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1341. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Vous n’en retrouverez rien dans La Bruyère, qui, plus varié que Molière, a écrit sur tous les tons et peint toutes sortes de caractères. Sans doute on ne peut pas plus comparer La Bruyère à Molière qu’on ne compare le talent de peindre les caractères à celui de les faire agir et de faire sortir leurs traits de la situation où l’art sait les placer ; mais, supérieur à Molière par l’étendue, la profondeur, la diversité, la sagacité, la moralité de ses observations, il est son émule dans l’art d’écrire et de décrire, et son talent de peindre est si parfait, qu’il n’a pas besoin de comédiens pour vous imprimer dans l’esprit la figure et le mouvement de ses personnages. […] C’est peu que leurs conseils si je ne sais les suivre… Et qu’au moins vers ma fin je recommence à vivre ; Car je n’ai pas vécu ; j’ai suivi deux tyrans : En vain bruit et l’amour ont partagé mes ans… » Racine, homme plus grave, caractère plus élevé que ses trois amis, son tenait glorieusement sa marche dans la carrière qu’il s’était ouverte.

1342. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

Bienfaisance, réforme, espérance, l’amour du bien, un optimisme brillant et assez aimable, ce sont les caractères moraux qui le distinguent, et le tout se traduit volontiers dans un style élégant, un peu mou et trop adouci. […] En achevant de lire Pariset sur Pinel et Corvisart, j’ai pris aussitôt Cuvier sur les mêmes sujets, et j’ai senti toute la différence qu’il y a entre un homme instruit, disert, comme Pariset, qui a du feu, du coloris, de la sensibilité, mais qui déborde et divague souvent, et un esprit du premier ordre, toujours maître de lui et de son sujet, qui, en se hâtant, touche à tous les points essentiels, ne néglige aucun des caractères de l’homme, retrace le trait principal des doctrines sans se détourner jamais, marque en passant les rapports, les dépendances des diverses branches, signale les influences positives, soulève ou écarte les objections. […] On a fort apprécié surtout, dans ce dernier éloge, le talent consciencieux avec lequel le biographe a su rendre le caractère, non seulement du maître et du praticien, mais de l’homme, et ce soin curieux de recomposer par une foule de traits une figure originale.

1343. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Que nous importe après tout telle ou telle circonstance de sa vie, si les traits du caractère se dénoncent ? […] Une telle vocation semblerait indiquer des goûts austères ; mais ici cette vocation sait très bien se combiner avec des goûts romanesques, et c’est un trait encore et des plus essentiels dans le caractère de Mme de Genlis. […] De la grâce, de l’élégance dans la forme, une grande affabilité sociale, le discernement mondain des caractères et le talent de s’y insinuer, une teinte universelle de sentiment qui colorait et dissimulait la pédanterie, c’étaient là ses charmes dans la jeunesse.

1344. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Les Français, à travers toutes les formes de gouvernement et de société qu’ils traversent, continuent, dit-on, d’être les mêmes, d’offrir les mêmes traits principaux de caractère. […] Le caractère est bien soutenu, l’intrigue bel et bien nouée, les scènes pleines et sans langueur, l’action attachante et jusqu’à la fin en suspens, le style surtout dru, ample, aisé, délicieux. […] Dans Le Joueur, le caractère principal a beaucoup de vérité : cet homme, qui a joué, qui joue et qui jouera, qui, toutes les fois qu’il perd, sent revenir sur l’eau son amour, mais qui, au moindre retour de fortune, lui refait banqueroute de plus belle, cet homme est incurable ; il a beau s’écrier dans sa détresse : Ah !

1345. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

Enfin, il ne manque au caractère d’un Français rien de ce qui appartient à celui d’un agréable et galant homme. […] En envoyant ce portrait à ses amis d’Amérique, il faisait remarquer, par manière d’excuse, ce caractère propre à la nation française, de pousser l’éloge à l’extrême, tellement que la louange ordinaire, toute simple, devient presque une censure, et que la louange extrême finit, à son tour, par devenir insignifiante. […] Entre divers passages, en voici un que je choisis comme exprimant bien ce mélange de sérénité et de douce ironie, d’expérience humaine et d’espoir, qui fait son caractère habituel.

1346. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

Une littérature malade devait conduire naturellement les esprits réfléchis à cette conclusion : « Le génie n’est qu’une maladie. » Quels sont, suivant l’auteur, les caractères indubitables du génie ? […] il est déjà bien difficile de diagnostiquer une maladie, lorsque le sujet est présent et qu’on a toutes les indications possibles à sa disposition, et vous voulez déterminer avec précision le caractère d’une maladie, mentale ou autre, à deux mille ans de distance sur des indications données longtemps après l’événement, et par des témoins peu spéciaux ! […] Mignet, dans son excellent livre sur Charles-Quint à Saint-Just, a démontré péremptoirement que c’est là une fable qui n’a aucun caractère d’authenticité, et bien plus qui est en contradiction avec les renseignements certains que nous avons jour par jour et heure par heure de la dernière maladie de Charles-Quint.

1347. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

C’est là un des caractères les plus frappants des mœurs américaines. Peut-être ce caractère tient-il au génie de la race plus encore qu’aux institutions ; cependant on ne peut nier qu’en Europe les révolutions démocratiques (car elles l’ont été toutes plus ou moins) n’aient provoqué également un grand esprit d’entreprise et une extrême activité en tout genre. […] Ajoutez que l’absence de grandes fortunes constituées par la loi et l’extrême mobilité des biens sont cause que chacun est obligé d’employer toute son énergie à vivre et à se procurer un certain bien-être : or cette perpétuelle occupation n’est pas toujours très-favorable à l’élévation des idées et à la noblesse du caractère.

1348. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

C’est de la nutrition qu’on déduit toutes ces liaisons et tous ces caractères. […] Une civilisation, un peuple, un siècle, ont une définition et tous leurs caractères ou leurs détails n’en sont que la suite et les développements. […] Vous détachez cette faculté égoïste et politique, et vous en déduisez aussitôt tous les caractères de la société et du gouvernement romain, l’art de combattre, de négocier et d’administrer, l’invincible amour de la patrie, le courage orgueilleux et froid, l’esprit de discipline, le projet soutenu et accompli de conquérir, garder et exploiter le monde, le respect de la loi, le talent de la résistance et de l’attaque légale, la mesure et l’obstination dans les luttes civiles ; partout la réflexion qui calcule et la volonté qui se maîtrise.

