; on a étudié l’Orient ; on a eu besoin d’émotions nouvelles ; le sentiment de la liberté et de l’individualisme s’est montré partout, s’est appliqué à tout ; enfin on retrouve ici, comme dans mille autres questions, l’influence de tout ce qui compose ce qu’on appelle l’esprit du siècle. […] Aussi appelle-t-il lui-même ses poèmes une aurore boréale nuancée de mille couleurs qui flambe sur une terre glaciale et déserte 9.
Mais ce premier chapitre grandiose, entremêlé çà et là d’apostrophes et d’allusions aux oisifs, de ce que j’appelle le Raynal ou la déclamation d’aujourd’hui, me plaît moins que l’histoire toute simple et tout agreste de Germain le fin laboureur. […] L’embarras de s’orienter redouble : « Le brouillard rampait et semblait se coller à la terre humide. » On rôde autour de cette maudite Mare au diable (c’est ainsi que l’appellent les gens du pays), et, après maint effort pour s’en éloigner, on y est toujours ramené comme par un sort. […] Ces deux bessons, dont l’un, venu une heure avant l’autre, s’appela Sylvain ou Sylvinet, et l’autre Landry, étaient pareils de tout point, et, tant qu’ils furent enfants, on eut peine à les distinguer l’un de l’autre.
Mais je reviendrai à fond sur ce prodigieux caractère de l’homme politique (si on peut appeler cela un homme politique), qui se révèle désormais à nu, et sans plus de masque, dans toute son humeur massacrante et sa verve exterminatrice : aujourd’hui je ne veux parler que du Chateaubriand romancier, romanesque et amoureux. […] Ce qu’on a appelé de l’égoïsme à deux restait chez lui de l’égoïsme à un seul. […] Ce sentiment instinctif et universel qui fait que pour tout mortel, même malheureux, la vie peut se dire douce et chère, qui fait aimer, regretter à tous les êtres, une fois nés, la douce lumière du jour, il l’appelle une manie.
Dans ce xviiie siècle qui avait eu le temps de tout raffiner, il se donna à la Cour, au mardi gras de 1763, un bal qu’on appela le Bal des mères ; la jeunesse, à proprement parler, fut spectatrice, et il n’y eut que les femmes de trente ans qui dansèrent. […] Pétrone, du milieu des scènes qu’il décrit, ne regrette-t-il pas quelque part ce qu’il appelle oratio pudica, le style pudique et qui ne s’abandonne pas à la fluidité de tous les mouvements ? […] Quand il était de loisir (et il trouvait souvent moyen de l’être, livrant ses journées à la fantaisie, consumant ses nuits au travail), il aimait à aller à la chasse de ce qu’il appelait les beaux morceaux.
ce qu’on appelle un enfant bien né ; il a un penchant au vice et à des vices bas ; il a des convoitises honteuses et cachées qui ne sentent pas le gentilhomme ; il a de ces longues timidités qui se retournent tout d’un coup en effronteries de polisson et de vaurien comme il s’appelle ; en un mot, il n’a pas cette sauvegarde de l’honneur, que M. de Chateaubriand eut, dès l’enfance, comme une sentinelle vigilante à côté de ses défauts. […] Les lecteurs français, habitués à l’air factice d’une atmosphère de salon, ces lecteurs urbains, comme il les appelle, s’étonnèrent tout ravis de sentir arriver, du côté des Alpes, ces bonnes et fraîches haleines des montagnes, qui venaient raviver une littérature aussi distinguée que desséchée.
Ce n’est point là non plus ce qu’on appelle une infidélité. […] En cette circonstance toutefois, et quelle que fût la réalité des motifs qu’il a exposés lui-même en toute nudité, il viola ce que les anciens appelaient la conscience du genre humain, et il coopéra à l’un de ces scandales qui ébranlent toujours la confiance des peuples dans le droit protecteur des sociétés. […] Henry appelle l’attention, et du point de vue auquel il les rapporte.
