Daudet intervient lui-même au récit par une exclamation qu’il jette en terminant, comme si tout à coup l’âme du personnage vibrait et palpitait en lui. […] Zola, « vous vous jetez dans le train banal de l’existence ». […] Elle lui jetait son mouchoir parfumé au bout de la pièce, et il devait courir le ramasser avec les dents, en se traînant sur les mains et les pieds. […] et comme on est tenté de jeter là le volume avant d’avoir abordé le roman ! […] De toutes les indications jetées dans la première partie sortent successivement des conséquences, des conséquences naturelles, et des conséquences fatales.
Et elle jette son terrible : « Sortez ! […] Il nous a même jeté en pâture une troupe de ballerines. […] Son âme enfantine ne se remettra point de ce coup, et tous ses discours et toute sa conduite, si étrange qu’elle soit, s’expliqueront facilement par le trouble profond où cette révélation l’a jeté. […] Dans presque toutes ses comédies Musset a jeté des fantoches de ce genre. […] Et, alors, les Ménades jalouses l’égorgent et le déchirent, et jettent ses membres dans le fleuve.
Il a jeté comme un voile d’or la « poésie », qu’il tirait de son imagination et de son talent, sur la « vérité » qui n’était pas toujours belle. […] Elle pousse un cri et se jette sur la sonnette.) […] Le lendemain, il revint chez elle à l’heure où il la savait seule, il se jeta à ses pieds en lui déclarant son amour. […] Il y eut une épidémie de suicides : en 1778, une jeune fille se jeta dans l’Inn, accident dont Goethe se montra fort ému. […] Bernays, qui jettent sur l’ensemble des faits un manteau bleu, couleur de leur rêve innocent.
Homme des rues, homme aux poings durs casse les vieilles garnitures toutes les porcelaines des raffinements écrase lobe par lobe puis jette au fumier les cerveaux sous globe. […] La volupté jette des créatures hors du quotidien. […] Lafcadio, en jetant par la portière une créature falote, jette un défi à la société. […] Thémisao voit-elle sa balance pencher du côté qu’elle ne veut pas, dans l’autre plateau, elle jettera un sabre, un crucifix ou quelqu’un de ces ustensiles toujours si utiles, quand il s’agit pour la droite de l’emporter à tout prix. […] Or, le premier bond révolutionnaire ira droit à ces tombes qu’il s’agit de profaner, les unes pour jeter au fumier leurs cadavres-symboles, les autres pour rendre au jour ce qui agonisait, enterré vif.
Et Musset, avec la même hardiesse que le Chérubin de Beaumarchais, va aller au-devant de toutes les émotions, se jeter au-devant de la vie, qu’il défie, et à laquelle il demande toutes les jouissances. […] Le front mâle et fier, la joue en fleur et qui gardait encore les roses de l’enfance, la narine enflée du souffle du désir, il avançait le talon sonnant et l’œil au ciel, comme assuré de sa conquête et tout plein de l’orgueil de la vie. » Et lui-même, Alfred de Musset, un peu plus tard, fatigué, lassé de beaucoup de choses, se revoit dans le passé tel qu’il était alors : Il était gai, jeune et hardi, Il se jetait en étourdi À l’aventure. […] à ce qu’il se jette, respectueux et timide, aux pieds de la jeune fille et lui demande de lui faire la grâce de devenir sa femme. […] Elle inspecte, dans le panier, Les tartines de confitures Et jette un coup d’œil au dernier Devoir du cahier d’écriture. […] Mais la musique vous jette dans certains états d’âme, à la fois très vagues, très troublants, très profonds, parfois douloureux, parfois délicieux.
Quand René jette ses regards sur une foule, sur ce désert d’hommes comme il l’a appelé, il peut s’écrier sans crainte, ainsi que s’écriait l’infortuné dans l’Essai à la vue des petites lumières des faubourgs : La, j’ai des frères ! […] Il est admirable surtout, quand, remontant le torrent qui se jette dans le port, jusqu’à un certain coude, et ne voyant plus rien qu’une vallée étroite et stérile, il tombe en rêverie ; et si le vent lui apporte alors le bruit du canon d’un vaisseau qui met à la voile, il tressaille et pleure.
L’éclat tant célébré des triomphes militaires d’alors, cette pourpre mensongère qu’on jette à la statue et qui va s’élargissant chaque jour, couvre déjà pour beaucoup de spectateurs éblouis ces hideux aspects, mais ne les dérobe pas encore entièrement à qui sait regarder et se souvenir. […] Au combat de Cassano, en effet, sous M. de Vendôme, il avait été blessé à la défense d’un pont ; et l’armée ennemie lui avait passé sur le corps ; sa tête n’échappa que grâce à une marmite de fer que son vieux sergent Laprairie, en fuyant, lui avait jetée à tout hasard pour le protéger.
Tienne qui voudra contre de si grandes extrémités, je me jette et me réfugie dans la médiocrité. » Les simples bourgeois viennent là bien à propos pour endosser le reproche, mais je ne répondrais pas que la pensée ne fût écrite un soir en rentrant d’un de ces soupers de demi-dieux, où M. le Duc poussait de Champagne Santeul142. […] Il a fait plus que de montrer au doigt le courtisan, qui autrefois portait ses cheveux, en perruque désormais, l’habit serré et le bas uni, parce qu’il est dévot ; il a fait plus que de dénoncer à l’avance les représailles impies de la Régence, par le trait ineffaçable : Un dévot est celui qui sous un roi athée serait athée ; il a adressé à Louis XIV même ce conseil direct, à peine voilé en éloge : « C’est une chose délicate à un prince religieux de réformer la cour et de la rendre pieuse ; instruit jusques où le courtisan veut lui plaire et aux dépens de quoi il feroit sa fortune, il le ménage avec prudence ; il tolère, il dissimule, de peur de le jeter dans l’hypocrisie ou le sacrilége ; il attend plus de Dieu et du temps que de son zèle et de son industrie. » Malgré ses dialogues sur le quiétisme, malgré quelques mots qu’on regrette de lire sur la révocation de l’édit de Nantes, et quelque endroit favorable à la magie, je serais tenté plutôt de soupçonner La Bruyère de liberté d’esprit que du contraire.
Messieurs, on a bien peur que nous restions par un peu de vivacité, de malice et de gaieté, les petits-fils de Voltaire, de Rivarol, de Chamfort, et je dirai même de Boileau, ce Boileau que M. de Montausier, aussi rébarbatif à sa manière que les majorités législatives d’aujourd’hui, menaçait tout simplement de jeter à la rivière. […] » Savez-vous, messieurs les sénateurs, que cela est fait pour jeter un froid dans les âmes et pour décourager les talents ?
Les femmes, femmelettes et jusqu’aux femmes de chambre s’y feraient hacher… Ce parti s’est grossi des honnêtes gens du royaume qui détestent les persécutions et l’injustice. » — Aussi, quand toutes les chambres de magistrature, jointes aux avocats, donnent leur démission et défilent hors du palais « au milieu d’un monde infini, le public dit : Voilà de vrais Romains, les pères de la patrie ; on bat des mains au passage des deux conseillers Pucelle et Menguy et on leur jette des couronnes » […] Leurs fils, MM. de Villemur, de Francueil, d’Épinay, jettent l’argent par les fenêtres aussi élégamment que les jeunes ducs avec lesquels ils soupent.
En effet, à de certains moments, pendant une demi-seconde, on croit voir des objets réels ; je l’éprouvais tout à l’heure, et les artistes, les écrivains, tous ceux qui ont la mémoire exacte et lucide, savent bien qu’il en est ainsi ; une personne nerveuse, qui a subi une opération chirurgicale ou quelque accident tragique, porte le même témoignage18 ; l’acuité du souvenir est telle que parfois elle pâlit et jette des cris. […] Quelque chose vous passe devant les yeux ; c’est alors qu’il faut se jeter dessus, avidement ». — Ma propre expérience s’accorde avec ces remarques.
Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) I Finissons-en avec les théories imaginaires de ces législateurs des rêves, qui, en plaçant le but hors de portée parce qu’il est hors de la vérité, consument le peuple en vains efforts pour l’atteindre, font perdre le temps à l’humanité, finissent par l’irriter de son impuissance et par la jeter dans des fureurs suicides, au lieu de la guider sous le doigt de Dieu vers des améliorations salutaires à l’avenir des sociétés. Rousseau et ses disciples en politique n’ont pas jeté au peuple moins de fausses définitions de la liberté politique que de l’égalité sociale.
L’abbé de Lamennais, qui était encore dans son lit, fut tellement ravi de cet essai de mon talent, qu’il jeta à terre sa couverture et ses draps, et s’écria que ce jeune garde du corps était le barde sacré de ce temps-ci, et qu’il voulait que Genoude, sans perdre un moment, le conduisît immédiatement chez lui. […] Vous ne tenez pas plus que moi à l’ordre de choses sous lequel nous avons le bonheur de vivre ; mais vous ne voudriez pas, je le sais, jeter le pays dans une révolution mal préparée et dangereuse, qui retomberait sur votre responsabilité.
Celle qui les écrivait n’ignorait pas qu’elles seraient montrées ; celle qui les recevait souffrait qu’on y jetât les yeux ; car comment résister au plaisir de laisser voir aux autres qu’on est aimée ? […] Que d’esprit, de ressources, de stratégie, dans ces guerres d’intrigue où sont jetés tous les personnages de marque !
Il ne faut pas qu’il les jette brusquement, mais qu’il apprenne, sinon à s’en passer, du moins à en accepter d’autres, plus légères, qu’il en change à mesure qu’il grandit. […] On a vu aussi de fins ironistes, délicats écrivains, se jeter naguère dans la bataille des partis.
voilà un bien grand mot ; mais ce qui me paraît certain, et ce qui le serait, je le crois, pour tous ceux qui auraient jeté les yeux sur cette suite de pensées neuves et hardies, produites par lui dès sa première jeunesse, c’est qu’il y avait en Sieyès du Descartes, c’est-à-dire de l’homme qui fait volontiers table rase de tout ce qui a précédé, et qui recommence en toute matière, sociale, économique et politique, une organisation nouvelle et une. […] Et, Sieyès lui-même, ce puissant cerveau, doué au plus haut degré de l’intensité de la conception, accorderait-il ainsi à l’idée pure le premier rôle, s’il était également en possession de cette langue dorée et de ces chaînes électriques dont l’éloquence se plaît à jeter le réseau autour d’elle32.
La poésie, c’est le regard jeté sur le fond, brumeux, mouvant et infini des choses. […] Beaucoup de réflexions profondes sont jetées en passant par le poète. « Ce serait faire du bien aux hommes que de leur donner la manière de jouir des idées et de jouer avec elles, au lieu de jouer avec les actions, qui froissent toujours les autres.Un mandarin ne fait de mal à personne, jouit d’une idée et d’une tasse de thé « Ailleurs, l’hégélianisme se traduit en belles formules : « Chaque homme n’est qu’une image de l’esprit général. — L’humanité fait un interminable discours dont chaque homme illustre est une idée. » Vigny a des remarques fines et profondes sur les défauts de l’esprit français : « Parler de ses opinions, de ses admirations avec un demi-sourire, comme de peu de chose, qu’on est tout près d’abandonner pour dire le contraire : vice français. » 88.
. — Mademoiselle Doze Nous étions donc réunis tous les trois, chacun de nous rêvant à quelque tristesse cachée ; dans la cheminée le feu était vif, au ciel le soleil était pâle ; le dimanche jetait son froid et son silence dans la ville. — Allons, leur dis-je, vous êtes heureux, vous autres, chantez ou rêvez à votre aise ; moi, il faut que je raconte mon histoire de chaque semaine. […] Elle devrait quelque pitié à l’amour de ce pauvre Arnolphe…, elle se jette à la tête du premier venu qui lui parle.
L’esprit militaire ne peut exister que lorsque l’état de la société est propre à le faire naître, c’est-à-dire lorsqu’il y a un très-grand nombre d’hommes que le besoin, l’inquiétude, l’absence de sécurité, l’espoir et la possibilité du succès, l’habitude de l’agitation, ont jetés hors de leur assiette naturelle. […] Il s’étonne lui-même de se voir jeté tout à coup par la tyrannie hors de l’existence obscure et paisible que le sort semblait lui avoir destinée.
Après quelque temps, la connaissance de l’atelier, le souvenir de conversations nombreuses, et de nombreuses lettres, me firent apercevoir jusqu’à l’évidence, parmi d’autres choses, l’obstacle au mariage, que les jeunes filles de la mode rencontrent dans leur profession même ; comment celle-ci les affine et les déclasse ; comment elles sont d’un monde par leur naissance et d’un autre par leurs rêves, partagées entre le luxe du dehors et la misère de chez elles, jetées de l’un à l’autre par le travail qui reprend ou le travail qui cesse, également impuissantes à oublier la richesse qu’elles côtoient et à faire oublier la condition d’où elles sortent. […] La rencontre d’un ami peut achever un rôle incomplet ; une fin de chapitre sortir d’une course en fiacre ; l’audition d’un concert jeter dans une rêverie qui dictera, en la chantant, toute la poésie d’un livre.
Et ici je demande la permission de laisser de côté le chef de l’école lui-même pour jeter un regard sur ses disciples. […] L’une, l’aînée, a jeté depuis longtemps son bonnet par-dessus les moulins.
C’est alors que périt l’orateur athénien Démade, comme un instrument de liberté, moins noble et moins pur, qu’on brise et qu’on jette en morceaux, après s’en être servi, pour la calomnier elle-même. […] ou avais-tu goûté trop de vin, lorsque tu t’es jeté sur la couche du repos ?
« Les grands se sont troublés ; les forts, les puissants, se sont rendus avec effroi ; et toi, ô Dieu, comme la roue du vanneur jette les barbes de l’épi au souffle impétueux du vent, tu as livré ces méchants, qui, fugitifs par milliers, se pâmaient devant un seul homme. […] Ces tons élevés et purs, rencontrés par Malherbe, allaient susciter d’autres accents pareils ; Racan, Maynard et d’autres oubliés aujourd’hui trouvaient çà et là, dans quelques vers, la douceur et la majesté du mode lyrique, et cette mélodie, cette voix émue de l’âme solitaire, qui, moins naturelle au dix-septième siècle que l’éloquence du drame, devait cependant s’y mêler, pour jeter parfois sur cette éloquence d’admirables éclairs.
se voit obligée d’avoir ses pages clandestines, son registre à la Suétone, à la Procope et à la Bussy, pâture jetée à la curiosité sensuelle, où chacun, s’il n’y prend garde, va se prendre tout d’abord comme à un appât, et que l’humaine malice, s’il est possible, exagère encore.
Comme un enchantement d’espérance et de joie, Il vient avec sa cour et ses chœurs gracieux, Où, sous des réseaux d’or et des voiles de soie, S’enchaînent des Esprits inconnus dans les cieux ; Soit que, dans un soleil où le jour n’a point d’ombre, Il me promène errant sur un firmament bleu, Soit qu’il marche, suivi de Sylphides sans nombre Qui jettent dans la nuit leurs aigrettes de feu : L’une tombe en riant et danse dans la plaine, Et l’autre dans l’azur parcourt un blanc sillon ; L’une au zéphyr du soir emprunte son haleine, A l’astre du berger l’autre vole un rayon.
L’esprit et ce qu’on appelait le goût survivaient toujours et foisonnaient à l’envi ; mais c’étaient comme les fleurs légères jetées sur des armes, comme des paillettes au fourreau de soie des épées.
Quelles que soient les différences réelles et historiques qui séparent la civilisation des États-Unis de la civilisation européenne, il faut convenir maintenant que la première de ces civilisations est très avancée, très développée, et fort capable en mainte question de jeter un grand jour sur la seconde, de laquelle elle peut sembler à beaucoup d’égards comme un cas particulier simplifié et anticipé.
Notre qualité d’hommes de collège en littérature, fait qu’en voyant ses comédies, au lieu de nous livrer à sa gaîté vraiment folle, nous pensons uniquement aux arrêts terribles qui le jettent au second rang.
Bref il fait œuvre estimable d’historien ; même les qualités de perspicace, de connaisseur, aussi d’écrivain, qui lui sont nécessaires feraient de l’archéologue le plus désigné des critiques si sa familiarité avec, les œuvres anciennes ne le rendait un peu indulgent jusqu’aux plus inutiles copistes qu’il aime pour les originaux évoqués à sa mémoire érudite, conséquemment un peu sévère aux novateurs, et si ses habitudes scientifiques de travail complet où les œuvres sont étudiées non seulement morphologiquement, mais dès leurs genèses et jusqu’à leurs influences, ne lui interdisaient presque la besogne hâtive et jetée de la chronique salonnière.
C’est la manie légiférante, la réglementation et le contrôle à outrance ; c’est la suspicion jetée sur toute volonté d’indépendance dans l’ordre des idées et des croyances comme dans celui des actes.
Ce corps eut une enfance, une jeunesse, un âge mûr souvent, une vieillesse parfois ; il fut un homme, lit partie d’une famille, naquit et vécut dans une patrie, eut tels parents, tels amis, tels contemporains ; la carrière de cet être fut mêlée d’infortunes et de joies, de hasards et d’habitudes ; il subit et exerça des influences spirituelles ; il reprit l’œuvre artistique à un point donné et en porta le progrès à tel autre point ; cette entité intellectuelle dont on a désigné d’abord la configuration totale et générale, avec toutes ses acquisitions et toute son innéité, eut une évolution, fut jetée dans le compromis de résistances et d’adaptations qu’est la vie, fut fait d’originalité et d’imitation comme tout individu vivant, mêla sa tâche de redites et de trouvailles.
Quelle bizarre idée de prêter à un cierge la fantaisie de devenir immortel, et pour cela de se jeter au feu.
Comme les très grands écrivains qui ont su s’attendre, Joseph de Maistre, qui fut une créature beaucoup trop élevée et trop simple pour se jeter à la tête de la publicité et pour s’ébouriffer de ce mot de gloire, comme Diderot, Rousseau et tant d’autres, Joseph de Maistre, qui écrivit tard, apparaît, quand il paraît avec une beauté accomplie et une physionomie complète.
Thucydide est un historien qui a jeté sur les événements de son temps le regard clair d’un fils de Minerve aux yeux pers.
Un tel acte prouva tout d’abord qu’il y avait dans les veines de cet efféminé, grandi comme Achille sous des vêtements de femme, mais qui se jetait à l’épée, deux gouttes de sang des Wasa qui ne devaient pas froidir et furent toujours prêtes à remonter à ce grand front vaniteux et fuyant qu’on lui a fait dans ses portraits, et la seule chose — le front — qui ait jamais fui, en pareil homme !
C’est par là que, n’étant plus jeune, et que, n’étant presque plus belle, elle avait arraché Louis XIV — l’homme le plus difficile à séduire et le plus difficile à captiver — à la plus belle de ses maîtresses, à la plus altière, à la plus sanguinement spirituelle, à cette Armide des Mortemart qui l’avait enlacé par plus puissant que ses bras, — l’habitude, — et qui lui avait mis aux quatre membres ce boulet des enfants qui fait enfoncer un homme dans une liaison encore plus que le boulet de bronze ne fait s’enfoncer celui qu’on y jette dans la mer !
Du moins, c’est ce que son titre impliquait… Et il ne nous a raconté que les Effets révolutionnaires, incapable qu’il était de pénétrer dans cette profondeur des Causes et de jeter sa sonde là-dedans !
Mais, quoique M. et Madame Guizot appartiennent par plus d’un endroit aux doctrines qui sont sorties de l’insurrection spirituelle qu’Abailard commençait au Moyen Âge, si réellement la Philosophie ne s’était pas glissée dans cette publication et n’avait pas projeté d’imprimer la marque de son ergot dans ce livre de moralité sensible, si vraiment on n’avait pensé qu’à peindre et à juger une passion qui a jeté des cris et laissé son sang dans l’Histoire, on n’eût pas troublé l’unité de la compilation qu’on édite par l’insertion de documents étrangers au but d’étude morale qu’on voulait atteindre.
Et cependant, à toutes les époques de cette existence brillante et qui aurait dû être heureuse, le cri de l’ennui que, seule dans tout son siècle, elle a poussé, elle le jeta partout autour d’elle et avec une vibration dont, un siècle plus tard, Chateaubriand, qui avait vu la Révolution française, n’a pas dépassé l’intensité.
On lui jetterait, à cet insecte, une prise de bon tabac d’académicien sur la tête, et tout serait dit !
Mais quoique M. et Mme Guizot appartiennent par plus d’un endroit aux doctrines qui sont sorties de l’insurrection spirituelle qu’Abailard commençait au Moyen Âge, si réellement la Philosophie ne s’était pas glissée dans la publication présente et n’avait pas projeté d’imprimer la marque de son ergot dans ce livre de moralité sensible, si vraiment on n’avait pensé qu’à peindre et à juger une passion qui a jeté des cris et laissé son sang dans l’histoire, on n’eût pas troublé l’unité de la compilation qu’on édite par l’insertion de documents, étrangers au but d’étude morale qu’on voulait atteindre.
Il a choisi les plus comptés d’entre eux et il a cherché, sous le masque fin d’une phrase éteinte, qui jette de la cendre par-dessus la flamme, afin qu’on ne crie pas « au feu !
Il l’orne, il l’atourne, il l’amollit, il lui communique de certains charmes, mais il ne le dévore pas comme Corneille, pour en jeter, après, les cendres aux vents.
Ces gens-là ne sont pas sots comme nous… Jetez une robe de moine, pour les élargir, sur les étroites et grêles épaules de Charles de Rémusat, et dressez devant lui l’Église dans la majesté d’un Concile, et vous n’aurez plus le petit philosophe moderne qui n’a plus d’hérésie à oser, dans ce xixe siècle incrédule et tolérant comme la prostitution !
Et l’inquiétude qu’il éprouve n’est pas seulement pour ses propres raisonnements ou pour la destinée d’un livre qui peut paraître la plus mauvaise des plaisanteries à ceux qui prennent les choses par le côté plaisant, mais c’est une inquiétude plus haute, plus nette et plus fondée… La pudeur du philosophe qui rougit de ces vésanies d’une ignominieuse extravagance, ne l’empêche pas de jeter sur le temps où ces vésanies courent le monde et ambitionnent de le dominer le regard inquiet de l’homme pénétrant que le philosophe ne peut abuser… C’est ici le côté profond de cette Étude sur le Pessimisme au xixe siècle.
L’homme, en ce malheureux Georges Caumont, si démoralisé par la mort, ne va pas, lui, jusqu’au génie, dans ses facultés : mais son cri monte jusque-là, — ce cri dans lequel il semble jeter ses entrailles, — ce cri qui dure deux cent quarante-six pages, toujours du même perçant, du même infatigablement suraigu !
De tous les gouvernements qui peuvent immensément par eux-mêmes et qui s’imaginent, malgré l’expérience, jeter la civilisation à tous les rivages avec les ancres de leurs vaisseaux, le gouvernement d’Angleterre est assurément le plus intelligent, le plus profond, le plus habile.
— Gœthe, qui s’était jeté là dedans comme Sapho avec sa lyre, comme le pêcheur de sa ballade dans les bras de cette sirène qui ne le rendit point ; Gœthe enfin, tout entier, avec sa résolution d’un homme de génie qui se suicide dans un système, et qui ne chicane point, avec une puérilité lâche, l’arme qui lui sert à se tuer !
J’ai dans ma vie vu bien des êtres creux, coupes et cruches, bassins de toute espèce, imbécilles, ouverts et béants à toutes les choses qu’on jette dans leur vide, mais de capacité à tenir tout un homme, et quel homme !
Dans les ardentes fantaisies légères qu’il a jetées à tous les vents, dans ces poésies qui sont comme les bulles de savon de sa muse, mais dont la passion colore toujours la diaphanéité, Ronsard, ce poète jupiterréen de la Renaissance, ne peut déguiser ce qu’il est et garder l’incognito de sa divinité.
Il en a la langue immense, enthousiaste, éloquente, lyrique, à rires sonores, à larges larmes, l’engueulement sublime du cabaret, la gouaille à écuellées, les gros mots hardis qui n’ont peur de rien, quand il s’agit d’être remuant et pittoresque ; le gros sel, le sel bourguignon qu’il jette à poignées, d’ici, de là, mais plus cristallisé, plus diamanté et qui, en salant tout autant, étincelle davantage !
Il pouvait être le frère de charité, l’ensevelisseur des restes d’un homme de génie, sans les jeter à la tête de tout un pays qui, en définitive, ne l’a point volontairement assassiné.
La brusque disparition d’un dixième peut-être de notre corps électoral jettera un trouble profond dans la direction des affaires publiques.
Naissance, éducation, mœurs ; principes ou qui tiennent au caractère ou qui le combattent ; concours de plusieurs grands hommes qui se développent en se choquant ; grands hommes isolés et qui semblent jetés hors des routes de la nature dans des temps de faiblesse et de langueur ; lutte d’un grand caractère contre les mœurs avilies d’un peuple qui tombe ; développement rapide d’un peuple naissant à qui un homme de génie imprime sa force ; mouvement donné à des nations par les lois, par les conquêtes, par l’éloquence ; grandes vertus toujours plus rares que les talents, les unes impétueuses et fortes, les autres calmes et raisonnées ; desseins, tantôt conçus profondément et mûris par les années, tantôt inspirés, conçus, exécutés presque à la fois, et avec cette vigueur qui renverse tout, parce qu’elle ne donne le temps de rien prévoir ; enfin des vies éclatantes, dès morts illustres et presque toujours violentes ; car, par une loi inévitable, l’action de ces hommes qui remuent tout, produit une résistance égale dans ce qui les entoure ; ils pèsent sur l’univers, et l’univers sur eux ; et derrière la gloire est presque toujours caché l’exil, le fer ou le poison : tel est à peu près le tableau que nous offre Plutarque.
Le plus souvent il jette et abandonne ses idées sans s’en apercevoir, et l’expression naît d’elle-même.
Quand on voudra, par exemple, dans une clinique, faire cet essai, il suffira d’ajouter un peu de noir animal à l’urine, on jettera sur un filtre, et l’on recueillera le liquide limpide qu’on essayera alors au réactif. […] Il vous suffira, pour juger de la généralité de la fonction glycogénique dans le règne animal, de jeter les yeux sur la liste suivante, que j’ai fait écrire sur le tableau. […] On a jeté sur un filtre et l’on a recueilli le liquide filtré parfaitement transparent, incolore et sucré. […] On y ajoute ensuite de l’eau pour dissoudre la matière sucrée, on jette le tout sur un nitre ; le liquide, comme vous voyez, passe parfaitement limpide. […] Ce dernier fait, jusqu’alors inconnu, est destiné, je crois, à jeter un jour tout nouveau sur les actions chimiques qui se passent d’abord dans le foie et même dans tout l’organisme, et sur l’espèce d’action que le système nerveux exerce sur ces phénomènes.
Les journalistes de toute couleur ont jeté sur ce cercueil quelques respectueuses gouttes de leur encre et se sont éloignés dans un recueillement sacerdotal. […] sans doute, la Paternité de Flaubert et la Procession de Zola ne sauraient être méconnues par lui, mais son âme tendre ne peut pas résister à ce qui l’attire et il se jette, il se colle au Verbe-Goncourt comme un suçoir. […] Justin pensa qu’un regard jeté sur le papier en désordre lui apprendrait peut-être la vérité. […] Dumas, en tant qu’arrangeur de la pièce dont l’intuitive Sarah est assurément le vrai poète, ressemble à un croquant en visite chez une princesse très bonne qui consentirait à ne pas le faire jeter à la porte. […] Sous prétexte qu’il leur ressemble, on dira qu’il les imite et on lui jettera à la tête, pour l’écraser, ces noms illustres, qu’il admire et qu’il révère plus que personne.
Peu lui importe le tyran, puisqu’il avait d’abord choisi, pour le frapper, un pape, avant de jeter son dévolu sur Alexandre de Médicis. […] Et c’est pourquoi elle jette, au travers des imprécations du jeune homme, un crescendo éperdu de « Armando ! […] Elle cherche à écarter la jeune ouvrière en lui offrant (comme une aumône qu’on jetterait avec menace) une place de femme de chambre dans un château éloigné de la ville. […] … Et je te jette à terre ! […] Les cloches sonnaient, les musiques jouaient, on jetait des roses ; les femmes criaient : « Comme il est beau !
Elle jette dans une certaine émotion un peu tremblante. […] Quand il ajoute, c’est donc, fréquemment, l’homme de 1550 qui intervient dans l’œuvre antique, y mêle un trait, y met un accent, y jette un esprit qui sont modernes. […] Il ne jette pas un regard sur ces salons du xviiie siècle qui ont été les places fortes, les places de sûreté et les places de ravitaillement de l’armée encyclopédique. […] On n’a plus qu’une raison d’y jeter quelque coup d’œil, c’est le plaisir qu’on éprouve à contempler le spectacle de folies dont on est exempt. […] Mais, voyez déjà : Les Burgraves ne sont plus guère une tragédie ; c’est une épopée jetée sur la scène.
L’art, la poésie, voilà les créations vraiment divines qu’il a jetées dans le torrent des choses. […] Après avoir acclamé les pourchasseurs d’illusions et les briseurs d’idoles, nous sommes presque tentés de leur jeter des pierres. […] Qui ne voudrait pouvoir, par l’effet magique d’une baguette de fée, jeter un coup d’œil sur les trésors cachés dans ce tabernacle ? […] Dansons avec reconnaissance sur le volcan où le sort nous a jetés. […] Son horreur des chemins battus le jeta en des lieux où l’on a quelque répugnance à le suivre.
C’est un très grand danger parce que cela peut vous jeter en proie aux mains de certaines gens. […] Par peur de la Camargue vous épiez tous les symptômes de maladie que vous pouvez avoir et vous vous jetez dans les bras de Monsieur Diafoirus où aux genoux de Monsieur Purgon. […] Molière l’imite une fois, mais d’ordinaire il n’aime qu’à jeter sur la scène un personnage observé de près, qu’il a vu de ses yeux. […] Au premier, c’est presque Chérubin ; c’est Chérubin à vingt ans ; c’est le conquérant, c’est le jeune homme qui est jeté dans le libertinage allègre et joyeux en même temps que par la chaleur du sang, par la volonté de puissance, par l’ambition de conquêtes. […] Un gentilhomme même sans honneur se jette au secours de gentilshommes attaqués par des brigands, il s’y jette comme par un mouvement réflexe ; un gentilhomme donne un louis à un pauvre comme par une habitude ancestrale de la main exactement comme un avare ramasse une épingle.
Mais, pour jeter au néant une chose, il faudrait concevoir le néant : et, si le néant existe, il n’est plus le néant. […] » Il se jette à terre et colle son oreille sur le pavé, il reconnaît le galop de César. […] Elle les accusait de forfaits effroyables, comme d’allumer les meules et les fermes, de voler les enfants et de jeter le mauvais sort aux troupeaux. […] Leurs volées magnifiques jetaient dans l’air une gaieté de vie nouvelle. […] Coiffée, — les cheveux noirs, — coiffée un peu à la Charles X, le poil amené en avant sur les tempes et jeté en côté de manière à laisser nu le front large et très haut.
Que le forcené Ladislas, emporté par sa passion, teint du sang de son rival, se jette aux pieds de sa maîtresse, on est ému d’horreur et de pitié. […] C’est de le jeter dans de grands périls qui nous fassent trembler pour lui. […] Mais que si vous voyez, ceint du bandeau mortel, Votre fils Télémaque approcher de l’autel, Nous vous verrions, troublé de cette affreuse image, Changer bientôt en pleurs ce superbe langage, Éprouver la douleur que j’éprouve aujourd’hui, Et courir vous jeter entre Calchas et lui ! […] Il suit de là qu’un grand nombre de confidents dans une pièce, en suspendent la marche et l’intérêt, et qu’ils y jettent par là beaucoup de froideur et d’ennui. […] C’est ainsi que, dans le Bourgeois gentilhomme, la grossièreté de Nicole jette un nouveau ridicule sur les prétentions impertinentes, et l’éducation forcée de M.
Mais si, tout bonnement, je me jette à l’eau sans avoir peur, je me soutiendrai d’abord sur l’eau tant bien que mal en me débattant contre elle, et peu à peu je m’adapterai à ce nouveau milieu, j’apprendrai à nager. […] Celui qui se jette à l’eau, n’ayant jamais connu que la résistance de la terre ferme, se noierait tout de suite s’il ne se débattait pas contre la fluidité du nouveau milieu ; force lui est de se cramponner à ce que l’eau lui présente encore, pour ainsi dire, de solidité. […] Une fois en possession de la forme d’espace, il s’en sert comme d’un filet aux mailles faisables et défaisables à volonté, lequel, jeté sur la matière, la divise comme les besoins de notre action l’exigent. […] Si je choisis, au hasard, un volume dans ma bibliothèque, je puis, après y avoir jeté un coup d’œil, le remettre sur les rayons en disant : « ce ne sont pas des vers. » Est-ce bien ce que j’ai aperçu en feuilletant le livre ? […] Point n’était nécessaire que la vie jetât son dévolu sur le carbone de l’acide carbonique principalement.
Conte moi Quel sûr démon te jette en ce sinistre émoi, Ce baiser, ces parfums offerts, et le dirai-je ? […] C’est ainsi que je m’efforcerai toujours de « comprendre » Mallarmé, dût-on m’accuser de jeter sur le sol de cent iris les pavés « d’affirmations lourdes et inutiles ». […] Cette formule jetée en passant, il l’a à peine pratiquée. […] L’art n’est point créé par l’Idée seule, mais par la coulée de matière jetée dans son moule. […] Ainsi Jouffroy, tout plein de ferveur pour la psychologie, n’y réalisa à peu près rien, parce qu’il s’épuisa, en ce que Sainte-Beuve appelle des précautions passionnées, à préciser le rôle, l’avenir, les droits de la psychologie, à décomposer en grelottant des mouvements sur le rivage au lieu de se jeter hardiment à l’eau.
Le grand effort est fait, et visiblement il suffira de quelques coups pour jeter bas ce qui subsiste encore de l’ancienne société française. […] C’est encore lui, quand le marquis de Mirabeau publiera sa Théorie de l’impôt, qui s’indignera que le gouvernement ait attendu plus de vingt-quatre heures pour jeter ce marquis dans un cul de basse-fosse. […] C’est comme quand Ximénès veut faire jeter l’abbé de La Porte au Fort-l’Évêque. […] Et c’est peut-être depuis cette époque que se jeter la pierre est devenu un acte humain. » On ne fait pas plus pédantesquement l’agréable. […] Ne doutez pas que ce soit par là qu’ils plaisent, mais réfléchissez aussi que c’est par là qu’ils ont jeté la critique d’art dans une voie dangereuse.
Le pauvre Micheletty, (mon professeur, ) faillit tomber évanoui ou se jeter par la fenêtre de la joie de m’entendre parler italien. […] Au second tour, le surprenant, mais stupide personnage, s’approche de la voiture et de sa voix stridente avec son accent niçois jette ces mots flamboyants de distinction : — Où donc êtes-vous logées ? […] Chez moi je me déshabille et, en chemise, me précipite sur mes classiques, les range, leur assigne des armoires particulières et ayant terminé ce travail me jette sur le tapis et passe une heure entre les caresses de mes deux chiens, les seuls vrais amis de l’homme, cet homme fût-il Socrate. […] Je prends à peine le temps de faire un croquis au crayon et me jette sur la terre glaise. […] La baleine saisie d’effroi Jeta l’prophète à la dérive, Et obligée, mais pleine d’émoi Nagea vite vers une autre rive.
Les songes, les pressentiments, les oracles, tout ce qui jette dans la vie de l’extraordinaire, de l’inattendu, ne permet pas de croire au malheur irrévocable.
Que ne donnerions-nous pas pour qu’il nous fût possible de jeter un coup d’œil furtif sur tel livre qui servira aux écoles primaires dans cent ans ?
Le christianisme raisonnable de Locke, le christianisme dans les limites de la raison de Kant, le christianisme progressif de Lessing, le christianisme, unitaire de Channing, peut encore sauver l’idée religieuse du péril où l’ont jetée parmi nous la science et la philosophie.
La nouvelle maniere de réciter aura donc paru fort extraordinaire aux romains dans ses commencemens, mais ils s’y seront habituez dans la suite, parce qu’on s’accoutume facilement aux nouveautez, qui mettent plus d’action et qui jettent plus d’ame dans les représentations théatrales.
Il prétendra que le plaisir, qu’elle nous procure est un plaisir d’opinion, qu’il faut se contenter, dans quelque ouvrage que ce soit, de parler à l’esprit et à l’âme : il jettera même par des raisonnements captieux un ridicule apparent sur le soin d’arranger des mots pour le plaisir de l’oreille.
Jolie peut-être autant que Rosine, qui faisait probablement des fautes d’orthographe dans ses billets doux et qui en faisait certainement une, en conduite, quand elle les jetait par la fenêtre, l’auteur de Robert Emmet n’en fait ni dans ses livres, ni nulle part Pour en faire, elle est trop instruite, elle a été trop bien élevée, elle est trop précieusement correcte.
Cela seul jetterait sur son ouvrage un intérêt puissant et relevé, mais ce n’est pas tout.
On arrache la cocarde nationale, on la jette par terre, on l’insulte du pied.
» Henri IV n’était pas l’hypocrite catholique qui jetait si légèrement son masque aux pieds de sa maîtresse.
mais que ce mot de femmes miroite dans le titre du livre qu’on publie, et les hommes s’y jetteront… quittes à être attrapés.
et elle a jeté sur la tête de tout le monde le poids d’un génie écrasant, qui a écrasé ceux qui le niaient ou qui voulaient le diminuer.
Il lui surgira un Heine, un Yorick, un bouffon quelconque, qui lui jettera sa pelletée de plaisanteries sur la tête, et c’en sera pour jamais !
Il s’est jeté dans la psychologie, le puits de l’abîme pour les philosophes, « la cave de M.
Flourens jetait aux Bichats de l’avenir, pour le développer, le germe d’une nouvelle chirurgie, et ce n’était là qu’un profit de la physiologie ; mais la théorie posant l’axiome superbe : « la matière passe et les forces restent », frappait le matérialisme, d’un premier coup, au ventre même.