1349. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

Ce bon lettré vient d’énumérer, docile aux leçons d’Aristote, les caractères essentiels de la beauté poétique. […] Tout poème doit son caractère proprement poétique à la présence, au rayonnement, à l’action transformante et unifiante d’une réalité mystérieuse que nous appelons poésie pure. […] Je retiens seulement une indication très précieuse, et qui rejoint ce que j’ai essayé ailleurs d’expliquer sur le caractère profondément religieux du mouvement romantique. […] L’appui des savants en « psychodynamique » distinction d’une force à caractère de simple « impulsion » (logique) ; — « induction » (morale) ; — « irradiation » (esthétique). […] Il part donc d’un monde qui occupe expérimentalement un espace à 3 dimensions, d’où trois qualités de figures : les lignes, figures à 1 dimension : longueur, les surfaces, figures à 2 dimensions : longueur, largeur, les volumes, figures à 3 dimensions : longueur, largeur, hauteur (ou profondeur) ; d’où trois qualités de mouvements : les translations, (ou vibrations) mouvement, à 1 dimension, à caractère d’ impulsion, les rotations, (ou oscillations) mouvements à 2 dimensions, à caractère d’ induction, les déformations élastiques, (dilatations, pulsations radiales, flexions ou torsions) mouvements à 3 dimensions, à caractère d’ expansion, et conséquemment trois qualités dans toutes les catégories de phénomènes, ceux-ci devant être considérés, avec Descartes et Pascal, comme des combinaisons de figure et de mouvement.

1350. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Ledent, Richard »

Mais on ne peut pas dire non plus qu’elle revête le caractère d’étrangeté que l’auteur semble avoir voulu lui donner.

1351. (1761) Salon de 1761 « Sculpture — Falconet »

Deux groupes de femmes en plâtre, pour des chandeliers ; belles figures, d’un caractère simple, noble et antique.

1352. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre I. La Restauration. »

Sir William Temple. —  Sa vie, son caractère, son esprit, son style. […] Ses mésaventures ne seront plus le martyre de la justice, mais les désagréments d’un caractère grognon. […] Son caractère est un fonds d’honnêteté, mais accommodé au monde. […] Les deux moments, les deux théâtres, les deux caractères se correspondent. […] Le caractère de la nourrice est excellent.

1353. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hennique, Nicolette (1886-19..) »

La valeur de ce livre de Nicolette Hennique : Des rêves et des choses, est grande, car on y trouve quelque chose de nouveau ; et cette nouveauté, ce n’est ni la vigueur, ni la mélancolie, ni la beauté qui certes y abondent ; ce ne sont pas non plus les savantes expressions, ni les bons vers — toutes ces qualités ne font que mettre ce livre parmi les meilleurs — la vraie nouveauté qui ressort de l’ouvrage de Nicolette Hennique, c’est cet élément imprécis mais certain qui distingue les œuvres solides et qui, cette fois, nous dénote la naissance d’un nouveau caractère.

1354. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Prarond, Ernest (1821-1909) »

Il ajoute que le véritable caractère du poète d’Abbeville est la bonhomie, « la leste bonhomie des vieux conteurs du nord de la France ».

1355. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

Le moraliste, à proprement parler, a une faculté et un goût d’observer les choses et les caractères, de les prendre n’importe par quel bout selon qu’ils se présentent, et de les pénétrer, de les approfondir. […] On ne se dit pas seulement : « Cela est bon, cela est mauvais ; je suis amusé ou ennuyé ; » on refait, on converse en soi-même ; on revoit en action les caractères, non pas au point de vue de la scène, mais selon le détail de la réalité ; Tartufe suggère Onuphre. […] De jolies scènes domestiques, des intérieurs de famille, et la continuité aisée des caractères, attestent d’ailleurs cette portion de faculté dramatique, cette science de mise en scène et en dialogue dont Mme Guizot a fait preuve en bien d’autres ouvrages, dans ses Contes, dans l’Écolier, et jusque dans ses Lettres sur l’Éducation. Car, à un degré modéré et dans les limites du moraliste, elle avait l’imagination inventive ; ses pensées, loin de rester à l’état de maximes, entraient volontiers en jeu et en conversation dans son esprit ; elle savait faire vivre et agir sous quelques aspects des caractères qui n’étaient pas de simples copies. […] Au reste, la raison de Mme Guizot, qui a pied dans le fait même, admet, pressent les cas d’insuffisance et en avertit : « Je le vois plus clairement chaque jour, dit Mme d’Attilly, la jeunesse est de tous les âges de la vie celui que l’enfance nous révèle le moins ; une influence indépendante du caractère la domine avec un empire contre lequel on peut d’avance lui donner des forces, mais sans prévoir de quelle manière elle aura à s’en servir. » Mme Guizot relève en un endroit une assertion de mistress Hannah More sur la nature déjà corrompue des enfants, et elle la combat.

1356. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

La doctrine, ses prétentions et son caractère. — Autorité nouvelle de la raison dans le gouvernement des choses humaines. — Jusqu’ici ce gouvernement appartenait à la tradition. […] Pour entrer dans la pratique, pour prendre le gouvernement des âmes, pour se transformer en un ressort d’action, il faut qu’elle se dépose dans les esprits à l’état de croyance faite, d’habitude prise, d’inclination établie, de tradition domestique, et que, des hauteurs agitées de l’intelligence, elle descende et s’incruste dans les bas-fonds immobiles de la volonté ; alors seulement elle fait partie du caractère et devient une force sociale. […] La science était tenue d’être épigrammatique ou oratoire ; le détail technique ou cru aurait déplu à un public de gens du monde ; le beau style omettait ou faussait les petits faits significatifs qui donnent aux caractères anciens leur tour propre et leur relief original. — Quand même on aurait osé les noter, on n’en aurait pas démêlé le sens et la portée. […] On n’imaginait pas la structure de son esprit encore primitif, la rareté et la ténacité de ses idées, l’étroitesse de sa vie routinière, machinale, livrée au travail manuel, absorbée par le souci du pain quotidien, confinée dans les limites de l’horizon visible, son attachement au saint local, aux rites, au prêtre, ses rancunes profondes, sa défiance invétérée, sa crédulité fondée sur l’imagination, son incapacité de concevoir le droit abstrait et les événements publics, le sourd travail par lequel les nouvelles politiques se transformaient dans sa tête en contes de revenant ou de nourrice, ses affolements contagieux pareils à ceux des moutons, ses fureurs aveugles pareilles à celle d’un taureau, et tous ces traits de caractère que la Révolution allait mettre au jour. […] Cette idée, Rousseau l’a tirée tout entière du spectacle de son propre cœur410 : homme étrange, original et supérieur, mais qui, dès l’enfance, portait en soi un germe de folie et qui à la fin devint fou tout à fait ; esprit admirable et mal équilibré, en qui les sensations, les émotions et les images étaient trop fortes : à la fois aveugle et perspicace, véritable poète et poète malade, qui, au lieu des choses, voyait ses rêves, vivait dans un roman et mourut sous le cauchemar qu’il s’était forgé ; incapable de se maîtriser et de se conduire, prenant ses résolutions pour des actes, ses velléités pour des résolutions et le rôle qu’il se donnait pour le caractère qu’il croyait avoir ; en tout disproportionné au train courant du monde, s’aheurtant, se blessant, se salissant à toutes les bornes du chemin ; ayant commis des extravagances, des vilenies et des crimes, et néanmoins gardant jusqu’au bout la sensibilité délicate et profonde, l’humanité, l’attendrissement, le don des larmes, la faculté d’aimer, la passion de la justice, le sentiment religieux, l’enthousiasme, comme autant de racines vivaces où fermente toujours la sève généreuse pendant que la tige et les rameaux avortent, se déforment ou se flétrissent sous l’inclémence de l’air.