Un jeune militaire, qu’on appelait par confusion et par ricochet un petit-neveu de Voltaire, ne pouvait que trouver faveur à sa suite et au lendemain de son apothéose. […] Il l’aborda de préférence par le genre des pastorales et des nouvelles, et lui emprunta Galatée (1783), qu’il traita avec liberté d’ailleurs, et qu’il accommoda selon le goût du temps, en y donnant une teinte plus récente de Gessner : « J’ai tâché, écrivait-il à ce dernier, d’habiller la Galatée de Michel Cervantes comme vous habillez vos Chloés : je lui ai fait chanter les chansons que vous m’avez apprises, et j’ai orné son chapeau de fleurs volées à vos bergères. » Ce roman pastoral, mêlé de tendres romances, réussit beaucoup : toutes les jeunes femmes, tous les amoureux en raffolèrent ; les sévères critiques eux-mêmes furent fléchis : « C’est un jeune homme d’un esprit heureux et naturel, écrivait La Harpe parlant de l’auteur de Galatée, et qui aura toujours des succès s’il ne sort pas du genre où son talent l’appelle. » Il est vrai que, peu de temps auparavant, le chevalier de Florian avait adressé au même M. de La Harpe des vers d’enthousiasme, au sortir de la représentation de Philoctète : Je ne sais pas le grec mais mon âme est sensible ; Et, pour juger tes vers, il suffit de mon cœur ! […] Il avait terminé l’un des livres de ses Fables par ces vers, qui pourraient être plus forts d’expression, mais qui sont pleins de sentiment et de philosophie, et qu’il a intitulés Le Voyage : Partir avant le jour, à tâtons, sans voir goutte, Sans songer seulement à demander sa route, Aller de chute en chute, et, se traînant ainsi, Faire un tiers du chemin jusqu’à près de midi ; Voir sur sa tête alors s’amasser les nuages, Dans un sable mouvant précipiter ses pas, Courir, en essuyant orages sur orages, Vers un but incertain, où l’on n’arrive pas ; Détrompé, vers le soir, chercher une retraite, Arriver haletant, se coucher, s’endormir, On appelle cela naître, vivre et mourir : La volonté de Dieu soit faite !
En philosophie, un jour que son professeur le fit taire, il se leva et sortit de la classe, suivi d’un camarade appelé Beaurain qui était en tout son second. […] Versailles est son temple ; toutes les merveilles du monde y sont pour lui rassemblées ; il remarque seulement que ce qu’il appelle les Muses y tient moins de place que le reste, et il croit y suppléer avec des descriptions à la Scudéry et des madrigaux à la Benserade. […] L’auteur y mêlait, par une diversité agréable et judicieuse, les princes, les cardinaux, les ministres d’État, les hommes de guerre, les savants, les poètes, les ingénieurs, les artistes, ceux qu’on appelait encore à cette date les artisans.
Son livre n’était pas un ouvrage régulier : il avait eu d’abord l’idée, disait-il en commençant, d’écrire une histoire générale de la nature ; mais bientôt, renonçant à un plan trop vaste, il s’était borné à en rassembler quelques portions, et, comme il les appelait, des ruines, n’y laissant debout que le frontispice. […] Mainte page de Bernardin appellerait la même remarque. […] « Dans cette halte de victoires qu’on appelait la paix, au bruit de ces crosses de fusils posées un moment à terre », il a montré le public d’élite accouru en foule à cette paisible fête littéraire, les bancs des académiciens envahis, l’auditoire en attente, et il s’est écrié : Quel contraste dans toutes les âmes, entre ces purs, ces gracieux souvenirs et ce ciel d’airain ?