Certainement, cela n’eût pas été plus vrai que toutes les autres applications de l’hégelianisme dont la fausseté déborde autour de nous, mais cela eût été curieux, et, d’ailleurs, cela eût fait contre cette philosophie, qui est la possession intellectuelle de notre temps, une de ces fières preuves par l’absurde qui jettent bas une doctrine dans le mépris.
Malgré deux ou trois efforts qu’il fît un jour pour s’ôter de la place où Dieu l’avait mis aux regards du monde comme un pont du ciel qu’il lui avait jeté, malgré la tentation qui le prit de la pénitence au désert, du silence ardent des Chartreuses et de la contemplation rigide et extatique en Dieu des grands Solitaires, Dieu ne permit point au serviteur qu’il s’était choisi d’être autre chose qu’un grand confesseur, et je dirai plus : le confesseur au dix-neuvième siècle.
Un jour, elle a passé, cette terrible idée, dans l’esprit d’un homme de génie, et Dieu sait le trouble qu’elle y jeta !
Effrayante alternative pour Guizot, qui n’a même guères abordé que par la main des autres la vie publique de Calvin et son gouvernement spirituel, mais qui, pour le reste, pour cet abîme de la moralité d’un homme, qu’il faut pénétrer et sonder dans tout homme, quand on se charge de son histoire, a fait ce qu’on fit à la mort de Calvin, dont on s’empressa de clouer vite dans le cercueil le cadavre, qui aurait parlé, et de le jeter dans la tombe… Prudence terrible, qui dit même plus qu’on n’ose penser.
Mais ce n’est pas le fond de cette profonde coupe de rêveries, dans laquelle, si on la vidait, on regarderait peut-être encore, comme ce vieux enivré de roi de Thulé regardait au fond de la sienne, en l’emplissant de ses longues larmes avant de la jeter dans la mer !
Ce talent naturel comme la voix, n’allez pas croire pourtant que cette rêveuse, cette abandonnée, cette troublée qui jetait ses cris éloquents autour d’elle ou laissait tomber ses soupirs, chantât comme Ophélie entre le saule et l’eau : non !
Il y a quelque temps, le hasard, qui n’est pas toujours un imbécile, jeta dans nos mains un recueil de vers dont on a parlé bien sobrement, — l’auteur n’était pas de Paris, — et c’est ce recueil, très-inconnu en raison du peu qu’en ont dit les hospitaliers généreux de cette ville charmante, c’est ce recueil d’un luxe typographique qui est une poésie à lui seul que nous voulons signaler à l’attention de ceux-là qui aiment la poésie, et on ne peut l’aimer maintenant qu’avec désespoir.
Jetez, en effet, dans un mortier, Alfred de Musset et Victor Hugo, broyez et mêlez, et vous aurez une combinaison, une composition poétique qui pourrait bien s’appeler Théodore de Banville.
Ils auraient pu jaillir impétueusement comme des sanglots et des larmes, mais ils ne furent ni une déchirante élégie, ni une ode désespérée et saignante qui jette son sang contre le ciel.
Si le roman de madame George Sand est une étude, purement et simplement, de nature et de passion humaine, comme les romanciers ont l’habitude de nous en donner, la pudeur, toutes les pudeurs, la compassion, toutes les compassions, la compassion pour Lui, et même pour Elle, le respect du passé, de la mort, de l’irrévocable, la peur enfin de son immortalité d’écrivain, si elle a la faiblesse d’y croire, tout devait l’arrêter, la troubler, lui faire jeter sa plume terrifiée.
L’enfant, durement chassée par l’implacable, va disparaître… Elle est presque à la porte, quand le cœur fond à Renée de Penarvan, qui se jette à l’enfant comme une lionne : et le charme de l’orgueil est rompu !
Si le nouveau roman de Mme George Sand est une étude, purement et simplement de nature et de passion humaine, comme les romanciers ont l’habitude de nous en donner, la pudeur, toutes les pudeurs, la compassion, toutes les compassions, la compassion pour Lui, et même pour Elle, le respect du passé, de la mort, de l’irrévocable, la peur enfin de son immortalité d’écrivain, si elle a la faiblesse d’y croire, tout devait l’arrêter, la troubler, lui faire jeter sa plume terrifiée.
Malheureusement l’auteur, qui, comme tous les littérateurs de son pays, imite perpétuellement quelqu’un ou quelque chose, et qui, comme Michel Cervantès, avait appelé poëme son roman, est mort au dix-neuvième chant de ce poëme qui n’est pas un poëme, et qu’il avait, comme Virgile (toujours comme quelqu’un), jeté au feu, sans qu’il ait brûlé plus que l’Enéide.
Je ne sais si je me trompe, mais il me semble que quelques lignes que madame de Sévigné a jetées au hasard dans ses lettres, sans soin, sans apprêt, et avec l’abandon d’une âme sensible, font encore plus aimer M. de Turenne, et donnent une plus grande idée de sa perte.
Faudrait-il supposer même que, métropole puissante de l’univers, le sillonnant de ses colonies, l’Europe lui ait envoyé avec son sang une vieillesse anticipée, et que, sur ces territoires de l’Amérique septentrionale qui s’étendent sans cesse, dans ces villes qui poussent si vite, notre civilisation n’ait jeté partout, avec son expérience de plusieurs siècles et ses plus récentes inventions, que le bon sens pratique, l’intelligente âpreté au gain, et cette active distribution du travail, cet emploi technique et pressé de la vie, qui laisse si peu de temps aux plaisirs délicats de l’âme et du goût ?
L’homme le moins qualifié pour cette vie, Condorcet, écrivant dans sa cachette, après le 2 juin, son Tableau des progrès, en dit : « Cette contemplation est pour moi un tranquille asile où le souvenir de mes persécuteurs ne peut m’atteindre. » La Révolution jette bien des âmes dans ces asiles. […] En 1789, les Parisiens du faubourg Saint-Antoine ont démoli la Bastille avec le même enthousiasme que leurs grands-pères avaient employé à jeter bas le temple protestant de Charenton. […] Ces deux livres de proscrits jetés l’un vers le passé, l’autre vers l’avenir, par la tempête contemporaine, suffiraient à sauver l’honneur de la littérature révolutionnaire. […] Jeté dans l’exil par la Révolution, il s’était précipité sur sa plume et avait écrit, dans l’Essai de 1797, un Génie des Révolutions. […] Ce séraphin de l’ombre, ce prince du silence et de la tour d’ivoire, la femme publique l’a jeté avec ses plus chers secrets sur la place publique, l’a divulgué presque nu à ceux et à celles qui l’ont remplacé près d’elle.
Elle aime à jeter la sonde dans l’océan sans fond de l’inconnaissable, à prolonger dans l’infini les hypothèses que lui suggère la science, à s’élever sur les ailes du rêve dans le monde du mystère. […] Ce fut sa manière de jeter sa gourme. […] Comment dire l’état de rêve ou me jetèrent ces premières paroles de l’Imitation ? […] Si l’amitié l’avait consolé de l’amour déçu, il se jeta avec fureur dans l’activité intellectuelle quand il fut privé des joies quotidiennes de l’amitié. […] Nous espérons qu’ils recevront une publicité plus durable que celle d’un journal ; car ils méritent d’être conservés, par leur beauté propre et pour la lumière qu’ils jettent sur le caractère et les idées de leur auteur.
Monté sur Marchegai et faisant bonne contenance, malgré son piteux équipage, il passe par les rues de Poitiers et d’Orléans ; un débauché l’assaille, la vieille Hersent le défie et l’accable d’injures, le peuple clabaude et poursuit de ses gaberies le gentilhomme : c’est la première fois peut-être que la foule entre en scène et que la réalité vilaine tente de jeter la poésie épique à bas de son grand palefroi. […] « Le grand laquais, dit Furetière, jeta un gros pavé qu’il trouva dans sa main à l’un de ces meuniers avec une telle force que cela eût été capable de rompre les reins de tout autre ; mais ce rustre, hochant la tête et le regardant par-dessus l’épaule, lui dit avec un ris badin : “Ha oui ! […] Dans la réalité, les faits matériels se jettent à la traverse des actions : — Il les écarte. […] Pour une manœuvre manquée, Koutouzow s’en prend au messager, l’officier Eichen, se jette sur lui « en le menaçant du poing et en l’accablant des plus grossières injures ». […] Il sauve une enfant ; et, nouveau retour, comme l’enfant, pâle, laide, s’effrayait de lui par méprise, hurlait avec colère et mordillait ses mains pour échapper à son étreinte, « cet attouchement, qui ressemblait à celui d’un petit animal, lui causa une telle répulsion, qu’il fut obligé de se dominer pour ne pas jeter là l’enfant ».
La force du caractère voulait qu’il lui dît brusquement : « Votre sonnet ne vaut rien, jetez-le au feu », mais cela aurait ôté le comique qui naît de l’embarras du misanthrope et de ses je ne dis pas cela répétés qui ne sont au fond que des mensonges. […] Si Molière, comme Rousseau le voudrait, disait d’emblée à Oronte : « Votre sonnet ne vaut rien, jetez-le au feu », le public dirait : « Voilà tout simplement un grossier personnage » et Alceste serait ridicule et antipathique. […] Ce billet, l’avocat en a la conviction, est faux, en ce sens que la signature est authentique, mais a dû être surprise, a dû être jetée par le grand seigneur étourdi sur une pièce qu’il croyait sans importance. […] … Lorsqu’on a, comme moi, épousé une méchante femme, le meilleur parti qu’on puisse prendre, c’est de s’aller jeter dans l’eau, la tête la première… Tu l’as voulu, George Dandin ! […] Ce qui déverse le comique, ce qui jette le ridicule sur les gens, sur telles et telles gens, ce qui rit, c’est le bon sens moyen, le bon sens bourgeois ou populaire, trouvant ridicule tout ce qui s’écarte de lui.
En attendant, le poète jette sur la vie un regard sérieux et superbe. […] Mais le vieux mari d’Aïna découvre la ruse et fait crever les yeux au chanteur… Un peu après, Djérid, errant sur le quai, entend qu’on jette à la mer Aïna cousue dans un sac. […] La malédiction jetée à la chair a dramatisé l’amour. […] Faible, en proie au hasard et à l’aventure, victime de cette merveilleuse nervosité qui serait la meilleure part de son génie, il gaspillerait ses jours et tous les présents des fées comme un jeune roi capricieux qui s’amuserait à jeter ses trésors à la mer. […] Ce ventre « lui semble jeter son ombre sur la propreté froide de la cour… et emplir l’immeuble d’une chose déshonnête dont les murs gardent un malaise — « Dans les commencements, explique-t-il, ça se voyait à peine ; c’était possible ; je ne disais trop rien.
Que de pièces « vingt fois sur le métier » remises avant que ne sortent, ne s’irisent, à la lumière, ces coupes infrangibles où s’accusent des formes toujours si élégantes, — usant parfois, pour feinte dernière, de je ne sais quel « jeté » qui provoque. […] Qu’il jette un seul coup de fusil en pure perte, aussitôt l’arbitraire intervient, et le lecteur est en droit de demander : pourquoi maintenant plutôt que tout à l’heure, pourquoi pas tout le temps, puisqu’aussi bien, selon la formule consacrée, tout est dans tout ? […] Mon père jetait mes paquets dans la voiture et me poussait sur le marchepied. […] C’est seulement une fois tout danger passé qu’on a cyniquement jeté les masques. […] Car en cette âme — provisoirement désaffectée — si l’amour jette une flamme si vive, c’est que l’amour lui est alors un absolu, qu’Aimée lui tient lieu de Dieu, — oh !
Il ne faut pas croire qu’il le fut sans regret et sans regard jeté en arrière et que son état, en cette crise, fut tout de suite l’état dionysiaque. […] N’importe ; l’événement inattendu me jeta une lumière soudaine sur l’endroit que je venais de quitter et me donna aussi ce frisson de terreur que l’on ressent après avoir couru inconsciemment un immense danger. […] Nietzsche en est persuadé au moins, et, de son regard jeté sur la société, il conclut pour le moment : Ceci encore est un obstacle à ma foi. […] La même méchanceté est dans l’âme de tous les maîtres et de tous les prédicateurs de ce qui est neuf, cette méchanceté qui jette le discrédit sur un conquérant. […] Tous les siècles à venir jetteront sur cet âge de perfection un regard plein d’envie et de respect ; car le mouvement de nations dont sortira cette gloire guerrière n’est que le contre-coup de l’effort de Napoléon et n’existerait pas sans Napoléon.
En quittant la ligne extrême où la marée allemande a jeté son flot, on a cru qu’épuisée elle se retirait. […] Jetez même un adieu rapide à votre cœur d’hier. […] René Benjamin, lui, nous jette en plein dans la guerre. […] Mais voici qu’une vive lumière se jette sur ces demi-teintes, éclaire la pénombre dangereuse et dissipe les nuées troubles ; il fait jour. […] Et François tremble de colère humiliée… « Il aurait voulu se jeter sur cet homme, lui cracher au visage, le piétiner.
Michaud, de retour de l’exil où l’avait jeté le 18 fructidor, publiait ses lettres à Delille sur la Pitié, en préparant son poëme du Printemps d’un Proscrit, dont il courait à l’avance des citations. […] Mais son exil à la fin de 1803, ses voyages, son existence de suzeraine à Coppet, ses relations germaniques, aristocratiques, moins contre-balancées, tout la jeta dès lors dans une autre sphère et dissipa vite en elle cette inspiration de l’an III, que nous avons essayé de ressaisir. […] Mme de Staël est d’une taille moyenne, et son corps, sans avoir une élégance de nymphe, a la noblesse des proportions… Elle est forte, brunette, et son visage n’est pas à la lettre, très-beau ; mais on oublie tout dès que l’on voit ses yeux superbes, dans lesquels une grande âme divine, non-seulement étincelle, mais jette feu et flamme. […] C’est cette idée assez répandue, qu’elle aurait adhéré ou poussé au 18 fructidor, qui a fait dire d’elle « qu’elle jetait ses amis à l’eau pour se donner le plaisir de les repêcher le lendemain » En France un bon mot est souvent toute la preuve d’un fait. — Et puisque j’en suis à ces mots-là, je les mettrai ici tels que je les trouve dans les journaux du temps avec les variantes. Elle avait, disait-on encore, jeté tous ses amis à la mer pour avoir le plaisir de les repêcher à la ligne. — Une des victimes du 18 fructidor, un respectable déporté (Barbé-Marbois ?)
Comment trouver le temps de méditer, puis de m’approprier, ainsi qu’il l’eût fallu, un si grand nombre d’articles, même après avoir jeté au panier, sur la rapide inspection d’un ami, ceux qui ne méritaient pas d’être lus ! […] Parce que je soutiens-et tout se ramène là, en effet-que poésie n’est pas raison, il me reproche de « jeter l’anathème à la raison ». […] Paul Valéry, m’écrit Fagus, croit à l’inspiration, au vers initial jeté comme un coup de dés par le hasard des dieux. […] ainsi le « contrôle humain » s’entendrait du prosaïsme le plus plat ; et l’« inconnu », d’une abstraction qui nous jetterait hors du tableau, hors de toute plastique. […] Diderot raconte quelque part : j’ai connu un jeune homme plein de goût qui, avant de jeter le moindre trait sur la toile, se mettait à genoux et disait : « mon dieu, délivrez-moi du modèle. » on ne saurait trop presser le sens de cette petit histoire.
Pour moi, je ne puis que jeter de la poudre sur l’écriture de ces deux grands hommes, j’en bois fort peu ; et néanmoins ce sera une débauche, mais philosophique, et peut-être quelque chose davantage, pour être tous trois guéris du loup-garou et du mal des scrupules, qui est le tyran des consciences. […] Il s’agit de je ne sais quel conseil (page 229) dont Saint-Ange croit que les politiques d’alors pourraient tirer grand profit ; Mascurat répond : « Quand ils le feroient, Saint-Ange, ils ne réussiroient pas mieux au gouvernement des États et empires que les plus doctes médecins font à celui des malades ; car il faut nécessairement que les uns et les autres prennent fin, tantôt d’une façon et tantôt de l’autre : Quotidie aliquid in tam magno orbe mutatur, nova urbium fundamenta jaciuntur, nova gentium nomina, extinctis nominibus prioribus aut in accessionem validioris conversis, oriuntur (chaque jour quelque changement s’opère en ce vaste univers ; on jette les fondations de villes nouvelles ; de nouvelles nations s’élèvent sur la ruine des anciennes dont le nom s’éteint ou va se perdre dans la gloire d’un État plus puissant). […] Dans un Advis imprimé (1651) à l’adresse de nos Seigneurs du Parlement, il exhale les sentiments dont il est plein : « … Et pour moi qui la chérissois comme l’œuvre de mes mains et le miracle de ma vie, je vous avoue ingénuement que, depuis ce coup de foudre lancé du ciel de votre justice sur une pièce si rare, si belle et si excellente, et que j’avois par mes veilles et mes labeurs réduite à une telle perfection que l’on ne pouvoit pas moralement en désirer une plus grande, j’ai été tellement interdit et étonné, que si la même cause qui fit parler autrefois le fils de Crésus, quoique muet de sa nature, ne me délioit maintenant la langue pour jeter ces derniers accents au trépas de cette mienne fille, comme celui-là faisoit au dangereux état où se trouvoit son père, je serois demeuré muet éternellement.
Le Tasse était trop sacré pour être traité en fou, il était trop fou pour être traité en criminel, il était trop malheureux pour être jeté sans pitié à ces gémonies des vivants, parmi les balayures du monde. […] Enfin il aurait pu jeter un regard sur l’ancienne Asie, sur cette Égypte si fameuse, sur cette grande Babylone, sur cette superbe Tyr, sur les temps de Salomon et d’Isaïe. […] « Il y arrive, et voit du sein d’un rocher jaillir une onde claire et limpide, qui se précipite et roule avec un doux murmure sur un lit bordé de gazon : en proie à sa douleur, il s’arrête, il jette un cri ; l’écho seul y répond ; enfin l’aurore se lève, etc., etc. » Si l’on ajoute à cette situation et à ces images la mélodie évanouie des stances, trouvera-t-on dans Homère ou dans Virgile un plus délicieux contraste des champs de bataille et de la nature pastorale ?
« Vous avez, il est vrai, me dit-il, dédaigné d’être à midi notre hôte ; mais un verre de ce vin, présent d’amis aimés, vous fera du bien. » Je cédai à ses offres ; Goethe continua à parcourir la pièce en se parlant à lui-même ; il avait l’esprit excité, et j’entendais de temps en temps ses lèvres jeter des mots inintelligibles. — Je cherchai à ramener la conversation sur Napoléon, en disant : « Je crois cependant que c’est surtout quand Napoléon était jeune, et tant que sa force croissait, qu’il a joui de cette perpétuelle illumination intérieure : alors une protection divine semblait veiller sur lui, à son côté restait fidèlement la fortune ; mais plus tard, cette illumination intérieure, son bonheur, son étoile, tout paraît l’avoir délaissé. […] « Elle laisse jeter un coup d’œil sur le printemps d’une belle âme », dit Goethe. […] En conséquence, il ne se demande pas si tel livre de la Bible peut jeter de la lumière dans l’esprit, s’il renferme de hautes leçons de moralité, s’il offre des exemples d’une noble existence : l’important pour lui, c’est dans les livres de Moïse l’histoire de la chute, qui rend nécessaire le Sauveur ; dans les prophètes, les allusions qui sont faites au Désiré ; dans les évangiles, le récit de son apparition sur cette terre, et de sa mort sur la croix, qui expie nos péchés.
On l’a lié sur une planche, que l’on a jetée dans un fleuve plein de crocodiles. […] Il s’est jeté tête baissée dans le dédale des sombres aventures, poétisant de son encre la plus noire le crime et l’assassinat, n’oubliant pas de promener les cœurs naïfs à travers les situations les plus funestes, enchevêtrant presque avec art les quiproquos et les mystères, se perdant et se retrouvant le mieux du monde parmi les zigzags innombrables du dialogue, destinés à prolonger les suites insidieuses au prochain numéro ; enfin s’acquittant en conscience de son office. […] … Doit-on, pour cela, lui jeter la pierre ?
Et comme les institutions libres ont ce beau privilège, que l’art de persuader en est l’âme et que, même corrompues, elles ne peuvent se passer du talent, son amitié et sa haine ne pouvaient être indifférentes à personne et, dans cette arène où luttaient les plus heureux génies de l’Angleterre, la nature l’avait jeté tout armé. […] Sir Temple s’était jeté, avec une témérité qui ne lui était pas ordinaire, dans cette vaine polémique sur le mérite comparé des anciens et des modernes, qui avait traversé la France et qui occupait en Angleterre des esprits distingués. […] Aussitôt Swift partit avec cette lettre pour Cellbridge, entra chez Vanessa, jeta cette lettre sur la table, et sortit sans lui dire un seul mot.
Racine, dans la prairie de Port-Royal, lisait et savait par cœur Théagène en grec, comme nous écoliers, aux heures printanières, nous lisions Estelle et Numa ; mais, le livre jeté ou confisqué, il lui restait de plus le grec qu’il savait à toujours, l’accès direct et perpétuel d’Euripide et de Pindare. […] Un jour M. de Narbonne lui parlait de quelques mots jetés à l’Empereur sur l’éducation du Roi de Rome ; une autre fois, il lui touchait une idée qu’avait l’Empereur de réformer les auteurs classiques, semés de maximes et de principes qu’il faudrait élaguer avec art : « Dites-lui donc, » répliquait le jeune homme de goût, « que César ne s’avisa jamais de donner d’édition abrégée de Cicéron. » Et il ne fut plus reparlé de cela.
Lorsque Ulysse déguisé en mendiant arrive chez le fidèle Eumée, celui-ci traite son hôte avec honneur ; il lui sert le dos tout entier d’un porc succulent, lui présente la coupe toute pleine, et Ulysse, moitié ruse, moitié gaieté, et comme animé d’une pointe de vin, se met à raconter avec verve certaine aventure à demi mensongère où figure Ulysse lui-même : « Écoute maintenant, Eumée, s’écrie-t-il, écoutez vous tous, compagnons, je vais parler en me vantant, car le vin me le commande, le vin qui égare, qui ordonne même au plus sage de chanter, qui excite au rire délicieux et à la danse, et qui jette en avant des paroles qu’il serait mieux de retenir… » Et cela dit, le malin conteur pousse sa pointe et, comme entre deux vins, il risque son histoire, qui a bien son grain d’humour et dans laquelle il joue avec son propre secret. […] Dans les pièces de jeunes gens qu’il faisait jouer, combien de fois il lui arriva de jeter des couplets sans s’en vanter, quelques grains de son sel !
À leur passage, le pauvre homme « est obligé de se jeter à tâtons le long d’un talus, pour se garantir des pieds et des éclaboussures de leurs chevaux, comme aussi des roues et peut-être du fouet d’un clocher insolent », puis « tout crotté, son chétif bâton d’une main et son chapeau, tel quel, de l’autre, de saluer humblement et rapidement, à travers la portière du char clos et doré, le hiérarque postiche ronflant sur la laine du troupeau que le pauvre curé va paissant et dont il ne lui laisse que la crotte et le suint ». […] Il y a vingt ans, les fils des ducs, des ministres, des gens attachés à la cour, les parents et protégés des maîtresses, devenaient colonels à seize ans ; M. de Choiseul fit jeter les hauts cris en rejetant cette époque à vingt-trois ; mais, pour dédommager la faveur et l’arbitraire, il a remis à la pure grâce du roi, ou plutôt des ministres, la nomination des lieutenances-colonelles et des majorités qui jusqu’alors allaient de droit à l’ancienneté du service, les gouvernements et les commandements des provinces et des villes.
Je crois, je suis certain même, que l’auteur de Chérie, si fier, si noble, si digne, si pointilleux, sur le point d’honneur littéraire, aurait jeté au feu son testament, s’il avait prévu la façon dont ses volontés seraient respectées. […] Nul n’est obligé de se jeter dans l’aventure.
La description la plus détaillée de la Vénus de Médicis en apprend moins qu’un seul regard jeté sur la statue. […] Pour répondre à la première question, il suffit de jeter un regard sur notre nature.
Les ïambes ont jeté sur les hommes et les choses de cette époque une lumière sombre, qui ne s’éteindra jamais. […] Il a paru, en ces derniers temps, une œuvre historique qui a jeté un grand lustre sur notre littérature et sur notre pays.
) ; mots à terminaison latine qui jetteraient Cicéron ou Virgile dans des abîmes de perplexité (aluminium, fuchsia, eucalyptus, etc.). […] Ecoutez le chœur de ceux qui dénoncent ses effets meurtriers : Elle ôte aux choses l’attrait du mystère ; elle jette sur l’univers un jour cru contraire aux mirages de l’illusion ; elle dissipe le clair-obscur propice à la rêverie ; elle fait évanouir mythes et légendes comme une troupe de fantômes chassés par le chant du coq.
Mais le troisième acte, après son terrible premier tableau, entrant brusquement dans la troisième manière du Maître, nous jette au plein des émotions multiples où transperce le drame … Cette fois, Madame Vogl donne des craintes de plus en plus vives. […] » Elle jette impérieusement à Dieu, à elle-même, cette décisive question.
Je cite le texte presque en entier, car le lecteur y trouvera, en outre du détail de l’Or amoncelé, la première idée de la malédiction jetée par AIberich sur son anneau. […] Oper und Drama avait fait scandale en Allemagne et il ne manquait pas de Fétis, de l’autre côté du Rhin, pour jeter la pierre à l’écrivain présomptueux, à l’iconoclaste !
« A moins de jeter la science aux vents, nous devons admettre que tous les animaux sont conscients (ont des sensations) quoiqu’ils n’aient pas chaque forme de conscience. » La conscience des sens renferme toutes les sensations dérivées des organes des cinq sens. […] Quand il eut quelques mois, on le mit près d’un étang : non-seulement il refusa d’aller à l’eau, mais quand on l’y jetait, il en sortait au plus vite comme une poule aurait fait. » 264.
. — Entendez, résonnement fait de souvenir, la voix tue du rossignol : « Les dernières notes de son chant étaient tombées, rebondissantes en écho, comme des perles jetées de très haut dans un bassin de fabuleux cristal. » — Un être lucide jusqu’ici devient fou. […] « Les oliviers au tronc busqué doivent à l’inclinaison du sol de paraître des êtres prêts à se mettre à genoux ou qui s’en relèvent lentement. » De crainte de m’attarder, je tourne cent pages et je rencontre cette définition à laquelle semblent avoir collaboré un mathématicien puissant et un profond théologien : « Dieu est un point minéral dont la densité est le cube de l’unité. » Je me fais violence pour ne point jeter ici à pleines mains l’or sonore des vers bien frappés et de poids.
Charles-Brun, d’un geste qui de sa part semble un peu vif, se jette à genoux en poussant ce cri d’amour : Ô femme, toi qui n’es qu’une senteur perverse ! […] si Jésus venait à passer sur la route déserte, avec quel bonheur on jetterait derrière soi tout ce qui fait le bonheur pour la foule, en quelle extase on suivrait Celui qui serait la voie et la vie, et comme on laisserait indifférent les morts ensevelir les morts… Hélas !
Jetez de l’iodure de potassium dans une solution saturnienne, vous aurez un précipité jaune ; jetez-le dans une solution mercurielle, vous aurez un précipité rouge.
L’exposition est la partie du poème dramatique dans laquelle l’auteur jette les fondements de la pièce, en exposant les faits de l’avant-scène qui doivent produire ceux qui vont arriver, en établissant les intérêts et les caractères des personnages qui doivent y avoir part, et surtout en dirigeant l’esprit et le cœur du côté de l’intérêt principal dont on veut les occuper. […] Parmi nous, l’épisode se prend pour un incident ou une action détachée qu’un poète insère dans son ouvrage et lie à son action principale, pour y jeter une plus grande diversité d’événements.
Peut-être il ne m’appartient pas d’en faire une critique raisonnée ; et d’ailleurs cela nous mènerait trop loin ; mais cependant, comme vous et vos partisans avez plus d’une fois critiqué tous nos grands auteurs et jeté le plus grand mépris sur ce que vous appelez la littérature de l’empire, dont j’ai l’honneur de faire partie, il doit m’être permis de vous dire, le plus poliment que je pourrai, ce que je pense de vos drames. […] Est-ce que Beaumarchais, et quelques autres qui n’ont point suivi de modèles, ont jeté de la boue à leurs prédécesseurs ?
Elles ne nous rendirent notre salut, qu’en faisant une légère inclination de tête, marchant toujours avec une gravité de déesses, et ne daignant presque jeter les yeux sur nous, comme simples mortels que nous étions. […] Vous savez que, jusqu’à la fin, l’admiration pour les jeunes filles a été une de ses manies, un de ses péchés légers ; jusqu’à la fin, il a jeté des regards du côté de la jeunesse féminine ; chez les Herwart, à la campagne, il tombait en extase devant une toute jeune fille, à ce point que, pour revenir à Paris, il s’égarait dans ses rêveries et dans les chemins, et finissait par s’apercevoir qu’il avait tourné absolument le dos au but de son voyage.
Je ne cherche à jeter de la défaveur sur personne, mais un jour chacun de ceux qui ont eu part aux événements devra rendre compte au gouvernement de sa conduite ; la mienne sera facile à connaître : le général Menou fut nommé par vous notre général en chef9 ; il avait votre estime, il eut votre confiance ; devais-je lui refuser la mienne ?
Les genres sont sentis plutôt que définis, et leurs limites plutôt indiquées comme des convenances de l’esprit humain que jetées en travers des auteurs comme des barrières.
Le gant était jeté ; les dés étaient sur table
La censure d’alors interdisant au drame tout développement historique un peu vrai et un peu profond, on se jeta dans des genres intermédiaires, on louvoya, on fit des proverbes et des comédies en volume ; c’est ce qui s’appelle peloter en attendant partie : je ne sais si la partie est venue, ou plutôt je sais comme tout le monde qu’au théâtre elle n’a pas été gagnée.
Toutes celles qu’il a recueillies dans son commerce avec les classiques grecs et latins, avec les voyageurs et les poëtes du jour, avec les oiseleurs, les chasseurs au renard, les pâtres et les braconniers de ses romans, il les entasse pêle-mêle dans cette production de détresse, à peu près comme au moment du naufrage on jette à l’eau bagages et trésors : Médée, Minerve, Prospero, Robin-Hood, des magiciens, des meutes, des lévriers, des corbeaux, des tigres, l’énorme serpent Anaconda, l'Oύτις 9 d’Homère, le Lope d’Aguirre, le Thalaba de Southey, et cela en présence de pareils événements et de pareils hommes !
Lorsque la Révolution fut venue déranger quelque peu ces petites existences littéraires, au lieu des lectures dans les salons, on eut les Déjeuners dominicaux : c’est là que, durant quinze années au moins, les convives littérateurs se faisaient leurs confidences réciproques entre la poire et le fromage ; c’est là qu’on racontait à ses amis le sujet, le pian de son ouvrage, avant d’en avoir écrit une seule ligne ; à peine les premiers actes étaient-ils jetés sur le papier que l’on en faisait une lecture.
Quand le peuple se lève et passe, ces gens-là se jettent à plat-ventre : on les croirait morts en ces moments, si en ces moments l’on songeait à eux ; mais sitôt que le peuple en personne est passé, vite ils regardent alentour et se ravisent.
Il jeta un regard sur les siens leva une de ses mains au ciel, et dit à haute voix : « — Fasse Dieu que tous les hérétiques qui sont ici rassemblés n’entendent pas, les infidèles, de quelle manière est torturé un chrétien !
Turgot l’a professé sous le gouvernement arbitraire, mais modéré du dernier règne ; et Condorcet, dans la proscription où l’avait jeté la sanguinaire tyrannie qui devait le faire désespérer de la république, Condorcet, au comble de l’infortune, écrivait encore en faveur de la perfectibilité de l’espèce humaine, tant les esprits penseurs ont attaché d’importance à ce système, qui promet aux hommes sur cette terre quelques-uns des bienfaits d’une vie immortelle, un avenir sans bornes, une continuité sans interruption7.
Essayez d’écarter pour un moment le voile jeté par l’habitude, sur des actions qui ont lieu si vite, que vous en avez presque perdu le pouvoir de les suivre de l’œil et de les voir se passer.
Il se jette dans les jambes, reçoit des coups de pied, heurte, flaire, lève la patte, curieux, hasardeux, bruyant, gourmand, fort en gueule, aussi varié dans ses accents, aussi prompt à donner de la voix qu’un avocat au parlement.
L’aigle pond dans le giron de Jupiter, et l’irrévérencieux escarbot « sur la robe du dieu fait tomber une crotte. » Le dieu, la secouant, jeta les oeufs à bas.
De sorte que pour décrire un état moral il faut voir le reflet qu’a jeté la sensibilité sur les perceptions et sur les déterminations de l’âme.
Couché dans l’herbe, au pied d’un arbre, vous lisez les strophes que je citais tout à l’heure, ou d’autres aussi belles ; et le soleil, à travers les branches, jette sur la page des taches lumineuses et mobiles.
. — Au milieu d’une effusion mystique et lyrique, s’arrête-t-il tout à coup pour nous jeter quelque impitoyable réflexion sur le train brutal et fatal des choses humaines ?
En vain, elle se jette sur lui et « l’enveloppe de baisers, de larmes, de cris, de morsures » ; il s’arrache d’elle en disant : « Je ne vous vois plus seule.
C’est un scandale pour de tels esprits que de discuter son devoir et jeter par là un doute sur l’infaillibilité de la conscience et la certitude de la loi.
Il sera comme le grain de sénevé, qui est la plus petite des semences, mais qui, jeté en terre, devient un arbre sous le feuillage duquel les oiseaux viennent se reposer 348 ; ou bien il sera comme le levain qui, déposé dans la pâte, la fait fermenter tout entière 349.
Ce qui prouve bien, du reste, que Jésus ne s’absorba jamais entièrement dans ses idées apocalyptiques, c’est qu’au temps même où il en était le plus préoccupé, il jette avec une rare sûreté de vues les bases d’une église destinée à durer.
Un monarque d’Orient n’est pas plus changeant dans ses goûts ; il jette le mouchoir à droite, à gauche, suivant la fantaisie du moment.
Elles voient les morceaux de blanc d’œuf qu’on leur jette, les suivent, les saisissent ; elles luttent avec les carpes intactes pour happer ces morceaux.
. — Il jeta ses filets dans l’eau, les plombs touchaient le fond.
Il se dit d’un autre côté que, s’il était nécessaire qu’on vît la servitude se traîner sous les pieds des burgraves, il était nécessaire aussi qu’on vît la souveraineté éclater au-dessus d’eux ; il se dit qu’il fallait qu’au milieu de ces princes bandits un empereur apparût ; que dans une œuvre de ce genre, si le poète avait le droit, pour peindre l’époque, d’emprunter à l’histoire ce qu’elle enseigne, il avait également le droit d’employer, pour faire mouvoir ses personnages, ce que la légende autorise ; qu’il serait beau peut-être de réveiller pour un moment et de faire sortir des profondeurs mystérieuses où il est enseveli le glorieux messie militaire que l’Allemagne attend encore, le dormeur impérial de Kaiserslautern, et de jeter, terrible et foudroyant, au milieu des géants du Rhin, le Jupiter du douzième siècle, Frédéric Barberousse.
Qu’on jette les yeux sur les meilleures actrices de nos jours.
Il semble qu’une si triste expérience devrait avoir au moins l’avantage de jeter quelque lumière sur le problème que nous étudions, car si l’on découvrait dans quelles conditions se trouve le cerveau lorsque la pensée s’égare, on pourrait induire de là, par opposition, les conditions normales de l’exercice de la pensée.
Magy (la Science et la Nature), ont commencé à jeter les bases d’une philosophie naturelle.
Mais comme le Dieu des chrétiens ne s’est pas logé à l’étroit dans un soleil, il a livré les astres aux vaines recherches des savants ; il a jeté le monde devant eux, comme une pâture pour leurs disputes 142.
Il y a quelque mille ans, on le jetait dans la fosse aux lions — et voilà qu’aujourd’hui il va tomber dans la fosse aux ours !
Cette vue de Rome jetait ma pensée dans la contemplation de quelques-unes des vérités qui font le sujet du chapitre précédent.
Enfin il y a cette dernière génération, si nombreuse, si brillante, si cultivée par de fortes études, cette génération qui donne à la France actuelle de si justes espérances par un grand développement de facultés, en qui l’éducation religieuse a jeté de si heureux germes par l’effet de la force des mœurs contre les tendances exagérées de l’opinion : cette génération doit être l’objet de nos vives sollicitudes ; car, il faut le dire, en entrant dans le monde elle trouvera d’autres enseignements, elle sera soumise à d’autres directions, elle sentira la société assise sur d’autres bases que celles de l’éducation.
Une première remarque va jeter un jour décisif sur toutes les questions de ce genre.
C’est un de ces aperçus, frappés comme une médaille par ce moraliste aigu et mordant d’Alphonse Karr, qui en a gravé ainsi quelques-uns, jetés par lui dans la circulation et qui ne doivent plus jamais en sortir.
« Il avait l’égoïsme prudent. » Mais nous connaissons cette prudence, qui jeta son bouclier à Philippe et eût recommencé dans tous les dangers de la vie.
Mais, malheureusement pour la sagesse et l’orgueil des hommes, l’auteur à l’enthousiasme sacré du livre Les Paroles de Dieu, cette perle jetée sur le fumier du siècle aux porcs qui ne la ramassent pas, restera le mystique Hello, dans sa nuit invisible de flamme, avec son amour, son enthousiasme et sa foi !