1357. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Dans le Tasse, la sensibilité et l’imagination seules étaient supérieures ; la raison, qui ne manquait pas à sa poésie, manquait à sa vie ; l’intelligence était saine, le caractère était égaré ; sa mélancolie, faiblesse de sa trame, comme dans Rousseau, obscurcissait sa raison. […] Ce ne fut que plus tard que la sollicitude changea de caractère, et qu’une aigreur cruelle parut succéder dans ce prince à la pitié. […] Ces deux adolescents donnaient, depuis leur enfance, les signes de cette bonté de caractère et de cette grâce de manières qui les ont rendus depuis chers à tous les proches et à tous leurs compatriotes. » XIII « Cornélia, sa sœur, non contente d’entourer de ses soins et de sa tendresse le frère qui lui était rendu, voulut affermir encore sa convalescence par les soins des plus habiles médecins de Salerne et de Naples. […] Nous verrons, dans la suite du récit, que cette supposition, incompatible avec le caractère, la vertu, la situation de Léonora, n’a pas plus de réalité dans le caractère et dans la conduite du Tasse lui-même.

1358. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Mais le jansénisme se distingue, d’abord parce que seul il est hétérodoxe, ce qui veut dire qu’il a une doctrine, une personnalité intellectuelle, une conception propre de la vie et des rapports de l’homme avec le surnaturel ; ensuite parce que seul il ne se développe point exclusivement dans l’Eglise ; au contraire, il n’a point de pénétration dans le clergé régulier, il est assez largement diffus parmi les compagnies de prêtres telles que l’Oratoire, il recrute surtout ses adhérents parmi les ecclésiastiques séculiers et parmi les personnes pieuses de tout caractère. […] C’est une œuvre de raison, non seulement parce que l’objet en est une démonstration et la méthode une suite de raisonnements, mais surtout parce que, selon la raison, elle ne nous parle jamais de son auteur, toujours de son sujet, et parce qu’elle a un caractère universel de vérité et de beauté. […] Il a une puissance d’analyse et de raisonnement, qui y découvre toutes sortes de caractères et de liaisons qu’on ne soupçonnait pas. […] Où que son raisonnement le mène, il jette de triomphants coups de sonde : il ouvre à la pensée des voies fécondes, quand il définit l’éloquence ou le style, ou quand il jette quelques mots, obscurs et bizarres de prime abord, mais combien riches de sens, sur les caractères de la beauté. […] Mais l’originalité poétique de Pascal, c’est le caractère, si je puis dire, métaphysique des inquiétudes et des images qui jettent ces flammes intenses dans son style.

1359. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

La littérature, comme un instrument très sensible, reproduit et indique les variations que subit la prospérité matérielle d’un peuple ; ou bien elle doit certains caractères particuliers à la prédominance du commerce, de l’agriculture, de l’industrie. […] Le commerce, qui convie toutes les civilisations à ses expositions universelles, a contribué plus que toute autre chose à donner à la littérature de notre siècle ce caractère cosmopolite qui la distingue. […] La littérature devenue une branche de commerce comme une autre a pris par là-même des caractères nouveaux. […] § 4. — Si les phénomènes littéraires se ressentent ainsi du voisinage des phénomènes commerciaux, ils se modifient également quand la civilisation revêt un caractère industriel. […] Ce n’est pas le moment de détailler les caractères bons et mauvais que la littérature de notre siècle a pu devoir à ce déplacement d’influence ; mais on peut être sûr qu’ils ont été nombreux et importants.

1360. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Sa mentalité n’est qu’un prolongement de la pitié dont nous avons vu naître les premières manifestations sous l’influence des grands écrivains russes : et cela seul donne à ses œuvres un caractère nettement social. […] Paul Bourget et Maurice Barres, le roman social devait acquérir pleinement ce dernier caractère. […] Par là se dégage le caractère nettement contre-révolutionnaire de son œuvre présente. […] Les études de caractère y sont pénétrantes, les tableaux de mœurs impressionnants et justes. […] Mais si les détails du décor et de l’action sont réduits au strict nécessaire, si les scènes sont étrangement sobres de mouvement, les caractères des personnages y apparaissent fouillés par le scalpel d’un maître.

1361. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

— Revêtir d’un caractère irréfragable et solennel. […] Cursif Adj. — Qui a un caractère de rapidité. […] Dyscole Adj. — Qui a mauvais caractère. […] Physiognomonique Adj. — Qui juge le caractère par l’inspection du visage. […] Et les voilà traçant les cercles médiateurs et les ellipses de force, les caractères vocatoires, les signes aux spirales complexes qui unissent les vigueurs occultes des mondes.

1362. (1761) Salon de 1761 « Gravure —  Cochin  »

Il y a une diversité étonnante d’attitudes, de visages et de caractères.