Aussi est-il juste de comparer, avec William James, le mécanisme de la pensée au phénomène électrique qu’on appelle l’aurore boréale, où l’équilibre entre l’électricité terrestre et celle des particules glacées de l’atmosphère est sans cesse rompu et rétabli, où les inductions électriques sont perpétuelles, de manière à produire des irradiations sur des points continuellement changeants : les rayons lumineux qui jaillissent successivement, l’un ici, l’autre là, sont associés entre eux comme le sont nos idées, c’est-à-dire qu’en réalité ils ne se produisent pas l’un l’autre, mais sont produits l’un après l’autre par une cause commune, la tension générale, et par les conditions particulières qui la font se décharger successivement ici et là ; chaque idée est comme une irradiation sur un point particulier, révélant à la fois la tension générale et la décharge particulière du magnétisme intérieur. […] Seulement, un esprit ordinaire se contentera de remarquer une similitude entre deux idées sans en tirer des conséquences et sans remonter aux principes ; un Franklin, habitué à ce que Platon appelait la chasse aux ressemblances, partira de là pour concevoir sous les contrastes visibles des similitudes cachées et pour les vérifier par l’expérimentation. […] On pourrait appeler cette loi profonde d’association « loi de sélection sensible », puisqu’elle fait de notre sensibilité une force d’attraction et de répulsion.
Mais faut-il donc attendre que la secte du Romantisme (car c’est ainsi qu’on l’appelle), entraînée elle-même au-delà du but où elle tend, si toutefois elle se propose un but, en vienne jusque-là, qu’elle mette en problème toutes nos règles, insulte à tous nos chefs-d’œuvre, et pervertisse, par d’illégitimes succès, cette masse flottante d’opinions dont toujours la fortune dispose ? […] Je me hâte d’arriver à ce que j’appellerai le Romantisme français ou plutôt gaulois ; romantisme bâtard, qui n’a ni la même énergie, ni la même audace, ni les mêmes excuses que le romantisme teutonique. […] Rassurons-nous : cette tristesse systématique de leurs écrits n’empêche pas que leur humeur ne soit gaie et leur existence joyeuse ; de même que le génie, qu’ils appellent une maladie, ne porte heureusement aucune atteinte à leur brillante santé.
Le sujet que devait traiter Mme Stern devait faire au moins six volumes et cela devait naturellement s’appeler : La République des Pays-Bas, mais la femme en domino, sous son nom d’homme, devait avoir peur de six volumes à mettre debout et à lancer ! […] Aucune de ces trois choses qui font la femme tout entière, aucun de ces trois rayons qui composent cette jolie petite foudre qu’on appelle une femme, et qui peut tomber sur nos cœurs, n’est en Mme Stern. […] Mme de Staël, que des critiques sans observation et sans justice se sont permis d’appeler une virago, avait dans sa grosse tête, — et de femme, malgré sa grosseur, — plus d’homme cent fois que Mme Stern n’en a dans la sienne.
Cela n’empêcha point que, dans des panégyriques de son temps, et même après sa mort, il n’ait été appelé le grand Henri III. […] Ces puérilités s’appelaient alors de l’éloquence ; et Duperron comme orateur, et Ronsard comme poète, sont aujourd’hui également inconnus. […] En effet, qu’on suppose un orateur doué par la nature de cette magie puissante de la parole, qui a tant d’empire sur les âmes et les remue à son gré ; qu’il paraisse aux yeux de la nation assemblée pour rendre les derniers devoirs à Henri IV ; qu’il ait sous ses yeux le corps de ce malheureux prince ; que peut-être, le poignard, instrument du parricide, soit sur le cercueil et exposé à tous les regards ; que l’orateur alors élève sa voix, pour rappeler aux Français tous les malheurs que depuis cent ans leur ont causés leurs divisions et tous les crimes du fanatisme et de la politique mêlés ensemble ; qu’en commençant par la proscription des Vaudois et les arrêts qui firent consumer dans les flammes vingt-deux villages, et égorger ou brûler