Ils sont les semeurs d’un grain invisible qu’ils jettent, pour ainsi dire, par-dessus le mur de leur œuvre et qui doit lever plus loin… Cependant, ne soyons pas injuste : si l’histoire de la Grèce antique par Lerminier est un ouvrage où nul mot n’a été écrit en dehors ou à côté du sujet qu’il traite, si le respect des faits et de l’unité de leur ensemble y est poussé jusqu’à la stoïque abstinence de ces déductions ou de ces inductions qui s’en élancent naturellement, et qui devaient tenter la verve philosophique de l’auteur, n’oublions pas qu’au seuil de ce livre il y a une préface dans laquelle l’historien, qui s’est imposé une réserve si haute et si sévère, signale néanmoins fort bien renseignement pratique qu’on peut tirer de son histoire.
et il continue, avec cette légèreté qui jette la dernière pelletée de terre sur la tête de toutes les questions : « Quelques points controversés avaient été décidés d’après les opinions des meilleurs juristes, et l’on s’était écarté de la ligne de la succession ; c’était tout, mais c’était assez. » Oui, c’était tout !
N’était ce dernier coup d’œil jeté sur l’effort perdu des enfants de Jacques Cœur pour réhabiliter, comme on dit aujourd’hui, sa mémoire, Clément, fidèle au titre de son livre, n’aurait point dépassé la limite de sa double biographie.
Que si, au contraire, l’oubli a eu raison de s’étendre sur les plateaux pyrénéens, si ces peuplades intermédiaires — Catalans, Aragonais, Navarrais, Béarnais et Basques, — ne sont placées aux frontières de France et d’Espagne que pour appointer des forces respectives et jeter dans la balance des intérêts de ces deux pays le poids de leurs atomes orageux ; si, enfin, toute cette paille d’hommes hachés par les événements et par la guerre n’est là — comme on pourrait le croire — que pour faire fumier aux grandes nations qui résument l’Europe, et par l’Europe le genre humain, à quoi bon remuer, avec un tel détail, ce monde de faits sans signification vive et profonde, et sous lesquels le lecteur périt accablé ?
Il est douteux aussi — du moins, nous le croyons, — qu’ils admettent sans un modeste embarras la conclusion, logiquement très bonne, mais historiquement suspecte, que Bellegarrigue sait tirer de cette absence de la famille aux États-Unis : « L’autorité paternelle — dit-il — ayant abdiqué en Amérique, sinon en totalité, du moins en grande partie, il est arrivé que la famille n’y existe pas… et que l’extrême civilisation autorise les mœurs à ressaisir la simplicité de l’état sauvage. » Mais cet éloge, une fois jeté en passant, des Américains, qui ne sont pas l’objet spécial du livre, l’auteur revient aux femmes d’Amérique ; car sans la femme, nous dit-il avec une galanterie vraiment philosophique, la masculinité ne serait pas !
c’est un moderne, qui se jette et tombe dans son sujet avec son armature moderne, — et c’est d’une originalité et d’une sensation surprenantes que cette langue moderne, hardie, familière, pittoresque, cette langue que nous parlons tous dans le plain-pied de notre vie : à souper, entre les portants de deux coulisses, partout ; la langue du monde et non de la littérature, qui touche presque à l’argot et au néologisme, qui ne craint ni le mot plaisant, ni le mot débraillé, ni le mot cru, ni le mot nu, et que voici parlée comme les chroniqueurs de notre temps la parleraient dans un journal de notre temps, et appliquée hardiment aux plus hauts sujets et aux plus majestueuses figures, avec une aisance, un sans-façon et un brio dignes de Fervacques et de Bachaumont dans des chroniques d’hier !
Il n’a pas un mouvement d’oubli avec ce pauvre diable d’Eckermann, que comme homme il peut mépriser, mais dont il se sert comme de la boîte aux lettres de la postérité et dans les oreilles idolâtres duquel il jette ses pensées, laborieusement rédigées, pour qu’elle les entende.
son fils respectueux, le roi Philippe, prit, quand elles furent froidies, dans ses mains les cendres de son père et les jeta du haut de cette montagne aux quatre coins de l’horizon.
Seul, Joseph de Maistre, écartant et déchirant cette pourpre de la gloire, jetée parfois comme un voile splendide sur des fronts coupables, avait peint, résolument Voltaire et il l’avait peint si horrible que son portrait, quoi qu’il fût ressemblant, parut une charge sublime de la Haine… Eh bien !
Après tout ce que l’Histoire nous a apporté de notions sur Saint Louis, il fallait, puisqu’on n’apportait pas de notions nouvelles, puisque l’investigateur n’avait pas un fait inconnu à nous jeter, s’embraser au moins à la lumière et au rayonnement de la figure céleste de Saint Louis.
À ces deux moments d’une vie rompue et qu’il jeta, comme une branche d’arbre cassée, de deux côtés si différents, Lamennais avait le masque colossal que le génie se compose lui-même et qui fait croire à la toute-puissance de la vie et de l’intensité dans ces sublimes infirmes, dans ces pauvres créatures souvent délicates et souffrantes, que ce soit Lamennais lui-même, Pascal ou Byron, et c’est ce masque oublié, délacé dans des lettres familières et faciles, où l’on respire même de son talent, qui permet de trouver, sous l’écrivain, l’homme.
, jeté au feu, sans qu’il ait brûlé plus que l’Énéide.
Parmi tous les bonheurs et toutes les somptuosités de cette prodigieuse destinée que Dieu, après sa mort, continue à cet heureux, qui aurait pu jeter sa bague aux poissons du Jardin des Plantes, le meilleur, c’est cette gloire plus intelligente et plus pure, incarnée dans l’admiration d’un rare esprit qui sait, lui, pourquoi il admire, et qui se détache de ce fond d’éloges traditionnels et de sots respects qui compose le gros de toute renommée.
Si ce n’était pas là une simple tactique ; s’il était vrai, s’il était réel que la métaphysique d’un saint, et, par exemple de saint Anselme, eût des racines secrètes, inévitables, nécessaires avec toute cette métaphysique transcendante qui doit un jour remplacer, par la clarté de l’idée pure, le demi-jour des religions, une telle analogie, une telle rencontre ne serait-elle pas encore meilleure à montrer, à démontrer, à proclamer de toutes les manières possibles, comme une de ces preuves, grosses de bien d’autres, qu’on jette dans les esprits déducteurs et qui y doivent devenir fécondes ?
C’est ainsi que la Philosophie, si elle n’est pas charmée, est au moins gênée devant les yeux baissés de l’immaculée Carmélite qui n’est pas seulement la gloire de l’Espagne, mais de la Chrétienté et de l’âme humaine, et aussi de l’esprit humain, et c’est pourquoi, sans aucun doute, dans l’embarras où tant de gloire la jette, elle aime mieux se taire que parler !
l’histoire d’un seul Pape, dans l’histoire de l’Église, a de tels rayonnements en avant et en arrière que ce n’est plus l’histoire d’un siècle ni d’un Pape, mais l’histoire de l’Église universelle et éternelle, concentrée dans la minute d’un siècle ou d’une vie d’homme, comme tout un horizon répercuté et concentré dans une facette de diamant… En intérêt, l’Histoire de la Papauté pendant le xve siècle, par l’abbé Christophe, vaut, avec d’autres événements et des personnalités différentes, son Histoire de la Papauté pendant le xive siècle, et elle a le même mérite d’unité dans la variété qui est le caractère particulier de toutes les histoires détachées de l’histoire générale de l’Église, qui a bien raison de s’appeler catholique, c’est-à-dire universelle ; car si Dieu l’ôtait de ce monde, il s’y ferait un de ces trous, comme dit Shakespeare en parlant des monarchies qui croulent, que rien — quoi qu’on y jette — ne peut plus combler !
Tels sont, indiqués d’une main bien rapide, les points culminants d’un travail qui rétablit la tradition philosophique interrompue et jette la première arche du pont qui doit unir, par-dessus les eaux troubles du xviiie siècle, la philosophie du xviie siècle et la philosophie de notre temps.
Avec cette charité et cette politesse qui drapent de si haut les coups… que l’on porte si bas, nous sommes plus libres, nous, les brutaux, de jeter à la porte, à notre manière, les réputations et les idées qui n’avaient pas le droit d’entrer !
Byron, accusé d’être immoral par tous les Tartuffes de l’Angleterre, n’admettait pas les esthétiques athées que nous admettons très bien maintenant, et qui, moins polis que Platon, jettent, sans couronne, la morale à la porte de la poésie.
Eh bien, ce cri d’angoisse et d’horreur infinie, Je l’ai jeté ; je puis sombrer !
J’étais avec Aubryet, le délicat des Patriciennes de l’amour, un homme qui n’est jamais vulgaire, et qui, pour échapper à cette ornière qu’on appelle la vulgarité, se jetterait dans tous les sauts de loups du côté opposé, la tête la première.
Il écrivit, après leur publication, près de trente volumes qu’il jeta dans le torrent de la publicité avec l’insouciance d’une de ces natures qui se sentent supérieures à ce qu’elles produisent, et qui, malheureusement pour elles, ne s’incarneront jamais de pied en cap dans une œuvre quelconque.
Toujours est-il qu’il s’est jeté gaillardement dans le roman, où tout de suite il a fait son bruit.
qui n’est presque jamais l’intérêt profond, passionné, à impression ineffaçable, que donnent les livres forts et grands ; mais il a cette fleur de l’amusement qu’on respire et qu’on jette aussi (rarement pour la reprendre) après l’avoir respirée !
Dans ce roman, — qu’on pourrait appeler une immense tragi-comédie à tiroirs, et à tiroirs pleins de choses, — il y a un amour jeté là, en passant, cet amour exigé dans toutes les pièces françaises par l’imagination du public, mais cet amour n’est qu’une visée secondaire dans la préoccupation de l’auteur, sous la main duquel le vaste cœur compliqué des foules palpite mieux que les cœurs grêles de moineau de ses amoureux !
., etc. » Cette voix, cette langue, cette allure, cette coupe de phrase, à laquelle notre langue à nous du xixe siècle a jeté une couleur plus vive, et, si l’on veut (qu’est-ce que cela me fait ?)
Sans doute il plonge souvent dans le comique féroce et s’élève jusqu’au comique absolu ; mais l’aspect général sous lequel il voit les choses est surtout fantastique, ou plutôt le regard qu’il jette sur les choses est un traducteur naturellement fantastique.
L’armée, en apprenant le meurtre de l’empereur, était prête à se révolter ; tout à coup Dion jette les haillons qui le couvraient, s’élance sur un autel, et de là s’adressant aux soldats : enfin le sage Ulysse a quitté ses lambeaux 48, dit-il ; poursuit, se fait connaître, parle avec la plus grande éloquence, apaise la sédition et calme l’armée.
Mais que : ou Corneille se jette spontanément sur le sujet de Racine, ou que Racine se précipite de lui-même sur le sujet de Corneille, j’avoue que cela m’étonne un peu. […] — devrait jeter un coup d’œil de ce côté. […] Fuyons ces vilains mots que tout le monde se jette à la tête et qui sont sujets à malentendu et à contresens ; c’en est un ici. […] Le réalisme ne tient pas à un propos bas et inutile ; il ne consiste pas en quelques grossièretés jetées au hasard dans le texte d’un roman ou d’un drame. […] Et le voilà qui me jette cette bonne locution éminemment parisienne, ce bon tour qui fleure la rue Montorgueil, ce bon barbarisme parisien : « jusque Pantin ».
En quels affreux périls il faudra vous jeter ? […] Ce n’est ni Molière ni Lesage qu’on lui jette à la tête, c’est Regnard. […] Elle y avait jeté les libertés du mélodrame. […] Un capitaine, capitaine de vaisseau, sur la mer, comme il va sombrer, la jette dans l’eau. […] Casimir alla littéralement se jeter aux pieds de Mlle Volnais.
Le premier regard jeté sur la société est toujours vif et profond, et nous gardons toute la vie le souvenir de l’impression charmante ou douloureuse que nous avons ressentie alors. […] L’horreur du commun le pousse dans l’artificiel, et le souci de l’élégance le jette dans les mignardises maniérées. […] Sa pauvreté est une agréable aventure qui a jeté dans sa vie le charme de l’imprévu, et qu’il se rappellera avec bonheur. […] Qu’il élargisse son horizon ; que, sans quitter sa calme retraite et sa campagne aimée, il jette plus souvent un regard sur le vaste monde. […] Un regard sommaire jeté sur notre état social nous dit assez combien nous sommes loin de cette situation heureuse, capable de faire plus et mieux encore que de grands romanciers.
Le style de Renan semble jeté dans la fraîcheur et le négligé d’une nature fraîche ; je le crois plus artificiel et laborieux que celui de Taine, qui donne précisément (et nous avons vu comme cette apparence a trompé) l’idée de l’artificiel et du laborieux. […] Les lecteurs de Chateaubriand savent quelles lueurs divinatrices les phrases et des images du Génie du Christianisme jettent sur les grands écrivains du passé. […] Et devant ces blasphèmes je ne m’étonne ni ne me scandalise à l’excès de voir certains « certitudiens » se replier jusque sur saint Thomas, se jeter, comme dans Alésia, dans la place forte de la Somme. […] Ira-t-il jeter une pierre dans ce jardin, le critique dont la Poésie de Mallarmé a été, chez le pharmacien, préparée sur cette ordonnance : dix parties de critique pour une de poésie ? […] Quelques années de vie nouvelle, d’invention mécanique, de mode, de littérature, de peinture, ont jeté l’homme d’après-guerre, sa vision, son goût, son sens interne, en plein courant de mobilisme.
Si sa proie est là, il se jette sur elle. […] Qu’un guerrier soit tué ou blessé d’un coup de lance, c’est qu’il n’était pas en état de parer, c’est qu’on avait jeté sur lui un sort : il n’y a pas de hasard 9. […] Bruyamment, dans le verre qui servirait à me rincer la bouche après l’opération (l’asepsie était inconnue en ces temps très lointains) le dentiste jetait une pièce de cinquante centimes, dont le pouvoir d’achat était alors de dix sucres d’orge. […] Cette chose peut n’avoir été qu’entrevue ; elle peut avoir été mal vue ; elle peut avoir été jetée pêle-mêle avec d’autres dont il faudra l’isoler. […] Ainsi les inquiétudes de l’homme jeté sur la terre, et les tentations que l’individu peut avoir de se préférer lui-même à la communauté, — inquiétudes et tentations qui sont le propre d’un être intelligent, — se prêteraient à une énumération sans fin.
Il donne lecture de ce manuscrit à Maxime du Camp et à Louis Bouilhet, qui lui conseillent de le jeter au feu. […] Il est juste que nous recevions ces outrages jetés à la République et dont nous aurions dû la défendre. […] Frédéric Masson peut avoir des dangers et nous jeter en défiance, mais il donne à son œuvre une âme émouvante et une vigoureuse unité. […] Mais il jette l’art par-dessus bord parce que Wagner l’horripile et qu’il veut faire pièce à Huysmans. […] On a l’impression que l’auteur improvise et jette sans choix sur le papier tout ce que lui suggère son imagination débordante.
Le minimum de matière à pensée qu’il faut jeter dans la mécanique intellectuelle pour qu’elle ne tourne pas absolument à vide, c’est lui qui l’a mis dans la sienne. […] De Maistre en a de ce genre, mais amusantes, jetées (le plus souvent du moins) à travers la grêle cinglante et étourdissante des boutades, des paradoxes et des traits à l’humour. […] Oui, cela est quelque chose ; c’est une lumière, une grande clarté jetée sur une question. […] Aussi elle s’y jeta de tout son courage. […] Et le seul livre où effusion, rêve, contemplations, contradictions, transport lyrique, fond de l’âme, pour tout dire, se trouve jeté sur le papier, pour notre éternelle admiration, c’est les Pensées de Pascal, ce qui tient à ce qu’il n’a pas été rédigé.
Et Anthime jette à Julius cette phrase : « Non, mais vraiment vous en parlez trop à votre aise, vous à qui, vrai ou faux, tout profite… » Ainsi la même révélation qui ramène Julius à la religion, en détourne définitivement Anthime, dont les douleurs au surplus ont reparu, l’efficacité du miracle étant épuisée. […] Dans le même chapitre du même quatrième évangile, particulièrement cher au pasteur, on lit un peu plus haut : « Celui qui ne demeure pas en moi, il sera jeté dehors comme le sarment et il séchera et on le ramassera pour le jeter au feu et le brûler ». […] « Nathanael, jette mon livre… Ne crois pas que ta vérité puisse être trouvée par quelque autre… Cherche la tienne.
D’abord on peut jeter le volume au bout de vingt pages, commencer par la fin, ou au milieu ; vous n’y êtes pas serviteur, mais maître ; vous pouvez le traiter comme journal ; en effet, c’est le journal d’un esprit. — En second lieu, il est varié ; d’une page à l’autre vous passez de la Renaissance au dix-neuvième siècle, de l’Inde à l’Angleterre ; cette diversité surprend et plaît. — Enfin, involontairement, l’auteur y est indiscret ; il se découvre à nous, sans rien réserver de lui-même ; c’est une conversation intime, et il n’y en a point qui vaille celle du plus grand historien de l’Angleterre. […] Lorsqu’un sujet est obscur, il ne se contente pas d’une première explication, il en donne une seconde, puis une troisième ; il jette à profusion la lumière, il l’apporte de tous côtés, il va la chercher dans toutes les parties de l’histoire ; et ce qu’il y a de merveilleux, c’est qu’il n’est jamais long. […] J’aime mieux traduire encore un passage, dont la solennité et la magnificence donneront quelque idée des sérieux et riches ornements qu’il jette sur son récit, sorte de végétation puissante, fleurs de pourpre éclatante, pareilles à celles qui s’épanouissent à chaque page du Paradis perdu et de Childe Harold. […] Mal rassasiés de pommes de terre et de lait aigre, ils se jettent en affamés sur les grands troupeaux des protestants.
Or l’idée moderne, la méthode moderne revient essentiellement à ceci : étant donnée une œuvre, étant donné un texte, comment le connaissons-nous ; commençons par ne point saisir le texte ; surtout gardons-nous bien de porter la main sur le texte ; et d’y jeter les yeux ; cela, c’est la fin ; si jamais on y arrive ; commençons par le commencement, ou plutôt, car il faut être complet, commençons par le commencement du commencement ; le commencement du commencement, c’est, dans l’immense, dans la mouvante, dans l’universelle, dans la totale réalité très exactement le point de connaissance ayant quelque rapport au texte qui est le plus éloigné du texte ; que si même on peut commencer par un point de connaissance totalement étranger au texte, absolument incommunicable, pour de là passer par le chemin le plus long possible au point de connaissance ayant quelque rapport au texte qui est le plus éloigné du texte, alors nous obtenons le couronnement même de la méthode scientifique, nous fabriquons un chef-d’œuvre de l’esprit moderne ; et tant plus le point de départ du commencement du commencement du travail sera éloigné, si possible étranger, tant plus l’acheminement sera venu de loin, et bizarre ; — de tant plus nous serons des scientifiques, des historiens, et des savants modernes. […] Au nord »,… Circuit, le mot n’est pas de moi, le mot est de Taine ; cette méthode est proprement la méthode de la grande ceinture ; si vous voulez connaître Paris, commencez par tourner ; circulez de Chartres sur Montargis, et retour ; c’est la méthode des vibrations concentriques, en commençant par la vibration la plus circonférentielle, la plus éloignée du centre, la plus étrangère ; en admettant qu’on puisse obtenir jamais, pour commencer, cette vibration la plus circonférentielle ; car on voit bien comment des vibrations partent d’un centre, connu ; on ne voit pas comment obtenir la vibration la plus circonférentielle, ni même comment se la représenter, si le centre est par définition non connu, et si un cercle ne se conçoit point sans un centre connu ; pétition de principe ; c’est le contraire de ce qui se passe pour les ondes sonores, électriques, optiques, pour toutes les ondes qui se meuvent partant de leur point d’émission ; c’est le contraire de ce qui se passe quand on jette une pierre dans l’eau ; c’est une spirale commencée par le bout le plus éloigné du centre ; à condition qu’on tienne ce bout ; ce sont les vastes tournoiements plans de l’aigle, moins l’acuité du regard, et le coup de sonde, et, au centre, la saisie ; je découpe ici mon exemplaire, et je cite au long, pour que l’on voie, pour que l’on mesure, sur cet exemple éminent, toute la longueur du circuit : « Au nord, l’Océan bat les falaises blanchâtres ou noie les terres plates ; les coups de ce bélier monotone qui heurte obstinément la grève, l’entassement de ces eaux stériles qui assiègent l’embouchure des fleuves, la joie des vagues indomptées qui s’entre-choquent follement sur la plaine sans limites, font descendre au fond du cœur des émotions tragiques ; la mer est un hôte disproportionné et sauvage dont le voisinage laisse toujours dans l’homme un fond d’inquiétude et d’accablement. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. […] « Quelle opposition entre notre littérature du douzième siècle et celle des nations voisines. » J’arrête ici pour aujourd’hui la citation ; la méthode est bien ce que nous avons dit ; elle est doublement ce que nous avons dit ; quand par malheur l’historien parvient enfin aux frontières de son sujet, à peine réchappé de l’indéfinité, de l’infinité du circuit antérieur, il se hâte, pour parer ce coup du sort, de se jeter dans une autre indéfinité, dans une autre infinité, celle du sujet même ; à peine réchappé d’avoir absorbé une première indéfinité, une première infinité, celle du circuit, celle du parcours, et de tous ces travaux d’approche, qui avaient pour principal objet de n’approcher point, il invente, il imagine, il trouve, il feint une indéfinité nouvelle, une infinité nouvelle, celle du sujet même ; il analyse, il découpe son sujet même en autant de tranches, en autant de parcelles que faire se pourra ; il y aura des coupes, des tranches longitudinales, des tranches latérales, des tranches verticales, des tranches horizontales, des tranches obliques ; il y en aurait davantage ; mais notre espace n’a malheureusement que trois dimensions ; et comme nos images de littérature sont calquées sur nos figures de géométrie, le nombre des combinaisons est assez restreint ; tout restreint qu’il soit, nous obtenons déjà d’assez beaux résultats ; nous étudierons séparément l’homme, l’artiste, le penseur, le rêveur, le géomètre, l’écrivain, le styliste, et j’en passe, dans la même personne, dans le même auteur ; cela fera autant de chapitres ; nous nous garderons surtout de nous occuper dans le même chapitre de l’art et de l’artiste ; cela ferait un chapitre de perdu ; et si d’aventure, de male aventure nous parvenons à parcourir toutes les indéfinités, toutes les infinités de détail de tous ces chapitres, de toutes ces sections, il nous reste une ressource suprême, un dernier moyen de nous rattraper ; ayant étudié séparément l’homme, l’écrivain, l’artiste, et ainsi de suite, nous étudierons les relations de l’homme et de l’écrivain, puis de l’artiste et de l’art, et du styliste, et ainsi de suite, d’abord deux par deux, puis trois par trois, et ainsi de suite ; étant données un certain nombre de sections, formant unités, les mêmes mathématiques nous apportent les formules, et nous savons combien de combinaisons de relation peuvent s’établir ; cela fera autant de chapitres nouveaux ; et quand nous aurons fini, si jamais nous finissons, le diable soit du bonhomme s’il peut seulement ramasser ses morceaux ; que de les rassembler, il ne faut point qu’il y songe ; l’auteur a fait un jeu de patience où nulle patience ne se retrouverait. […] De la réalité nous avons reçu trop de rudes avertissements ; au moment même où j’écris, l’humanité, qui se croyait civilisée, au moins quelque peu, est jetée en proie à l’une des guerres les plus énormes, et les plus écrasantes, qu’elle ait jamais peut-être soutenues ; deux peuples se sont affrontés, avec un fanatisme de rage dont il ne faut pas dire seulement qu’il est barbare, qu’il fait un retour à la barbarie, mais dont il faut avouer ceci, qu’il paraît prouver que l’humanité n’a rien gagné peut-être, depuis le commencement des cultures, si vraiment la même ancienne barbarie peut reparaître au moment qu’on s’y attend le moins, toute pareille, toute ancienne, toute la même, admirablement conservée, seule sincère peut-être, seule naturelle et spontanée sous les perfectionnements superficiels de ces cultures ; les arrachements que l’homme a laissés dans le règne animal, poussant d’étranges pousses, nous réservent peut-être d’incalculables surprises ; et sans courir au bout du monde, parmi nos Français mêmes, quels rudes avertissements n’avons-nous pas reçus, et en quelques années ; qui prévoyait qu’en pleine France toute la haine et toute la barbarie des anciennes guerres civiles religieuses en pleine période moderne serait sur le point d’exercer les mêmes anciens ravages ; derechef qui prévoyait, qui pouvait prévoir inversement que les mêmes hommes, qui alors combattaient l’injustice d’État, seraient exactement les mêmes qui, à peine victorieux, exerceraient pour leur compte cette même injustice ; qui pouvait prévoir, et cette irruption de barbarie, et ce retournement de servitude ; qui pouvait prévoir qu’un grand tribun, en moins de quatre ans, deviendrait un épais affabulateur, et que des plus hautes revendications de la justice il tomberait aux plus basses pratiques de la démagogie ; qui pouvait prévoir que de tant de mal il sortirait tant de bien, et de tant de bien, tant de mal ; de tant d’indifférence tant de crise, et de tant de crise tant d’indifférence ; qui aujourd’hui répondrait de l’humanité, qui répondrait d’un peuple, qui répondrait d’un homme.
Huysmans (Joris-Karl), s’est jeté dans la traverse symboliste et est devenu à son tour chef de bande ; et M. de Maupassant, son talent sain et vigoureux a tranché trop vite sur l’honnête médiocrité des disciples pour qu’on puisse le considérer autrement qu’en lui-même et dans sa pleine possession. […] « C’est aux manuels spéciaux, dit-il dans sa préface, de raconter où jette sa gourme un jeune homme, sa bibliothèque, son installation à Paris, son entrée aux affaires étrangères et toute son intrigue. […] Rhéteur donc, si vous voulez, mais assurément un maître rhéteur, et, comme il dit encore, comme cette étrange Miarka, la « fille à l’ours », qu’un caprice de la destinée jeta de sa roulante tribu à la banalité des villes, une sorte de zingari civilisé, un zingari qui aurait fait ses classes, traversé la rue d’Ulm et les littératures anciennes, et qui garderait du tempérament ancestral les fièvres, les colères, les spasmes, l’amour enfantin du tam-tam et des paillettes, et le culte aussi des grandes choses naturelles149. […] Georges Ohnet, qui n’attendait plus qu’un fauteuil à l’Académie, s’est vu tout d’un coup dépouillé de son auréole et jeté bas de son piédestal par la main vigoureuse de M. […] « La seconde balle du brigadier l’atteignit à la tête, le jeta à terre.
L’amphithéâtre a la forme d’un fer à cheval ; les deux extrémités sont reliées par un immense décor, qui s’entr’ouvre pour jeter dans l’arène le flot des cavaliers. […] Finalement, il la fit étrangler et jeter à l’eau par deux domestiques. […] Une d’elles jette dans une marmite de terre, où chauffe de la graisse, des poignées de farine dont ses mains noires et ses bras restent tout poudrés ; elle fait un roux. […] Les deux sous jetés dans le tronc, vous tirez une poignée, et une aiguille vous renseigne sur votre force musculaire. […] … Elle jette le verre : — Je te sauve ; et je vais te délivrer de moi… Car tu recommencerais, j’en suis sûr… Tu l’auras donc, ton divorce.
Une étrange métamorphose s’est opérée : les calomnies qu’on leur a jetées à la tête se sont mises à resplendir, et la boue est leur auréole ». […] La gaîté du soleil est troublée par l’immense quantité de grandes douleurs, de sublimités et de rénovations morales qu’ils jettent dans l’air. […] On y vient parce que la porte en est ouverte, qu’il y a un écriteau au-dessus, que les critiques font aller leur tam-tam, que tout le monde s’y rencontre, mais on en sort en bâillant, et en se plaignant du torticolis après s’être forcé à jeter un coup d’œil distrait sur tant de tableaux maussades et sans intérêt. […] — Je ne sais qui vient de jeter un cri de joie grotesque en voyant apparaître M. […] Une étrange métamorphose s’est opérée : les calomnies qu’on leur a jetées à la tête se sont mises à resplendir, et la boue est leur auréole ».
La marquise de Vilars, dont la vertueuse résistance jette Auguste des Préaux dans la folle entreprise de Latréaumont, est à mon avis la meilleure figure du livre. […] Il jette une jeune fille dans le lit d’un vieillard ; et sans s’inquiéter de l’amant désespéré, il vante ce mariage monstrueux comme une bonne affaire. […] Après avoir caché l’âme de Socrate dans le corps d’un valet, il a jeté l’amour maternel dans le cœur d’une femme adultère, incestueuse, qui partage son lit entre son père et ses frères. […] Sur le trône absolu où il est assis, il n’écoute, n’entend que lui-même, et s’il lui arrive de jeter les yeux sur les visages muets dont il est entouré, ce n’est que pour y voir le reflet de sa pensée, pour s’admirer dans tous ces regards où se peint l’extase. […] Elle peut jeter sur le passé un regard désolé ; pour se mêler à la cohue des dévots, il faudrait qu’elle eût perdu toute pudeur.
∴ « Elle est domptée, maintenant, cette Gaule, qui jadis jeta sur nous les Ambrons et les Cimbres. […] Un simple regard jeté sur le monde suffit à l’établir. […] Il s’agirait de jeter par terre l’édifice entier de l’enseignement et de reconstruire sur des bases nouvelles, suivant les besoins de la race et de l’époque. […] La situation actuelle exige que nous jetions bas un édifice malsain, empli de miasmes, véritable foyer d’épidémies. […] L’Angleterre, la Belgique, l’Allemagne, etc., peuvent ou pourraient avoir des colonies, pour y jeter périodiquement le trop-plein de leur population et l’excès de leur énergie.
La question est si complexe qu’on ne sait par où l’aborder ; elle a tant de pointes et c’est un tel buisson de ronces et d’épines qu’au lieu de s’y jeter on en fait le tour ; et c’est prudent. […] L’arbre a été jeté par terre, ses branches taillées ; il n’y a plus qu’à en faire des fagots. […] Jetez-moi bas une vingtaine de réputations et la vôtre grandira infailliblement… » Sans doute, si le coup est vraiment un « coup d’éclat », mais qui oserait en répondre ? […] À la moindre imprudence, ils se jetteront sur vous et vous dévoreront en commençant par les parties molles, mais tout y passera jusqu’aux os et jusqu’aux excréments, et on les admirera sur le boulevard, fiers de leurs lèvres encore sanglantes. […] Au lieu de la guerre, je propose la paix ; je laisse la vie à celui qui me la laisse, — et à celui qui m’a retiré de l’abîme et qui en m’en retirant y est tombé lui-même, je jette à mon tour la corde du salut.
» Sa sœur Eugénie, qui habite Rouen, tombe mortellement malade, et l’on n’attend plus que sa fin ; Mme Valmore écrit à sa nièce, fille d’Eugénie, de respecter ce qui peut lui rester encore d’espérance de guérison : « (5 septembre 1850)… J’attends une lettre avec la plus grande anxiété, et votre silence me jette dans l’effroi. […] Je l’ai priée aussi pour nous tous ; je me suis jetée à sa miséricorde.
Je n’exagère rien : des voix éloquentes dans les chaires ont proclamé depuis longtemps la nécessité, l’à-propos de cette connaissance heureuse, et cherchent à en propager l’esprit ; mais en France rien n’est fait tant que le grand public n’est pas saisi des questions et mis à portée des résultats, tant qu’il n’y a pas un pont jeté entre la science de quelques-uns et l’instruction de tous116. […] Il a de ces débuts enflammés qui tiennent des deux ivresses : ainsi, dans cet élan d’orgie ou de sérénade (c’était un peu la même chose chez les Anciens, comessatio), il veut courir à la porte de sa maîtresse, et s’adresse tour à tour à son serviteur pour qu’il allume le flambeau, et à lui-même pour s’enhardir : « Le dé en est jeté : allons, enfant, j’irai. — Allons, courage !
Les mécomptes de l’enthousiasme jettent dans le dégoût. […] Il ne se cache pas sur les motifs qui l’y jetèrent : « Je ne balançai point, dit-il, et je ressentis un grand plaisir de voir qu’en quelque état que la dureté de la reine et la haine du cardinal (Mazarin) eussent pu me réduire, il me restoit encore des moyens de me venger d’eux. » Mal payé de son premier dévouement, il s’était bien promis qu’on ne l’y prendrait plus.
Dans Raoul de Cambrai, au commencement et le matin d’une bataille, ces barons qui chevauchent si serrés que, si l’on jetait un gant sur les heaumes, il ne tomberait pas à terre d’une grande lieue. […] Le Roman de la Rose, je l’ai dit, avait jeté l’esprit français dans une route de traverse, où il était empêché depuis près de deux siècles.
Dans ses deux grands romans, Diderot les jette à pleines mains, comme en un jour d’orgie. […] Amuser, s’amuser, « faire passer son âme par tous les modes imaginables », comme un foyer ardent où l’on jette tour à tour les substances les plus diverses pour lui faire rendre toutes les flammes, tous les pétillements et tous les parfums, voilà son premier instinct. « La vie, dit-il encore, est un enfant qu’il faut bercer jusqu’à ce qu’il s’endorme. » Il n’y eut jamais de créature mortelle plus excitée et plus excitante, plus impropre au silence et plus hostile à l’ennui471, mieux douée pour la conversation, plus visiblement destinée à devenir la reine d’un siècle sociable où, avec six jolis contes, trente bons mots et un peu d’usage, un homme avait son passeport mondain et la certitude d’être bien accueilli partout.
. — Pendant les six premières semaines, les sons qu’il a proférés n’étaient que des cris, et très simples, cris de douleur, de malaise, de besoin, analogues à ceux qu’il jetait au moment même de sa naissance. […] Les serpents par exemple sont assez rapides quand ils se jettent sur leur proie ; mais leur nom fut formé par un autre concept, celui d’étouffer ou étrangler.
Ses longues jambes flexibles se détendent d’elles-mêmes comme un ressort, et, quelque part qu’elles le jettent, avec ses quatre mains et sa queue il a toujours de quoi s’accrocher et se balancer, et garder libres deux ou trois membres pour s’agiter en contorsions bizarres. […] Il choisira parmi les oiseaux, « le peuple au col changeant, au coeur tendre et fidèle », la colombe compatissante qui jette un brin d’herbe à la fourmi qui se noie, qui met la paix entre les vautours ses ennemis.
Racine était fort jeune : après avoir failli mourir d’ennui chez son oncle le chanoine, il jetait sa gourme, il éclatait. […] Hermione, au quatrième acte, lui jette ses exploits à la face. « Je vous aime ; épousez-moi, ou j’égorge votre fils », c’est le fond de ses discours à Andromaque.
Le haut-le-cœur de son naturalisme l’a jeté au mysticisme ; mais on a cette impression qu’il demeure le même homme. […] Une fois seulement, un petit homme noir, de figure sèche et mauvaise, a jeté quelques cris brutaux.
On en trouve des exemples typiques : Voici ma pensée : Si la flèche Que mon arc lance aux étoiles Retombe et blesse Ma main qui l’a lancée Vers les étoiles ; Et si le cri d’opprobre Que je jette à l’écho des bois — Bavard ou de réponse sobre, Selon ma voix- Se retourne comme une insulte Qui brûle mon cœur en moi ; Ainsi tout vieux rêve vers toi, Tout vieil émoi (Qu’un nouveau rire, croit-il, achève) Surgit encore comme un tumulte, Hélène, Et tout vieux rêve Me pèse jour et nuit en honte vaine Comme un remords : Tel l’espoir d’une aube qui jamais ne se lève, Tel que mon jour est las de porter mes jours morts. […] Mais que feront des poètes moindres, que fera l’adolescent littérateur qui jette sa pensée vierge dans le tumulte des images et des rythmes ?
Zaïre a fait son sacrifice ; ce cœur si tendre jette un dernier cri : Pardonnez-moi, chrétiens, qui ne l’aurait aimé ? […] Cette fuite n’est pas une difficulté éludée ; c’est un trait de génie, comme, dans le tableau de Timanthe, le voile jeté sur l’indescriptible visage d’un père qui pleure.
Les femmes de rang se crurent attaquées et jetèrent les hauts cris. […] Il pouvait se croire très autorisé à défendue, comme licite et comme convenable, ce qui, dans ses pièces, était conforme à l’usage et aux mœurs de la société du temps, et encore trouver licite de jeter le ridicule indistinctement sur tout ce qui avait concouru à amener la révolution qui le menaçait, et de lancer ses traits au hasard sur le parti, sans s’embarrasser sur qui ils tomberaient.
Il fait des jeux de mots sur Prométhée, sur Polynice, sur Hélène, sur Apollon, sur Ilion, sur le coq et le soleil, imitant en cela Homère, lequel a fait sur l’olive ce fameux calembour dont s’autorisa Diogène pour jeter son plat d’olives et manger une tarte. […] Écoutez : « Il me jette au nez un pot de nuit.
(1) Pour expliquer convenablement la véritable nature et le caractère propre de la philosophie positive, il est indispensable de jeter d’abord un coup d’œil général sur la marche progressive de l’esprit humain, envisagée dans son ensemble : car une conception quelconque ne peut être bien connue que par son histoire. […] Et néanmoins les plus hautes questions, dont plusieurs n’avaient même jamais été posées sont traitées dans cet ouvrage, preuve palpable que l’esprit humain, sans se jeter dans des problèmes inabordables, et en se restreignant dans les recherches d’un ordre entièrement positif, peut y trouver un aliment inépuisable à son activité la plus profonde.
Si les métaphysiciens qui ont attribué à l’homme l’invention du langage avaient, je ne dis pas étudié, mais seulement jeté les yeux sur le peu de renseignements historiques qui existent, sur le très petit nombre de faits qui ont été rassemblés, ils auraient appris que leurs théories étaient contraires à tout ce que nous savons de certain ; ils auraient appris que toutes les doctrines de l’antiquité leur sont opposées ; ils auraient appris que plus l’on remonte haut, c’est-à-dire plus l’on s’approche du berceau au moins présumé de l’espèce humaine, plus l’on trouve les langues parfaites et fécondes. […] Cette supposition absurde est comme un voile jeté sur l’objet des recherches de cet admirable observateur.