1363. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Je ne me hasarderai pas à donner les traits qui définissent le mieux le génie natif de cette, race lyonnaise dont nous avons connu des représentants diversement distingués ; mais assurément un même caractère provincial leur demeure attaché à tous : ce caractère porte avec lui un certain fonds de croyances, de sentiments, d’habitudes morales, de patriotisme local, de religiosité et d’affectuosité (si je puis dire), qui se maintient au milieu de l’effacement ou du dessèchement trop général des âmes. […] Touche-t-elle en rien à la moralité du caractère ? […] Mon amitié me fera reprendre le ton familier, mais fi me restera au fond du cœur de l’admiration pour votre caractère et votre talent. […] S’il n’a pas pu contenter tout le monde, du moins il n’a mécontenté personne, et tous rendent justice à son caractère et à ses intentions. — Vous êtes bien bon de penser à lui demander des lettres pour moi ; elles seraient inutiles. […] On me dit que Camille Jordan lui-même ne l’a pas vu dans sa belle humeur ; en ce cas il ne peut le connaître. » Cependant Gœthe, toujours attentif, avait pris, de son côté, une juste idée de Camille Jordan et de son caractère.

1364. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

L’histoire entière de l’art repassait successivement dans mon souvenir, comme l’histoire même de l’humanité racontée en caractères symboliques. […] Puis, pour saisir par le contraste le caractère propre de cet esprit et de ce style, lisez une page de Shakespeare. […] Cette opposition des sociétés spirituelles et oisives contre le gouvernement revêtit au siècle de Louis XIV un caractère moral et religieux. […] Molière avait observé que certaines gens, laïques, sans caractère, sans autorité, sous ombre de piété, se mêlaient de direction. […] La Bruyère, Caractères.

1365. (1904) Zangwill pp. 7-90

Il n’en raisonne point, il n’arrive point à des jugements nets ; mais toutes ces émotions sourdes, semblables aux bruissements innombrables et imperceptibles de la campagne, s’assemblent pour faire ce ton habituel de l’âme que nous appelons le caractère. […] « En tous cas, il y a un moyen de s’assurer de ce caractère que nous prêtons à la race. […] « Une race se rencontre ayant reçu son caractère du climat, du sol, des aliments, et des grands événements qu’elle a subis à son origine. Ce caractère l’approprie et la réduit à la culture d’un certain esprit comme à la conception d’une certaine beauté. […] Il a fallu la vue intérieure des caractères, la précision, l’énergie, la tristesse anglaise, la fougue, l’imagination, le paganisme de la Renaissance pour produire un Shakespeare.

1366. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Michelet, Victor-Émile (1861-1938) »

Léon Bazalgette Un caractère général de ses vers et de sa prose, c’est la mystérieuse mélodie intérieure dont l’accompagnent les échos de sa pensée, qu’elle soit magnétiquement attirée par l’éternel féminin des choses ou enivré par le flamboiement de l’abstrait.

1367. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tastu, Amable (1798-1885) »

Édouard Fournier La muse la plus idéalement pure, comme talent et comme caractère, de toute l’époque romantique.

1368. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Brenet »

Elle est faible de couleur ; mais il y a de l’harmonie ; l’enfant est joli, la figure de la Vierge n’est du moins empruntée de personne ; les mages ne sont ni sans effet, ni sans caractère.

1369. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Guerin » p. 221

L’effet de l’ensemble, l’intérêt de l’action, la position, le caractère, l’expression des figures, la distribution, les groupes, l’entente des lumières, quelque chose même du dessin et de la couleur sont restés ; mais arrêtez, entrez dans les détails, il n’y a plus ni finesse, ni pureté, ni correction ; vous prenez Guerin par l’oreille, vous le mettez à genoux, et vous lui faites faire amende honorable à de grands maîtres si maltraités.

1370. (1927) Approximations. Deuxième série

C’est ainsi que le caractère de Julien déborde à tout instant non seulement l’idée qu’on s’en fait, mais l’idée que Stendhal lui-même voudrait s’en faire et voudrait qu’on s’en fît. […] Degas parvient souvent à donner un style à l’homme moderne, sans lui retirer, bien entendu, mais sans davantage souligner son caractère de modernité. […] Chez Degas le caractère n’éclate pas ni ne s’épanouit : il y a toujours une imperceptible réticence qui stylise. […] Une force explosive toujours présente dans l’expression, voilà ce qui investit le langage de Pascal de ce caractère immédiat qui partout constitue la donnée première de son génie. […] Constructeur à tout moment des caractères, le dialogue se substitue à l’analyse, mais pour faire son travail ; et en même temps il rend sans cesse une sonorité de réplique.

1371. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

Il était difficile d’avoir plus de bonté et d’élévation dans le caractère. […] « Vous aviez montré pour la vieillesse et le caractère du chef de l’Église des égards qui vous avaient honoré. […] Tête, cœur, caractère, j’ai tout trouvé en vous à ma guise, et je sens désormais que je vous suis attaché pour la vie…. […] Un avantage demeure, et il est grand : le caractère historique remplace à distance l’intérêt littéraire pâlissant. […] Quand le caractère et les sentiments français pouvaient s’altérer de plus en plus par un mélange étranger, elle faisait lire les auteurs qui les rappellent avec le plus de grâce et d’énergie.

1372. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Il nous rend à merveille le fin mot de cette Cour romaine du xvie  siècle, ce qui la distingue en général des autres Cours par son caractère de douceur, de finesse et de ruse : Marcher d’un grave pas et d’un grave sourcil, Et d’un grave souris à chacun faire fête, Balancer tous ses mots, répondre de la tête, Avec un Messer non, ou bien un Messer si ; Entremêler souvent un petit E cosi, Et d’un son Servitor contrefaire l’honnête, Et comme si l’on eût sa part en la conquête, Discourir sur Florence et sur Naples aussi ; Seigneuriser chacun d’un baisement de main, Et, suivant la façon du courtisan romain, Cacher sa pauvreté d’une brave apparence : Voilà de cette Cour la plus grande vertu, Dont souvent mal monté, mal sain et mal vêtu, Sans barbe et sans argent on s’en retourne en France. […] Un caractère saillant de la Cour romaine à cette époque était l’exaltation soudaine de quelques-uns qui n’étaient rien la veille, et leur chute profonde le lendemain. […] Eût-il eu dans son caractère, comme André Chénier, quelque ressort un peu vif et quelque principe de fierté qui le rendait moins commode qu’il n’aurait fallu dans l’habitude, pour moi, je ne l’en estimerais pas moins, et, dussé-je être taxé de partialité pour les poètes, il m’est impossible, même après la publication de ces dernières pièces, de trouver à Joachim d’autre tort que celui d’avoir été maltraité par la fortune, d’avoir été fait intendant et homme d’affaires tandis qu’il était poète, et d’avoir commis cette autre faute grave de s’être laissé mourir jeune avant d’avoir franchi le détroit qui l’eût mené à sa seconde carrière. […] Il voulait, aux approches du jour de l’an de 1560, envoyer à ses amis d’ingénieuses étrennes, et, selon le goût du temps, selon le goût aussi des Anciens qui ont souvent joué sur les noms (nomen omen), il composa en distiques latins une suite d’Allusions 115, dans lesquelles, prenant successivement chaque nom propre des contemporains célèbres, il en tirait, bon gré mal gré, un sens plus ou moins analogue au talent et au caractère du personnage : par exemple, Michel de l’Hôpital semblait avoir reçu son nom tout exprès, puisqu’il était l’hospice des Muses, auxquelles sa maison était toujours ouverte.