des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, il leur rappelle ensuite la conspiration d’Amboise, les batailles de Dreux, de Saint-Denis, de Jarnac, de Montcontour, de Coutras ; la nuit de la Saint-Barthélemi, l’assassinat du prince de Condé, l’assassinat de François de Guise, l’assassinat de Henri de Guise et de son frère, l’assassinat de Henri III ; plus de mille combats ou sièges, où toujours le sang français avait coulé par la main des Français ; le fanatisme et la vengeance faisant périr sur les échafauds ou dans les flammes, ceux qui avaient eu le malheur d’échapper à la guerre ; les meurtres, les empoisonnements, les incendies, les massacres de sang-froid, regardés comme des actions permises ou vertueuses ; les enfants qui n’avaient pas encore vu le jour, arrachés des entrailles palpitantes des mères, pour être écrasés ; qu’il termine enfin cet horrible tableau par l’assassinat de Henri IV, dont le corps sanglant est dans ce moment sous leurs yeux ; qu’alors attestant la religion et l’humanité, il conjure les Français de se réunir, de se regarder comme des concitoyens et des frères ; qu’à la vue de tant de malheurs et de crimes, à la vue de tant de sang versé, il les invite à renoncer à cet esprit de rage, à cette horrible démence qui, pendant un siècle, les a dénaturés, et a fait du peuple le plus doux un peuple de tigres ; que lui-même prononçant un serment à haute voix, il appelle tous les Français pour jurer avec lui sur le corps de Henri IV, sur ses blessures et le reste de son sang, que désormais ils seront unis et oublieront les affreuses querelles qui les divisent ; qu’ensuite, s’adressant à Henri IV même, il fasse, pour ainsi dire, amende honorable à son ombre, au nom de toute la France et de son siècle, et même au nom des siècles suivants, pour cet assassinat, prix si différent de celui que méritaient ses vertus ; qu’il lui annonce les hommages de tous les Français qui naîtront un jour ; qu’en finissant il se prosterne sur sa tombe et la baigne de ses larmes : quelle impression croit-on qu’un pareil discours aurait pu faire sur des milliers d’hommes assemblés, et dans un moment où le spectacle seul du corps de ce prince, sans être aidé de l’éloquence de l’orateur, suffisait pour émouvoir et attendrir ?
Un peu plus loin, le gracieux abbé rapporte que Mme de Vieuxpont appela son mari en duel. […] Qu’il dise le mot vrai et bas ; qu’il appelle mon père l’ami intime du meurtrier de son père. […] Il avait suivi Cyrus comme volontaire, appelé par Proxénos son hôte, un des généraux. […] Ils ne sont point soutenus par cette vanité généreuse qu’on appelle l’honneur, mais par leur bon sens et leur droit jugement. […] Cette toile m’attire, m’appelle, m’envahit, m’absorbe ; je vais à elle malgré moi, comme l’oiseau va au serpent !
Le prince des Sept : celui que vous autres vous appelez l’orgueil. […] J’appelai, — nul ne répondit. […] Je m’appelle Norbert de Gloussat. […] J’appelle cela de l’indiscrétion et de l’ingratitude. […] Et, empruntant une définition à Flaubert, j’appelle bourgeois « celui qui pense bassement ».
Il semble donc une qualité permanente dans ce groupe de possibilités permanentes que nous appelons le corps. […] Quelle que soit sa cause, sitôt qu’elle naît, la couleur naît et, en même temps, ce que nous appelons la figure visible. […] S’il est piqué, il se figure la forme, la couleur, la distribution des petits filets blanchâtres et mollasses qu’on appelle nerfs et que la piqûre a touchés. […] Mais, cela fait, quel que soit l’objet, une sphère, un cube, même une étendue considérable, par exemple une rue, ils le pensent d’un seul coup et se le représentent en bloc. « Il ne nous manque, disent-ils, que ce que vous appelez l’idée de la couleur ; l’objet est pour nous ce qu’est pour vous un dessin, une épreuve photographique sans ombres portées, plus exactement encore un ensemble de lignes. […] Y a-t-il quelque chose de réel qui corresponde à ce fantôme que la sensation suscite en nous et que nous appelons un corps ?