. — Et il ne lui est resté que des muscles, les muscles du savant qui saisit les faits puissamment et qui dédaigne tout ce qui n’est pas le fait retrouvé, appréhendé, entassé, accumulé et jeté, comme une écrasante avalanche, sur la tête d’une époque qui se vante, comme d’une très belle chose, de ne plus croire qu’à la souveraineté, des faits. […] Une si formidable analyse semble promettre une synthèse plus formidable encore… Mais ici, il n’a pensé qu’à jeter le fondement de toute histoire future.
Avec infiniment plus de moralité assurément que Bussy-Rabutin ou que Bonneval, il a comme eux une faculté de satire et de riposte dont il abuse ; sa réplique a volontiers un air de défi qu’il vous jette à la tête, en sous-entendant à peine : « Prenez-le comme vous voudrez. » Et puisque j’en suis à rassembler autour de lui les noms qui peuvent servir à le mesurer et à le définir, je dirai encore qu’il participe à cette démangeaison de Henri Estienne et de ces gens d’esprit pétulants qui se donnent avant tout la satisfaction d’imprimer leurs fantaisies, sauf à s’attirer bientôt des affaires sur les bras et à ne trop savoir comment en sortir.
Les forces disponibles de la société, refaites à peine des excès et des prodiges de l’action, se portèrent à la tête ; on se jeta dans les travaux et les luttes de l’esprit.
Encadrée comme elle l’était dans la maison de Port-Royal, amenée après des années de recueillement et de paix à être témoin et, qui plus est, champion de contentions opiniâtres, jetée forcément au milieu des luttes, et placée même depuis la mort de sa sœur à la tête de la résistance, elle sut conserver un caractère de douceur inaltérable, une physionomie paisible et presque souriante.
On aura peut-être fait courir le bruit que j’y ai succombé avec toutes mes troupes, parce que j’ai interrompu de suite toutes mes communications avec Trente, et que laissant un corps ennemi derrière moi, je me suis jeté au milieu des gorges, à travers une multitude de paysans armés, pour forcer les passages et faire ma jonction avec le général Bonaparte qui est aux portes de Vienne.
On dirait qu’en finissant l’auteur a voulu jeter une poignée de lis aux yeux.
Après s’être fait d’abord tout grec et tout latin, on s’est jeté ensuite dans un excès opposé, et chez nous, par exemple, on était venu à tout franciser, sentiments et costume : les érudits eux-mêmes, comme l’abbé Barthélemy, trouvaient moyen de placer leur Chanteloup dans le pèlerinage d’Athènes.
Dans un système de religion quelconque, la terreur sait toujours à quel point elle doit s’arrêter ; elle se fonde toujours du moins sur quelques motifs raisonnés : mais le chaos de la magie jette dans la tête le désordre le plus complet.
Que penseriez-vous d’un peuple civilisé qui jetterait ses manuscrits aux flammes, et ses médailles à la fournaise, pour prouver sa civilisation ?
Larroumet aimait mieux induire lentement de faits multiples, emboiter le pas tranquillement à des jugements antérieurs qu’il reconnaissait vrais, que de jeter des aperçus mal vérifiés, ou d’étaler des fantaisies brillantes.
Celui-ci, l’homme des boutades, A recours aux vers familiers ; Cet autre dans ses incartades Est près de vider l’étrier : Il a beau suer et crier, Pégase va droit aux abîmes Pour y jeter son cavalier….
Francis Vielé-Griffin Quand — hommage pieux — les poètes laurés Jetèrent, tour à tour, leur plume sur sa bière, Peut-être que, parmi ses clairs rêves dorés.
Vous rappellerai-je comment il fut à son tour jeté en discrédit ?
Dès qu’elles jetaient les yeux sur moi, je les croyais occupées à en médire46 ».
. — « Henri IV se plaignait à Sully de Concini et de sa Léonore, qui avaient été jusqu’à jeter dans l’esprit de Marie de Médicis, que le roi voulait se défaire d’elle, et étaient parvenus à lui persuader de ne manger rien de ce qu’il lui envoyait, et de faire cuire souvent sa viande dans leur chambre. » 3.
Ce qu’il faut de plus en plus à la France, appelée indistinctement à la vie de tribune et jetée tout entière sur la place publique, c’est une école de bonne langue, de belle et haute littérature, un organe permanent et pur de tradition.
Monde des idées et monde des corps, il saura célébrer toute chose créée… mais par le moyen artistique d’une nouvelle création. » Et les ennemis du Parnasse, aux pontifes de l’Empirisme jetaient ces derniers mots, soudain, comme un défi.
Qu’est-ce que la sonde vous rapporte jetée dans ce mystère ?
Mais, s’il en est ainsi, le doute le plus grave vient envahir l’âme et la jeter dans un abîme de mélancolique rêverie.
L’idéal humain recule toujours, recule dans l’infini, mais dans l’infini, aujourd’hui, nous pouvons jeter beaucoup plus de lumières !
Arrêter le plan de l’édifice pour le temps où l’on est et, pour l’avenir, en jeter les fondements, élever quelques pans de mur et abandonner à ses successeurs le reste de l’exécution.
Ceux mêmes qui ont écrit méthodiquement sur la poësie, sur l’architecture et sur plusieurs autres arts, jugeant qu’il étoit inutile de faire préceder leurs raisonnemens et leurs dogmes par des descriptions exactes de ce qui étoit sous les yeux de tout le monde, se jettent d’abord dans des préceptes et dans des discussions que les contemporains trouvoient très-claires, mais qui sont des énigmes pour la postérité, à cause que le flambeau qui éclairoit les contemporains s’est éteint.
Il s’y mêle les pleurnichements de ces natures molles qui n’ont pas eu l’énergie de se jeter à travers la foule Pour s’y tailler leur place à coups de volonté.
et il dira aussi : Lui, sans aucun effroi, comme maître paisible, Jetait dans les sillons cette semence horrible, D’où s’élève aussitôt un escadron armé, Par qui de tous côtés il se trouve enfermé, Tous n’en veulent qu’à lui, mais son âme plus fière, Ne daigne contre eux tous s’armer que de poussière.
— ou que la Portinari ne fût pas morte à douze ans, mais qu’elle eût vécu sur le cœur du Dante, — et supposez qu’on vînt vous dire, tout à coup, ce matin, que toutes les deux ont écrit, — l’une sur Pétrarque, l’autre sur Dante, — avec quelle violence d’intérêt ne vous jetteriez-vous pas sur le livre qu’elles auraient laissé !
Tout à coup ses yeux jettent des flammes.
C’est ainsi que la Philosophie, si elle n’est pas charmée, est au moins gênée devant les yeux baissés de l’immaculée Carmélite, qui n’est pas seulement la gloire de l’Espagne, mais de la Chrétienté et de l’âme humaine, et aussi de l’esprit humain ; et c’est pourquoi, sans aucun doute, dans l’embarras où tant de gloire la jette, elle aime mieux se taire que parler.
Qu’on étudie l’Église elle-même, l’Église calme n’est-elle pas, pour qui jette sur elle un regard profond, une ligue à l’état latent ?
C’est tragique, ce déterrement d’un cadavre pourri, qu’on ne déterre que pour s’en faire une arme, — que pour le jeter, avec la peste qu’il exhale, à la tête de ses ennemis !
Le moindre grimaud sans mandat et sans autorité, ou la moindre grimaude, — car nous avons vu des femmes conférencer, leur éventail à la main, — se hisse sur un amphithéâtre ou sur un perchoir de quelque chaire, et la curiosité badaude, et l’oisiveté ennuyée, et la paresse, ennemie des lectures attentives et longues, viennent tendre leurs oreilles aux connaissances faciles qu’on leur égruge et qu’on leur jette.
Il n’a point laissé de trace et de ciment parmi eux, comme Swedenborg, cet autre mystique qui passa aussi sa vie dans la contemplation et dans l’obscurité, mais dont le système plus hardi et plus exprimé a jeté un éclat qui rappelle les aurores boréales de son pays.
Mitraud sur la Nature des sociétés humaines, comme il dit, et ce livre dont tout pour nous, jusqu’au titre, manque de rigueur et de vérité nous a jeté dans des perplexités étranges.
Les plus grands sont las De gloire, Et, comme un hochet, Ont jeté l’archet D’ivoire !
Ce n’est pas une seule émeraude qu’ils jettent à la mer, comme le tyran de Samos !
À un certain moment de ces lettres, l’homme aimé de Réa Delcroix a la pensée de s’arracher des bras qui le retiennent pour se jeter dans les bras de Dieu.
Mais ce premier amour, qui lui fait descendre les premières marches de l’escalier de l’infamie, la jette aux secondes, qui la rouleront sur les dernières.
Jetés hors des routes communes, la postérité les distingue de loin, comme ces arbres solitaires qui s’élèvent avec vigueur dans un espace désert.
— Quant à Pufendorf, il commence son système par jeter l’homme dans le monde, sans soin ni secours de Dieu.
L’âme se réveillait un instant, étendait son aile brisée, mais immense, versait une larme, jetait un rayon ; et de pures étoiles venaient luire encore à ce front souillé. […] Et, si l’Angleterre évolue, au lieu de se jeter en incessante révolution, ce n’est pas qu’elle change, c’est qu’elle change posément. […] Maintenant j’ai, non pas du dédain, mais une sorte d’éloignement pour les écrivains qui me jetaient alors dans des transports d’admiration. […] Tito se jette aux naseaux du cheval, saisît la bride. […] « La Hollande intolérante et puritaine, qui était la Hollande de son temps, a pu jeter sur son épaule le manteau noir qui l’assombrit.
L’entrée d’une maison opulente était une porte ouverte à la fortune ; je ne voulais pas risquer de me la fermer… Madame Dupin aimait avoir tous les gens qui jetaient de l’éclat, les grands, les gens de lettres, les belles femmes. […] c’est toi la courtisane, C’est toi qui dans ce lit as poussé cet enfant Que la Grèce eût jeté sur l’autel de Diane ! […] Une fois pourtant, et une autre fois encore, il attire son attention, et dans des conditions flatteuses pour lui : « Elle jeta les yeux sur moi. […] Julie donc se jette à l’eau pour sauver son petit garçon. […] Frappé d’un nom si cher, il se réveille en sursaut, et jette un regard avide sur celle qui le porte, etc.
Comment donc pourraient-ils plaire, eux que la divine Intuition retient dans la nature, à des intelligences faussées qu’une demi-science jeta dans l’artifice ? […] » Il a jeté sur la réponse de sa colère la draperie de son imagination et il a vu ses héros marcher dans son rêve. — Oui, il y a du vrai dans les calomnies : si ce n’est en action, c’est du moins en pensée que Byron est ce coupable dont son temps s’épouvanta. […] Rien n’est facile à faire comme un roman, selon cette formule, et toutes les médiocrités s’y sont jetées. […] Volontiers il la raille et lui jette le défi d’expliquer les mystères qu’elle constate. […] D’abord dans cette magie de couleurs ardentes et comme jetées, on ne percevrait que violences dont le regard est brutalisé.
Oserons-nous dire que cette esquisse, si imparfaite qu’elle soit, a jeté en France les fondements de l’étude vraiment philosophique de l’histoire de la philosophie ? […] Son auteur même l’a répudié, pour se jeter dans un autre excès : esprit puissant et extravagant, qui ne pouvait habiter que des abîmes. […] Mais enfin, prise en elle-même, quel grand jour jette-t-elle sur l’époque dont elle fait partie ? […] Il est donc impossible que l’historien, au premier regard qu’il jette sur l’humanité, n’y aperçoive que la philosophie. […] Le grand penseur est parti de la pensée ; le grand géomètre a jeté sur la pensée la forme de la géométrie.
C’est ce qu’on oublie trop souvent aussi quand on parle des Provinciales, et qu’on veut faire honneur aux amis mondains de Pascal, au chevalier de Méré, par exemple, ou je ne sais encore à qui, de l’avoir jeté lui-même, sans qu’il y songeât, dans la voie du succès. […] Avec infiniment d’habileté, Pascal se jette ici sur ceux de nos péchés qui sont des vices ou des crimes, qui le sont partout, en Chine comme à Rome, qui le seront toujours, tels que, par exemple, le vol ou l’impudicité ! […] Mais bien loin — et quoiqu’on les imprime habituellement avec elles — de faire corps avec les Pensées, dont les premières ne sauraient guère avoir été jetées sur le papier avant 1658, ces fragments leur sont, l’un de dix, et l’autre de trois ou quatre ans antérieurs, et conséquemment ils ne prouvent que pour la jeunesse de Pascal. […] En fait, les « raisonneurs » de son répertoire ne jouent pas le rôle du « chœur » dans l’ancienne comédie ; ils n’expriment qu’une partie de sa pensée seulement, celle qu’il croit la plus conforme aux préjugés de son public ; et leurs discours ne sont, que l’appât qu’il jette au parterre. […] En revanche, il a du regret de voir Tite-Live « jeter des fleurs sur les colosses de l’antiquité » — ce qui sans doute est dit d’une manière galante, — et il déclare que Voltaire ne fera jamais « une bonne histoire ».
Rien n’y put faire, et Mlle Aïssé, décidée à ne point séparer le don de son cœur d’avec son estime, déclara que si on continuait de l’obséder, elle se jetterait dans un couvent. […] Cette somme à débourser tenait surtout à cœur à Mme de Ferriol, et elle le fit sentir à Mlle Aïssé, qui se leva, alla prendre le billet et le jeta au feu en sa présence. […] Brue, son frère, en l’envoyant à la Cour, pour passer ensuite en Italie, afin de jeter à Rome les premières dispositions de son dessein de parvenir à la pourpre romaine.
Figurez-vous des hommes du monde qui lisent une page entre deux bouchées de gâteau927, des dames qui interrompent une phrase pour demander l’heure du bal : trois mots spéciaux ou savants leur feraient jeter le journal. […] Telle est cette vision de Mirza qu’il faut traduire presque en entier944 : « Le cinquième jour de la lune, étant monté sur les hautes collines de Bagdad, pour passer le reste du jour dans la méditation et dans la prière, je tombai en une profonde méditation sur la vanité de la vie humaine, et passant d’une pensée à l’autre : Sûrement, me dis-je, l’homme n’est qu’une ombre et la vie un songe. — Pendant que je rêvais ainsi, je jetai les yeux sur le sommet d’un roc qui n’était pas loin de moi, et j’y aperçus une figure en habit de berger, avec un instrument de musique à la main. […] Jette tes yeux vers l’orient, me dit-il ; et raconte-moi ce que tu vois. — Je vois, répondis-je, une large vallée et un prodigieux courant de mer qui roule à travers elle. — Considère maintenant, me dit-il, cette mer, qui à ses deux extrémités est bornée par des ténèbres, et dis-moi ce que tu y découvres. — Je vois, repris-je, un pont qui s’élève au milieu du courant. — Le pont que tu vois, me dit-il, est la vie humaine : considère-le attentivement. — L’ayant regardé plus à loisir, je vis qu’il consistait en soixante-dix arches entières et en plusieurs arches rompues qui, avec les autres, faisaient environ cent.
Un peu plus loin, vous apercevez la religion passionnée d’un protestant révolutionnaire, lorsqu’il vous parle des sons funèbres que jette le vent attardé autour de l’autel, des accents sauvages avec lesquels il semble chanter les attentats que l’homme commet et les faux dieux que l’homme adore. […] La même faculté nous porte à la gloire ou nous jette dans un cabanon. […] Pour s’exalter, Dickens n’a pas besoin d’un pareil spectacle : une diligence le jette dans le dithyrambe ; les roues, les éclaboussures, les sifflements du fouet, le tintamarre des chevaux, des harnais et de la machine, en voilà assez pour le mettre hors de lui.
Mais, si tu veux me fournir un nouveau sujet de gloire, sors avec le cortège de brigands qui t’est dévoué ; sors avec la lie des citoyens ; va dans le camp de Mallius ; déclare à l’État une guerre impie ; va te jeter dans ce repaire où t’appelle depuis longtemps ta fureur insensée. […] Mais on aime mieux jeter le voile de l’ignorance sur les sagesses de Cicéron, de Confucius, et parler de progrès pour se nier son néant. […] Témoin celui qui dit : « Ici sur Ennius, Romains, jetez les yeux ; Par lui furent chantés vos célèbres aïeux.
Pour dissiper le doute où cette vue le jeta, il imagina d’ordonner que le cadavre fût attaché à une muraille ; et, plaçant des gardes alentour, il leur enjoignit de saisir et de lui amener tous ceux qu’ils verraient pleurer ou témoigner quelque pitié à ce spectacle. […] Interrogé par elle comme les autres, il lui dit : « que ce qu’il avait fait de plus hardi et de plus criminel était d’avoir coupé la tête de son frère, pris à un piége tendu dans le trésor du roi ; et que ce qu’il avait fait de plus adroit était d’être parvenu à enlever le corps de ce frère, après avoir enivré les soldats chargés de le garder. » Lorsque la fille du roi entendit cet aveu, elle se jeta sur le jeune homme et crut l’avoir arrêté, mais comme elle n’avait saisi que le bras mort dont il s’était muni, il s’évada par la porte et parvint à s’enfuir. […] De temps en temps, ils tournaient le dos comme s’ils allaient prendre tous la fuite, et les barbares, voyant ce mouvement, s’abandonnaient à leur poursuite, poussant de grands cris et frappant sur leurs armes ; mais, au moment où ils allaient atteindre les Lacédémoniens, ceux-ci, se retournant subitement, faisaient tête, et, renouvelant le combat, jetaient sur la place un nombre infini de Perses.
Le « nouveau jeu », c’est une gourme qu’on jette, et cela ne tire pas à conséquence. […] Mais l’enfant royal, sommeillant à demi, lui jette ses deux bras au cou ; et ce geste d’enfantine confiance désarme Brutus et fait subitement crouler, au choc d’un sentiment très simple de pitié humaine, toute son intransigeance abstraite et têtue. « Bah ! […] Donc, en disant que j’ai voulu jeter le ridicule sur les ménages de pasteurs et écrire un plaidoyer en faveur du célibat des prêtres, vous me faites un procès de tendances.
Du bois flotté est constamment jeté sur les côtes de la plupart des îles, même de celles qui sont situées au milieu des plus vastes océans ; et les natifs des îles de coraux de la mer Pacifique n’ont d’autres pierres pour leurs outils ou leurs armes, que celles qu’ils trouvent entre les racines de ces arbres échoués. […] Partant de ce point de vue que le monde entier ou du moins de larges bandes longitudinales ont été simultanément plus froides d’un pôle à l’autre, on peut jeter quelque lumière sur la distribution actuelle des espèces identiques ou alliées. […] Cherchons maintenant quelle lumière on peut jeter sur les différents faits qui précèdent en partant de l’hypothèse appuyée, comme nous l’avons vu, sur un ensemble considérable de preuves géologiques, que le monde entier, ou du moins une grande partie de sa surface, a subi un abaissement simultané de température pendant toute la durée de la période glaciaire.
J’eus quelque idée de me jeter à l’eau ; mais j’ai quarante-sept ans et des rhumatismes, il faisait un froid piquant… « Ce serait trop fou à moi, me disais-je ; quand je serai cloué dans mon lit avec un rhumatisme aigu, qui viendra me voir ? […] » Ce qui me frappa, c’est que la voix, cette fois, ne me tutoyait pas… Je me serais méprisé moi-même si je ne me fusse pas jeté à l’eau169. » VII. […] Egger ne veut pas citer cette parole comme parole intérieure morale à proprement parler, parce qu’elle surgit dans une voix réelle d’enfant — même si ce chant est un peu insolite — qui prend pour Augustin une signification providentielle à cause de ses réflexions du moment (XII, 28 : « Je jetais des cris pitoyables : ‘Dans combien de temps ?
Bien qu’il désespère du salut, de l’affranchissement de l’Italie, cependant il sait que sa voix sera entendue sur le Tibre et sur l’Arno ; il s’adresse à Dieu et le supplie de jeter un regard compatissant sur ce beau pays qu’il a traité avec tant de prédilection. […] Jusqu’à présent, les débats de la Chambre des communes n’avaient jeté aucun jour sur l’importance politique de M. […] Les rapprochements les plus ingénieux, qui peuvent plaire et séduire dans la conversation, jettent dans la trame du récit une singulière confusion, si bien qu’après avoir étudié attentivement dans le livre de M. […] Les extraits qu’ils nous donne sont curieux sans doute ; mais ces extraits, qui dans un travail purement littéraire éveilleraient l’attention, jetés au milieu d’une narration historique, n’excitent que l’impatience. […] Quand le Christ pardonne à Madeleine, à la femme adultère, et dit aux assistants : « Qui de vous osera lui jeter la première pierre ?
On le moqua, on lui fit croire qu’on le jetterait à la rivière, ce que d’ailleurs on eût fait peut-être, et, de la ville comme du palais, il s’enfuit en courte honte. […] On ne le sait, l’affaire étant compliquée de là pruderie hyperbolique des Génevois de ce temps de l’amitié de Calvin pour Marot qui a pu au contraire dissimuler une faute grave et la convertir en simple infraction, à la condition que Marot quittât la ville ; de l’indulgence enfin et du pardon et des regrets des calvinistes des temps plus rapprochés, qui, ayant fait de Marot un des leurs, ont pu jeter le manteau sur tout cela. […] Tu n’as couteau, serpe ni serpillon, Qui sût couper corde nicord il Ion, Pour me jeter de cette étroite voie. […] Et quand on jette les yeux à coté de lui à peu près sur n’importe lequel de ses contemporains, on comprend à quel point il devait paraître court, et même concis. […] Elle réchauffe presque ; du moins, quand elle pousse avec lui ses avantages, elle précipite sa parole, jette comme par saccades vigoureuses son argumentation pressante et rude : « Il y a des hommes qui restent ministres de l’Église catholique pour que ces places ne soient pas occupées par plus méchants qu’eux.
« Le troisième de ses compagnons paraît être très-farouche, et pourtant son corps est beau, ô reine puissante : ses regards sont rapides, il les jette sans cesse autour de lui. […] « Mais il se dit : « Je ne veux point tuer la belle vierge », et tournant le tranchant du javelot vers son épaule, il le jeta le bois en avant, l’homme fort, avec tant de violence qu’elle se prit à chanceler. […] quels bons mets on trouva jetés dans les cendres ! […] Hagene, profitant de son absence, s’empare du trésor et le jette dans le Rhin pour le saisir plus tard.
En lisant certaines notes, jetées à la fin de quelques-uns de ses volumes, on imagine que les différences de l’œuvre et de l’auteur furent d’abord, pour ce perspicace Sainte-Beuve, une occasion de malicieux amusement. […] Il n’est qu’un moyen de jeter une lumière plus vive sur les énergies que le peintre des mœurs s’est proposé de définir et de caractériser. […] C’est ainsi qu’il écrit : « Pour que l’Empire germanique usurpe l’Europe, il faut qu’il tue la France. » Quelle lumière jetée en une ligne sur toute la politique suivie par Bismarck et Guillaume II, et quelle divination des dangereuses conséquences de ce funeste principe des nationalités qui a substitué à l’équilibre issu des traités de 1815 le chaos redoutable de l’Europe actuelle ! […] « Pour trouver le parfait et l’éternel », conclut-il, « il faut dépasser l’humanité et se jeter dans la haute mer. » La Science est pour lui un moyen de s’associer en pensée à cette évolution du cosmos vers un terme indéfiniment reculé, si démesuré par rapport à notre chétive personnalité que vraiment elle ne compte plus. […] Écoutez-le, après un coup d’œil jeté sur une carte.
Étonnez-vous après cela de ce qu’un pareil législateur jette une dédaigneuse pitié sur son père, flétrisse sa bienfaitrice, corrompue par sa commisération pour lui, se refuse au mariage, cette tutelle des générations à venir, et jette ses propres enfants à la voirie publique et aux gémonies du hasard qu’on appelle Hospice des enfants abandonnés, pour les punir sans doute d’être nés d’un père aussi dénaturé que ce sophiste législateur !
« À ces mots, épouvanté, je le regardai en tremblant, et je crois que j’aurais perdu la parole s’il m’avait regardé le premier ; mais j’avais déjà jeté les yeux sur lui, au moment où sa colère éclata par ce discours. […] Puis il passe à la catégorie capitale des gardiens de l’État, les soldats, et, dans la vue de former cette catégorie de défenseurs de l’État avec toutes les conditions et les vertus de la profession, il se jette dans des utopies presque aussi révoltantes et aussi absurdes que les utopies des blasphémateurs de la propriété, des destructeurs de la famille et des expropriateurs de nos jours.
Telle est la loi des êtres qui sont jetés dans le monde avec une prodigalité de nature trop disproportionnée au moule humain ; ils sont malheureux, mais sont-ils malheureux parce qu’ils sont trop complets ? […] Rousseau, et qui lui firent jeter quatre de ses enfants à l’hospice des enfants abandonnés sans marque de reconnaissance, de peur que ses fils, sollicités au parricide par ses ennemis, ne devinssent un jour les assassins de leur père ?
Jamais Malherbe ne put gagner sur lui qu’il composât avec lenteur et correction, qu’il polit laborieusement les vers que son inspiration première avait jetés. […] C’est un vrai poète (il en avait l’âme et l’oreille), un amant de la campagne, qui dans le plus faux des genres, dans la pastorale dramatique, a su jeter quelques impressions profondément sincères, un doux mélancolique qui a pleuré la fuite des choses et le néant de l’homme en strophes lamartiniennes, du milieu desquelles parfois s’enlèvent puissamment de magnifiques images, des périodes nerveuses et fières.
La recherche des moyens d’y atteindre le jeta dans de violentes agitations. […] Il se jette à chaque instant hors de la raison générale, qu’il n’a pas d’ailleurs reconnue ; et bon nombre de ces délicatesses de pensée et d’expression, de ces nuances dont son style est chargé, ne peuvent passer de son esprit dans l’esprit de ses lecteurs.
De la petite ville la plus obscure de la province la plus perdue, je fus jeté, sans préparation, dans le milieu parisien le plus vivant. […] Le lendemain, je partais pour Paris ; le 7, je vis des choses aussi nouvelles pour moi que si j’avais été jeté brusquement en France de Tahiti ou de Tombouctou.
Dans cette quiétude, des élans exaltés vibrent cependant, et l’on y discerne une extase contenue, un secret ravissement ; Ils s’arrêtent devant une statue de la Madone, et Tannhaeuser en les écoutant se jette à genoux Aussi épouvanté du prodige de miséricorde qui vient de le sauver, que stupéfait de voir son vœu audacieux si soudainement exaucé, et sa délivrance si inopinément accomplie, il répète les paroles des pèlerins : « je suis oppressé par mon péché, je succombe sous son poids, je ne veux donc plus connaître ni la paix, ni le repos, je ne choisis désormais pour moi que peines et fatigues ! […] Elle arrive les bras étendus, comme pour jeter sur tous les objets environnants, le brillant éclat de son bonheur, le rayonnement de sa félicité expansive et généreuse.
Ils ont pu siffler, hurler, jeter des pierres, sous l’œil serein de la police et à la stupéfaction des honnêtes gens. […] Non, le seul résultat de ces ignobles journées a été de ruiner, ou peu s’en faut, le plus désintéressé et le plus vaillant des chefs d’orchestre, de jeter sur le pavé quatre cents de nos compatriotes, et de rendre impossible l’établissement de ce théâtre lyrique nouveau qu’attendaient si impatiemment tous nos jeunes musiciens.
L’homme avait jeté sa gourme professorale, chose rare ! […] Et cette faute, de l’avoir oubliée, plane dans toute son histoire comme un nuage qui y jette son ombre à tout ce qu’il y a de vérité.
Avec ses théories philosophiques ou économiques, il ira rejoindre dans l’oubli Campanella et tant d’autres, jusqu’à ce que le crochet de quelque curieux ou de quelque penseur original l’y rattrape pour le jeter dans la hotte de quelque système, comme dernièrement il est arrivé à Campanella. […] Proudhon ne dit pas à Cromwell de mettre son chapeau ; il le lui ôte, sans façon, du bout de son bâton, car c’est un bâtonniste, et il le jette par la fenêtre, et il se trouve que c’est un chapeau de femme, ce chapeau !
Un jour, à l’une de ces thèses dite la tentative, le prince de Condé, ami et protecteur de sa famille, à qui il l’avait dédiée et qui y assistait, voyant le répondant assailli de toutes parts et faisant face à tous, eut la tentation lui-même de faire comme sur le champ de bataille, de courir à son secours et d’entrer dans la mêlée : instinct de héros, qui ne peut voir un ami, un brave dans le péril, sans s’y jeter et sans prendre sa part à la fête. — Ou bien encore (car ces sortes de légendes sont flottantes) ce fut contre le brillant bachelier en personne qu’il se sentit, dit-on, l’envie de disputer, le voyant si redoutable et si vainqueur : autre instinct de héros et d’Alexandre, jaloux de toutes les palmes, avide et amoureux de toutes les gloires.
Des incidents récents et fort imprévus sont venus la lui donner et l’ont jeté, pour ainsi dire, dans le flot d’une popularité pour laquelle il ne semblait pas fait, et que certainement il n’ambitionnait pas.
Beugnot que d’être un excellent administrateur et un haut fonctionnaire capable ; c’était, d’ailleurs, un tout autre caractère et d’une nature différente : esprit droit, sensé, mais sans trait et sans brillant, ayant eu les passions généreuses et les enthousiasmes de la jeunesse, cœur dévoué et qui s’était dès l’abord donné à Mirabeau ; qui conserva toujours quelques illusions sur cette grande mémoire trop mélangée ; homme public apte et laborieux, tout à la chose, assez peu observateur des personnes, de plus en plus tourné à la bienveillance en vieillissant, et que le soudain malheur qui brisa sa carrière jeta dans un complet abattement suivi de résignation, sans qu’il y entrât jamais un grain d’ironie ni une goutte d’amertume.
Tous les poëtes et rimeurs critiqués, confessant naïvement leurs griefs, ont été les premiers, dans la bagarre présente, à se soulever, à prêter leurs noms, à venir se faire inscrire à la file comme témoins à charge, même les malades, dit-on, même les infirmes (ceci est affligeant à toucher, mais on nous y force), et l’on nous assure que, pour jeter sa pierre, le plus clément, le plus chevaleresque, le plus contrit de tous lui-même a marché83.
C’est une remarque à faire qu’aux approches des grandes crises politiques et au milieu des sociétés en dissolution, sont souvent jetées d’avance, et comme par une ébauche anticipée, quelques âmes douées vivement des trois ou quatre idées qui ne tarderont pas à se dégager et qui prévaudront dans l’ordre nouveau.
L’amour, tel qu’ils le peignaient, est une maladie, un sort jeté par les dieux, un genre de délire, qui ne suppose aucune qualité morale dans l’objet aimé.
Ce n’est pas d’abord à satisfaire des sentiments de haine et de fureur que des décrets barbares ont été consacrés, c’est aux battements de mains des tribunes ; ce bruit enivrait les orateurs et les jetait dans l’état où les liqueurs fortes plongent les sauvages ; et les spectateurs eux-mêmes qui applaudissaient, voulaient par ces signes d’approbation, faire effet sur leurs voisins, et jouissaient d’exercer de l’influence sur leurs représentants : sans doute, l’ascendant de la peur a succédé à l’émulation de la vanité, mais la vanité avait créé cette puissance qui a anéanti, pendant un temps, tous les mouvements spontanés des hommes.
Il faut se mêler pour ainsi dire à sa lecture, jeter tout ce qu’on a d’esprit et d’idées acquises à la traverse des raisonnements de l’auteur, le contrôler par sa propre expérience, et contrôler la sienne par lui.
Enfin toutes ces causes d’erreur peuvent se mêler et concourir dans une fausse généralisation ; on obéit à des préjugés, à une tradition, à l’intérêt ou à la passion, et l’on accepte pour vrais des faits imaginaires ; on jette un coup d’œil distrait sur la réalité ; on la voit de loin, indistinctement, confusément, ou l’on n’en prend qu’une partie ; on fait arbitrairement abstraction de ce qui gêne ou déplaît ; après quoi l’on se prononce avec autorité, et l’on établit des lois, universelles, éternelles.
Ce qu’il veut, lui, c’est jeter des femmes, le plus de femmes possible, toutes les femmes à ses pieds.
Et la plume est jetée : M. le secrétaire accourt, humble page, à son lit. » Notez qu’ici le petit page a trente-six ans, qui, il est vrai, « en valent quinze. » Il n’est pas toujours plaisant de voir ce grand lyrique faire ainsi le gamin.
Il se jeta aux pieds du roi ; mais, bien que la dame joignît ses supplications aux siennes, Auguste demeura inexorable.
Jusqu’au jour où tous les deux, las enfin de cette pitoyable comédie, jetteront le masque et se verront face à face.
Le monothéisme enlève toute aptitude à comprendre les religions païennes ; le musulman jeté dans les pays polythéistes semble n’avoir pas d’yeux.
De complaisantes explications jettent un voile sur le règne réel qui ne veut pas venir.
La terreur, l’hésitation s’emparèrent de lui et le jetèrent dans une défaillance pire que la mort.
Aux supplications de sa mère il jette d’inexorables répliques ; chaque mouvement qu’elle fait pour le fléchir est repoussé par un mot mortel.
L’héroïsme, jusqu’à la fin, a beau jeter d’admirables éclairs, on peut trop voir à quoi tient cette flamme elle-même, et qu’elle va périr faute d’aliment.
L’Etna flamboie et bave, jette dehors sa lueur, sa colère, sa lave et sa cendre ; ils prennent un trébuchet, et pèsent cette cendre pincée par pincée.
Je comprends et j’apprécie la valeur de cette considération ; mais on voit aussi combien elle jette d’obscurité et d’incertitude sur tout le débat, car tant qu’on n’aura pas spécifié quelle est la partie du cerveau qui exerce les fonctions motrices et sensitives, on ne peut pas s’assurer que cette partie soit plus ou moins grande dans telle ou telle espèce, la taille n’étant elle-même qu’une indication très-insuffisante : de ce qu’un animal est plus gros, il ne s’ensuit pas que son cerveau contienne plus de force motrice qu’un plus petit, ni plus de finesse sensorielle.
Un anatomiste un peu distingué ne peut réellement jeter les yeux sur ces figures sans éprouver un sentiment pénible, tant elles sont peu conformes à celles que la nature nous offre. » Je laisse à décider aux anatomistes si M.
comment le fortifier contre l’abattement où le jettent la crainte et la pitié ?
Si vous perdez le sentiment de la différence de l’homme qui se présente en compagnie, et de l’homme intéressé qui agit, de l’homme qui est seul, et de l’homme qu’on regarde, jetez vos pinceaux dans le feu.
Là, au surplus, s’arrête la similitude ; on ne la ressaisit plus à travers le livre de Furetière que dans certaines boutades à intention comique ou burlesque, comme par exemple la scène ou Nicodème, voulant se jeter aux genoux de sa maîtresse, met en pièces le ménage de Mme Vollichon ; ou celle encore des laquais vengeant leur maître, éclaboussé, par des coups de fouet et de pierres lancés au dos des maquignons.
Il y a bien de l’imprécation jetée à ces princes catholiques, qui sont l’ennemi pour M.
On n’a pas le droit, dans quelque hypothèse qu’on se place, de jeter sur la place une somme de livres ennuyeux qui, au fond, ne sont pas des livres, et qu’on n’y aurait jamais lancés si on n’avait pas trouvé dans quelque coin les brouillons des lettres écrites autrefois par ceux dont on a hérité.
Dans le coup d’œil que nous venons de jeter sur la philosophie française du XVIIe et du XVIIIe siècles, nous avons pris une vue d’ensemble ; nous avons dû laisser de côté un grand nombre de penseurs et ne considérer que les plus importants d’entre eux.
« Après avoir réglé, dit l’orateur, les objets les plus importants de l’administration et de l’empire, il jeta les yeux sur l’intérieur du palais ; il aperçut une multitude innombrable de gens inutiles, esclaves et instruments du luxe, cuisiniers, échansons, eunuques, entassés par milliers, semblables aux essaims dévorants de frelons, ou à ces mouches innombrables que la chaleur du printemps rassemble sous les toits des pasteurs ; cette classe d’hommes dont l’oisiveté s’engraissait aux dépens du prince, ne lui parut qu’onéreuse sans être utile, et fut aussitôt chassée du palais ; il chassa en même temps une foule énorme de gens de plume, tyrans domestiques qui, abusant du crédit de leur place, prétendaient s’asservir les premières dignités de l’État : on ne pouvait plus ni habiter près d’eux, ni leur parler impunément.
C’est comme si un statuaire ou un peintre voulait jeter sur le corps d’une Vénus la draperie d’une Minerve.
Mais les injures violentes, les noms de débauché nocturne, de ventru, de pied-bot, qu’il jeta plus tard au sage Pittacus, furent sans puissance, comme ses armes : « Répète un chant romain, nous dit Horace, ô lyre modulée d’abord par le citoyen de Lesbos, qui, forcené pour la guerre, savait pourtant, soit au milieu des armes, soit quand son navire battu des flots reprenait le rivage, chanter Bacchus et les Muses, Vénus et l’enfant qui la suit toujours62. » Puis ailleurs, lorsque, échappé à un danger de mort, Horace, qui a cru voir de près l’Élysée, y place le belliqueux Alcée, comme Virgile osait y mettre Caton : « De combien peu, dit-il, nous avons failli voir l’empire de la sombre Proserpine, et le tribunal d’Éaque, et les demeures réservées des âmes pieuses, et Sapho sur la lyre éolienne se plaignant des jeunes filles ses compatriotes, et toi aussi, Alcée, redisant plus haut sur ton luth d’or les maux de la tempête, les maux de l’exil, les maux de la guerre !