1373. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Cet incomparable succès, au début, conféra à M. de Chateaubriand un caractère public, comme écrivain ; sa triple influence, religieuse, poétique et monarchique, commença dès lors. […] Mais, chemin faisant, au milieu des peintures et des caractères, des récits enjoués ou des idéales rêveries, les indications abondent : on y sent passer les secrets voilés ; on saisit surtout cette continuité essentielle du héros, qui s’étend du berceau jusqu’à la gloire, qui persiste de dessous la gloire jusqu’à la tombe. […] Cette idée de noblesse et d’antique naissance est surtout nécessaire pour expliquer le caractère et la physionomie du père de M. de Chateaubriand, de l’homme ardent, rigoureux, opiniâtre, magnanime et de génie à sa manière, dont toute la vie se passe à vouloir relever son nom et sa famille ; espèce de Jean-Antoine de Mirabeau dans son âpre baronnie. […] Ceux qui cherchent dans les parents des grands hommes la trace et la racine des vocations éclatantes, ceux qui demandent aux mères de Walter Scott, de Byron et de Lamartine, le secret du génie de leurs fils, remarqueront ce caractère à la fois mélancolique et cultivé de madame de Chateaubriand ; ils auraient à remarquer aussi que deux des sœurs du poëte, et l’une particulièrement, ont laissé des pages touchantes ; qu’un de ses oncles paternels, prêtre, faisait des vers, et qu’un autre oncle paternel vivait à Paris, voué aux recherches d’érudition et d’histoire.

1374. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

Cette liaison, toutefois, qui fut assez constante, ne fut jamais tendre: le goût de la haute littérature nous unissait, la différence de nos caractères tendait sans cesse à nous désunir. […] Quand nous fûmes assis ; il tira de sa poche un petit rouleau de papier écrit en très-mince caractère et me dit: « J’ai confiance en vous, voici un ouvrage manuscrit de moi qui, dans l’état actuel des affaires, pourrait produire une émotion dangereuse dans le peuple, et renverser peut-être ce misérable gouvernement. […] Son habit et son caractère de prêtre auraient dû l’en détourner. […] Il avait conservé pour M. de Genoude le dévouement qui était son métier, et la reconnaissance qui était son caractère.

1375. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Si l’auteur, dans son indifférence, n’avait pas retracé deux ou trois scènes indignes d’une plume qui se respecte, le vrai caractère de son livre serait moins l’excitation au mal que l’épouvantable châtiment de l’adultère. […] En un mot, il y a ici plus d’exaltation que de vigueur ; le caractère de cette œuvre, c’est l’effort, un effort obstiné, acharné, ardent et maladif tout ensemble, un effort qui ne mène malheureusement ni à la vérité ni à l’émotion. […] Le caractère de Mâtho, fort simple il est vrai, fait honneur au peintre ; l’éblouissement du Libyen en présence de Salammbô, ce choc soudain qui ébranle tout son être, cette passion tour à tour violente et timide, ces pleurs, ces rugissements, ce désordre farouche qui le livre comme un enfant aux conseils de Spendius, tout cela est étudié avec soin et rendu en traits énergiques. […] Et l’on n’est pas dédommagé des tortures qu’il vous cause par la joie que pourrait faire éprouver la représentation exacte de la nature humaine, des caractères humains ; non, tout au contraire, la nature et la vérité sont absentes de ces pages.

1376. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Je ne le connais pas d’ailleurs ; mais s’il fallait deviner son caractère d’après sa petite comédie, je parierais qu’il est petit-maître, bon enfant au fond, mais vain, pétri de petits airs, de petites manières, ignorant et confiant à proportion ; en un mot, de cette pâte mêlée dont il résulte des enfants de vingt à vingt-cinq ans assez déplaisants, mais qui mûrissent cependant, et deviennent, à l’âge de trente à quarante ans, des hommes de mérite. […] Je l’ignore, et il importe peu de le rechercher ; car, du caractère et de l’humeur qu’il était, une occasion manquant, il s’en serait créé une autre. […] C’est par rapport au très grand monde seulement que Chamfort a pu dire : « Il paraît impossible que, dans l’état actuel de la société, il y ait un seul homme qui puisse montrer le fond de son âme et les détails de son caractère, et surtout de ses faiblesses, à son meilleur ami. » C’est ce grand monde uniquement qu’il avait en vue quand il disait : « La meilleure philosophie relativement au monde est d’allier, à son égard, le sarcasme de la gaieté avec l’indulgence du mépris. » C’est pour avoir trop vécu sur ce théâtre de lutte inégale, de ruse et de vanité, qu’il a pu dire son mot fameux : « J’ai été amené là par degrés : en vivant et en voyant les hommes, il faut que le cœur se brise ou se bronze. » J’ajouterai, pour infirmer l’autorité de certaines maximes de Chamfort et pour en dénoncer le côté faux, qu’elles viennent évidemment d’un homme qui n’a jamais eu de famille, qui n’a pas été attendri par elle ni en remontant ni en descendant, qui n’a pas eu de père et qui, à son tour, n’a pas voulu l’être. […] Stahl-Hetzel a vu dans mon article sur Chamfort une déclaration et un réquisitoire contre le sonneur de tocsin de la Révolution et de la République ; car il me fait l’honneur de me considérer comme un ennemi de cette forme de gouvernement, et il me donne là-dessus toutes sortes d’avis et de conseils, sans se demander s’il a bien caractère et qualité pour cela.