Il avait épousé mademoiselle Didot et en avait eu un fils appelé Paul. […] Le père de Molière s’appelait Poquelin ; il était tapissier, valet de chambre du roi. […] Cette femme avait une fille de quatorze ou quinze ans, qui regardait Molière comme son père, et qui l’appelait son mari depuis son enfance. […] Je n’épargnai rien, à la première connaissance que j’en eus, pour me vaincre moi-même, dans l’impossibilité que je trouvai à la changer ; je me servis pour cela de toutes les forces de mon esprit ; j’appelai à mon secours tout ce qui pouvait contribuer à ma consolation. […] comme dans sa détresse il appelle à son aide tous les secrets de son art infernal !
Samedi 7 mars Je ne sais qui m’appelait hier « triomphateur ». […] Il ne portait pas dans la vie courante, le nom nobiliaire de son père, mon grand-père, le député du Bassigny en Barrois à la Constituante, ne voulant être appelé que M. […] Je redoute le soir, où on me dira : On ne vous joue plus, tel jour, et cependant je l’appelle ce jour, où on me dira cela. […] Elle excelle à peindre en toutes ses variétés, — ce type assez commun à Paris — des femmes, aux caresses de la parole, où l’on perçoit je ne sais quoi de malveillant dont on ne peut se fâcher, en un mot ces femmes vraiment artistes pour introduire un filet de vinaigre dans leurs amabilités, et qui fait ressembler leurs compliments, à la sauce italienne, appelée acre dolce. […] Car enfin ces paysages historiques sont tout aussi intéressants que ce qu’on appelle un monument historique : une église, un château, une maison.
Daudet, ce soir, est repris de son idée de la fondation d’une revue qui s’appellerait la « Revue de Champrosay » où il serait prêt à mettre cent mille francs, et où il grouperait autour de lui notre monde, dont il payerait la copie, comme aucun directeur ne l’a fait jusqu’ici. […] Une femme noire, immobilisée par le froid, sous un ciel, où la lune met un rayonnement blême dans le moutonnement des nuages couleur de suie, près de cette eau morne aux lueurs saumonées, trémolente sur la fluctuation lente du fleuve, — près de cette eau de suicide, qui semble appeler à elle. […] Un jour que Dumas l’avait fait appeler, se croyant souffrant, et qu’il était au lit, on introduisait un pauvre journaliste nécessiteux de Marseille, qui venait lui demander des recommandations pour des journaux de Paris. […] Je m’enfonce parmi ces hommes, aux cheveux tuyautés tout droits, aux larges épaules, à l’étroit bassin, à la peau briquetée, vêtus du pagne plissé, appelé schenti, et tenant entre le pouce et l’index de la main gauche un petit sceptre, et de l’autre un bâton d’honneur ; vêtus d’une peau de panthère, quand ils sont des prêtres. […] Il se nomme Hermon, et est aussi appelé Nilos ; Syrien de naissance, de la ville de Bambyce ; environ dix-huit ans, taille moyenne, sans barbe, creux au menton, signe près de la narine gauche, cicatrice au-dessous du coin gauche de la bouche, le poignet droit marqué de lettres barbares ponctuées.
Montchrétien ne manque pas à cette loi : à l’appui des vérités économiques, il appelle ici la religion, là le patriotisme ; la charité, l’humanité, autorisent ses démonstrations. […] À toute heure on l’appelle. […] C’est cela qu’il reconnaît par un acte d’intelligence, qu’il accepte par un acte de volonté : ce double acte, voilà ce qu’il appelle adorer les jugements de Dieu. […] Elle appelle la raison, non la conscience, à juger les actions : elle présente les caractères dans leur rapport au vrai. […] Taine appelle si bien un « résidu évaporé ».
Mais hors des faits et du raisonnement, ce qu’on appelle le développement pathétique ne saurait être que l’amplification creuse, à grand renfort d’épithètes et de périphrases.
Tout le monde fait que M. de Clermont-Tonnerre est ce même Evêque de Noyon qui s’est rendu ridiculement célebre par son faste bruyant, par le galimatias de ses Sermons, par la singularité de ses Lettres Pastorales, & plus encore par sa vanité, qui ne lui permettoit, dit-on, d’appeler son Auditoire que Canaille Chrétienne.