Quoiqu’il entrevît des abîmes au fond de ce qu’il appelait la philosophie, il s’y est jeté avec un courage qui n’est pas sans grandeur ; car la grandeur de l’homme est de préférer ce qu’il croit la vérité à lui-même. […] Toute œuvre d’art, quelle que soit sa forme, petite ou grande, figurée, chantée ou parlée, toute œuvre d’art, vraiment belle ou sublime, jette l’âme dans une rêverie gracieuse ou sévère qui l’élève vers l’infini. […] Les scènes humaines jetées dans un coin n’ont d’autre objet que de relever et de faire paraître davantage les scènes de la nature par l’harmonie ou par le contraste. […] Une philosophie superficielle vous a jetés loin du christianisme considéré d’une façon étroite ; une autre philosophie peut vous en rapprocher en vous le faisant envisager d’un autre œil. […] On peut aussi, en s’entourant de certains objets, se ménager en quelque sorte et faire naître en soi des sensations et des désirs qui pour cela ne sont pas plus volontaires que ne serait volontaire l’impression faite sur nous par une pierre que nous nous serions jetée à nous-même.
Il la chasse d’abord en la personne du mannequin d’osier sur lequel elle essayait ses robes et qu’il jette par la fenêtre. […] Plus tard, le désespoir d’être séparé de son fils la jette dans la mort. […] C’est Manning, qui abandonne le protestantisme pour se jeter dans le catholicisme le plus tranché et le plus intransigeant. […] — Le précepteur de son jeune cousin se jette à l’eau et n’en revient que pour aller au cimetière. […] Il a d’abord l’idée de dérober le panier de figues et de le jeter dans le Tibre.
Mais l’abattement où le spectacle de l’univers nous jette a pour cause des rapports de grandeur, de distance, de durée, qui n’ont rien d’absolu et ne sont en bonne logique, en bonne psychologie, que ce que notre esprit les fait être. […] Il écrit, il écrit infatigablement, au risque d’écrire mal, sa plume étant non le burin qui grave avec lenteur sa pensée pour l’avenir, mais le simple porte-voix, quelquefois un peu rauque, qui la jette et la crie aux quatre coins de l’horizon… Oh ! […] Il est beaucoup plus sûr de jeter à tous les vents, à pleines mains, la semence de gloire, dont un grain seul peut-être aura la bonne fortune de lever. […] Semblable, écrit magnifiquement Schopenhauer, à l’imperator romain qui, se vouant à la mort, lançait son javelot dans les rangs ennemis, le génie jette ses oeuvres bien loin en avant sur la route où le temps seul viendra plus tard les ramasser. […] Mais, si Lemercier n’a pas beaucoup brillé avant le lever du soleil d’Hugo, c’est une pure sottise de penser qu’il aurait jeté un éclat plus vif sous le plein rayonnement de l’astre qui l’a effacé en lui succédant.
Jusque sous Philippe II, les cavaliers rapportaient de leurs expéditions des têtes de Maures pendantes à leurs selles et les jetaient aux enfants en passant dans les villages. […] Tout en sachant se cantonner dans son domaine propre, il jetait à chaque instant son regard dans les divers royaumes des savants spéciaux. […] J’avais apporté du pain que je lui jetai, mais il n’y toucha pas. Je lui jetai ensuite une grosse sauterelle, croyant, à la forme de son bec, qu’il mangeait des insectes, mais il ne parut pas en faire cas. […] On crut le singe ; Gleyre ne fut pas jeté à la mer.
Pour donner à ces tableaux quelque intérêt, il serait indispensable d’y jeter quelque variété, et M. de Lamartine ne paraît pas y songer un seul instant. […] Les colons les plus hardis se décident à se jeter dans les bras de l’armée française ; les plus timides perdent leur temps en délibérations, et sont emmenés dans les mornes par Dessalines. […] Leur père est devant eux, et ils ne se lèvent pas pour se jeter dans ses bras. […] Les enfants du poète ont, en jouant, jeté au feu les feuillets où il avait écrit ses vers ébauchés, et dans un moment de colère il les a chassés. […] Les voilà jetés dans une perplexité sans issue.
Ces divers exemples ont pour but de jeter les grandes lignes d’une étude qui pourrait avoir quelques profits. […] Quand il dessinait, il jetait sur du papier blanc de l’encre, du café : il précisait les vagues contours que cet accident avait faits sur la page. […] Ce cycle est une loi de toute manière jetée à la vie. […] Rodenbach, mieux que quiconque, a le pouvoir de jeter sur la phrase une légère écharpe de lin qui laisse deviner, et ne limite pas le contour. […] Lorsque des parents se haïssent dans cette œuvre, ils se jettent le cœur de leur enfant à la tête.
Charpentier qui n’avaient pas été jetés au feu. […] C’était, dit Chapelain, « un esprit tout de feu qui se jetait à tout ». […] Vous fermez ses livres et les jetez à l’écart. […] On le supplierait vulgairement de n’en plus jeter : l’on ne sait plus que faire de tant de richesses gaspillées. […] Qui oserait, là-dessus, jeter la pierre à M.
Tandis qu’ils n’avaient, trop longtemps, jeté sur l’humanité qu’un regard dur et hostile, ils se sont repris de sympathie pour les hommes, leurs frères, d’indulgence pour leurs fautes et d’apitoiement devant leurs misères. […] Je me jetai dans la vie éperdument, avide de plaisirs, avec toute l’ardeur de ma jeunesse… Et je commis faute sur faute, je longeai mille précipices. […] Elle vient vers celui qui est son allié naturel, afin qu’ils cherchent ensemble s’il n’y aurait pas un moyen d’échapper à l’abîme de misère où elle les a jetés tous les deux. […] L’auteur s’était hâté de jeter sur le papier tout ce qu’il sentait fermenter dans son esprit, sans avoir pris le temps de mûrir ses première ? […] Il s’y jette avec elle. — Ainsi se termine par un dénouement tragique ce drame de l’amour sensuel.
On se jette sur Melena, on le met en pièces, on acclame l’empereur, le bienfaiteur du peuple, le Prince de la Paix. […] Jette tes bras autour de mon cou, et dis-moi que tu m’aimes. […] Et tout à coup désespérée, sanglotant de toute son âme, elle se jette dans ses bras : « Ottomar, par pitié, secours-moi ! […] — Tiens, Ottomar, prends cela, jette, brûle cela ! […] Et, brusquement, il brisa le médaillon, le jeta au loin.
Le coucou jette sa voix monotone comme un soupir douloureux et tendre entre les troncs blancs des frênes ; le rossignol fait rouler et ruisseler ses notes triomphantes par-dessus la voûte du feuillage ; le rêve naît de lui-même, et Chaucer les entend disputer sur l’amour. […] Il n’assomme pas, il pique, en passant, non par haine ou indignation profonde, mais par agilité d’esprit et prompt sentiment des ridicules ; il les jette à pleines poignées sur les personnages. […] Au contraire, il y a plaisir à voir ces gentillesses musquées, ces petites façons précieuses, la mièvrerie et tout à côté la pruderie, le sourire demi-mondain et tout à la fois demi-monastique ; on respire là un délicat parfum féminin conservé et vieilli sous la guimpe : « Elle était si charitable et si compatissante — qu’elle pleurait si par hasard elle voyait une souris — dans le piége, blessée ou morte. — Elle avait de petits chiens qu’elle nourrissait — de viande rôtie, de lait, de pain de fine farine. — Elle pleurait amèrement si l’un d’eux mourait — ou si quelqu’un leur donnait un méchant coup de bâton. — Elle était toute conscience et tendre cœur. » Beaucoup de vieilles filles se jettent dans ces affections, faute d’autre issue.
Au seuil de vivre, Zola n’a donc pas connu, comme tant d’adolescents modernes, cette atroce, cette infernale mélancolie qui jette en eux la fièvre et le trouble, pour toute leur existence. […] La sève ancestrale se divise en deux grandes branches, d’un côté la branche légitime, forte et puissante, aboutissant à Eugène Rougon, « l’aigle de la famille se dégage des vulgaires intérêts, aimant la force pour la force et conquérant Paris en vieilles bottes » ; de l’autre, la branche bâtarde, pleine de vitalité et de sang, elle aussi, mais qui, jetée dans les bas-fonds prolétariens, victime de l’alcool, de la faim, de la misère finit par produire les Gervaise Macquart, les Lantier ou les Nana, ces déchets de l’arbre social. […] De pâles lueurs déjà frissonnent à l’horizon, des souffles plus frais passent sur le vieux monde étonné, religions et morales éclatent au vent, la Science marche, à pas prudents et majestueux ; le terrain conquis ne sera plus perdu, et bientôt y seront jetées les fondations du futur édifice social.
Car tu ne seras point une de ces créatures à deux pieds qui fourmillent sur le pavé des villes, n’ayant cure que de grignoter le morceau de pain qu’ils mendient et qu’on leur jette ; pas plus tu ne feras partie de ces millionnaires ennuyés qui agonisent dans la faim de leur spleen. […] Si nous devons le constater, ce n’est point pour jeter l’outrage à ceux dont les barques descendent au gré du courant des heures, mais plutôt pour trouver, dans la vision de leur départ, un peu de cette intelligence de la vie que seule donne la contemplation sereine et désintéressée des choses qui passent. […] Pour le savoir, et puisque nous devons tenir compte des faits, il est indispensable de jeter un rapide coup d’œil sur l’histoire littéraire qui nous précède et sur les divers aspects de la tradition avec laquelle nous devons compter.
Le double mystère de son immensité et de son éternité l’emplissait de crainte et le jetait en extase. […] C’est parce qu’on leur jette leur titre comme une injure, et parce que c’est un dogme dans certaines régions de la presse que l’éducation normalienne étouffe par avance toute espèce d’originalité. […] Jules Lemaître, à la manière de ceux chez qui sont développées surtout les facultés d’analyse et de réflexion, part d’une idée sur laquelle il jette ensuite le voile léger d’une fiction. […] Que si enfin nous voulions, au lieu de nous confiner toujours dans l’horizon de notre vie française, jeter les regards hors de chez nous, les mêmes conclusions s’imposeraient à nous avec beaucoup plus de force. […] Non seulement ils lui sont devenus étrangers, mais, à force de lui jeter l’ainathème et de l’irriter par de continuelles dénonciations, ils ont pris le meilleur moyen pour faire de ce siècle l’ennemi irréconciliable de l’Église.
La terreur religieuse n’est pas un vain mot : le tonnerre jette le chien dans les jambes de son maître, et le chien n’a pas d’imagination. […] On s’accorde même à dire que, si un paria jetait les yeux sur les ustensiles d’une cuisine, ils devraient être remplacés. […] Sageret, justifie la réputation de folie qu’on faisait à Fourier et jette la suspicion sur son œuvre entière. […] Courtier, si des fraudes dûment constatées risquent de jeter la suspicion sur tous les phénomènes ? […] L’un se jette à l’eau, à la tête d’un cheval, arrête le bras, etc. ; l’autre regarde comment cela va se passer.
Entre deux idées de savant, dit Jules Romains, il n’hésite pas à jeter une de ces « vues brillantes » qui témoignent, à coup sûr, d’une grande activité de pensée, qu’on a envie de déclarer géniales, mais qu’on ne range pas ensuite dans le même coin de l’esprit que la bonne monnaie scientifique. […] Au lieu des expressions abstraites « temps où j’étais heureux », « temps où j’étais aimé », qu’il avait souvent prononcées jusque-là et sans trop souffrir, car son intelligence n’y avait enfermé du passé que de prétendus extraits qui n’en conservaient rien, il retrouva tout ce qui de ce bonheur perdu avait fixé à jamais la spécifique et volatile essence ; il revit tout, les pétales neigeux et frisés du chrysanthème qu’elle lui avait jeté dans sa voiture, qu’il avait gardé contre ses lèvres — l’adresse en relief de la « Maison Dorée » sur la lettre où il avait lu : « Ma main tremble si fort en vous écrivant » — le rapprochement de ses sourcils quand elle lui avait dit d’un air suppliant : « Ce n’est pas dans trop longtemps que vous me ferez signe ? […] Proust ne cherchait jamais à arriver à ses fins, à obtenir ce qu’il désirait que par une politique extrêmement compliquée, que par tout un système d’invitations, de rétractations et de ruses qu’il jetait sur le réel comme un filet pour le ramener à lui. […] Alors l’être avec qui nous nous plaisons à ce moment-là, le sort en est jeté, c’est lui que nous aimerons. […] Au lieu des expressions abstraites « temps où j’étais heureux », « temps où j’étais aimé », qu’il avait souvent prononcées jusque-là et sans trop souffrir, car son intelligence n’y avait enfermé du passé que de prétendus extraits qui n’en conservaient rien, il retrouva tout ce qui de ce bonheur perdu avait fixé à jamais la spécifique et volatile essence ; il revit tout, les pétales neigeux et frisés du chrysanthème qu’elle lui avait jeté dans sa voiture, qu’il avait gardé contre ses lèvres — l’adresse en relief de la « Maison Dorée » sur la lettre où il avait lu : « Ma main tremble si fort en vous écrivant » — le rapprochement de ses sourcils quand elle lui avait dit d’un air suppliant : « Ce n’est pas dans trop longtemps que vous me ferez signe ?
Leur philosophie, leur dilettantisme (un peu grêle) qui donnèrent de l’agacement à quantité d’honnêtes personnes, avaient jeté les jeunes hommes dans le ravissement. […] Mais il faut croire que Poccancy n’était pas né courtisan et n’eût jamais avancé beaucoup ses affaires à Versailles puisqu’il n’avait pas compris, en ce soir décisif, le regard que son maître avait jeté sur son amie. […] On voit dans le bassin les pièces de monnaie qu’y jettent au départ les voyageurs pour s’assurer du retour. » Qu’il s’agisse de peindre non plus des fontaines, mais le caractère d’un homme, M. de Régnier appliquera les mêmes touches. […] Avec quel cœur et de quelle fougue ils se jettent dans la vie, jaloux d’en épuiser toute la substance ! […] Pas de pessimisme, pas de lourde caricature : une franche et rieuse malice jette sur ces figures de petits rentiers, de hobereaux, de prêtres, de notaires et de médecins de campagne une clarté qui ne les fait paraître ni plus beaux ni plus laids qu’ils ne sont en vérité.
Dès le lendemain de la guerre, l’Allemagne se jetait dans les liras de l’Amérique, optant d’ailleurs en masse pour un américanisme théorique, qui lui a apporté les mêmes désillusions qu’à l’Amérique elle-même, mais qui y a laissé des traces profondes. […] La hiérarchie condamna ces aspirations insolites, brisa Lamennais, mais Gracchus jeta vers le ciel la poignée de poussière d’où naquirent plusieurs Marius. […] La loi de classe, le fait même de leur recrutement populaire, avait jeté les boursiers d’École et de Faculté (à bien des exceptions près, évidemment) du côté de la démocratie. […] Léon Blum porte de l’autre côté des Alpes le regard que nos princes lorrains et leur suite jettent de l’autre côté du Rhin (mais la dictature n’a-t-elle pas autant de chances que le parlementarisme de revenir à sa première direction socialiste). […] La Révolution croit à la justice sur la terre, et son fleuve individualiste va de ce fait se jeter dans la mer socialiste.
L’Espagnol catholique et exalté se représente la vie à la façon des croisés, des amoureux et des chevaliers, et, abandonnant le travail, la liberté et la science, se jette, à la suite de son inquisition et de son roi, dans la guerre fanatique, dans l’oisiveté romanesque, dans l’obéissance superstitieuse et passionnée, dans l’ignorance volontaire et irrémédiable1325. […] Liverpool, Manchester et une dizaine de villes de quarante à cent mille âmes germent comme une végétation sur le bassin du Lancashire ; jetez les yeux sur la carte, et voyez les districts teintés de noir, Glasgow, Newcastle, Birmingham, le pays de Galles, toute l’Irlande, qui n’est qu’un bloc de charbon.
Ce feu sacré, emprunté à d’autres, jetait par moment quelques flammes dans ses strophes, mais il ne brûlait pas dans son sein. […] » Et, franchissant tout à coup les temps, il se transporte en pensée au milieu de cette prophétie déjà accomplie, il jette les cris d’horreur et de pitié d’un champ de bataille.
En tout, c’était la figure de Werther, amoureux, pensif, désespéré, tel que le capricieux génie de Goethe venait de le jeter dans l’imagination de l’Europe pour y vivre longtemps de ses larmes et de son sang. […] J’entendis ses cris, et je rentrai dans ma tour plus mort que vif ; mes genoux tremblants ne pouvaient me soutenir : je me jetai sur mon lit dans un état impossible à décrire.
Possesseur d’une belle fortune, il pouvait le faire honorablement sans avoir l’intention de jeter son argent par la portière de sa voiture : il alla d’abord à Vienne où il rencontra le prince Eugène, ce Coriolan, qui n’avait pas épargné sa patrie ; de là il passa en Hongrie et ensuite en Italie ; il connut à Venise l’Écossais Law, tout meurtri des ricochets de son système, bombe éclatée entre ses mains, mais qui n’était pas un financier vulgaire ; il s’y entretint aussi avec le comte de Bonneval, aventurier destiné à mourir pacha. […] Pour peu qu’on voie les choses avec une certaine étendue, les saillies s’évanouissent ; elles ne naissent d’ordinaire que parce que l’esprit se jette tout d’un côté et abandonne tous les autres.
N’est-ce pas une nouveauté admirable, à cette époque de notre littérature et de notre langue que cette courte et frappante description du Nil : « Ce flum (fleuve), dit Joinville, est divers de toutes autres rivières ; car quant viennent les autres rivieres aval, et plus y chieent (tombent) de petites rivieres et de petitz ruissiaus, et en ce flum (fleuve) n’en chiet nulles ; aincois avient ainsi que il vient tout en un chanel jusques en Egypte, et lors gete (jette) de lises branches qui s’espandent parmi Egypte, Et quant ce vient après la saint Remy, les sept rivieres s’espandent par le païs, et cuevrent les terres pleinnes ; et quant elles se retroient, les gaungneurs (laboureurs) vont chascun labourer en sa terre à une charue sanz rouelles (roues) ; de quoy ils treuvent dedens la terre les fourmens, les orges, les comminz, le ris ; et vivent si bien que nulz n’i sauroit quémander ; ne se scet l’en dont celle treuve (trouvaille) vient mez que de la volenté Dieu… L’yaue (l’eau) du flum est de telle nature, que, quant nous la pendion en poz de terre blans que l’en fait ou pais, aus cordes de nos paveillons, l’yaue devenoit ou (au) chaut du jour aussi froide comme de fonteinne. […] Mais là il fut frappé d’une flèche au gros du bras, sous l’épaule, mortellement, en sorte qu’il commença à jeter beaucoup de sang.
Quand on quitte les Pensées pour les Provinciales, on éprouve du soulagement, un peu pour soi-même, au sortir des méditations douloureuses où nous jettent les Pensées, un peu pour Pascal, parce qu’il semble, dans les Provinciales, tirer quelque contentement de cette raison qui le rend si misérable dans les Pensées. […] Mais les Provinciales n’enfoncent pas si avant que les Pensées ; elles ne jettent point dans la réflexion et la rêverie ; elles s’adressent, pour ainsi dire, à ce qui est toujours prêt en nous, à la raison courante, à la conscience d’habitude, à ce sentiment du ridicule qui cherche sans cesse où se prendre.
Cette amitié, il s’en fait honneur devant tous ; il en fatigue les jésuites qui le viennent visiter à Auteuil ; les échos de son jardin retentissent de tout ce qu’il dit, non seulement du génie d’Arnauld, de l’étendue de ses connaissances, deux points sur lesquels les jésuites sont d’accord avec lui, mais d’autres qualités qui leur font jeter les hauts cris, la droiture de son esprit, la candeur de son âme, la pureté de ses intentions. […] Nous ne sommes si attentifs aux pensées de Pascal et de La Rochefoucauld, que parce que leur rareté nous surprend, ou que leur profondeur nous jette dans la rêverie.
Peut-être irait-il même jusqu’à encourager des hommes d’un plus fort génie à se jeter dans la carrière ! […] Même sans le vouloir, on en subit l’impression ; on est comme un passant jeté par hasard au milieu d’authentiques réjouissances.
L’Allemagne des grands maîtres, que nous applaudissons en France chaque jour, comme nous sommes prêts à applaudir les maîtres allemands nouveaux qui n’ont point personnalisé l’injure jetée par un vainqueur à notre patrie vaincue, l’Allemagne patriote me comprendrait mieux, si je m’adressais à elle, que certains Français ! […] Cela ne veut pas dire que nous approuvions unanimement cette tentative, mais nous sommes unanimes à ne pas vouloir jeter notre Association dans ce conflit.
Pourquoi venir jeter sa destinée individuelle dans le courant de passions, de préjugés, d’instincts, de nécessités, qui doivent tout entraîner ? […] Alors on jette pêlemêle sous la hache du bourreau les ennemis malgré leur faiblesse, les amis malgré leur dévouement, Vergniaud, Condorcet, Camille Desmoulins, Danton, Mme Roland, après Louis XVI et Marie-Antoinette.
Ce n’était pas le compte de Voltaire, qui prétendait, et avec raison, peindre, animer ses tableaux, tenir le lecteur en haleine et les yeux attachés sur les principaux personnages : « Je jetterais mon ouvrage au feu, si je croyais qu’il fût regardé comme l’ouvrage d’un homme d’esprit… J’ai voulu émouvoir, même dans l’histoire.
Quand je vois ces qualités et ces défauts de l’historien d’une époque finissante, cet arrangement élégant et peigné, ces comparaisons disparates où les images d’Endymion ou de tel autre personnage mythologique sont jetées à travers les événements les plus positifs et les plus désastreux de l’histoire, je les oppose aux qualités et aux défauts du narrateur français qui commence, à cette simplicité grave, sèche et roide, mais parfois épique, et je me demande : « Lequel des deux est véritablement le plus voisin d’Homère ou d’Hérodote ?
Quand il s’agit de transférer l’établissement de Rueil à Noisy, elle ne veut pas qu’on se jette dans les superfluités ni qu’on renouvelle toutes choses : Conservez bien tout ce que vous avez pour l’autel, car j’ai dit que nous ne voulions point qu’on en fît, et que nous arrangerions les dedans à notre fantaisie ; je connais MM. les architectes du roi, ils nous accommoderaient de la façon du monde la plus régulière pour la symétrie et la plus incommode ; ne perdons pas le moindre banc et la plus petite chaise de paille ; tout nous servira, et nous en demanderons moins, qui est pour moi le souverain bonheur.
Ce qui est tout sérieux, ce qui est bien conforme à l’esprit intérieur, c’est sa méditation perpétuelle de l’Écriture dès qu’il sentit que le terme de sa vie était proche. « Il avait pris une grande dévotion à réciter souvent le psaume XXI : Mon Dieu, mon Dieu, jetez sur moi votre regard ; pourquoi m’avez-vous abandonné ?
Il fit une maladie grave et qui mit ses jours en danger en 1739 ; les lettres que lui adresse Vauvenargues à ce sujet sont les plus précieuses de cette correspondance, en ce qu’elles jettent quelque lumière sur les vrais sentiments en matière de religion et les croyances de celui qui les écrivait.
Et Roger que ce nous négligemment jeté a déjà mordu au cœur, et que bouleverse la seule attente, se met à décrire le conflit fiévreux de sentiments contraires, de terreurs, d’espoirs confus et d’amertumes qui lui bouillonnaient dans le cerveau : Mais ce n’était rien auprès de ce que je devais éprouver à cette table trop étroite où, sous les nappes de clarté qui s’échappaient des globes des lampes, nul convive ne pouvait dérober à personne les pensées qui plissaient son front.
Son dix-septième volume, qui est peut-être le plus beau de tous, et qui est certainement le plus émouvant, le plus poignant d’intérêt pour tout cœur français, comprend les événements des deux derniers mois de 1813 et des quatre premiers de 1814 : il ne reste plus à l’auteur, pour clore entièrement son œuvre, qu’à écrire l’histoire des Cent-Jours, cette histoire pénible, où d’autres, avides de désastres, se sont jetés avant lui, où lui il n’arrive qu’à regret et comme par nécessité, et où, venant le dernier, il saura apporter, sur des points encore controversés, des lumières, à quelques égards nouvelles et peut-être décisives.
C’était (et il le sentait bien tout en y cédant) s’être jeté, de gaieté de cœur, dans un conflit et un courant de difficultés presque impossible à surmonter pour aucun autre, plus impossible encore pour lui avec son caractère.
Ballanche, mais le poète, obéissant à sa naturedans cette imitation même, avait jeté là, spontanément, la fleur de son âme.
Veuillot pour de très-beaux vers encore, et cette fois des vers de cœur et de sensibilité qui se trouvent jetés comme au hasard entre des pages de prose.
Il commence par l’attaque du camp de la Perche, que les Espagnols avaient établi pour arriver à battre les remparts de Mont-Louis ; il les en chasse, et se jette le lendemain dans la Cerdagne espagnole.
On sait que Mirabeau avait bien des collaborateurs ; chacun lui aidait, lui apportait, qui une idée, qui une citation, un renseignement, un à-propos, et il pétrissait tout de sa puissante main, il animait tout de son souffle ardent, et vivifié, transformé, le jetait ensuite en pâture au monde.
Ce fut, comme tant d’autres, l’intérêt unique de son ambition qui le jeta, dans cette voie.
Ici de belles pages plus générales viennent consoler, cependant, de cette histoire allégorique et mystique si prolongée, et qui nous paraît, malgré tout, un peu dure : c’est un coup d’œil jeté sur l’état du monde avant la venue du Messie, sur la préparation graduelle des esprits à le recevoir.
Il a jeté un bon germe dans les cœurs.
Dès le début, nommé membre de l’Assemblée par le clergé de son diocèse, il donne son programme dans un discours remarquable, tout pratique, où, sans se jeter dans le vague des théories, il résume les principales réformes et les améliorations qu’il estime nécessaires, et qui ont été depuis en partie gagnées définitivement et conquises, en partie aussi outrepassées ou reperdues.
Alfred de Musset, que s’il jetait souvent à la face du siècle d’étincelantes satires comme la dernière sur la Paresse, que s’il livrait plus souvent aux amis de l’idéal et du rêve des méditations comme sa Nuit de Mai, il serait peut-être en grande chance de faire infidélité à son groupe, et de passer, lui aussi, le plus jeune des glorieux, à l’auréole pleine et distincte154.
Telle grosse question métaphysique y trouvera sa solution : par exemple, on verra, dans une note de cet ouvrage, quelles lumières la névropathie cérébro-cardiaque, décrite par le Dr Krishaber, jette sur la formation et sur les éléments de la notion du moi.
Cet esprit a besoin d’être dans l’opposition extrême pour trouver tout son emploi, pour jeter tout son éclat, pour valoir tout son prix, pour sortir et se déployer tout entier.
Arrivé en présence de Sa Majesté, il jetait son manteau par terre, et il chantait une chanson bien propre à mettre ses partenaires en émoi.
On connaîtra le Florilège, et le public à qui Mallarmé fut un nom jeté il y a quelques années en risée viendra, avec sérieux, lire ces Morceaux choisis, comme il a fait ceux de Verlaine, l’an d’avant.
Or je le réimprime : « Il y a ceux dont la clameur jeta l’idée sur le déploiement des villes grises et bleuâtres, par-dessus les dômes des académies, les colonnes de victoire, les jardins d’amour, les halles en fer du commerce, les astres électriques éclairant les essors des express ou les remous nerveux des foules, jusque les océans de sillons fructueux, jusque les gestes du semeur et l’effort solitaire du labour, jusqu’aux lentes pensées du rustre fumant contre l’âtre, jusqu’à l’espoir du marin penché aux bastingages pour suivre la palpitation lumineuse de la mer. » Voyez-vous là un mot inintelligible ?
Il ne me reste plus qu’à jeter mes vues ailleurs, si toutefois… mais saurons-nous jamais le dernier mot de cette affaire ?
Mais que le gouvernement qui à cet égard est sans péché jette à Pilate la première pierre.
« C’est une manière, disait-elle, de mettre du passé devant l’amitié. » Sa liaison avec Mme de Staël, avec Mme de Moreau, avec les blessés et les vaincus, la jeta de bonne heure dans l’opposition à l’Empire, mais il y eut un moment où elle n’avait pas pris encore de couleur.
Il suppose toujours les principes, ou les établit en deux mots, & se jette sur la morale : il préfère le sentiment à tout : il remplit l’ame de cette émotion vive & salutaire, qui nous fait aimer la vertu.
La société royale de Londres fondée sous Charles II, jetait les fondemens de la vraie physique établie sur les expériences et sur les faits.
Des délégations de tous les pays venaient trouver ce châtelain de Ferney, toujours plus jeune sous le redoublement des années, et recevoir la parole d’émancipation de cette bouche qui avait si fréquemment jeté le cri de la pitié et de l’humanité méconnues.
Lorsqu’on jette les yeux sur les progrès de l’esprit humain depuis l’invention de l’imprimerie, après cette longue suite de siècles où il est resté enseveli dans les plus profondes ténèbres, on remarque d’abord, qu’après la renaissance des lettres en Italie, la bonne culture, les meilleures écoles se sont établies dans les pays protestants, de préférence aux pays qui ont conservé la religion romaine, et qu’elles y ont fait jusqu’à ce jour les progrès les plus sensibles.
Un jour, cependant, Barbey d’Aurevilly, qui professait pour lui une grande admiration littéraire et une vive sympathie intellectuelle, ne put se tenir de le tancer vertement pour avoir présenté un de ses livres sous ce titre : les Plateaux de la Balance, image usée, vulgaire et jetée au rebut des allocutions de comices agricoles.
Jeté au milieu du monde civilisé, dans un moment de trouble, il voulut se créer un monde barbare, pour régner plus à son aise.
Malgré cet habit de ministre anglican que sa naissance lui jeta sur les épaules, c’était un chrétien de l’Évangile dans le pays de la Bible, un chrétien qui aurait dit si bien à l’Église : « Ma mère !
Laromiguière le charma et le jeta dans la philosophie.
S’étreindre, c’est se jeter à deux dans la mort-mais avec la faculté d’en revenir et de s’en souvenir… ceux qui accomplissent le rite sans croire, l’acte sans aimer, ne songent qu’à l’agrément de cette névrose et non à la conséquence métaphysique et tragique de l’étreinte. « Mais l’acte d’amour vrai » cette seconde de la projection vitale n’étant qu’un éclair entre deux infinis, qu’est-ce donc que l’idée de possession ?
. — Mais, à chaque instant, des vues lumineuses et de haute politique générale sillonnent le sujet et élargissent les horizons : « Il est bon, dit le publiciste, en tout ceci purement judicieux, qu’une quantité considérable de nobles se jette dans toutes les carrières en concurrence avec le second ordre ; non-seulement la noblesse illustre les emplois qu’elle occupe, mais par sa présence elle unit tous les états, et par son influence elle empêche tous les corps dont elle fait partie de se cantonner… C’est ainsi qu’en Angleterre la portion de la noblesse qui entre dans la Chambre des communes tempère l’âcreté délétère du principe démocratique qui doit essentiellement y résider, et qui brûlerait infailliblement la Constitution sans cet amalgame précieux. » Et plus loin : « Observez en passant qu’un des grands avantages de la noblesse, c’est qu’il y ait dans l’État quelque chose de plus précieux que l’or187. » Il raille de ce bon rire, qui s’essaye d’abord comme en famille, ses compatriotes devenus les citoyens tricolores, et se moque des raisonnements sur les assignats : « Lorsque je lis des raisonnements de cette force, je suis tenté de pardonner à Juvénal d’avoir dit en parlant d’un sot de son temps : Ciceronem Allobroga dixit 188 ; et à Thomas Corneille d’avoir dit dans une comédie en parlant d’un autre sot : Il est pis qu’Allobroge. » Mais déjà il passe à tout moment la frontière et ne se retient pas sur le compte de la grande nation : « Quand on voit ces prétendus législateurs de la France prendre des institutions anglaises sur leur sol natal et les transporter brusquement chez eux, on ne peut s’empêcher de songer à ce général romain qui fit enlever un cadran solaire à Syracuse et vint le placer à Rome, sans s’inquiéter le moins du monde de la latitude. […] Si vous êtes catholiques, essayez un peu de jeter à la poste une lettre adressée à Sa Sainteté, le Pape, à Rome, vous verrez si elle arrivera. […] Il faut surtout voir, dans la plupart de ses paradoxes, des chicanes d’érudition, des contre-parties neuves qu’il faisait à la déclamation du ses adversaires, pour les jeter en colère et hors d’eux-mêmes : c’était un démenti bien retentissant qu’il leur lançait jusque sur leur point le plus fort, pour les faire délirer. […] Que d’autres invoquent donc tant qu’il leur plaira la parole muette, nous rirons en paix de ce faux Dieu, attendant toujours avec une tendre impatience le moment où ses partisans détrompés se jetteront dans nos bras, ouverts bientôt depuis trois siècles. » Tout ce passage est d’un bel accent.
Il jette ses figures, les groupe et les plie à volonté avec la hardiesse de Michel-Ange et la fécondité de Rubens. […] Pour se bien faire une idée du trouble profond que le tableau de Dante et Virgile dut jeter dans les esprits d’alors, de l’étonnement, de l’abasourdissement, de la colère, du hourra, des injures, de l’enthousiasme et des éclats de rire insolents qui entourèrent ce beau tableau, vrai signal d’une révolution, il faut se rappeler que dans l’atelier de M. […] En général, et pour la plupart des gens, nommer Eugène Delacroix, c’est jeter dans leur esprit je ne sais quelles idées vagues de fougue mal dirigée, de turbulence, d’inspiration aventurière, de désordre même ; et pour ces messieurs qui font la majorité du public, le hasard, honnête et complaisant serviteur du génie, joue un grand rôle dans ses plus heureuses compositions. […] Les partisans contraires, les naturalistes et les coloristes, sont bien plus populaires et ont jeté bien plus d’éclat.
Mais quel érudit jetterait sur le Léonard authentique un rayon de lumière plus lointain que cette simple phrase : « Il abandonne les débris d’on ne sait quels grands jeux ? […] Le créateur des images sent que d’une réalité à une autre on peut toujours établir le pont d’une « métaphore », et que la capacité de φερειν, limitée chez l’homme ordinaire à la faculté de jeter une passerelle sur un ruisseau, devient chez un Hugo la puissance de lancer le pont sur la Manche, ou de creuser le canal de Suez, c’est-à-dire de réunir par l’art ce que la nature sociale sépare. […] Viendra l’heureuse surprise, Une colombe, la brise, L’ébranlement le plus doux, Feront tomber cette pluie Où l’on se jette à genoux ! […] J’ai quelque jour, dans l’Océan, (Mais je ne sais plus sous quels cieux) Jeté, comme offrande au néant, Tout un peu de vin précieux...
Les savants, artistes, penseurs gouverneront, les propriétaires les aideront de leur argent, « s’ils ne veulent vas que les premiers, comme en 1789, jettent le peuple sur les seconds ». — Du reste les propriétaires ne contribueront pas au gouvernement seulement comme tributaires ; le gouvernement temporel (pouvoir exécutif ?) […] En tout cas, notre siècle s’y est jeté de tout son cœur, de grandes œuvres ont été inspirées par cet esprit, et Ballanche a été le premier instigateur de ce mouvement intellectuel. […] Le premier soin était excellent, et, quand, après lui, plus précisément, plus modestement, et sans prétendre tout embrasser, on a creusé au même sillon, c’est toute une science, qui restera toujours hypothétique, mais qui jette beaucoup de lumières dans l’étude de l’esprit humain et dans la connaissance des choses morales, qui finira par être instituée. […] Jeté dans l’action, il faudra qu’il dise, et un peu qu’il sache, avec qui il est dans la grande mêlée des partis, religieux et philosophiques. […] Cela jette une étrange confusion et déroute l’esprit du lecteur.
On m’a, s’il m’en souvient, tant jeté à la tête Ronsard, que j’ai de la peine à ne pas dire mon Ronsard. […] Dieu avoit jeté une amertume salutaire sur ses occupations mondaines, et elle est morte après avoir souffert dans la solitude, avec une piété admirable, les rigueurs de ses infirmités, y ayant été fort aidée par M. l’abbé Du Guet et par quelques-uns de Messieurs de Port-Royal qu’elle avoit en grande vénération, ce qui a fait dire mille biens d’eux par Mme la comtesse de Grammont qui estime fort Port-Royal et ne s’en cache pas…. » 125.
La mort prochaine jette son ombre avancée sur l’amour et donne à ce sentiment souvent fugitif quelque chose de l’éternité. […] XXXIV Qu’y a-t-il dans tout cela, dans ce jeune lévite, dans cette belle fiancée, dans ces quelques sonnets écrits sous une grotte, jetés au vent de la Sorgues et recueillis par les couples amoureux d’Avignon, qui soit de nature à perpétuer son contrecoup et son bruit à travers les siècles ?
Puis il nous semble que Beethoven, éperdu de cette profonde joie intime, jette au monde extérieur un regard pénétré d’une indicible sérénité. […] Schopenhauer dit : « Chaque œuvre d’art s’efforce à nous montrer les choses telles qu’elles sont en vérité et en réalité, mais telles qu’elles ne peuvent être reconnues par chacun, à cause du voile que jettent autour d’elles les impressions fortuites, de nature objective ou subjective.
L’étonnement de la multitude, le venin de l’envie jettent leurs ombres jusque dans le cœur de la femme aimante ; le doute et la jalousie lui prouvent qu’il ne peut pas être compris, mais seulement adoré, alors il avoue sa divinité, et retourne anéanti dans sa solitude. » Wagner allait entreprendre l’exécution définitive de Lohengrin, quand des doutes lui furent suggérés sur cette conception qui le passionnait. […] Il est venu jeter le trouble dans le cœur d’une jeune fille, et parce que celle-ci, avant de s’abandonner, veut savoir à qui elle se donne, il lui tourne le dos pour retourner jouir tranquillement de sa divinité !
Micawber, à l’instigation de sa femme, prend la résolution de jeter le gant à la société, la sommant de lui donner une position digne de ses talents. […] De même qu’un auteur de cette espèce ne peut avoir du monde qu’une connaissance incomplète et partiale, il ne verra des hommes que certains gros côtés extérieurs et les verra déformés, enlaidis ou embellis, selon qu’à première vue ils lui plaisent ou déplaisent, dans l’immédiat retour que l’homme sentimental exécute après chaque regard jeté au dehors.