1377. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

La substance des différens écrits dont nous venons de parler, a été exprimée dans le Dictionnaire historique des Auteurs ecclésiastiques, renfermant la vie des Peres & des Docteurs de l’Eglise ; des meilleurs interprêtes de l’Ecriture Sainte, Juifs & Chrétiens ; des Théologiens scholastiques, moraux, mystiques, polémiques, hétérodoxes même qui ont écrit sur des matieres non controversées ; des Canonistes & des Commentateurs des Décrétales & du corps du Droit canonique, des Historiens, Bibliographes, Biographes & Agiographes ecclésiastiques ; des Orateurs sacrés ; des Liturgistes & généralement de tous les auteurs qui ont écrit sur les matieres ecclésiastiques ; avec le catalogue de leurs principaux ouvrages ; le sommaire de ce qu’on trouve de remarquable dans ceux des Peres, pour former la chaine de la tradition ; le jugement des critiques sur la personne, le caractère, la doctrine, la méthode & le style des différens Auteurs ecclésiastiques ; & l’indication des meilleures éditions de leurs ouvrages : le tout suivi d’une table chronologique pour l’histoire de l’Eglise depuis J. […] Le traducteur l’a chargée de notes, dans lesquelles il s’offre d’établir un systême qui tend à justifier toutes les Religions, & à ravir à la seule véritable les caractères qui la distinguent. […] Le même caractère de modération se fait sentir dans la Vie du Pape Sixte V. traduite de l’italien de Gregorio Leti en françois, in-12. […] Il exprime les différens caractères par des traits fermes, énergiques & précis qui peignent l’ame même ; ses descriptions vives & animées entraînent le lecteur.

1378. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Zola n’était pas encore au temps où Mme de Staël écrivait : « La littérature est l’expression de la société. » Avant Mme de Staël, La Bruyère avait commencé son livre des Caractères par cette phrase charmante en sa douce malice : « Je rends à mon siècle ce qu’il m’a prêté. » Les Grecs et les Latins, avant La Bruyère, avaient plus d’une fois dit à peu près la même chose. […] Il regarde sous un angle particulier et dans une certaine perspective et les caractères et la vie humaine ; il considère de parti pris une série de faits en éliminant tous les autres : il fait son choix systématique et exclusif dans l’immense variété du « document humain ». […] La peinture de ces mouvements intérieurs, leurs effets, les rencontres comiques ou terribles des caractères, des intérêts, des passions, voilà le vrai domaine du romancier comme de l’auteur dramatique. […] J’arrive au second caractère de l’esthétique naturaliste, à sa préférence marquée pour les personnages populaires ; il serait plus juste de dire pour les ouvriers et ouvrières de nos ateliers parisiens : car en fait de peuple on ne nous a guère montré jusqu’ici que cela.

1379. (1894) Critique de combat

Quelques caractères bien tracés prouvent qu’il n’en est plus à ses débuts comme créateur d’âmes. […] Et c’est ainsi que l’école mathématique, si française par son origine et son caractère, eut l’étrange fortune de réussir dans tous les pays avant de pénétrer en France. […] La Bruyère, dans ses Caractères, a déjà étudié le pli que la profession peut imprimer à l’homme. […] On ne peut rien pour modifier son caractère. » Mais arrière également les partisans du libre arbitre, cette théorie que M.  […] Mais ne pourrait-on du moins distinguer certaines familles de caractères, comme le fait M. 

1380. (1774) Correspondance générale

Mes ennemis en font, selon leur caractère, un sujet de plaisanterie ou d’injure. […] Le monument sera simple, mais correspondra parfaitement au caractère du héros. […] Je vois avec chagrin que les hommes de lettres font moins de cas de leur caractère moral que de leur talent littéraire. […] J’ai demandé le caractère qui me convenait. […] Son respect pour vous, fondé sur une juste appréciation de votre caractère, est parfaitement sincère.

1381. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Sur le comte Dandolo. (Article Marmont, p. 51.) » p. 514

II, p. 233) : « Dandolo, homme d’un caractère vif, chaud, enthousiaste pour la liberté, fort honnête homme, avocat des plus distingués, se mit à la tête de toutes les affaires de la ville… » Son fils, le comte Tullio Dandolo, lui-même écrivain très connu, possède des lettres de Bonaparte, dans lesquelles le premier Consul parle à son père d’« affection » et de l’« estime la plus vraie ».

1382. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite et fin.) »

Elle avait beau s’armer de philosophie : « Son caractère, écrivait l’ambassadeur français, M. de Breteuil, n’est pas formé à ce genre, quoiqu’elle m’ait fait souvent l’honneur de m’assurer du contraire. » Plus juste que M. de Breteuil, nous disons : la philosophie pour elle était un pis aller, il était toujours temps d’y recourir. […] La conséquence du syllogisme (pour parler comme elle) se tirait irrésistiblement en vertu d’une logique inexorable et de cette force des choses qui n’est que la somme totale et la résultante, à la longue, des actions, de la conduite et des caractères.

1383. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

À cette raison générale et assez naturelle que je me donnais à moi-même pour me méfier de Valentine, il s’en joignait d’autres plus particulières, tirées du caractère et du genre de mérite d’Indiana. […] Bénédict est bien fait de sa personne ; son visage, d’une pâleur bilieuse, exprime la fierté et la distinction ; il a les lèvres minces et mobiles et un certain regard singulier qui marque une force étrange de caractère et qui fascine. 

1384. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre II. Le Rire » pp. 28-42

. — Et les caractères, qu’en dites-vous ? — Sublimes et parfaitement soutenus, surtout les majuscules. » Bodoni, enthousiaste de son art, ne voyait, dans la tragédie de son ami, que la beauté des caractères d’imprimerie.

1385. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre III. Du récit des faits. — Antécédents et conséquents. — Causes et effets »

Il faut éviter ici la confusion, l’entortillement, les digressions, ne point remonter trop haut, ni descendre trop bas ; ne rien omettre qui ait rapport à la cause ; enfin tout ce que j’ai dit pour la brièveté trouve aussi son application ici… La vraisemblance consiste à donner au récit tous les caractères de la réalité ; à observer la dignité des personnages ; à montrer les causes des événements ; à faire voir qu’on a eu le moyen, l’occasion, le temps, de faire ce qu’on a fait ; que le lieu aussi convenait à l’exécution de la chose ; que cette chose même n’a rien qui choque le caractère de ceux qui l’ont faite, ou la nature humaine ou l’opinion des auditeurs.

1386. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre IV. Unité et mouvement »

Il a conçu de telle façon les caractères du frère et de la sœur, il a si fortement éclairé l’opposition de leurs égoïsmes fanatiques, que la victoire d’Horace doive produire la douleur frénétique de Camille, et celle-ci exaspérer la rage patriotique de son frère jusqu’à l’assassinat : ce dernier effet de la passion d’Horace pour Rome nécessite à son tour le jugement, que le précédent effet, qui est la victoire sur Albe, fait forcément aboutir à un acquittement. […] L’unité de l’œuvre est ailleurs : elle est dans le caractère d’Auguste.