Il s’appelle François-Thomas, & non Jacques ; il est vivant, & non mort : double erreur, dont nous nous étions rendus coupables dans la premiere Edition, & qu’il nous a joliment reprochée par une Lettre insérée dans le Mercure du mois d’Avril 1773.
Le tendre Appelle, un jour, dans ces jeux si vantés, Qu’Athenes autrefois consacroit à Neptune, Vit, au sortir de l’onde, éclater cent beautés ; Et, prenant un trait de chacune, Il fit de sa Venus un portrait immortel.
Une réserve dont on doit lui savoir gré, c’est que la vivacité de son imagination n’a jamais laissé échapper aucun trait contre la Religion, aucun de ces transports qu’on appelle philosophiques, aucune de ces saillies licencieuses qui coutoient si peu aux Grécourt, aux Chaulieu, & à quelques autres qui n’avoient jamais tant d’esprit que pour le vice & contre Dieu.
Ce n’est pas tant l’estime des Princes de son temps [estime qui le faisoit appeler alors le Poëte des Princes & le Prince des Poëtes] que l’approbation de Lafontaine, de Despréaux, de J.
Elle chantait sa mère, elle appelait la gloire, Elle enivrait la foule… et les femmes tremblaient. […] La seconde fille de Mme Desbordes-Valmore, poète également si l’on peut appeler de ce nom la sensibilité elle-même, avait plutôt en elle la faculté de souffrir de sa mère, cette faculté isolée, développée encore et aiguisée à un degré effrayant ; pauvre enfant inquiet, irritable, malade sans cause visible, elle se consumait, elle se mourait lentement, et par cela seul qu’elle se croyait moins regardée et favorisée, moins aimée ; devenue l’objet d’une sollicitude continuelle et sans partage (car elle était restée seule au nid maternel), rien ne pouvait la rassurer ni apprivoiser sa crainte, et la plus tendre chanson de sa mère ne faisait que bercer son tourment sans jamais réussir à l’apaiser ni à l’endormir : Inès Je ne dis rien de toi, toi la plus enfermée.
Il voulait que les lumières fussent de bon ton, que la philosophie fût à la mode ; mais il ne soulevait point les sensations fortes de la nature ; il n’appelait pas du fond des forêts, comme Rousseau, la tempête des passions primitives, pour ébranler le gouvernement sur ses antiques bases. […] Lorsque nous sommes émus, le son de la voix s’adoucit pour implorer la pitié, l’accent devient plus sévère pour exprimer une résolution généreuse ; il s’élève, il se précipite lorsqu’on veut entraîner à son opinion les auditeurs incertains qui nous entourent : le talent, c’est la faculté d’appeler à soi, quand on le veut, toutes les ressources, tous les effets des mouvements naturels ; c’est cette mobilité d’âme qui vous fait recevoir de l’imagination l’émotion que les autres hommes ne pourraient éprouver que par les événements de leur propre vie.
Elle songea à se nommer Académie des beaux esprits, ou Académie de l’éloquence, ou Académie éminente, et finit par s’appeler du meilleur et du plus simple nom : Académie française. […] Un peu trop savant pour l’usage des honnêtes gens, puisqu’il reproduit le plan du Thésaurus grec de Henri Estienne et classe les mots par racines et dérivés, il ne contenait que la langue de la société polie, les termes d’usage universel, qui sont les signes nécessaires de ces idées qu’on pourrait appeler le domaine commun des intelligences.
Et ce n’est point là, comme vous le pourriez croire, un simple accès de fièvre : car, d’abord, il appelle couramment son père dans le reste du journal : « mon bâtard de père » ; puis, relisant vingt ans après la page que j’ai citée, il ajoute en marge : « Ne rougis-tu point, au fond du cœur, en lisant ceci en 1835 ? […] Premièrement, il veut se faire aimer d’une petite comédienne, Mélanie Guilbert, qu’il appelle plus souvent Louason.