Je vous conjure donc, mon cher neveu, d’avoir pitié de votre âme, et de rentrer dans votre cœur pour y considérer sérieusement dans quel abîme vous vous êtes jeté. […] Nous ne jetterons qu’un coup d’œil rapide sur cette idylle héroïque et sacrée d’Esther, qui n’est remarquable que parce qu’elle est la première inspiration originale et biblique de Racine, et le premier prélude à son style sacré.
Mais c’est aussi pourquoi, si la pompe quasi liturgique des Mystères a d’abord continué dans la rue les cérémonies que l’on célébrait dans l’intérieur de l’église ; s’ils ont été, comme les processions, une manière d’intéresser les sens du populaire, son avidité naturelle de divertissements et de spectacle à la durée de la religion ; et enfin, s’ils ne sont morts, comme on le montrerait, que de l’anathème que l’Église a jeté sur eux, on peut dire et il faut dire que, comme la poésie, courtoise exprimait l’idéal de la noblesse et les Fabliaux celui du vilain, pareillement les Mystères ont commencé par exprimer l’idéal du clergé. […] — Impossibilité de répondre à la question ; — et si cette impossibilité ne jette pas quelque doute sur la prétendue « continuité » de l’évolution dramatique au Moyen Âge. — Qu’en tout cas les deux pièces qui nous restent du xiiie siècle [le Jeu de saint Nicolas, de Jean Bodel, et le Miracle de Théophile, de Rutebeuf] ne rétablissent pas la continuité ; — non plus que les Miracles de Notre-Dame ; — lesquels n’ont avec les Mystères qu’un rapport éloigné.
On y trouve l’action fatale et funeste de la société américaine sur un génie qui devait naître ailleurs pour s’épanouir dans toute sa gloire et qui valait mieux que le sol de limaille de fer et de poussière où Dieu l’avait jeté. […] Il pouvait être le frère de charité, l’ensevelisseur des restes d’un homme de génie, sans les jeter à la tête de tout un pays qui, en définitive, ne l’a point volontairement assassiné.
La populace, qui ne connaissait dans Molière que le comédien, et qui ignorait qu’il avait été un excellent auteur, un philosophe, un grand homme en son genre, s’attroupa en foule à la porte de sa maison le jour du convoi : sa veuve fut obligée de jeter de l’argent par les fenêtres ; et ces misérables, qui auraient, sans savoir pourquoi, troublé l’enterrement, accompagnèrent le corps avec respect. […] Plus on la vit, et plus on admira comment Molière avait pu jeter tant de comique sur un sujet qui paraissait fournir plus de pédanterie que d’agrément.
Et tous se précipitèrent, ceux des moindres vaisseaux sautèrent au rivage, et ceux des grands vaisseaux se jetèrent dans les barques, et tous abordaient à l’envi, à qui mieux mieux… La ville impériale ne fut pas prise ce jour-là ; mais l’action du vieux doge subsiste dans toute sa grandeur.
Tantôt nous pensions que les miroirs avaient été mal dirigés, ou que quelque coup de vent avait emporté la cabane et l’avait jetée dans la mer ; car nous avions déjà perdu plusieurs tentes par de semblables accidents, et nous n’avions pu en préserver notre pauvre cabane qu’en passant par-dessus des câbles et la liant au rocher.
. — Un autre chapitre, jeté dans le même moule, et à la Montesquieu, est encore celui où l’auteur semble prophétiser sur l’Amérique : « Si l’on découvrait une vaste contrée dont le sol neuf et fertile n’attendît que les plus légers travaux, etc. » Les derniers chapitres du livre, ceux surtout qui ont été ajoutés dans la seconde édition, en 1789, à la veille des États généraux, contiennent des idées d’avenir, notamment sur la milice, sur le tirage au sort de tous les citoyens.
En même temps qu’il admet que le souvenir du Déluge se montre partout comme un fait historique conservé par la tradition et dont l’idée funeste ne serait point venue naturellement à l’homme, il reconnaît que le souvenir de l’âge d’or peut être le produit d’une imagination heureuse et complaisante qui jette des reflets sur le passé, et pourtant il répugne à y voir une pure fiction : « J’y vois les embellissements de l’imagination, dit-il, mais j’y crois découvrir un fond réel.
Dans son trajet de l’abbaye d’Engelberg au Dittlisberg, Ramond rencontre bien des difficultés, des dangers, mais aussi de ces jouissances sans nom qu’il décrit de la sorte : Du haut de notre rocher, nous avions une de ces vues dont on ne jouit que dans les Alpes les plus élevées : devant nous fuyait une longue et profonde vallée, couverte dans toutes ses parties d’une neige dont la blancheur était sans tache ; çà et là perçaient quelques roches de granit, qui semblaient autant d’îles jetées sur la face d’un océan ; les sommets épouvantables qui bordaient cette vallée, couverts comme elle de neiges et de glaciers, réfléchissaient les rayons du soleil sous toutes les nuances qui sont entre le blanc et l’azur ; ces sommets descendaient par degrés en s’éloignant de nous, et formaient un longue suite d’échelons dont les derniers étaient de la couleur du ciel, dans lequel ils se perdaient.
Charles IX, qui jouerait ici le rôle d’Auguste, n’est qu’un enfant maladif et gouverné ; il aime les vers, il est vrai, et il en commande volontiers à son poète ; mais une Saint-Barthélemy jetée à la traverse fait un terrible contre-temps.
Mais aussi il y a un historien des plus heureusement doués dont le procédé est autre : il lit, il étudie, il se pénètre pendant des mois et quelquefois des années d’un sujet, il en parcourt avec étendue et curiosité toutes les parties même les plus techniques, il le traverse en tous sens, s’attachant aux moindres endroits, aux plus minutieuses circonstances ; il en parle pendant ce temps avec enthousiasme, il en est plein et vous en entretient constamment, il se le répète à lui-même et aux autres ; ce trop de couleur dont il ne veut pas, il le dissipe de la sorte, il le prodigue en paroles, en saillies et en images mêmes qui vaudraient souvent la peine d’être recueillies, car, plume en main, il ne les retrouvera plus : et ce premier feu jeté, quand le moment d’écrire ou de dicter est venu, il épanche une dernière fois et tout d’une haleine son récit facile, naturel, explicatif, développé, imposant de masse et d’ensemble, où il y a bien des négligences sans doute, bien des longueurs, mais des grâces ; où rien ne saurait précisément se citer comme bien écrit, mais où il y a des choses merveilleusement dites, et où, si la brièveté et la haute concision du moraliste font défaut par moments, si l’expression surtout prend un certain air de lieu commun là où elle cesse d’être simple et où elle veut s’élever, les grandes parties positives d’administration, de guerre, sont si amplement et si largement traitées, si lumineusement rapportées et déduites, et la marche générale des choses de l’État si bien suivie, que cela suffit pour lui constituer entre les historiens modernes un mérite unique, et pour faire de son livre un monument.
un tout petit ouvrage où j’encadrerais mes pensées, mes points de vue, mes sentiments sur un objet… J’y jetterais ma vie, le trop plein de mon âme qui s’en irait de ce côté.
Et Garat, « qui s’est fait député du Tiers, et qui va être de l’Académie : c’est un pauvre mérite que ce Garat » ; — et le Chamfort, quelle force bel et bien de rétracter une de ses atrocités sur une pauvre morte qui n’est plus là pour se défendre ; — et le Raynal, dont elle se prive très volontiers à la lecture : « Je ne connais que sa conversation, très fatigante, et ses prétentions, très satisfaites : mon âme est naturellement chrétienne, et tout ce qui me ferait perdre ce sentiment, si cela était possible, il m’est facile de m’en abstenir » ; — et Cérutti, qui avait alors son instant de lueur et jetait sa première et dernière étincelle : L’administrateur Cérutti vient d’achever sa rhétorique : il promettait beaucoup, il y a vingt ans ; il n’a pas fait un pas depuis ce temps-là.
Une conversation qu’il eut, en 1632, avec l’abbé de Saint-Cyran, ce chrétien austère, ne contribua pas peu à le remettre à la raison : sous air de l’exhorter à aller en avant dans la carrière ecclésiastique, M. de Saint-Cyran lui fit une telle description du péril où se jettent ceux qui recherchent une si haute élévation sans connaître les perfections et les grands devoirs que Dieu leur impose, qu’il le consterna et le guérit, comme on guérit un malade avec une douche froide : « Au lieu d’accroître mon souci pour cela, il aida merveilleusement à me faire perdre le peu de désir qui m’en pouvait rester, dont je lui aurai une éternelle obligation. » Marolles se contenta désormais d’être le plus paisible et le plus oiseusement occupé des abbés de France, dont il sera le doyen un jour.
j’ai quelque regret d’assister à ces menus détails, je ne blâme point qu’on s’y livre, et même il le faut bien, puisqu’on les exige aujourd’hui et qu’une étude n’est pas censée complète sans cela : mais je regrette qu’ils soient devenus possibles ; je regrette qu’on n’ait pas brûlé, une bonne fois, tous ces brouillons, aussitôt employés, que tous ces copeaux tombés à terre n’aient pas été jetés au feu.
L’important et le difficile, c’est de s’apaiser ensuite à un degré convenable, de guérir sans trop se refroidir, de ne pas s’égarer dans la déraison, de ne pas se fixer dans un fanatisme, de ne pas revenir non plus en sens contraire jusqu’à se jeter dans la négation et la haine de ce qu’on a trop aimé.
jette donc vite ta cape d’hiver et prends-moi ta mantille printanière, tissue de feuilles et de fleurs.
Guizot, qu’il en cherche évidemment l’emploi et les occasions, et qu’à propos des morts de chaque année qu’il passe en revue, il trouve moyen de jeter le filet sur des noms qu’il ne rencontrerait pas directement dans son chemin : on ne se plaint pas du hors-d’œuvre.
Nous rêvions aussi un peu en arrière ; nous jetions un peu de notre enthousiasme et de notre mélancolie dans le passé.
Ce portrait ou Caractère dans le goût de La Bruyère, qui aurait pu sembler à quelques égards un jeu d’esprit et un exercice de littérature, aura désormais à nos yeux tout son sens et sa signification, éclairé qu’il est par la peinture flamboyante de Saint-Simon, qui y jette comme de sanglants reflets.
Simart aimait la sculpture comme ce Florentin aimait sa patrie. » De tels petits à-propos bien jetés sont comme des roues qui marchent d’elles-mêmes et qui font courir le discours.
Remarquez bien que ce Virgile que vous invoquez n’a point procédé ainsi contre les philosophes et théoriciens de son temps, contre le grand Lucrèce qui était bien le plus terrible des négateurs : il ne lui a point jeté la pierre ; il l’a honoré et respecté encore, même en s’en séparant.
Veuillot ; il a cassé les vitres, il a fait, lui aussi, ses Libres Penseurs, et il les a jetés dans la rue à la tête du passant.
Après avoir souri un instant de quelques-unes de ces malices contre les personnes, il n’y tint plus et jeta le livre : « C’est un livre détestable, s’écria-t-il, avilissant pour la France, avilissant pour l’humanité !
Comment la semence, jetée d’abord au vent et portée sur les rivages d’Asie et de Grèce, s’est-elle répandue de proche en proche et a-t-elle germé dans ce vaste champ qui était le monde ?
Mais, ce premier examen terminé et dans le calme profond dont on jouit si pleinement au milieu de la vaste cité aux trois quarts déserte, quelques monuments, quelques peintures revenaient dans la mémoire, en y laissant chaque jour des traces plus profondes ; bientôt ils formaient comme des points lumineux dont les reflets jetaient la clarté jusque sur les objets les plus médiocres en apparence.
Son frère, son unique frère restant de quatorze enfants qu’ils étaient, le chevalier de Belle-Isle, qui ne faisait qu’un avec lui, l’appuyait en tout de sa solidité et de son bon sens ; le maréchal y jetait de sa poudre d’or.
Un reflet de l’éclat que jette la parole du Père Hyacinthe est allé éclairer un tombeau presque oublié, et voilà comment j’ai aujourd’hui à annoncer une édition nouvelle de ces Poésies dont j’avais été le premier à reparler autrefois.
L’Empereur, ayant jeté les yeux sur le rapport du maréchal et sur la lettre de Jomini, lui demanda : « Connaissez-vous l’officier qui m’envoie ce paquet ?
… » Et il se jette, en finissant, sur Castor et Pollux, comme Simonide.
Si, en juin 1829, un jeune homme de vingt ans, inconnu, nous arrivait un matin d’Auxerre ou de Rouen avec un manuscrit contenant le Cantique d’Ézéchias, l’Ode au comte du Luc et la Cantate de Circé, ou l’équivalent, après avoir jeté un coup d’œil sur les trois chefs-d’œuvre, on lui dirait, ce me semble, ou du moins on penserait à part soi : « Ce jeune homme n’est pas dénué d’habitude pour les vers ; il a déjà dû en brûler beaucoup ; il sent assez bien l’harmonie de détail, mais sa strophe est pesante et son vers symétrique.
Millevoye a jeté, sous le titre de Dizains et de Huitains, une certaine quantité d’épigrammes d’un tour heureux, d’une pensée fine ou tendre.
On fera comme la nature, qui jette à profusion les qualités sur chaque objet, et ne souffre pas deux choses semblables dans l’univers.
Il a jeté dans la circulation tous les excellents lieux communs, où consiste la culture supérieure des esprits ; en les vulgarisant, il a mis le public en état de goûter les grandes œuvres dont elles seraient le nécessaire fondement.
Tous, directement ou indirectement, par de violentes attaques ou de sereines spéculations, concourent à jeter l’ancien édifice à bas.
» Pourtant la plupart des maximes, quand elles ne sont pas tout à fait misérables, semblent tout de suite piquantes et ingénieuses — justement parce qu’elles ont un petit air d’oracle, parce qu’on nous les jette à la tête sans explications et sans preuves, parce qu’elles sont, pour ainsi dire, coupées de leurs racines.
Charles Saunier Il suffit de jeter les yeux sur une liste des Quarante depuis la fondation de l’Académie, pour se rendre compte que la Compagnie demeure égale à elle-même.
Si quelqu’un te fait un procès pour ta tunique, abandonne-lui ton manteau 231. » « Si ton œil droit te scandalise, arrache-le et jette-le loin de toi 232. » « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent ; priez pour ceux qui vous persécutent 233. » « Ne jugez pas, et vous ne serez point jugé 234.
L’arrivée de l’abbé de Breteuil, frère de Mme du Châtelet, jette un peu de distraction dans ce régime de Cirey.
Ayons la sincérité et le naturel de nos propres pensées, de nos sentiments, cela se peut toujours ; joignons-y, ce qui est plus difficile, l’élévation, la direction, s’il se peut, vers quelque but haut placé ; et tout en parlant notre langue, en subissant les conditions des âges où nous sommes jetés et où nous puisons notre force comme nos défauts, demandons-nous de temps en temps, le front levé vers les collines et les yeux attachés aux groupes des mortels révérés : Que diraient-ils de nous ?
« Je n’aime pas les scènes », dit-elle un jour un peu brusquement à une femme qui, aux Tuileries, se jetait à ses pieds sur son passage pour la remercier d’un bienfait.
L’Empire tombe en 1814 et en 1815 ; les serviteurs de l’Empire, à peu d’exceptions près, sont jetés de côté à l’instant, et la face de la France gouvernante est renouvelée.
Il suffit pour s’en rendre compte do jeter un regard sur tout ce que l’homme acquiert par le moyen de l’éducation, depuis le langage jusqu’aux notions scientifiques les plus complexes, jusqu’aux jouissances esthétiques les plus hautes.
Dumas, dans sa Philosophie chimique, a jeté çà et là sur ce sujet quelques vues précises et pénétrantes ; M.
Comment l’idée de Maine de Biran aurait-elle pu jeter des racines et se développer dans cette dispersion indéfinie ?
Mais je prétends que celui qui se jette dans l’allégorie s’impose la nécessité de trouver des idées si fortes, si neuves, si frappantes, si sublimes, que sans cette ressource, avec Pallas, Minerve, les grâces, l’amour, la discorde, les furies, tournés et retournés en cent façons diverses, on est froid, obscur, plat et commun.
Toutefois, sur ce point, il y a lieu de faire une distinction qui jettera peut-être quelque lumière sur le débat.
Personne ne doute, à la façon dont Suréna parle, que Corneille ne soit avec Suréna, et que Suréna ne jette au public la pensée même de Corneille.
Un journaliste bruxellois, qui signe, je crois, d’un pseudonyme, me jette à la tête une colonne d’injures.
Tyr n’est plus qu’un cadavre jeté sur le rivage de la mer.
Cela n’a l’air de rien du tout ; c’est une bagatelle en apparence, faite avec des centons de préface, avec des morceaux détachés, jetés ici et là, et ramassés par une main qu’on ne croyait pas si prudente ; mais c’est très gros de visée.
Poudre à la maréchale retrouvée, poudre de riz, poudre d’iris, poudre de perles, poudre de rose et poudre d’or, bleu polonais, rouge de blonde, rouge de brune, maquillages d’idoles japonaises, toutes les poudres de perlimpinpin féminines, toutes les poudres à nous jeter aux yeux poudroient en ces écrits qu’elles ennuagent, colorent et parfument.
ou Cyrano de Bergerac, jette des défis à la tète de son lecteur et qui s’en vante jusque sur la couverture de son livre ?
Nous le connaissons, et l’intérêt que nous lui portons est surtout fait de la curiosité de savoir comment il sortira des difficultés où l’ont jeté ses passions ou les circonstances de la vie.
Mais ce feu, à cause d’un aliment insuffisant, finit par jeter un éclat de plus en plus pâle.
Zola, les moins complexes, les plus simples du monde, n’obéissant jamais qu’à l’impulsion d’un unique appétit, toujours élémentaire, ne connaissant en toute rencontre qu’une seule manière de le manifester, ne raisonnant d’ailleurs jamais avec eux-mêmes, traversent le roman avec l’allure roide et uniforme, les tics mécaniques et les gestes anguleux d’un fantoche ; et le comique naît, irrésistible et énorme, du contraste même entre les situations violentes où le romancier les jette, et l’immobilité de leur physionomie ou la gaucherie de leurs mouvemens.
Cousin à La Rochefoucauld, ce n’est pas pour plaire à Mme de Longueville que vous vous êtes engagé dans la Fronde ; vous vous y êtes jeté de vous-même par la passion du mouvement et de l’intrigue. » — Voulez-vous des rentrées d’éloquence philosophique et de l’indignation vertueuse ?
Est-il vraiment nécessaire, pour réhabiliter le gothique, de jeter la Renaissance et l’art classique aux gémonies ? […] On jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais ». […] Il aurait dû pour cela s’infliger le démenti le plus radical ; et autant aurait valu pour lui tout jeter au feu. […] Il ne le jeta heureusement que dans un tiroir, mais nous n’en avons eu la révélation qu’il y a peu d’années, par l’édition Conard. […] À force de lui jeter des pierres, on lui en a composé un piédestal.
Les plus intelligentes victimes de la débâcle primaire ont jeté leur brevet pour tenir la plume et, ne pouvant être professeurs, se sont faites bas-bleus. […] La librairie parisienne jette sur le marché, en moyenne, quatre à cinq volumes par jour, sans parler des réimpressions et autres livres scientifiques ou spéciaux. […] L’esprit d’autrefois jaillissait en éclairs ; aujourd’hui c’est une poignée de poudre jetée sur du feu. […] Il affirme donc l’amour ; mais c’est uniquement pour le mieux briser, pour le jeter vivant et palpitante l’oubli. […] s’il eût osé parler, quelle déconcertante lumière Chateaubriand eût jetée sur cette pitoyable nature humaine dont les faiblesses sont si compliquées !
Les Montaigne se jetteront toujours dans les Descartes et les Pascal, comme les fleuves dans la mer. […] Pour que la deuxième racine soit coupée, il suffît d’une activité sociale déversée tout entière vers le futur, vers l’action immédiate, et d’un art jeté à l’impression momentanée. […] Et voilà un fait qui n’a pas seulement un intérêt historique, mais qui jettera de la lumière sur la nature même et les nécessités de la critique professionnelle. […] La critique, l’histoire littéraire ont souvent le tort de mêler en une même série, de jeter en un même ordre ce qui se dit, ce qui se chante, ce qui se lit. […] Brunetière, qui savait mal douter, s’appliquait à bien bâtir, à jeter oratoirement, comme Cicéron Branquebalme, des aqueducs romains, et c’est pourquoi il se fit conduire par Bossuet comme Dante par Virgile.
Ses lettres écrites de Calabre jettent par analogie une lumière très significative sur un état d’âme dont nous apercevons à distance la féconde nouveauté. Un Paul-Louis Courier, un Henri Beyle, entraînés à la gymnastique de l’algèbre intellectuelle et purement spéculative, sont tout d’un coup jetés à plein dans l’action la plus violente, mis en contact quotidien avec la réalité la plus dure. […] Dans une de ces bagarres qui jetaient les deux moitiés de la Convention l’une contre l’autre, un Montagnard ayant présenté son pistolet, « Lauze de Perret », nous dit un assistant, « tira l’épée ». […] Je cherche des faits ; quand j’en ai trouvé un, je le pique avec mon croc et je le jette dans ma hotte. » Voilà le savant. […] Jetez-le, pendant des mois, au plein d’une mêlée comme l’humanité n’en a pas connu.
Je serais un grand sot de le jeter, ou de le négliger, ou de le diminuer, ou de le laisser diminuer en mes mains. […] Avait, en s’en allant, négligemment jeté Cette faucille d’or dans le champ des étoiles. […] Tout reposait dans Ur et dans Jérimadeth ; Les astres émaillaient le ciel profond et sombre ; Le croissant fin et clair parmi ces fleurs de l’ombre Brillait à l’occident, et Ruth se demandait, Immobile, ouvrant l’œil à moitié sous ses voiles, Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été Avait, en s’en allant, négligemment jeté Un temps. […] Il peut être un pardessus jeté sur du désordre. […] Ça ne sera plus seulement cet odieux parti péguyste que le parti intellectuel avait feint, avait fondé il y a quelque dix ans pour me dispenser de le fonder, (la seule fondation qu’il ait jamais faite), pour m’embêter, pour me le jeter dans les jambes.
C’est pourquoi, à la Comédie-Française, on pourra apporter des soins presque excessifs à la composition des ameublements sans crainte de jeter l’esprit du spectateur sur de fausses pistes. […] Le héros se dresse alors et jette à son fils ce vers qui l’accable : Perfide ! […] Dans l’Ami Fritz, c’est sur la ligne optique que Sûzel vient se jeter dans les bras de Fritz. […] Mais les comédiens avaient eu le tort de relever un trait particulier ne s’accordant pas avec l’idée générale que se forme le public de deux hommes qui se jettent dans les bras l’un de l’autre. […] La musique est ici la caractéristique de la passion qui a jeté Fabiani aux pieds de la reine.
Romancier révolutionnaire qui, au lieu de bombes, jette des livres dont le fracas force la multitude indifférente à tourner la tête et à se grouper avec étonnement, Zola est aussi rapporteur, apologiste et missionnaire d’une doctrine nouvelle qu’il formule en pages belliqueuses. […] Des éditions innombrables, une célébrité bruyante, des traductions dans toutes les langues ; les colonnes de la presse pleines du bruit de son nom, notre transformation littéraire comme coulée dans ses moules, ce sont là des motifs suffisants pour que Zola, malgré la boue qu’on lui jette au visage, croie que le triomphe lui appartient et que c’est lui qui a su trouver le goût de notre siècle. […] Proscrire un livre parce que tourtes les jeunes filles ne peuvent en nourrir leur intelligence, c’est comme si nous jetions par la fenêtre un morceau de viande, sous prétexte que les enfants qu’on allaite ne la mangent pas. […] Au lieu d’aspirer à produire de belles œuvres, des œuvres durables, elles se jettent dans le torrent écumeux de la production hâtive, luttant à qui fera le plus et non à qui fera le mieux. […] Mais, ce que je désapprouvais alors dans le Galdos des Épisodes, ce qui me paraissait le côté faible de son talent extraordinaire, c’était la tendance à la thèse, — dans un sens large et historique, c’est certain, mais à la thèse, — les accusations systématiques contre l’Espagne d’antan, les pelletées de terre jetées sur ce qu’elle fut ; et cette tendance, qui s’accentuait chaque fois davantage, dans la magnifique épopée des Épisodes au point de se déclarer explicitement dans la seconde série, fit explosion, disons-le ainsi, dans Doña Perfecta, dans Gloria, dans la Famille de Léon Roch 20.
Ils sortaient de leurs salles d’études, de leurs bibliothèques, de leurs universités ; ils abandonnaient leur foyer, et se jetaient dans la mêlée. […] Ils n’ont pas seulement regardé la prairie, mais le brin d’herbe, mais la marguerite qui vient jeter sa note blanche et jaune au milieu de la verdure. […] Ayant chassé ceux qu’il aimait, et jusqu’à son disciple préféré, seul, il se jette dans le cratère de l’Etna pour que l’esprit universel l’accueille et le dissolve, se sacrifiant ainsi au désir d’abolir le Moi, de délivrer la partie substantielle de l’être du caractère individuel qui la déforme, et de se fondre dans la divinité. […] Le vieux marin ne devrait pas plus avoir de morale que n’en a ce conte des Mille et une Nuits où l’on voit un marchand qui s’assied, pour manger des dattes, au bord d’un puits, et qui jette les noyaux autour de lui, quand tout à coup un génie surgit et dit qu’il est obligé de tuer ce marchand qui a, paraît-il, crevé un œil au fils du génie… Ce même Coleridge explique, d’autre part, que sa poésie a deux sources : ou bien ce qui est humble, simple, familier ; ou bien le surnaturel, considéré comme une réalité psychologique. […] Car il se jette à corps perdu dans l’érudition, apprenant tout ce que les hommes ont appris, les Grecs, les Latins, les Français, les Anglais, les Allemands.
La science est le flambeau qui vient éclairer un lieu obscur ; et tout entraîné qu’on est par le tourbillon de la terre et de la vie, c’est quelque chose que de pouvoir jeter un grave et long regard sur ces ténèbres et cet abîme. » Nourri des fortes lectures et abreuvé aux hautes sources des poètes, M. […] Le pont désormais était jeté et établi.
Le francique était généralement parlé sur la rive gauche du Rhin, dans les portions de l’ancienne Belgique où la population franke s’était jetée en masse, et d’où elle avait banni la population gallo-romaine. […] Aussi Chapelain lui répondit-il, non sans esprit, qu’il était un ingrat et que l’envie ne lui avait pris à lui-même de jeter les yeux sur ce bouquin que pour y observer un peu le langage et le style de nos ancêtres : « Et je m’y déterminai principalement, ajouta-t-il, par l’espérance que j’eus d’y rencontrer un fonds d’importance pour le traité des Origines de notre langue que ce dédaigneux a entrepris. » (De la Lecture des vieux romans, par Chapelain, dans la Continuatum des Mémoires de Sallengre, t.
Mme de Staël et Benjamin Constant auraient préféré qu’on publiât leur correspondance au lieu de la jeter au feu. […] Paul Comme la corde… On utilise partiellement — et partialement — ses Origines de la France contemporaine, mais on jette par-dessus bord ce qu’on appelle son scientisme.
Trois fois Caïrbar jette sa lance sur la bruyère, trois fois il porte la main à sa barbe. […] Armar se jette à la nage, résolu de secourir Daura ou de mourir.
Au mauvais, il faut imputer la légèreté et la déclamation, l’ardeur indiscrète de toutes les réformes, sauf la réforme individuelle ; le préjugé qui charge les gouvernements de tous les devoirs et leur impose toutes les vertus dont l’individu s’exempte lui-même ; l’esprit de critique et l’esprit de chimère, les ruines et les rêves ; enfin, avec l’excuse des bonnes intentions chez beaucoup de coupables, les crimes de la fin du siècle, et le discrédit peut-être irréparable que ses erreurs meurtrières ont jeté sur ses immortelles conquêtes. […] Sur un fond qui reste le même, il jette les diversités des conditions et des caractères.
Que ceux qui se font des lois de l’esprit humain une idée étroite et mesquine, qui ne comprennent rien au-delà de la vulgarité d’un salon ou des étroites limites du bon sens ordinaire ; que ceux qui n’ont pas compris la fière originalité des créations spontanées de la nature humaine, que ceux-là se gardent d’aborder un tel problème ou se contentent d’y jeter timidement la commode solution du surnaturel. […] Si l’histoire de l’esprit humain n’est qu’une succession de systèmes qui se renversent, il n’y a qu’à se jeter dans le scepticisme ou dans la foi.
Il quitta les Nibelungen pour se jeter dans Tristan et Yseult (Schuré II, 143). » Il est important, et pour la connaissance de l’œuvre, et pour la connaissance de son auteur, de savoir que les choses ne se passèrent point ainsi. […] Nous ne connaissons pas la date exacte d’une première hâtive esquisse, que le maître a probablement jetée sur le papier ; mais ce que nous savons, c’est qu’elle doit dater de l’époque pendant laquelle il travaillait à la Walküre.
On jette le coffre-fort, témoin du délit, dans la Bièvre, mais là il est retrouvé. […] L’horrible soif qui me déchire Aurait besoin pour s’assouvir D’autant de vin qu’en peut tenir Son tombeau ; — ce n’est pas peu dire : Je l’ai jetée au fond d’un puits, Et j’ai même poussé sur elle Tous les pavés de la margelle.
Il avait recommandé, servant Ibsen, qu’au dernier acte on ne jetât pas le mannequin : la foule figurante a bien assez de quelques moellons concassés sur la tête et du bris des planches hérissées de clous dans les mollets. […] L’œil clos du Château enferme l’image de la princesse Elade, que le commerce subtil des tendres lettres et des songes a dotée pour les visiteurs du désir, de la beauté des madones et des fées, sœur de cette Statue de Diane, si asexuée ou ambisexuée, conte l’un des philosophes du Banquet, que le jeune Grec qui la vint violer dans son temple l’approcha à la manière des philopaèdes, avant de se jeter dans la mer.
« Où étais-tu quand je jetais les fondements de la terre ? […] « Jette les yeux sur les impies, et qu’ils soient confondus ; foule-les aux pieds dans le lieu de leur gloire.
Il n’endort pas ses fauves pour jouer au dompteur mais, toutes cages ouvertes, clés jetées au vent, il part, voyageur qui ne pense pas à soi mais au voyageck, aux plages de rêves, forêts de mains, animaux d’âme, à toute l’indéniable surréalité. […] On retrouvera Lafcadio chez Crevel dans Le Clavecin de Diderot : « Lafcadio, en jetant par la portière une créature falote, jette un défi à la société.
Les peintres se jettent dans cette mitologie, ils perdent le goût des événements naturels de la vie ; et il ne sort plus de leurs pinceaux que des scènes indécentes, folles, extravagantes, idéales, ou tout au moins vuides d’intérêt. […] C’est fait, dit l’artiste ; qu’on me donne un crayon et que je jette bien vite sur le papier gris l’esquisse de mon tableau.
Il y a quelques années que, passant à Dijon, je fis visite à l’un de ces hommes savants et modestes comme la province en renfermait beaucoup autrefois et comme il y en a quelques-uns encore : cet homme de mérite, qui s’était de tout temps occupé d’histoire, et qui avait publié lui-même des Annales estimées24, avait les in-folio de Mézeray ouverts sur sa table, et, me voyant y jeter les yeux, il me dit : « En province nous avons encore le temps de lire.
Un jour que la galère impériale passait tout près du rocher où la tradition place le sacrifice d’Iphigénie et comme on discutait ce point de mythologie historique, Catherine, se promenant sur le pont avec majesté, grâce et lenteur, étendit la main et dit : « Je vous donne, prince de Ligne, le territoire contesté. » On ajoute que le prince, se voyant assez près de terre, se jeta à l’eau comme il était, en uniforme, et alla prendre à l’instant possession du rocher, y gravant d’un côté, du côté apparent, le nom divin de Catherine, et de l’autre côté (assure-t-il), le nom tout humain de la dame de ses pensées, de la dame d’alors, car il en changeait souvent.
Et après qu’il avait ainsi fait frissonner, en la touchant au passage, la plaie cachée de chaque auditeur, après qu’il avait dû sembler en venir presque aux personnalités auprès de chacun, Massillon se relevait dans un résumé plein de richesse et de grandeur ; il se hâtait de recouvrir le tout d’un large flot d’éloquence, et d’y jeter comme un pan déployé du rideau du Temple : Non, mon cher auditeur, disait-il aussitôt en rendant magnifiquement à toutes ces chutes et toutes ces misères présentes des noms bibliques et consacrésa, non, les crimes ne sont jamais les coups d’essai du cœur : David fut indiscret et oiseux avant que d’être adultère : Salomon se laissa amollir par les délices de la royauté, avant que de paraître sur les hauts lieux au milieu des femmes étrangères : Judas aima l’argent avant que de mettre à prix son maître : Pierre présuma avant que de le renoncer : Madeleine, sans doute, voulut plaire avant que d’être la pécheresse de Jérusalem… Le vice a ses progrès comme la vertu ; comme le jour instruit le jour, ainsi, dit le Prophète, la nuit donne de funestes leçons à la nuit… Ici l’écho s’éveille et nous redit ces vers de l’Hippolyte de Racine : Quelques crimes toujours précèdent les grands crimes… Ainsi que la vertu, le crime a ses degrés… On a souvent remarqué que Massillon se souvient de Racine et qu’il se plaît à le paraphraser quelquefois.
Approchez des grands ; jetez les yeux vous-même sur une de ces personnes qui ont vieilli dans les passions, et que le long usage des plaisirs a rendues également inhabiles et au vice et à la vertu.
Le charmant poète Gray qui, dans sa solitude mélancolique de Cambridge, étudiait tant de choses avec originalité et avec goût, écrivait à un ami en 1760 : Froissart (quoique je n’y aie plongé que çà et là par endroits) est un de mes livres favoris : il me semble étrange que des gens qui achèteraient au poids de l’or une douzaine de portraits originaux de cette époque pour orner une galerie, ne jettent jamais les yeux sur tant de tableaux mouvants de la vie, des actions, des mœurs et des pensées de leurs ancêtres, peints sur place avec de simples mais fortes couleurs.
La maîtresse en était absente, et, en la remerciant de l’hospitalité donnée en son nom, il lui écrivait avec un vif sentiment de la nature italienne : Vous ne m’aviez point dit assez de bien de Bagnaia, madame ; c’est le plus aimable lieu du monde que j’aie jamais vu ; on y trouve en même temps une belle vue, de grands arbres aussi verts qu’en France et qu’il ne faut point aller chercher, et des quantités de fontaines qui vont quand les maîtres n’y sont point : jamais ordre n’a été plus inutile que celui que vous aviez donné au jardinier de les faire toutes aller ; elles n’attendent pas vos ordres pour jeter des torrents de la plus belle eau du monde.
Les lettres de Fénelon, à cette date, jettent un profond et triste jour sur la décadence de l’esprit public et la détérioration des caractères et de la morale sociale.
Or, dans la peinture générale qu’il fait de l’homme, il commence par étaler, sans compensation et sans contre-poids, toutes les causes de misère, d’incertitude et d’erreur ; il humilie l’homme tant qu’il peut, et, à ne considérer même les choses qu’au point de vue purement naturel, il ne tient point compte de cette force sacrée qui est en lui, de cette lumière d’invention qui lui est propre et qui éclate surtout dans certaines races, de ce coup d’œil royal et conquérant qu’il lui est si aisé, à l’âge des espérances et dans l’essor du génie, de jeter hardiment sur l’univers.
Mme de Grammont ne jette que de rapides diversions et n’obtient que de charmants éclairs à travers ces préoccupations nombreuses : « Je suis sur le point de vous recouvrer un cheval qui va l’entrepas, le plus beau que vous vîtes et le meilleur, force panache d’aigrette.
Il parvint à jeter du secours dans Montauban, malgré le voisinage de deux armées.
Il avait dit dans l’épître à d’Argen Ami, le sort en est jeté ?
Ce n’est que de guerre lasse et de désespoir qu’il se jeta dans les bras du parti contraire : il ne prit pour nouvelle et dernière formule : Tout pour le peuple et par le peuple !
Cette idée, jetée en l’air et à l’étourdie par un homme de grand talent, qui sait sans doute autant et mieux que personne son xviie siècle, mais dont le premier jugement est rarement juste et précis, a été soigneusement ramassée et amplifiée par les disciples et les esprits à la suite.
Si la vie du vieillard a été vertueuse, le long regard jeté par lui sur le passé est plein de douceur ; il contemple tous les éléments, tous les gages d’un immortel et heureux avenir.
Dans le premier, il commit une faute par excès de préoccupation morale : à force de vouloir éviter la chronique scandaleuse, il se jeta dans la chronique vertueuse et raconta comment des demoiselles de sa connaissance, millionnaires, prenaient leurs maris parmi des jeunes gens distingués et sans fortune, précepteurs de leurs jeunes frères.
La reine s’avança pour le recevoir à l’entrée de son appartement, c’est-à-dire d’une chambre de paysan, de la porte à l’escalier ; elle parut se jeter à genoux pour lui baiser la main ; il l’en empêcha et la releva, mais ils se trouvèrent tous deux bien embarrassés de ne se pouvoir entendre.
N’abusons de rien, et que ceux qui sont sans aucun reste d’intempérance et sans un seul petit vice à soixante ans, lui jettent la première pierre.
Aussi suis-je resté stupéfait, l’autre jour, d’entendre un homme de goût, qui sait pourtant toutes ces choses aussi bien et mieux que nous15, en venir à qualifier Racine de « prince de l’école réaliste. » Fuyons ces vilains mots que tout le monde se jette à la tête et qui sont sujets à malentendu et à contresens ; c’en est un ici.
On sait le beau passage de l’Iliade (chant XII) lorsque Sarpédon, venu de Lycie au secours des Troyens, se jette dans la mêlée et prête la main à Hector au moment où il est en train de forcer le camp des Grecs.