1387. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre III. Éducation de Jésus. »

Par sa pauvreté humblement supportée, par la douceur de son caractère, par l’opposition qu’il faisait aux hypocrites et aux prêtres, Hillel fut le vrai maître de Jésus 136, s’il est permis de parler de maître, quand il s’agit d’une si haute originalité. […] De bonne heure, son caractère à part se révéla.

1388. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XX. Opposition contre Jésus. »

La passion, qui était au fond de son caractère, l’entraînait aux plus vives invectives. […] L’antipathie qui, dans un monde aussi passionné, dut éclater tout d’abord entre Jésus et des personnes de ce caractère, est facile à comprendre.

1389. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — II. La versification, et la rime. » pp. 257-274

Ces faits prouveroient que la rime, par elle-même, n’est pas un des caractères distinctifs de la poësie ; mais les anti-rimeurs ne firent pas mention de ces exemples. […] Il étoit recherché pour son esprit agréable & solide, pour sa conversation brillante, pour ses mœurs douces & ce mérite de caractère qui souvent influe sur la réputation.

1390. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Société française pendant la Révolution »

Mais on y cherche en vain la hure de saumon que le duc d’Albe préférait à des milliers de grenouilles, le document inattendu, nouveau, considérable, qui révèle tout à coup un esprit ou un caractère, inaperçu jusque-là, dans la société qu’on étudie. […] Il vous reste juste leur livre : des miettes historiques tombées de quelques corbeilles, de quelques pamphlets, de quelques journaux, — des miettes historiques, des atomes, de la poussière de documents qui en eux-mêmes ne sauraient changer le caractère jugé de la Révolution, mais que de grands artistes broieraient seulement dans les couleurs de leur palette pour donner plus d’éclat et plus de vie à cette grande fresque d’une histoire qu’on ne fera jamais au pointillé.

1391. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Gustave III »

II C’est, en effet, une bonne fortune, — et même la meilleure de toutes les fortunes, — pour qui se sent en soi le moindre génie historique, que de rencontrer sous sa main de ces figures très rares, à caractère ambigu ou à double caractère, qui exercent la sagacité et donnent un prix plus grand encore au mérite de la justice.

1392. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Maintenon » pp. 27-40

Les favoris ou les favorites ont un règne qui dure davantage, parce qu’ils établissent leur empire non sur les fougues éphémères des sens ou du cœur, mais sur les faiblesses, à poste fixe, de l’esprit ou du caractère. […] Madame de Maintenon l’emportait trop par la raison, par le caractère, par la dignité dans la vie, par le sentiment religieux qui planait perpétuellement sur son âme, et teignait ses mots et ses actes de ses reflets les plus graves et les plus solennels, pour avoir ce que l’on appelle de la grâce, ce joli mouvement des natures légères… Littérairement, il est resté d’elle des choses d’une beauté rare, une correspondance qu’aucune femme d’aucun temps ne recommencerait.

1393. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Henri de L’Épinois » pp. 83-97

Aux immunités personnelles et réelles, à l’exemption de la juridiction ordinaire, qui accordait aux clercs de ne pouvoir être traduits devant les tribunaux séculiers et de faire juger leurs causes, en matière même temporelle, par les tribunaux ecclésiastiques, s’ajouta l’arbitrage des évêques, qui prit le caractère d’une véritable juridiction et qui fit que les tribunaux séculiers purent dès lors être récusés par ceux qui désiraient soumettre les procès civils aux tribunaux ecclésiastiques. […] Honorable et rare caractère, du reste, et qui suffit à un esprit courageux, indifférent au succès, et qui ne l’a visé ni par le fond de son livre, impopulaire à cette heure, ni par sa forme rassise, qu’il n’affecte pas, mais que naturellement il possède.

1394. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

IV Quant aux lettres intimes qui expriment cet amour d’une âme angélique pour une autre âme, éprise aussi, mais inférieure, je l’ai déjà dit, il n’y en a certainement nulle part de cet accent, de ce caractère, de cet idéal de vérité, de simplicité et de candeur ! […] elle était sainte déjà avant d’être une Sainte, cette femme qui a du sang altier des Condé dans les veines, de ces terribles sangliers sauvages des Condé, et qui aime « son ami », comme elle dit simplement, avec la crainte, l’humilité, l’abandon et tous les caractères de l’amour de Dieu, transportés dans l’amour d’un homme !

1395. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Valmiki »

Le poème dont il est question, ou, pour mieux parler, les poésies en général comme les philosophies des Indiens, en d’autres termes toutes les manifestations de leur pensée, sont marquées des caractères qui doivent distinguer un pareil peuple, et ces caractères sont tous inférieurs.

1396. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

… Abélard, qui est le héros de cette énorme pièce, ne justifie ni par une scène, ni par un mot, ni par un geste, la grandeur de caractère ou de génie que l’auteur lui accorde dans l’opinion des personnages qu’il mêle à sa vie. […] Il manque de plan, d’organisme, de vie, de passion de caractère, de couleur franche, de traits hardis.

1397. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gustave D’Alaux »

Il est net, ferme, précis, sans fausse sentimentalité, sans déclamation, diagnostiquant hardiment, à travers Soulouque, les caractères de la race dont il est sorti… Malheureusement, comme beaucoup de braves, la chose faite, Gustave d’Alaux a été pris d’une peur rétrospective et il a attaché à un livre franc et plein de vaillance une préface de précaution qui nous étonne. […] De cet illuminisme qui domine la tête de Soulouque, et de la vanité du nègre (la vanité du nègre est quelque chose de sans nom) blessée par les classes éclairées, qui se moquèrent de son fétichisme dès les premiers moments de son avènement, l’historien fait sortir le Soulouque méchant enté sur le bon nègre, l’espèce de Tibère cafre qui, tout omnipotent qu’il soit, et féroce, sacrifie au préjugé des procédés judiciaires, et, trait de caractère, se sert un jour, pour condamner à la mort qu’il a résolue, de commissions militaires qu’il pourrait ne pas invoquer dans l’état absolu de sa puissance, mais qu’il invoque, nous dit d’Alaux avec une profondeur spirituelle, « pour ne pas être volé d’une seule de ses prérogatives ».