C’est Voltaire qui, lisant Athalie, s’exclamait : « On a honte de faire des vers quand on en lit de pareils. » Pareillement, et malgré l’autorité de notre aimable Marcel Prévost, qui, tout en continuant avec un dévouement dont on lui sait gré ce qu’il appelle la tradition des gentils conteurs, adresse à sa clientèle spéciale des consultations pour les maladies morales secrètes, et enseigne aux nobles lectrices du Temps, pour moitié protestantes et pour moitié israélites, les principes de la galanterie nationale et honnête, en un style troublant qui fleure le pot-au-feu au patchouli, malgré l’exemple du jeune et courageux écrivain, n’osons-nous plus tenter ces petits divertissements psychologiques pour peu que nous venions de relire ou Stendhal ou Balzac ou Tolstoï. […] Désiré Nisard appelait mélancoliquement la confusion des genres.
« Il les publie, dît-il dans sa préface, pour faire valoir l’esprit de ses illustres amies, et pour ne rien ôter à si reconnaissance et à leur gloire. » Il ajoute : « Je leur dois rendre le témoignage que leurs innocentes faveurs ont adouci tout le chagrin de ma vie et m’ont mis en état de me passer plus aisément de ce qu’on appelle fortune… Les femmes de qualité ont poli mes mœurs et cultivé mon esprit ; et comme je ne leur ai jamais eu d’obligation pour ma fortune, je n’ai jamais souffert auprès d’elles de servitude ni de contrainte. » Ces paroles ne sont pas d’un homme méprisable. […] M. de La Rochefoucauld appelait madame de La Fayette la vraie.
Des imbéciles incapables de saisir directement une pensée originale ; des imbéciles dont l’oreille fermée aux hommes est faite pour recueillir avec joie les échos, les bavardages des perroquets, les bafouillements des phonographes, vous appellent penseur, comme ils appellent astronome M.
Dans les produits simples de l’art plastique, dans la poésie de mots, le plaisir paraît dépendre immédiatement de l’excitation ; seules les œuvres dramatiques, parce que leur matériel est l’action humaine, appellent nécessairement un cortège d’émotions ordinaires, pénibles ou joyeuses, qui n’y prennent cependant, pour parler la langue de M. […] Relisant le livre, évoquant le tableau, faisant résonner à son esprit le développement sonore de la symphonie, l’analyste, considérant ces ensembles comme tels, les restaurant entiers, les reprenant et les subissant, devra en exprimer la perception vivante qui résulte du heurt de ces centres de force contre l’organisme humain charnel, touché, passionné et saisi4. » Et enfin (p. 217), « saisissant ainsi des intelligences telles quelles, les analysant avec une précision et une netteté considérables et les replaçant ensuite par une minutieuse synthèse dans leurs familles, leurs patries, leurs milieux, l’esthopsychologie, un ensemble d’études particulières de cette science, sont appelés à vérifier les plus importantes théories de ce temps sur la dépendance mutuelle des hommes, sur l’hérédité individuelle, sur l’influence de l’entourage physique et social ».
En effet, quoi de plus beau, même dans le talent le plus composé de facultés diverses, le plus brillant, le plus savant et le plus étonnant, que cet atome, céleste et mystérieux, qui manque souvent aux grands talents et que Mme de Staël, qui l’avait, appelait l’étincelle divine, — que ce rien qui est tout, qui se mêle à tout et qui fait qu’on est poëte ! […] Il y a dans le vicomte de Launay, que quelqu’un a appelé avec assez de justesse un chevalier de Malte de bal masqué, des contours d’esprit trop gracieux et trop révélateurs ; il y a dans ses mouvements trop de langueur et de légèreté vive pour qu’on puisse se méprendre à ce jeu d’un déguisement impossible.
Ce qu’on appelle le talent n’est pour rien dans cet écrit et dans ces lettres. […] Fleurange, que j’ai là sous la main, et qui précède le livre d’aujourd’hui, — le Mot de l’énigme, — est un livre de cette littérature médiocre et fluide qu’on peut appeler académique et que nulle originalité quelconque ne distingue, car à l’Académie, ce que ces douaniers de la littérature poursuivent comme de la fraude, c’est surtout l’originalité !