Que celui qui aurait osé, s’il avait été Romain, reprocher à l’antique Sénat sa politique persévérante, conquérante et assimilatrice à tout prix, cette politique qui agissait et opérait uniquement en vue de la grandeur et des destinées de Rome, que celui-là jette la pierre à Louvois, tout occupé de former et de remparer d’une enceinte infranchissable ce vaste quartier de terre, ce pré carré, comme l’appelait Vauban, ce beau gâteau compacte qui constitua depuis lors l’unité de notre territoire !
Ici il y a un pont plus mince, plus long, plus suspendu, à franchir ; on est entouré d’abîmes, pour peu qu’on regarde à droite ou à gauche (liberté, fatalité, prédestination, prescience divine, responsabilité humaine) ; le pont tremble sous vos pieds ; mais enfin il est jeté, il est franchi ; M.
De telles idées, en un mot, à ce degré de crudité et de réaction, tendaient à ramener violemment cette société vers un état à jamais détruit et de toutes parts dépassé ; et, si l’on n’y parvenait pas, elles n’allaient à rien moins qu’à faire jeter, comme on dit, le manche après la cognée, à faire désespérer de tout, du présent et de l’avenir.
Zeller y a puisé avec discrétion, et, en historien qu’il est, il s’est surtout attaché à celles des pensées qui jettent un jour sur les sentiments de Marc-Aurèle empereur, sur ses tristesses secrètes, sur son dégoût final, sur cette difficulté invincible au bien qu’il rencontrait à chaque pas dans la résistance des choses et des hommes.
L’empereur son époux, qui n’osait se mêler des affaires du gouvernement, se jeta dans celles du négoce… » Suivent quelques détails piquants et caustiques sur François Ier, cet époux tant adoré d’elle et si subordonné, qui, lui laissant tout l’honneur et toute la gloire de l’empire, s’était fait l’intendant, le fermier général, le banquier de la Cour, homme de négoce jusqu’à fournir au besoin en temps de guerre le fourrage et la farine aux ennemis eux-mêmes pour en tirer de l’argent ; puis reprenant le ton grave et sévère, Frédéric continue : « L’impératrice avait senti dans les guerres précédentes la nécessité de mieux discipliner son armée ; elle choisit des généraux laborieux, et capables d’introduire la discipline dans ses troupes ; de vieux officiers, peu propres aux emplois qu’ils occupaient, furent renvoyés avec ces pensions, et remplacés par de jeunes gens de condition pleins d’ardeur et d’amour pour le métier de la guerre.
C’est alors, et sans plus tarder, que le comte de Loss jugea à propos de s’adresser par lettre au maréchal de Saxe occupé au siège de Namur, pour le prier de repousser les influences contraires et de jeter dans la balance le poids de son nom.
Le triage se fit dans un entresol de la rue Saint-Florentin : Talleyrand, renversé dans son fauteuil, les jambes en l’air et appuyées contre le manteau de la cheminée, recevait des mains des deux acolytes les pièces condamnées et les jetait au feu.
Le ralentissement de ceux-ci, l’échouement de ceux-là, la difficulté des vents pour les heureux même, les ont à peu près tous jetés en vue des mêmes rivages : ce n’est plus certes le navire Argo qui peut voguer d’une proue magique à la conquête de la toison d’or ; mais de toutes ces nefs restantes, de tous ces débris d’espérances littéraires et de naufrages, n’y aurait-il donc pas à refaire encore une noble escadre, un grand radeau ?
Le stoïcien Brutus, dont la farouche vertu n’avait rien épargné, laissant voir un sentiment si tendre dans ces moments qui précèdent et ses derniers efforts et ses derniers jours, surprend le cœur par une émotion inattendue ; l’action terrible et la funeste destinée de ce dernier des Romains, entourent son image d’idées sombres qui jettent sur Porcie l’intérêt le plus douloureux24.
Je ne désavoue certainement pas tout ce que la saine philosophie peut ajouter à la morale de sentiment ; mais comme on ferait injure à l’amour maternel, en le croyant le résultat de la raison seulement, il faut conserver dans toutes les vertus ce qu’elles ont de purement naturel, en se réservant de jeter ensuite de nouvelles lumières sur la meilleure direction de ces mouvements irréfléchis.
La machine, avec son sifflement, sa fumée et le grand bruit qui accompagne le train, l’avait frappé ; le premier mot qu’il eût prononcé était fafer (chemin de fer) ; désormais, un bateau à vapeur, une cafetière à esprit-de-vin, tous les objets qui sifflent, font du bruit et jettent de la fumée étaient des fafer.
À l’Académie, comme dans la distribution des grâces royales, il semble que deux influences se balancent, et que deux courants se font sentir : ou plutôt le même courant porte l’argent du roi vers Despréaux et vers Perrault, jette à l’Académie tantôt Racine et tantôt Quinault, La Bruyère à la suite de Fontenelle.
Il y a du romantisme dans Renan : c’est-à-dire qu’il a souvent mêlé sa personne dans son œuvre, et jeté des impressions toutes subjectives à travers l’objectivité de sa science.
Et j’aime encore ce je ne sais quoi qui les rend beaux, nobles, cet instinct de bête sauvage qui les jette dans l’aventure, mauvaise ou sinistre, soit !
Quand une société n’a pas encore d’idées générales, faute d’avoir passé par les épreuves qui en sont le prix, s’il y naît un homme supérieur ou bien il se jette dans de folles spéculations d’esprit, ou bien il s’épuise en efforts ingénieux dans une méthode stérile et sans vie.
À peine le comédien a-t-il jeté les yeux sur le manuscrit qu’on lui apporte qu’il s’empourpre et le rejette avec humeur, persuadé qu’on se moque de lui.
Il est trop clair d’abord que la seule conscience d’avoir reculé devant la saine méthode et le sentiment permanent d’une objection non réelle jetteraient sur toute la vie ultérieure un scepticisme plus désolant que la négation même.
Enfin, parmi les productions les plus immédiatement contemporaines — sans parler d’une sorte de mysticisme qui va emprunter aux écrivains hermétiques leurs voiles les plus obscurs pour les jeter bizarrement sur le scepticisme contemporain — il faut noter le retour à la méditation, l’étude de la vie intérieure, la préoccupation de l’au-delà.
Mme de Grignan, la lieutenante générale, réunit chez elle les dames de la province, et il semble croire, en homme un peu glorieux, qu’il n’aurait, dans cette assemblée, qu’à jeter la pomme : « Le favori du gouverneur, dit-il, en réputation d’un bel esprit et d’homme de cour, serait bientôt ici un dangereux rival. » Il nous donne un échantillon des plaisanteries à la provençale qu’il adresse à l’une de ces dames ; la plaisanterie nous semble, avouons-le, de toute énormité, et on y revient à deux fois avant d’oser comprendre.
Bazin, dans les deux volumes qu’il a consacrés à l’Histoire de France sous le ministère du cardinal Mazarin, s’est attaché à dégager le récit historique des séductions qu’y avaient jetées les peintures du cardinal de Retz, et il l’a fait, même au risque d’y éteindre quelque peu la vivacité et l’intérêt.
Très avenante, très séduisante quand elle le voulait, connaissant le fort et le faible d’un chacun, et habile à jeter ses filets sur vous, elle devenait froide et indifférente dès que vous ne répondiez pas sur le même ton à sa démonstration expansive.
Plusieurs fois dans la journée, les Français jetaient leurs bidons aux Autrichiens, qui allaient les remplir et les leur rejetaient.
Il expose, dans sa remontrance et dans l’examen qui suivit, l’ancienne doctrine française parlementaire, l’utilité des vérifications d’édits par les cours souveraines, le bienfait même de certaines lenteurs, profitables au bon conseil et à la prudence, de telle sorte qu’une volonté du monarque, annoncée comme loi, n’ait pas son brusque effet immédiat aussi infailliblement qu’« une boule jetée contre une autre doit avoir le sien ».
Longtemps il crut avoir trouvé cet ami plus ferme de volonté et de dessein dans la personne de M. de Lamennais ; mais ces volontés plus fortes finissent souvent, sans y songer, par nous prendre comme leur proie et par nous jeter ensuite comme une dépouille.
Ces caractères, qui étaient bien dans la coupe du jour et qui sont soutenus jusqu’au bout ; le ressort de la crainte de l’opinion opposé à celui de l’avarice pure ; d’heureuses descriptions, jetées en passant, des dîners du grand ton : Ceux qui dînent chez moi ne sont pas mes amis ; une peinture légère des faillites à la mode, qui ne ruinent que les créanciers, et après lesquelles le banquier, s’élançant dans un brillant équipage, dit nonchalamment : Je vais m’ensevelir au château de ma femme ; l’intervention bien ménagée de deux femmes, l’une, fille du vieillard, et l’autre, sa petite-fille ; l’habile arrangement et le balancement des scènes ; d’excellents vers comiques, semés sur un fond de dialogue clair, facile et toujours coulant, voilà des mérites qui justifient pleinement le succès et qui mettent hors de doute le talent propre de l’auteur.
Ce faux classique commence avec Jean-Baptiste Rousseau, et même, il faut le dire, avec les tragédies et la Henriade de Voltaire ; il produit au xviiie siècle les tristes tragédies de la Harpe et de Marmontel, trouve plus tard un éclat, non tout à fait immérité, dans les poésies de l’ingénieux Delille, se lance dans les témérités avec Ducis, atteint l’apogée du médiocre et de l’ennuyeux avec la littérature impériale, jette ses dernières flammes et rend le dernier soupir avec l’aimable, le spirituel, l’élégant Casimir Delavigne.
Personne ne suppose que tous les individus de la même espèce soient jetés absolument dans le même moule.
Esprit ardent que l’âge n’éteint pas, mais exalte, Michelet s’est dernièrement distrait de l’histoire pour se jeter aux sciences naturelles et physiques, et le voilà respirant, suçant, pompant ces fleurs sérieuses avec une furie d’abeille déjà enivrée.
On oublia d’autres paroles très-expressives, trop expressives, qu’on avait autrefois jetées contre le christianisme, que les critiques n’osent citer, et dont tous les contemporains se souviennent.
Le mammifère jeté dans l’air respire par des poumons que l’air vient baigner ; les branchies du poisson montent dans sa tête, vont toucher l’oxygène dans l’eau qui le contient, et se munissent d’ouïes pour rejeter cette eau inutile ; le poulet renfermé dans l’œuf respire, par les vaisseaux de l’allantoïde, l’air qui traverse la coquille poreuse ; le fœtus du mammifère reçoit l’air par la communication des vaisseaux de sa mère et des siens.
Perthes pour créer une collection qui jette des ponts spirituels entre la France et l’Allemagne. […] C’est un moyen, entre tant d’autres, pour jeter sur le plus légitime procédé de défense nationale le discrédit mérité par le plus monstrueux esprit d’usurpation. […] Elles jettent pourtant une clarté singulière sur les mouvements auxquels nous assistons. […] Ils ont jeté bas tout l’antique édifice. […] Les enfants, alors, lui jettent d’énormes pierres.
On nous l’avait jetée comme une insulte, cette épithète ; je l’ai ramassée comme cri de guerre ; mais elle ne signifiait rien de spécial, que je sache. […] Taine, ensuite, qui nous a jetés jusqu’au col (je l’en remercie !) […] Il n’y a pas, hormis Huysmans, de maître à comparer à ceux d’hier, à Flaubert, à Barbey d’Aurevilly, aux Goncourt ; il n’y a même pas un fou lucide qui nous jette dans les jambes quelques Chants de Maldoror. […] Huysmans jeta les cendres dans la cheminée et sourit : — Vous y revenez ? […] Avant de partir, je jetai un dernier coup d’œil sur le décor bizarre qui m’entourait.
Les gamins leur jettent des pierres. […] Jeter un voile sur les frasques de La Fontaine, se dérober au moment de reproduire une épigramme ou une chanson sous prétexte qu’elle est trop leste, c’est une mauvaise plaisanterie. […] Ce prêtre le contraignit à jeter au feu une pièce de théâtre complètement achevée ! […] L’ermite, qui s’aperçut de son désespoir, jeta sur le sentier par où il devait passer un tapis de feutre qui lui servait de couche. […] Charmant petit pont turc, bel accent circonflexe jeté sur la rivière !
Mais elles sont en si grand nombre qu’elles fatiguent, d’autant plus que l’auteur les jette n’importe où et qu’elles sont invariablement composées en dyptique : de même — de même, ainsi— ainsi : « Patroklos le frappa de sa lance à la joue droite et l’airain passa à travers les dents, et comme il le ramenait, il arracha l’homme du char. […] Le cliché est une monnaie jetée dans la circulation ; la métaphore est le premier exemplaire de cette monnaie : il retournera à la fonte, entrera en quelque collection de raretés, ou bien il sera tiré à des millions et deviendra si vulgaire que nul ne songera jamais à considérer sa face. […] Et si un curieux s’y jette, aura-t-il présentes à la mémoire les quinze lignes que je viens d’en extraire ? […] De cette œuvre à laquelle Mallarmé travaillait depuis plusieurs années, on n’a malheureusement rien trouvé que des vers épars (à peine), des mots jetés sur des pages. […] Le discrédit s’est jeté par assimilation logique sur les formes correspondantes des autres conjugaisons : vinssiez, dormissions ; sur les formes irrégulières et fort embarrassantes, bouillions, fuissions (fuir), pourvoyions, cousissions (coudre), moulussions (moudre) et l’extraordinaire nuisissions !
Pour Miltiade, le vainqueur de Marathon, ils le condamnent à être précipité dans la fosse et, sans le premier Prytane il y eût été jeté. […] Par exemple s’il est question de brides et de mors, il y a l’écuyer qui s’en sert, le sellier et le forgeron qui les fabriquent, le peintre qui en jette sur sa toile une apparence. […] Il avait un fond de frivolité et d’outrecuidance qui lui faisait croire que le monde était destiné à être sa conquête, et il s’est jeté dans des entreprises folles qui l’ont amené en trois générations à être conquis, désarmé et blessé à mort. […] C’est là qu’est le vrai et en même temps je voudrais avoir montré que c’est là que la moralité retrouve son compte aussi bien et même mieux que dans la théorie qui lui attribue tout, lui sacrifie tout et jette tout au pied de ses autels. […] Il est assez naturel que nous jetions les regards vers le gouvernement de Sparte, qui a une très grande réputation parmi les hommes.
C’est l’ambition qui le jette d’abord du côté des réformés ; mais bientôt son esprit se prend tout de bon à leurs opinions, et il s’y glisse du fanatisme de doctrine ou de parti : Il était arrivé la même chose à l’Amiral, dit agréablement Mézeray, qu’il arrive à un jeune homme qui vient à se piquer tout de bon d’une maîtresse qu’il n’aurait entrepris d’aimer que par feinte et pour donner de la jalousie à une autre : il s’était si fort embéguiné de cette nouvelle religion que rien n’était plus capable de l’en désabuser.
Au nombre des résultats bons ou fâcheux qu’il constate, il compte celui-ci, d’avoir cessé d’être un Anglais, c’est-à-dire un insulaire marqué au coin de sa nation et jeté dans un moule indélébile : cette forme en lui s’effaça alors et ne reprit jamais qu’imparfaitement depuis.
On jeta la sonde ; on sentit la terre ; on se crut perdu ; le roi, pieds nus, en simple cotte et tout échevelé, était déjà sur le pont, les bras en croix devant le Saint-Sacrement86, comme celui qui croyait bien périrk.
Car La Bruyère, en parlant de Tréville d’une manière si serrée et si incisive, semble avoir quelque chose de particulier à venger sur lui : on dirait qu’il a appris que ce juge dégoûté des ouvrages de l’esprit a ouvert un jour une des premières éditions des Caractères et a jeté le livre après en avoir lu quelques pages, en disant : « N’est-ce que cela ?
Et puisque j’en suis à rappeler ces souvenirs fortifiants et ces antidotes en regard d’un exemple de dégradation qui afflige, qu’il me soit permis de joindre ici la traduction de la fameuse Hymne d’Aristote à la Vertu, où circule encore et se resserre en un jet vigoureux toute la sève des temps antiques : Vertu qui coûtes tant de sueurs à la race mortelle, ô la plus belle proie de la vie, c’est pour toi, pour ta beauté, ô Vierge, qu’il est enviable en Grèce, même de mourir, et d’endurer des travaux violents d’un cœur indomptable ; tant et si bien tu sais jeter dans l’âme une semence immortelle, supérieure à l’or et aux joies de la famille, et au sommeil qui console la paupière !
On appela les charpentiers… Comme le roulis m’empêchait de dormir, je m’étais jeté sur mon lit en bottes et en robe de chambre : mon chien paraissait saisi d’un effroi extraordinaire.
Sa Majesté, après m’avoir recommandé le plus grand secret sur ce qu’elle allait me confier me raconta que, s’étant trouvé seule avec le baron, il avait commencé par lui dire des choses d’une galanterie qui l’avait jetée dans le plus grand étonnement, et qu’il avait porté le délire jusqu’à se précipiter à ses genoux en lui faisant une déclaration en forme.
dès que j’eus entendu prononcer ce nom de magicienne qui m’avait toujours séduit, loin de songer à me précautionner contre Pamphile (l’hôtesse elle-même), je me sentis au contraire l’envie d’aller de ce pas la prier de m’initier à son art, quoi qu’il pût m’en coûter, et il me tardait de me jeter à corps perdu dans cet abîme.
On la surprit et l’on cloua la fenêtre, car elle s’y suspendait au risque de se jeter dans la rue.
Car il savait bien qu’on imputerait, malgré tout, sa résolution à faiblesse, et que tous ses succès anciens, éclipsés pour un temps, seraient méconnus,, attribués uniquement et comme jetés à la fortune.
si vous le voulez à toute force, — vous voyez que je n’y tiens pas, pourvu qu’il ait un peu de malice et qu’il soit tout nu et bien gentil. » Je ne voudrais pas abuser du plaisir de citer parmi ces pages, déjà si nombreuses, d’un livre inachevé ; mais cette finesse de sentiment et d’analyse, cette délicatesse d’expression sous forme écrite, jettent certainement un jour sur le talent de Gavarni, et nous expliquent les distinctions secrètes de son crayon, même lorsque ensuite il ira, comme il dit, au cabaret.
On a jeté de l’argent à la portière de sa voiture pour douze mille livres, dit-on. » Tel fut l’effet que produisit, à vingt-cinq ans, sur le bourgeois de Paris cette bonne reine, très aimée et très populaire.
Au lieu d’introduire, en l’interprétant, le renseignement nouveau, de le combiner avec les anciens et de rectifier les erreurs, s’il y a lieu, de réparer ou de combler les lacunes, on aime mieux jeter à bas et reprendre à neuf dès la base la statue, le monument.
Il va plus loin, il jette le câble électrique, il établit la chaîne : « Qui nous dit que ces mondes et leurs humanités ne forment pas dans leur ensemble une série, une unité hiérarchique, depuis les mondes où la somme des conditions heureuses d’habitabilité est la plus petite jusqu’à ceux où la nature entière brille à l’apogée de sa splendeur et de sa gloire ?
Les princes et les officiers s’étaient fort vaillamment conduits, mais le régiment des Gardes avait lâché pied tout d’abord, et, aux premières décharges de l’ennemi, s’était jeté dans le Mein sans que rien pût l’arrêter.
Malgré le découragement où me jette parfois le peu de succès que j’ai en sacrifiant depuis deux ans toutes mes pensées et actions à Mme la dauphine, je vois bien de la ressource dans son esprit et son caractère. » Nous sommes ici dans la vraie mesure : ni engouement ni dénigrement.
Après des personnes du grand monde, telles que la duchesse de Bouillon, — une passion orageuse et triste, traversée d’affreux soupçons, — il se jeta dans les plaisirs dits faciles et n’en sortit plus : ces plaisirs l’enchaînèrent.
Jeté entre Henri IV et Richelieu, c’est un poëte de régence, le favori de ces jeunes seigneurs que Richelieu décapitera (Bouteville, Montmorency) ; sa poésie libertine eût dû se ranger sous le grand Cardinal.
Celui qui demain va mourir sent un regret à quitter la vie que consolait sous les barreaux une vue si charmante, mais il exprime ce regret à peine, et son émotion prend encore la forme d’une pensée légère, de peur de jeter une ombre sur le jeune front souriant94.
« Othon ne cessait pas, de son côté, d’étendre les mains vers eux, d’adresser des hommages à cette multitude et de lui jeter des baisers, se dégradant jusqu’à la bassesse pour se relever à la domination !
Les soldats me mirent en joue ; à ce moment, le bourreau, qui était derrière moi, un peu à l’abri par un angle du mur, se jeta tout à coup sur moi, et, m’arrachant d’une main rapide et violente le capuchon et la robe de pénitent jusqu’à la ceinture, me découvrit presque nue aux yeux des soldats et de la foule.
Il n’y songea même pas ; il se contenta d’effleurer tout, en amateur, et de jeter en avant sur tout sujet ses vues personnelles, plus content d’en avoir à montrer que soucieux d’en vérifier la justesse.
Si l’individu n’est pas, de lui-même, originairement et physiologiquement, un Unique, au sens qu’a ce mot chez Stirner, c’est-à-dire un être animé d’une personnelle volonté d’indépendance et résolu à ne pas se laisser aveuglement absorber par la société où les circonstances l’ont jeté, ni la loi de l’entrecroisement des groupes, ni aucune loi sociologique quelle qu’elle soit, n’aura la vertu de faire de lui un Unique.
Le Figaro l’abandonne, et lui ne s’indigne pas ; il comprend : « J’admets très bien, pour un journal, la nécessité de compter avec les habitudes et les passions de sa clientèle. » Quoi, même lorsqu’il s’agit de ce qui apparaît à tes yeux naïfs la grande bataille de ton siècle, tu admets qu’on sacrifie la justice à un intérêt personnel et que, s’étant jeté volontairement dans la lutte, on s’enfuie à la pensée du risque, abandonnant sans armes ses compagnons de combat.
Joubert demande surtout aux modernes, c’est de ne pas insister sur leurs défauts, de ne pas verser du côté où ils penchent, de ne pas s’y jeter de toutes leurs forces.
M. de Florian paraît avoir des lois somptuaires dans son style, et son sujet exigeait un peu de luxe. » Cet article de Rivarol était écrit au moment où Florian allait entrer à l’Académie, et ses amis se jetèrent à la traverse pour arrêter le coup qui aurait pu nuire.
S’il lui arrive, dans les commencements, de traiter quelque sujet politique et économique à l’ordre du jour, ce n’est que par acquit de conscience et par manière de passe-temps, et il compare avec une grâce toute chrétienne ce travail inutile à ces corbeilles que tressaient les solitaires de la Thébaïde pour occuper leurs loisirs, et qu’ils jetaient souvent au feu à la fin de la semaine, quand ils ne trouvaient pas à en faire usage.
Ce dernier, traducteur de Juvénal, homme enthousiaste, expansif, nourri de toute la sentimentalité du siècle, s’était fort jeté à la tête de Jean-Jacques, qui l’avait d’abord pris en gré et l’avait, par exception, admis dans son intimité.
Il ne l’entend pas, et pourtant il jette à ce propos mille pensées fort neuves, fort spirituelles, et que la science critique a depuis plus ou moins exploitées ; il a des ouvertures imprévues et heureuses.
En peignant si à nu sa défaite et l’infirmité de la raison aux prises avec les inclinations les plus chères, il nous désarme nous-mêmes et nous force, par un retour secret, à nous demander : « Et qui donc d’entre nous sait assez résister à ses propres passions pour lui jeter la première pierre ?
Quant à lui, qui probablement eût fait de même s’il se fût trouvé avec eux, il se vit, en débarquant en Catalogne, jeté dans un groupe tout différent ; il y rencontra des militaires la plupart étrangers, bien qu’ayant fait partie autrefois des armées de l’Empire, des Italiens, des Polonais, qui n’étaient liés par aucun scrupule envers la France du drapeau blanc.
En cet âge de grandes choses, elle le fait assister aux petites ; elle le jette par deux fois dans le royaume de Naples, la seconde fois sous le général Reynier, médiocre ou malheureux ; il y voit une guerre de brigands toute décousue, tout atroce, toute bouffonne.
Il y est traité dans une libre et large manière : l’ample perruque de rigueur est noblement jetée sur son front et ne le surcharge pas ; il a l’attitude ferme et même fière, le port de tête assuré ; un demi-sourire moqueur erre sur ses lèvres ; le pli du nez un peu relevé, et celui de la bouche, indiquent l’habitude railleuse, rieuse et même mordante ; la lèvre pourtant est bonne et franche, entrouverte et parlante ; elle ne sait pas retenir le trait.
» Il sent qu’on est, par ennui, à la veille d’une réaction ; que les Hollandais et les Flamands, non pas seulement les plus grands comme Van Dyck et Rubens, mais ceux d’une moindre manière, vont l’emporter et prendre le dessus dans l’estime : « Ne serait-ce pas l’extrême platitude du coloris de nos peintres français qui aurait contribué à jeter notre goût dans l’excès opposé ?
Barthélemy avait songé d’abord à faire voyager un étranger, un Français, en Italie, vers le temps de Léon X, et à peindre par ce moyen la pleine et riche Renaissance ; mais, à la réflexion, il se trouva moins propre à un tel sujet, qui le tirait de son domaine favori et le jetait dans un monde d’art, de poésie moderne et de peinture, dans tout un ordre de sujets qui lui étaient médiocrement familiers, et il transporta alors cette idée en Grèce, en supposant un Scythe qui la visiterait vers le temps de Philippe.
Il ne se trompe que sur un point, sur la qualité de poète qu’il s’attribue ; mais il y a dans ce premier étonnement d’être devenu capitaine quelque chose d’imprévu et de piquant, et qui jette de la lumière sur le procédé de formation et sur la nature intérieure de Frédéric.
Je tombai sur ces vers puissants et sereins4 : — « La religion n’est pas de se tourner sans cesse vers la pierre voilée, ni de s’approcher de tous les autels, ni de se jeter à terre prosterné, ni de lever les mains devant les demeures des dieux, ni d’arroser les temples de beaucoup de sang des bêtes, ni d’accumuler les vœux sur les vœux, mais de tout regarder avec une âme tranquille. » — Je m’arrêtai pensif, puis je me remis à lire.
— J’ai commencé trois fois le portrait de Molière, et trois fois je l’ai jeté au feu, répondit-il au rédacteur en chef du journal.
… Et c’est là encore, pour le dire en passant, une raison à ajouter aux autres pour que ce traité de « la Douleur », qui ne s’arrête pas à la bagatelle des larmes et qui, comme Julien l’Apostat, ne jette pas non plus du sang de sa blessure contre le ciel, ait partagé le triste sort de tous les écrits de Saint-Bonnet, qui échappent à leur époque par leur élévation même et ne se courbent pas au niveau de cette masse qu’on appelle le public… « Il faut que tout se paye toujours !
Évidemment c’était là un fait hors de toute proportion avec la réalité, que de traiter ce petit taquin hypocrite qui tracassait dans les Évangiles comme ces grands ennemis de l’Église, les forts hérétiques de tous les temps, qui n’avaient pas emporté, ainsi que Samson, les portes de Gaza sur leurs épaules, mais qui, du moins, les avaient secouées… La goutte d’encre jetée à la face rayonnante du Christ par un gamin d’Académie ne méritait pas de si saintes colères.
VII Du reste, rien de plus facile que de ramasser cette pierre à ses pieds et de la jeter à la tête de quelqu’un : « Je ne vous crois pas.
» Et ce prêtre finissait toujours ses histoires par cette phrase fièrement et tristement jetée : « Nous avons fait notre devoir.
L’esprit humain, toujours curieux, aime à revenir quelquefois sur ces temps de son enfance ; mais quand on a jeté un coup d’œil sur des masures ou des palais gothiques, on aime ensuite à se reposer sur les grands monuments de l’architecture moderne.
Mais l’influence dure encore, et, pour la retrouver partout, il ne faut que jeter un coup d’œil sur la littérature contemporaine. […] Car jetez seulement les yeux sur les religions de l’antiquité, sur celles de l’Inde, ou de la Grèce, ou de Rome ? […] qu’entre le cri de l’animal et le langage de l’homme elles mettent ou elles creusent un abîme sur la profondeur duquel on ne jettera jamais aucun pont ? […] Ce sera par la difficulté même, et, pour ainsi parler, en nous aidant des lueurs qu’elle jette en s’augmentant. […] Ou plutôt, disons mieux, et sortons une fois de l’équivoque où l’on se jette.
* * * Quelque lumière que jettent sur le tempérament de M. de Montesquiou les traits que nous venons de noter, ils ne nous introduisent pas très avant dans la connaissance de son talent. […] Que l’on jette un regard rapide sur l’ensemble de la littérature, bien peu d’œuvres apparaissent sans déchets ni scories. […] On pourrait trouver maint exemple de ces vers heureux où les mots finement choisis jouent avec bonheur pour rendre sensible une charmante fantaisie d’imagination : … et des singes pelés se jetaient des noix d’or. […] Il expose son sujet avec brio, dessine ses personnages avec vivacité, les anime, puis il se jette sans tarder dans le cœur de son récit, le développe, l’équilibre, ménage l’intérêt et de scène en scène le fait croître jusqu’au dénouement qu’il gagne sans attendre. […] Et maintenant — mes yeux, ma bouche et tout mon être ivres d’un sang nouveau d’où ma force en mon corps avec lui va renaître — je jette ce roseau (Id.
Ce qui prouve, à notre avis, qu’elle a pour le chevalier des Grieux une affection réelle après comme avant son infidélité, c’est qu’elle n’essaye pas de jeter un voile sur sa faute, c’est qu’elle ne dit pas une parole pour détourner le mépris. […] Mais, chaque fois qu’elle le retrouve, elle le salue comme un sauveur, elle se jette dans ses bras en lui jurant qu’elle n’a jamais aimé que lui, et il croit fermement qu’elle est sincère. […] Il est juste d’ajouter qu’Éthel et Ordener jettent sur le récit, d’ailleurs très vulgaire et très monotone, qui remplit les neuf dixièmes du livre, une sorte d’intérêt poétique. […] Si plus tard la réflexion vient démontrer que les personnages de cette tragédie sont jetés dans un moule connu depuis longtemps, que l’action est languissante, la foule persiste pourtant dans son premier enthousiasme, et ne consent pas à renier son admiration. […] Enfin la reine, effrayée de l’interdit jeté sur le royaume et des malédictions populaires qui la poursuivent chaque jour, se décide à sauver le roi et son peuple au prix de sa vie.
Il vit tout en un clin d’œil, mais au moment de remonter au ciel, il s’avisa d’avoir oublié de jeter un regard sur les lieux où se rend la justice. […] Pourtant l’homme, qui était sous le jeune homme un peu pédant que j’étais alors, jetait parfois ou plutôt soulevait le masque et s’exprimait en plusieurs petits poèmes tendrement. […] La maison, en forme de châlet, donnait assez loin sur la mer pour n’y voir que l’horizon extrême, les moutons à peine perceptibles, les voiles en étincelles des barques de pêcheurs et la fumée rouge des paquebots sur le point de disparaître ou disparus… La ville est ce qu’on appellee outre Manche a walering-place, une ville d’eau, jolie, calme, sans aucun négoce, une plage sans port, avec, seulement, une jetée pour la forme, entourée de bois charmants, où le sapin domine. […] L’hésitant, le tourmenté prince Hamlet, lui-même ne se jette-t-il, en fin de compte, presque sans un mot, sur Polonius, après le congé signifié à sa mère d’un simple geste ? […] Puis vint la traduction de Letourneur, remplie, mais, c’est à peu près tout, de bonnes intentions, et sur laquelle Voltaire, pour comble, jeta l’anathème en son meilleur style ; traitant le traducteur de bonhomme étonné 10 comme Victor Hugo (dans la préface de l’ouvrage de son fils François) d’imbécile 11, et Shakespeare de « sauvage ivre ».
De ces feuilles volantes qu’il laissait perdre avec l’insouciance d’un puissant producteur, on a déjà rassemblé quelques-unes ; et quand on examine avec soin et impartialité ce labeur infini, cette masse de créations, de documents et de critiques, tous ces tableaux, toutes ces idées, tous ces sentiments, jetés de côté et d’autre au hasard du travail quotidien, on se demanderait comment subsistent à présent les légendes qui étouffent sa gloire, si la qualité essentielle d’une légende n’était pas de ne reposer absolument sur rien. […] Tantôt, au milieu des pensées ou des descriptions les plus élevées, il jette, une idée ou une image vulgaire. […] Les brutalités qu’il lui jette au visage dans le fameux duo139, les paroles obscènes qu’en souriant il lui chuchote à l’oreille avant la représentation du Meurtre de Gonzague 140 n’ont évidemment d’autre cause que la secrète satisfaction de torturer son cœur et de ternir sa pureté de vierge. […] Il le reçoit par des railleries et des injures, le repousse brutalement, jette sur sa marchandise un pot de fleurs qui achève de la mettre en pièces, et, ivre de joie à la pensée de cette ruine, il tombe lui-même dans une sorte de crise nerveuse, coupée par des cris d’aliéné. […] Par une fin tragique, au moins fort rare à ne regarder que la constante vérité des choses, il efface en partie ce qu’ont de banal l’âme, les désirs et les adultères d’Emma ; il éclaire la morne figure de Charles d’une lueur presque grandiose par la mélancolie insondable de sa douleur et la tristesse solitaire de sa mort ; il jette sur sa froide étude de mœurs la pourpre de descriptions dont l’éclat et l’harmonie de style ont été peut-être égalés parfois, mais jamais surpassés.
Il y a un vers de Ronsard qu’il trouvait sublime et qu’il vous jetait à la tête comme une bravade : « Certes, je le dirais du sang Valésien ! […] Certains mots qu’il a laissé échapper sont peut-être de nature à jeter quelque lueur sur cette tragique énigme. […] Il dit d’une actrice parisienne qui s’était jetée du haut d’un pont : « Mauvaise entrée en scène ». […] Elle jette des cris, on accourt. […] Nous jetâmes quelques idées sur un bout de papier. — Enfin, dit-il, au petit bonheur.
Monde des idées et monde des corps, il saura célébrer toute chose créée… mais par le moyen artistique d’une nouvelle création. » Et les ennemis du Parnasse, aux pontifes de l’Empirisme jetaient ces derniers mots, soudain, comme un défi. […] — D’autre part, Balthazar, espoir du très noble prieur, représentant dernier d’une haute lignée, que le remords a jeté dans le cloître, que le remords y poursuit, en rejette. […] Il ne s’est point contenté du pardon de Dieu ; il a jeté la graine de scandale dans l’inviolable couvent ; il est damné. […] Tu sauras que, suivant certaines étymologies, musarder veut dire « avoir le museau en l’air », ce qui est bien le fait du poète, lequel, comme on sait, regarde tellement là-haut, que souvent il trébuche et se jette dans des trous. […] Rostand, je crois plus important, avant de conclure, de jeter un coup d’œil rapide sur deux poèmes, deux poèmes-poèmes, — c’est chose rare n’est-ce pas ?
Ils le sentent bien ; et, pour tirer de leur originalité le droit de nous ennuyer d’eux, ils s’en composent, ils essaient péniblement de s’en composer une, ce qui ne tarde pas à les jeter dans la bizarrerie ou dans la monstruosité. […] Et, en effet, dans le même temps, c’est-à-dire aux environs de 1840, après avoir en quelque sorte « jeté ses premiers feux », et bruyamment occupé l’opinion de l’histoire de son mariage ou du scandale de ses amours, l’auteur elle-même d’Indiana, de Valentine, de Lélia, commence d’entrevoir que l’observation du dehors, l’observation impersonnelle et désintéressée, qui fait la définition du roman, en fait donc aussi la valeur. Il est vrai qu’aussitôt, avec cette facilité que les femmes ont toujours de se jeter aux extrêmes, et surtout d’obéir aux influences masculines qui les dominent momentanément, George Sand, guidée par Lamennais d’abord et ensuite par Pierre Leroux, se porte en trois pas du roman intime ou lyrique au roman social ou déjà socialiste ; et Le Péché de M. […] C’était fait ; et, sans parler de Lamartine, Victor Hugo venait de se jeter dans la politique, n’écrivait plus de drames, gardait pour lui ses Contemplations. […] Un père prodigue]. — Mais le succès de La Dame aux camélias, 1848 (roman), et 1852 (drame), — lui indique sa véritable voie ; — qui est l’imitation de ce qu’il a vu lui-même ; — et sans doute c’est une forme inférieure du réalisme ; — comme le réalisme des Champfleury, par exemple, et des Courbet ; — qui ne sont réalistes que de la stérilité de leur invention ; — mais pourtant c’en est une. — Différence à cet égard du réalisme de Dumas et de celui de Flaubert, ou de Taine. — Diane de Lys est toutefois une espèce de retour au romantisme. — Mais à dater du Demi-Monde, — 1855, — Dumas se jette tout entier dans le réalisme par imitation des mœurs contemporaines ; — et La Question d’argent, 1857 ; — Le Fils naturel, 1858, qui est lui-même, Dumas ; — Un père prodigue, 1859, qui est son propre père ; — L’Ami des femmes, 1864 ; — et L’Affaire Clémenceau, 1866, — sont autant d’œuvres où dominent les caractères du réalisme ; — dans la nature des intrigues ; — dans le choix des personnages ; — dans la familiarité du style. — C’est une autre différence encore du « réalisme » de Dumas, et de celui de Flaubert ou de Leconte de Lisle ; — l’indifférence presque entière à la forme ; — et la conviction qu’on écrit toujours assez bien dès qu’on réussit à se faire entendre. — Une autre différence est la tendance à discuter des « questions » et à moraliser.