1398. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Ferdinand Fabre »

Chaste et régulier dans ses mœurs, mais orgueilleux, — et la chasteté qui s’emmanche dans l’orgueil est terrible, car elle se fait payer par l’orgueil des sensualités qu’elle repousse, — l’abbé Capdepont dit « Tigrane » est, de plus, une espèce de Macbeth ecclésiastique, à qui les trois Sorcières qui sont en lui : la Puissance du génie, l’Autorité du caractère, et la Science, moins affirmatives que les Sorcières de Macbeth, ne lui disent pas : Tu seras Roi ! […] L’Église, l’esprit de l’Église, la sagesse romaine qui juge à travers le péché, qui peut pardonner tout à ses serviteurs quand ils ont cette chose rare maintenant et qu’on appelle « le caractère », ont inspiré heureusement Fabre.

1399. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Eugène Sue » pp. 16-26

Ces facultés, en effet, ont le double caractère qui atteste la médiocrité foncière d’un esprit destiné à périr ; elles manquent de sincérité, et elles ont produit des choses trop vite populaires. […] L’un et l’autre sont morts l’âme déchirée pour avoir voulu s’appliquer le mot de César, qui est le mot de tant de gens, très-peu Césars d’ailleurs   : « Être le premier dans une bicoque plutôt que le second à Rome. » Ce fut le mot de Lamennais dans le genre superbe ; ce fut celui d’Eugène Sue dans le genre pittoresque, car son ambition avait ce caractère.

1400. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Mm. Jules et Edmond de Goncourt. » pp. 189-201

Tout reste perdu et englouti dans cette mêlée tapageuse et confuse où la ligne de tout dessin se rompt, — où la composition se noie, — et où tout caractère, posé d’abord, éclate bientôt, sous l’effort qui le tend et qui finit par le briser ! […] Ainsi donc, s’il faut nous résumer sur le livre de MM. de Goncourt, — peu d’invention, — pas de composition, — des caricatures pour des caractères, — des pages détachées, qui pleuvent les unes sur les autres et qui ressemblent à un feuilleton perpétuel, des événements et des détails sans aucune originalité, — des conversations notées peut-être sur place, — des mots tenus en réserve, comme la poire pour la soif… de son public, que l’on croit avoir altéré d’esprit en lui en faisant boire trop depuis longtemps ; voilà le roman de MM. de Goncourt.

1401. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Théophile Gautier. » pp. 295-308

Il n’a ni la conception profonde et variée des caractères, ni l’intuition des situations, ni la puissance de la passion et de la vie. […] Quel est le sens esthétique ou moral, mais quelconque, de ce livre sans caractère tranché, fait de miettes et de petits souvenirs rapprochés, qui ne sait être nettement ni un roman d’idée, comme Don Quichotte, ni un roman de cœur, comme La Princesse de Clèves, ni un roman de nature humaine ou de mœurs, comme Gil Blas, ni même un roman d’aventure, comme le Roman comique de Scarron, car avec les comédiens qui emplissent le roman du Capitaine Fracasse, M. 

1402. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Monnet » p. 281

La Magdeleine de celui-ci est sans couleur, sans expression, sans intérêt, sans caractère, sans chair, c’est une ombre, c’est un morceau détestable de tout point.

1403. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Que reste-t-il alors de cet ensemble de particularités vraies qui distinguaient une physionomie vivante et qui la variaient dans un caractère unique, non méconnaissable ? […] Si l’ensemble de l’ouvrage prouve une grande force d’analyse, le style, par son caractère abstrait et scientifique, y jure un peu avec ce que cet élégant esprit a naturellement de souple et de dispos jusque dans sa fermeté. […] De quoi serviraient à l’homme ces notions ineffaçables, qu’il trouve en lui-même, de son origine et de sa fin, si elles ne donnaient à sa destinée les caractères d’une mission ? […] M. de Rémusat, lui aussi, de quoi qu’il s’agisse, n’est jamais sans cette idée de plus ; mais, bien autrement sérieux et soucieux du vrai, il tient bon ; il combine les principes et le caractère ; la digue est ferme, élevée ; qu’importe ? […] » Seulement, pour traduire en action cette lutte et lui donner tout son relief, il s’agissait de la rejeter dans le passé et de la personnifier dans quelque figure historique connue, dans un homme célèbre en qui l’esprit, supérieur au caractère, aurait eu à lutter et contre lui-même et contre le monde d’alentour.

1404. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

La façade, élevée de trois étages et surmontée de mansardes, est bâtie en moellons et badigeonnée avec cette couleur jaune qui donne un caractère ignoble à presque toutes les maisons de Paris. […] Ne pouvais-tu jouer avec les contrastes de mon caractère sans en demander les causes ? […] Suivant les caractères, l’habitude de trembler relâche les fibres, engendre la crainte ; et la crainte oblige à toujours céder. […] Ces caractères hermaphrodites commencent par le charme et finissent par le dégoût. […] En laissant de côté ces livres futiles et un peu cyniques, les Contes drolatiques, écrits dans le commencement de sa vie pour avoir du pain et un habit, qu’il ne faut pas compter pour des monuments, mais excuser comme des haillons de misère, son caractère était probe et religieux au fond, comme les leçons de sa mère et les souvenirs de sa sœur.

1405. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Voiriot »

La mère leur jette de l’argent sans les regarder ; elle tourne la tête vers son mari et cette tête ne dit mot non plus que celle du père ; de plus, ces deux figures muettes sans caractère, sans expression, sont encore lourdes, courtes et grises ; si le balcon était percé en dessous et qu’elles fussent achevées, leurs jambes passeraient de beaucoup à travers.

1406. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Jollain »

Jollain l’amour enchaîné par les grâces. imaginez l’amour assis sur une petite éminence au milieu des trois grâces accroupies ; et ces grâces n’en ayant ni dans leurs attitudes, ni dans leurs caractères, maussadement groupées, maussadement peintes ; la tête de l’amour si féminisée qu’on s’y tromperait, même à jeûn ; ni finesse, ni mouvement, ni esprit.

1407. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre premier. Explication du titre de la seconde section. »

L’amitié, la tendresse paternelle, filiale et conjugale, la religion, dans quelques caractères, ont beaucoup des inconvénients des passions, et dans d’autres, ces mêmes affections donnent la plupart des avantages des ressources qu’on trouve en soi ; l’exigence, c’est-à-dire le besoin d’un retour quelconque de la part des autres, est le point de ressemblance par lequel l’amitié et les sentiments de la nature se rapprochent des peines de l’amour, et quand la religion est du fanatisme, tout ce que j’ai dit de l’esprit de parti s’applique entièrement à elle.

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