Le « barbare coup de gosier » qu’il a jeté par-dessus « les toits du monde », il y a bien des années, et qui arracha aux lèvres de M. […] La première chose qui frappe, quand on jette les yeux sur la liste de ceux qui ont fourni leur appoint aux Chants du Travail de M. […] Le fou se jette sur les visiteurs pendant qu’ils battent en retraite, et la porte se fermantsur lui, il se laisse tomber sur le sol avec un hurlement. […] Jack arrive en Angleterre juste assez à temps pour empêcher le Docteur Josiah Brown de magnétiser Violette, que l’intrigant docteur voudrait bien épouser, et il jette son rival par la fenêtre. […] La doctrine de l’inutilité de toutes les choses utiles aurait pour effet non seulement de compromettre notre suprématie commerciale en tant que nation, mais encore de jeter le discrédit sur un grand nombre de membres prospères et sérieux de la classe des boutiquiers.
Pour qui, il y a vingt ans, a jeté parfois un œil curieux, dans une attente chérie, et a promené une main distraite sur quelqu’un de ces volumes préférés, rien de plus connu que Caliste, ou Lettres écrites de Lausanne ; rien ne l’est moins que l’auteur. […] En supposant que mon fils ne courbe jamais la règle, mais que, dans certains cas, il la méconnaisse, la brise, la jette loin de lui, est-il ou n’est-il pas ce qu’il veut que l’on soit ?
Selon lui, on est trop prompt à leur jeter son cœur à la tête, et on leur en dit plus d’abord que la vraisemblance ne leur permet d’en croire, et bien souvent qu’elles n’en veulent : « On ne leur donne pas le loisir de pouvoir souhaiter qu’on les aime, et de goûter une certaine douceur qui ne se trouve que dans le progrès de l’amour. […] Je n’en voudrais qu’une petite preuve que je jette à l’avance ici.
Ce n’est cependant pas que nos Poulets aient perdu toute crainte, mais seulement la crainte de nos Chiens et de nos Chats : car si la couveuse jette le cri d’alarme, ses poussins s’échappent de dessous ses ailes et vont se cacher dans l’herbe ou dans les fourrés voisins. […] Lorsque les Abeilles sont logées de manière qu’elles puissent travailler dans une position commode : par exemple, lorsqu’un barreau de bois se trouve directement placé sous un rayon en voie de construction et parallèlement à son plan, de manière que ce rayon doive descendre sur l’une de ces faces ; en ce cas, dis-je, les Abeilles peuvent jeter les fondements des murs de nouveaux hexagones, exactement dans leur position voulue, et les projeter vers les autres cellules déjà complètes.
Plusieurs de ses adversaires comptaient bien qu’il vanterait longuement ses services envers l’université ; plusieurs espéraient qu’il s’en tiendrait à l’érudition vulgaire des principaux auteurs qui avaient traité la matière ; d’autres, qu’il se jetterait sur ses principes du droit universel. […] Le critique bienveillant rappelle à cette occasion l’hérésie d’un Alméricus (p. 139), dont on jeta, les cendres au vent.
Dans le bien qu’elle avait fait à Saint-Cyr, elle comptait pour beaucoup les soins qu’elle avait pris de la récréation : C’est là, disait-elle, ce qui met l’union dans une maison et en ôte les partialités ; c’est là ce qui lie les maîtresses avec leurs élèves ; c’est là qu’une supérieure se fait goûter et épanouit le cœur de ses filles en leur donnant quelques plaisirs ; c’est là qu’on dit des choses édifiantes sans ennuyer, parce qu’on les mêle avec de la gaieté ; c’est là qu’en raillant on jette de bonnes maximes.
Toute cette première partie de la vie et de la jeunesse de Madame serait curieuse et importante à bien établir : « J’étais trop âgée, dit-elle, quand je vins en France, pour changer de caractère ; la base était jetée. » Tout en se soumettant avec courage et résolution aux devoirs de sa position nouvelle, elle gardera toujours ses goûts allemands ; elle les confessera, elle les affichera en plein Versailles et en plein Marly, et cette cour, qui était alors la règle de l’Europe, et qui donnait le ton, aurait pu s’en choquer si elle n’avait mieux aimé en sourire.
c’est le son du cor là-bas sur le pont… » Cet insouciant messager apporte dans son sac, qu’il jette négligemment, la joie ou la douleur, la mort ou la naissance, la fortune ou la ruine…, et il repart en sifflant.
Je ne puis vous exprimer quel effet m’ont fait ces pièces… » Voltaire eut toute une discussion avec le président au sujet de ce François II : « Je voudrais que, quand il se portera bien, disait-il, et qu’il n’aura rien à faire, il remaniât un peu cet ouvrage, qu’il pressât le dialogue, qu’il y jetât plus de terreur et de pitié, etc. » Bons conseils à suivre lorsque le démon intérieur s’en mêle.
Les gens du monde, les femmes, dans ce court intervalle des deux Frondes, se jetèrent sur les restes de leur auteur bien aimé.
Mais je ne sais si ma petite fortune, très dérangée par tant de voyages, ma mauvaise santé, plus altérée que jamais, et mon goût pour la plus profonde retraite, me permettront d’aller me jeter au travers du tintamarre de Whitehall et de Londres.
le matin de Malplaquet, jeter une partie du pain qu’on leur distribuait, n’en ayant eu qu’à peine la veille et l’avant-veille, pour courir plus légèrement à l’ennemi.
Louis XIV était mort, son testament déchiré, ses traditions déjà jetées au vent ; un membre de l’Académie s’avise d’écrire du grand roi ce que beaucoup déjà en pensaient. — Il révolte, — qui ?
La rivière traverse le tableau ; le cerf s’enfuit à la nage, poursuivi par une meute de chiens qui se sont tous jetés à l’eau et qui vont gagner l’autre rive.
Ne vous étonnez pas qu’elle aimât Montaigne, et qu’elle sentît comme lui, dans la vue de l’incertitude universelle : « On nous a jetés dans ce inonde on ne sait pourquoi, et il faut finir son temps pour devenir je ne sais quoi. — C’est mon bréviaire, ajoutait-elle, que ce Montaigne, ma consolation, et la patrie de mon âme et de mon esprit !
Il est vrai que le bras de Dieu, qui vous a soutenus dans les guerres passées, n’est pas encore raccourci ; mais si vous faites réflexion qu’un puissant roi s’est joint aux forces de votre prince, que les provisions, les officiers et l’union vous manquent, et que même vos obstinations vous feront abandonner de tous les princes et des États protestants…, vous ne pouvez pas espérer que la Providence divine, qui n’agit pas miraculeusement comme autrefois parmi les Israélites, veuille faire de vos ennemis ce qu’elle fit de Sennacherib ; et la parole de Dieu vous apprend que de se jeter dans les dangers sans prévoir humainement aucun moyen d’en sortir, c’est tenter Dieu qui laisse périr ceux qui aiment témérairement le danger… » On peut se figurer l’effet que dut produire la lecture d’une telle épître sur un auditoire mêlé de personnes timides, de vieillards, de femmes et d’enfants.
Mes conseils, ceux de l’abbé (de Vermond), ceux de Mercy, n’ont rien produit, n’ont pu vous garantir des inconvénients ; jugez combien j’en dois être affectée, et combien je voudrais, aux dépens de ma vie, vous être utile et vous tirer de l’abandon où vous vous êtes jetée.
Il nous racontait son origine bretonne et, par les femmes, quelque peu irlandaise, origine qui jette un certain jour sur la nature de son génie, son enfance presque sauvage, ses études solitaires au bord do la mer, sa passion pour le cheval, la chasse, les armes, et son audacieux défi à Surcouf, le fameux corsaire qui faisait trembler l’océan Indien : sa jeunesse opulente (?)
Valmore père et fils61 m’ont permis de jeter les yeux sur le trésor domestique tout intime, qu’ils ont pieusement conservé et mis en ordre, des papiers, notes et correspondance de cet autre tendre et passionné poète, Mme Desbordes-Valmore, qui unissait une délicatesse morale si exquise à un don de chanter si pénétrant, ou plutôt chez qui cette sensibilité et ce don ne faisaient qu’un.
me jeter ainsi votre démission à la figure, et croire que je renvoie ainsi les gens qui me servent bien !
Mon ami, tout cela est bien cruel, bien triste, bien malheureux et me jette dans un très-grand découragement de la vie et de la société.
Comme je ne me pique pas le moins du monde d’être agréable aujourd’hui, je dirai, même aux dames, toute ma pensée : « Tout le monde (c’est La Bruyère qui parle)185 connoît cette longue levée qui borne et qui resserre le lit de la Seine, du côté où elle entre à Paris avec la Marne qu’elle vient de recevoir : les hommes s’y baignent au pied pendant les chaleurs de la canicule ; on les voit de fort près se jeter dans l’eau, on les en voit sortir, c’est un amusement.
Le Cléon de Gresset jeta le masque, et vint exposer le portrait devant tous les yeux ; il était si frappant par tant de traits qu’on y appliqua à l’instant plusieurs noms, le marquis de Vintimille, le comte de Stainville, et bien d’autres.
Sur l’aimable et sage M. de Boismorel, qui joue un si beau rôle dans les Mémoires ; sur Sévelinges l’académicien89, qui n’est pas non plus sans agrément ; sur certain Genevois moins léger, et « dont l’esprit ressemble à une lanterne sourde qui n’éclaire que celui qui la tient ; » sur toutes ces figures de sa connaissance et bientôt de la nôtre, elle jette des regards et des mots d’une observation vive, qui plaisent comme ferait la conversation même.
Plus elle est monstrueuse, plus elle est vivace, accrochée aux plus frêles vraisemblances et tenace contre les plus fortes démonstrations Sous Louis XV, pendant l’arrestation des vagabonds, quelques enfants ayant été enlevés par abus ou par erreur, le bruit court que le roi prend des bains de sang pour réparer ses organes usés, et la chose paraît si évidente, que les femmes, révoltées par l’instinct maternel, se joignent à l’émeute : un exempt est saisi, assommé, et, comme il demandait un confesseur, une femme du peuple prend un pavé, crie qu’il ne faut pas lui donner le temps d’aller en paradis, et lui casse la tête, persuadée qu’elle fait justice739 Sous Louis XVI, il est avéré pour le peuple que la disette est factice : en 1789740, un officier, écoutant les discours de ses soldats, les entend répéter « avec une profonde conviction que les princes et les courtisans, pour affamer Paris, font jeter les farines dans la Seine ».
Il faut, quand on parle d’un marchand, nommer, comme La Fontaine, « les facteurs, les associés, les ballots, le fret », raconter la vente « du tabac, du sucre, de la porcelaine et de la cannelle. » Si vous voulez peindre un singe qui dissipe le trésor de son maître et fait des ricochets avec des louis, ne dites pas simplement qu’il jette l’argent par la fenêtre ; donnez le détail de cet argent ; appelez chaque pièce par son titre ; amoncelez les « pistoles, les doublons, les jacobus, les ducatons, les nobles à la rose » ; nous nous rappellerons l’effigie et l’exergue, et, au lieu de comprendre, nous verrons.
XI Bossuet jeta les yeux sur Fénelon.
Cependant il se jeta dans la révolte des protestants.
Et encore ces lecteurs, étant occupés de leur côté de leurs travaux spéciaux, n’ont pas le temps de s’occuper de ceux des autres et n’y jettent qu’un coup d’œil superficiel, de sorte qu’au résumé dans ces études chacun travaille pour lui seul.
Pour moi, je ne vois pas une théorie politique au nom de laquelle on ait le droit de jeter la première pierre aux théories vaincues.
Jeannine tressaille aux lueurs nouvelles qu’y jette sa parole.
Une fois les arches du pont jetées, il laisse le courant aller de soi-même en toute largeur.
Tout l’art que j’y sais, c’est de ne me point jeter à la tête, pour quelques sentiments que ce puisse être.
Jeté avec éclat dans l’opposition, surtout depuis 1732, époque où il eut à se démettre de ses charges de cour, lord Chesterfield travailla de tous ses efforts pendant dix ans à la chute de ce ministère Walpole, qui ne tomba qu’en 1742.
c’est un sot frotté d’esprit. » Elle disait du duc de Nivernais : « Il est manqué de partout, guerrier manqué, ambassadeur manqué, auteur manqué, etc. » Rulhière lisait dans les salons ses Anecdotes manuscrites sur la Russie ; elle aurait voulu qu’il les jetât au feu, et elle lui offrait de l’en dédommager par une somme d’argent.
Jetée en prison, livrée par les Bourguignons aux Anglais, par ceux-ci à la justice ecclésiastique et à l’Inquisition, son procès s’entame à Rouen en janvier 1431, et se termine par l’atroce scène du bûcher, où elle fut brûlée vive, comme relapse, convaincue de schisme, hérésie, idolâtrie, invocation des démons, le 30 mai de la même année.
Lisez tout ce portrait, suivez cette conversation du Cydias-Fontenelle que La Bruyère nous fait si bien voir tel qu’il était alors dans la société, avec ce premier vernis de la jeunesse et dans tout le lustre de son apprêt naturel, déjà lui-même au complet pour la patience et l’accent, nullement pressé de parler et d’interrompre, attendant paisiblement que chacun ait jeté son feu, puis débitant gracieusement alors, et avec un demi-sourire, des contradictions et des paradoxes que La Bruyère estime des impertinences, qui pourraient bien être souvent des vérités, ou du moins qui pourraient y conduire, ce que La Bruyère ne dit pas.
Ce secret était le mot même du proverbe (par exemple, Selon les gens l’encens, ou bien Il ne faut pas jeter le manche après la cognée, ou bien Les battus paient l’amende, etc.), mot qui était enveloppé dans l’action, et qu’il s’agissait de deviner : « de manière, dit Carmontelle (le grand créateur du genre), que si les spectateurs ne le devinent pas, il faut, lorsqu’on le leur dit, qu’ils s’écrient : Ah !
Cela fait allusion au parti du duc d’Orléans où se jeta Lauzun avec tous les mécontents de cour, les ambitieux évincés et les endettés.
« Où étiez-vous, disait Dieu à Job, lorsque je jetais les fondements de la terre ?
Car, sans point de doute, elle étoit proprement ce que Platon appelle une ville bouillante, ayant premièrement été fondée par hommes les plus courageux et les plus belliqueux du monde qui, de tous côtés, avec une audace désespérée, s’étoient illec (là) jetés et assemblés : et depuis s’étoit accrue et fortifiée par armes et guerres continuelles, tout ainsi que les pilotis que l’on fiche dedans terre, plus on les secoue et plus on les affermit et les fait-on entrer plus avant.
Voulant dire, par exemple, que les rois ne voient jamais le mal et le danger qu’à la dernière extrémité, et qu’on le leur déguise au travers de mille nuages : « La Vérité, dit-elle, que les poètes et les peintres représentent toute nue, est-toujours devant eux habillée de mille façons ; et jamais mondaine n’a si souvent changé de mode que celle-là en change quand elle va dans les palais des rois. » À propos du chapeau de cardinal qu’on avait promis depuis des années à l’abbé de La Rivière, favori de Monsieur, et que réclamait tout à coup le prince de Condé pour son frère le prince de Conti, elle dira que « la Discorde vint jeter une pomme vermeille dans le cabinet ».
Philippe (c’est le nom du valet de chambre, qui, indépendamment de toutes ses qualités, est studieux, instruit, amateur de lecture), Philippe, retiré du service et vivant auprès de son fils, a pris l’habitude de jeter ses pensées sur le papier ; et comme on lui proposait un jour de se faire imprimer : « Non, vraiment, répondit-ilh, je craindrais de trahir les secrets de l’humanité ; on sent le besoin de les cacher quand on connaît les hommes. » Vers le temps où, retiré en Champagne, à l’abri de la proscription, il écrivait sa Dot de Suzette, M.
Le premier pamphlet de Courier est sa Pétition aux deux Chambres, datée du 10 décembre 1816, et commençant en ces termes : « Je suis Tourangeau, j’habite Luynes sur la rive droite de la Loire, lieu autrefois considérable, que la révocation de l’édit de Nantes a réduit à mille habitants, et que l’on va réduire à rien par de nouvelles persécutions, si votre prudence n’y met ordre… » Suit l’exposé des faits, la rencontre de Fouquet à cheval allant au moulin, et du curé avec le mort qu’on mène au cimetière, Fouquet refusant de céder le pas, d’ôter le chapeau, lâchant même un juron au passage, et, pour ce méfait, pris un matin par quatre gendarmes et conduit pieds nus et mains liées entre deux voleurs aux prisons de Langeais ; puis, quelques mois après, l’arrestation de douze personnes dans ce petit endroit de Luynes, toutes enlevées nuitamment et jetées en prison pour propos séditieux ou conduite suspecte.
La préface commence par ces mots : « Rousseau répandit la consolation sur ma vie, je dois jeter quelques fleurs sur sa tombe. » En faisant imprimer cet opuscule à part, et en le dédiant à son frère, l’auteur parlait du Contrat social avec enthousiasme.
Voltaire continua de triompher en apparence, et de jeter au moins du trouble dans l’esprit des lecteurs les moins ordinaires.
Entre toutes celles qui pouvaient convenir à une âme élevée, à un homme public jeté avant l’heure dans la retraite, il n’en était point de plus digne assurément que de considérer l’idée religieuse dans ses rapports essentiels avec le maintien de la société.
Toutes ses lettres, toutes ses confidences respirent ce noble et vertueux effort ; quelque carrière qu’il entreprenne, il n’est pas de ceux qui ne s’y portent qu’à demi ; c’est dans ces années véritablement qu’on peut dire qu’il a jeté les fondements de son âme : Pour ce qui me regarde, écrit-il (15 novembre 1737), j’étudie de toutes mes forces, je fais tout ce que je puis pour acquérir les connaissances qui me sont nécessaires pour m’acquitter dignement de toutes les choses qui peuvent devenir de mon ressort ; enfin, je travaille à me rendre meilleur, et à me remplir l’esprit de tout ce que l’Antiquité et les temps modernes nous fournissent de plus illustres exemples.
C’est par trop manquer de prudence ; Dans l’eau c’est jeter ton argent : C’est vouloir… » — « Non, dit l’indigent, C’est acheter de l’espérance. » Ce ton légèrement attendri n’est pas le plus habituel chez Arnault.
Point de broderies ni d’ornements : un péplum jeté sur le corps de la déesse ; mais ce vêtement forme des plis infinis, dont chacun a une grâce qui lui est propre et qui pourtant se confond avec la grâce même des membres divins.
La Mme Lerat, de L’Assommoir, le sous-préfet de Poizat, le louche et gai bohème Gilquin, Lantier pâle, lent et ravageur, le marquis de Chouard, Trublot, sont tous admirablement saisis et jetés dans la vie commune, parlent et agissent avec des façons, des physionomies uniques.
C’est le vieux bourgeois de Paris, non le bourgeois badaud comme l’Étoile, notant jour par jour ce qui se passe dans la rue ; non le bourgeois railleur et frondeur comme Gui Patin, qui se dédommage dans les lettres familières du décorum des fonctions officielles ; non le bourgeois pédant et esprit fort comme Naudé, qui fait le politique parce qu’il a été le secrétaire d’un cardinal italien ; non le bourgeois naïf et licencieux, comme la Fontaine, qui flâne en rêvant ; — c’est le bourgeois parlementaire, né près du palais de justice, ayant jeté aux orties le froc de la basoche, mais ayant conservé le goût des mœurs solides et des sérieuses pensées, le bourgeois demi-janséniste, quoique dévoué au roi, aimant Paris, peu sensible à la campagne, détestant les mauvais poètes et les fausses élégances des ruelles et des salons, peu mondain, indifférent aux femmes, et par cela même un peu gauche, un peu lourd, mais franc du collier.
Qu’on jette en l’air une poignée de plumes, et chacune d’elles tombera à terre d’après des lois définies ; mais combien le problème de leur chute est simple auprès de celui des actions et réactions des plantes et des animaux sans nombre qui ont déterminé, pendant le cours des siècles, les nombres proportionnels et les espèces des arbres qui croissent maintenant sur les ruines indiennes !
Vous y trouvez bien quelques Sapho qui y jettent un ou deux cris qu’on entend toujours, quelques âmes divines comme sainte Thérèse, qui a fait, elle, son saut de Leucade dans le ciel, mais le talent littéraire, dans son expression la plus haute, est bien plus que des émotions éloquentes, que de sublimes palpitations.
C’était là, il me semble, ce qu’il fallait dire, puisqu’on risquait ce nom de de Maistre auprès du nom de Rivarol, il fallait tirer de la vie de Rivarol, jetée à tous les vents du monde et des ouvrages plutôt parlés qu’écrits de cet écrivain, un enseignement sévère et un avertissement utile.
De sorte que je n’ai eu aucun mérite à n’éprouver aucune hésitation à me jeter entre les balles et les obus ; je les voyais dévier autour de moi.
Il nous empêche de jeter les yeux à droite et à gauche, et même, la plupart du temps, en arrière ; il veut que nous regardions droit devant nous, dans la direction où nous avons à marcher.
Dans cette Jérusalem céleste, qu’avaient décrite les prophètes et qu’une secte chrétienne, les millénaires, attendait de siècle en siècle sous les nuits lumineuses du désert, le poëte avait ainsi jeté la vie nouvelle de l’amour pur.
En effet, ce n’est guère qu’entre 1645 et 1660 que nos auteurs dramatiques, Thomas Corneille, Scarron, Quinault, — pour ne rappeler que ceux dont le nom n’a pas péri tout entier, — se jettent à corps perdu dans l’imitation du théâtre espagnol, et qu’ils en viennent jusqu’à ne pouvoir plus seulement écrire une pièce de leur cru sans en placer la scène à Lisbonne ou à Salamanque. […] I, Paris, 1872], que « le privilège de la France de Louis XIV consiste à s’être trouvée placée dans des circonstances où son mouvement propre était dans le sens du mouvement général de l’Europe… de manière à la rendre l’interprète ou le véhicule des idées communes », on aurait jeté sans doute une vive lumière sur un temps de l’histoire de notre littérature, et particulièrement on en aurait assez bien expliqué la rapidité de propagation. […] De Julie d’Angennes, duchesse de Montausier [1607, † 1671]. — Que personne plus qu’elle n’a contribué à rendre l’hôtel de Rambouillet ridicule ; — et qu’en tout cas, les témoignages contemporains ne signalent rien en elle que d’assez déplaisant. — Le trop d’hommages l’a gâtée ; — ses soupirants ou ses « mourants » ont encouragé chez elle trop de prétentions à l’esprit ; — il semblé qu’elle ait été beaucoup plus entichée que sa mère de la dignité de sa naissance et de la hauteur de son rang ; — et enfin la longue attente qu’elle a imposée à Montausier ne laisse pas d’avoir jeté sur tous les deux quelque chose d’un peu comique. […] Cousin a jetées dans la circulation littéraire. — Que la diversité de ces interprétations ne procède : — que de l’état de mutilation où nous sont parvenues les Pensées ; — de l’erreur que l’on commet en y voulant voir une espèce de « confession » de Pascal, tandis qu’elles ne sont que les matériaux d’une « Apologétique » ; — et du peu d’attention que l’on donne à la succession des époques de la vie de Pascal. […] — Les « traitans » essaient de faire interdire Turcaret ; — intervention du Dauphin, fils de Louis XIV ; — Le Sage se brouille avec les comédiens ; — et se jette par dépit dans le théâtre de la Foire. — Il consacre désormais aux forains tous les loisirs que le roman lui laisse. — La collaboration de Le Sage, d’Orneval et Fuzelier ; — et de l’intérêt documentaire du théâtre de la Foire. — Le Diable boiteux, 1707 ; — et Gil Blas, 1715, 1724, 1735.
L’histoire nous montre, en effet, des périodes littéraires par excellence, où, malgré l’éclat que jettent les arts plastiques, la gloire des arts de la parole, et surtout de la poésie, qui en est le type, éclipse tous les autres arts de sa lumière, ou plutôt leur communique les rayons dont ils brillent. […] Cette accusation d’obscurité qui menace toute conception élevée et philosophique est particulièrement à redouter en France ; c’est l’anathème le plus irrémissible jeté sur un écrivain. […] Ce regard scrutateur que le poète jette sur la nature pour s’assimiler le monde des images, il le porte également sur le monde intérieur, sur l’intimité de l’âme humaine. […] D’ailleurs, quelque réprobation que mérite le relâchement des mœurs païennes, d’autant plus apparent que tout se passait chez ces peuples en plein soleil et que la sensualité n’y rendait pas encore à la vertu l’hommage de l’hypocrisie, nous cherchons encore quel siècle, quelle nation moderne, du haut de sa pudeur immaculée, a le droit de jeter la première pierre au siècle de Périclès. […] C’est de nos jours seulement qu’elle a jeté un solide éclat sous cette nouvelle enveloppe, dans Chateaubriand et dans quelques pages de ces nombreux romans qui semblent destinés à devenir les seuls poèmes populaires de notre temps.
Où les passions jetteraient-elles en effet de plus nombreuses, de plus vivaces, de plus tenaces racines ? […] qui jetteraient du jour, sans doute, sur la nature, et, comme on dirait aujourd’hui, sur la physiologie des passions ? […] Dans quels aveuglements l’amour jeta ma mère ! […] pouvons-nous croire au « sort » ainsi jeté sur elle ? […] Après cela, que reste-t-il, que de jeter quelques notes raciniennes, — plus raciniennes que Racine, — dans les rôles de tendresse, dans celui de son Xipharès et de sa Monime, je veux dire de son Arsame et de sa Zénobie : Lève-toi : c’en est trop.
Il chante Michelet quand il célèbre ceux qu’il aime, et il le chante encore quand il jette au cadavre de ceux qu’il n’aime pas son éloquente injure. […] L’abus de l’imagination a jeté les Hugo même et les Lamartine, les George Sand et les Michelet, dans les erreurs d’art que l’on sait, — car je ne veux rien dire ici des autres ; — mais l’abus de l’imagination, on le voit, c’est la suite chez eux d’un excès de confiance en eux-mêmes ; c’est donc encore et toujours l’exagération du sentiment individuel ; c’est proprement une conséquence, et la manifestation extérieure de l’hypertrophie du Moi. […] Je n’entre pas ici dans le détail des choses ; je ne rappelle pas qu’une vingtaine de pages sur la Tragédie de Racine ont renouvelé l’histoire littéraire du xviie siècle ; qu’à tout ce que contenait un seul article sur Balzac, les théoriciens du naturalisme n’ont rien ajouté que pour en compromettre la doctrine en l’exagérant ; qu’un peu plus tard, cinq ou six leçons sur l’Idéal dans l’art ont jeté, pour ainsi dire, dans la circulation littéraire, plus d’idées sur l’art et sur l’histoire de l’art qu’aucun livre peut-être depuis l’Esthétique d’Hégel.
J’avais ôté mon justaucorps, j’allais achever de me mettre en chemise, et Mlle votre fille n’attendait que le moment de m’embrasser et de se jeter à corps perdu sur moi. […] La position qu’il prit dans la querelle peut jeter, d’autre part, un jour assez vif sur la nature de son talent. […] Mais il semble bien que la nécessité de vivre, jointe à son goût pour le vin, disent les uns, pour les femmes, disent les autres, l’aurait une ou deux fois jeté dans les plus cruelles aventures. […] Un désespoir d’amour l’avait jeté dans le cloître, un besoin vague et général d’aimer l’en avait fait sortir : « Qu’on a de peine, a-t-il dit lui-même, à reprendre quelque vigueur quand on s’est fait une habitude de sa faiblesse, et qu’il en coûte à combattre pour la victoire quand on a trouvé longtemps de la douceur à se laisser vaincre ! […] Tourmenté de cette inquiétude et victime de cette mélancolie qui tour à tour l’ont jeté du siècle dans le cloître et du cloître ramené au siècle, s’il cherche dans le travail un moyen de vivre, il y trouve d’abord une occasion, avidement saisie, d’épancher sa sensibilité.
« Mon imagination, dit-il, prit un parti qui me sauva de moi-même et calma ma naissante sensualité ; ce fut de se nourrir des situations qui m’avaient intéressé dans mes lectures, de les rappeler, de les varier, de les combiner, de me les approprier tellement que je devinsse un des personnages que j’imaginais, que je me visse toujours dans les positions les plus agréables selon mon goût, enfin que l’état fictif où je venais de me mettre me fît oublier mon état réel, dont j’étais si mécontent28. » Dans une situation analogue, Chateaubriand agit de même, mais invente davantage : « L’ardeur de mon imagination, dit-il, ma timidité, la solitude tirent qu’au lieu de me jeter au dehors, je me repliai sur moi-même ; faute d’objet réel, j’évoquai, par la puissance de mes vagues désirs, un fantôme qui ne me quitta plus… je me composai donc une femme de toutes les femmes que j’avais vues… Cette charmeuse me suivait partout, invisible ; je m’entretenais avec elle comme avec un être réel ; elle variait au gré de ma folie… Pygmalion fut moins amoureux de sa statue : mon embarras était de plaire à la mienne. […] Zola écrit, il élargit peu à peu, plus qu’il ne revient en arrière et ne corrige… Peu à peu les personnages se dessinent, déduits des idées générales ; quelques-uns cependant sont observés, mais aucun ne sort d’un tiroir où il avait été jeté dans l’idée d’être utilisé un jour. […] Toujours une circonstance antérieure jette dans son esprit la semence qui devra mûrir lentement et ne donner ses fruits que longtemps après ». […] En 1859, il jette les fondations de son familistère, en 1880 la dernière aile bâtie du « palais social » est complètement occupée. […] ” Delacroix jeta un cri de saisissement, comme si je l’eusse réveillé en sursaut ; il me dit : “Il fait trop chaud ici, je deviens fou...”
Quelques-uns, après avoir mangé, se jetèrent pendant une heure sur des bottes de paille, au fond des hangars. […] Tantôt il décrit le riant pays wallon et ses villes si cordiales « qu’elles se jettent au cou du premier qui les aime, et, pour lui, n’ont guère de caché ». […] Telle apparaît, succinctement résumée, l’œuvre de celui qui « sur les épaules de la muse belge, encore frêle et timide, a jeté, d’un geste libre et puissant, une large étoffe aux couleurs étincelantes137 ». […] Je me jette moi-même au ban de l’Univers ; Je veux qu’on me crache à la face ; Qu’on me coupe ces mains qui ont tué ; Qu’on m’arrache ce manteau blanc prostitué ; Qu’on appelle, qu’on ameute la populace. […] Il convient, pour en apprécier la vigueur, de jeter aussi un regard sur les nombreuses revues.
Dans l’un et l’autre cas, n’ayons aucun scrupule de montrer au peuple cette bastille à jeter par terre et déchaînons-le. […] Les bourgeois à leur tour deviennent l’objet de l’envie de ce même peuple, qui jette à bas cette oligarchie ploutocratique. […] Le diplomate, pour reprendre une théorie et une formule chères à Balzac, constitue une espèce sociale, comme le soldat, l’avocat, le médecin, le prêtre, c’est-à-dire qu’il possède des vertus spéciales produites par la discipline professionnelle, vertus de silence, de calcul, de tenue et en particulier de circonspection, — mot très bien fait, que l’on doit traduire par son étymologie : regard jeté à l’entour. […] Envahir la Belgique, ce n’était pas seulement manquer à un engagement d’honneur, c’était atteindre la Grande-Bretagne au plus vif de sa sensibilité nationale et la jeter dans le conflit. […] Ces documents, bien rares, jettent un jour très intéressant sur la diplomatie d’Henri IV.
Telle était la tyrannie exercée par la mode italo-hispanique, qu’à côté des mauvais poètes qui s’y jetaient, en pleine illusion, par médiocrité et frivolité, des esprits supérieurs, de grands poètes, qui avaient goûté de la vraie gloire, allaient demander à la mode les succès bruyants et lucratifs. […] Les esprits médiocres, qui ne sont que les esclaves de la mode, s’y jetaient sans réserve, et vivaient de cette fumée ; les hommes de génie, tant le succès leur est nécessaire, l’auraient cherché dans le galant plutôt que de s’en passer. […] Qu’on me donne à lire une ode, je m’attends à quelque chant sublime ou gracieux ; si l’inhabileté du poète me jette dans quelque récit, ou me détourne vers des idées satiriques, il mécontente ma disposition lyrique, sans contenter la disposition que je prête soit à l’épopée, soit à la satire.
Le pauvre architecte jeta là son plan et s’en alla planter ses choux.
Il leur jette à la face, dès le premier abord, toutes les épithètes injurieuses de Plaute, sans parler de ces autres injures plus raffinées qui n’ont pu être inventées que depuis le xvie siècle et après la découverte de l’Amérique.
Je m’aperçus qu’il n’était pas étranger aux beaux-arts ; il jeta sur le papier, pour l’embellissement de la ville de Düsseldorf, quelques idées dont on tira profit.
Feugère et en y applaudissant volontiers dans son ensemble, il a laissé percer un regret : Pourtant, bibliographiquement parlant, dit-il, je suis un peu blessé de cette sorte de profanation qui consiste à jeter à profusion à la multitude ce qui, jusque-là, avait été le partage de quelques lecteurs d’élite.
Jouir d’une mine qu’on a jugée la plus avantageuse, qu’on ne voudrait pas changer pour une autre, et voir devant ses yeux un maudit visage qui vient chercher noise à la bonne opinion que vous avez du vôtre, qui vous présente hardiment le combat, et qui vous jette dans la confusion de douter un moment de la victoire ; qui voudrait enfin accuser d’abus le plaisir qu’on a de croire sa physionomie sans reproche et sans pair : ces moments-là sont périlleux ; je lisais tout l’embarras du visage insulté : mais cet embarras ne faisait que passer.
Il faut le voir dans cette comparaison à laquelle il se complaît et qui jette un jour distinct sur deux figures qu’on est porté à confondre.
Ce qui est assez particulier, c’est que ce comte de Saint-Alban, dessiné de la sorte, nous est donné de son propre aveu comme ayant été à l’origine, et presque dès le collège, un libéral sans préjugés et un ambitieux de la belle gloire, de celle qui s’acquérait dans les luttes de la parole publique et de l’antique forum ; ce serait un grand citoyen manqué, un Chatam venu trop tard ou trop tôt, désœuvré dans le pays de Mme de Pompadour, et qui, voyant le noble but impossible, en aurait dédaigné de moindres, et se serait jeté, de dégoui et de pitié, dans les délices : Les plaisirs sont la seule ressource de l’homme ardent et passionné dont l’ambition est contrariée !
Le bétail était mené sûrement aux champs, et les laboureurs versaient les guérets pour y jeter les blés que les leveurs de taille et les gens de guerre n’avaient pas ravagés.
Il est plus certain qu’il fut très mal accueilli sur le territoire de l’évêque d’Orléans, Thibault d’Aussigny, et qu’y ayant commis, par suite de cette même nécessité qui fait saillir le loup hors du bois, quelque nouveau méfait, quelqu’une de ces peccadilles dont il était si fort coutumier, il fut jeté dans les prisons de Meung-sur-Loire, y languit tout un été au fond d’un cul de basse fosse, et ne dut sa grâce qu’à Louis XI, nouvellement roi, qui vint à passer en cette ville de Meung dans l’automne de cette année 1461.
Qu’on imagine ce que dut produire d’explosion et de colère une telle évocation, une telle menace de reproche jetée à la face de cette Chambre plus que royaliste, accusée à bout portant de désemparer, de découronner, de décapiter la royauté !
Boulmier, qui est solide et même ferré sur ces matières du xvie siècle, avait annoncé, de plus, le dessein de réhabiliter Salmon Macrin, un poète latin dans le genre lyrique, contemporain et ami de Du Bellay, de Ronsard et autres novateurs, et il semblait se réserver de lui découvrir une certaine influence occulte, et non encore reconnue, sur le développement de la poésie française ; je ne vois pas qu’il ait mis jusqu’ici à exécution ce projet et cette promesse qu’il avait jetée d’un air de défi ou de paradoxe.
Un jour, dans le salon impérial, il s’était amusé machinalement, et pour occuper ses doigts, à façonner avec de la cire un petit casque : l’empereur y jette les yeux, trouve le modèle parfait, et dès le lendemain le fait adopter par une partie de sa cavalerie.
A l’intérêt que le roman et le théâtre avaient jeté sur l’infortuné don Carlos, à cet amour partagé qui aurait fait deux victimes, à cet enthousiasme de philosophie et de liberté dont le prince espagnol aurait été le complice et le martyr, est substitué, d’après des pièces authentiques, le récit d’une longue démence et d’une maladie terminée par la mort.
Avant lui le carnaval jetait et restait presque uniquement composé des types de l’ancienne Comédie Italienne, Pierrot, Arlequin, etc.
Après le trouble que venaient de jeter les documents nouveaux dans l’idée qu’on se faisait d’elle, il était nécessaire de repasser sur les traits de son caractère et de dresser de nouveau son image.
Saint-René Taillandier) nous montre en conséquence Mme Favart « se moquant des menaces aussi bien que des promesses, en butte à de lâches intrigues, poursuivie, jetée au fond d’un cachot, gardant purs et intacts la dignité de son art et l’honneur de son nom : rare leçon donnée par une comédienne à une société corrompue !
Berthier, dans ses hautes fonctions et dans son aptitude limitée, flaira de bonne heure en Jomini un talent supérieur, un rival possible auprès de Napoléon ; les missions de confiance que Jomini va remplir au quartier général impérial dans les campagnes de 1806-1807 éveilleront surtout la jalousie du major général, qui ne perdra aucune occasion dès lors de rabaisser, de retarder, s’il était possible, et finalement de décourager, d’ulcérer et d’outrer, jusqu’à le jeter hors des gonds, un étranger de mérite, et de l’ordre de mérite le plus fait pour lui porter ombrage.
Notre chétive et frugale théorie de propriété littéraire n’a qu’un avantage : tant qu’elle a régné dans les lettres, on n’y jetait pas un éclat de financier aux yeux des passants, on ne les attroupait pas non plus autour de ses misères.
Ampère se jeta avec tout le feu de ces années d’assaut et d’avant-garde ; mais, par la forme même de ses projets et de ses ébauches, il dénota tout d’abord son instinct des grands ouvrages et des longues entreprises.
L’Allemagne de Mme de Staël n’en est pas moins un brillant assaut, pour avoir été précédé, avant 89, de toutes ces fascines jetées dans le fossé.
Arrivé le dernier, il a trouvé moyen d’y jeter toutes sortes de vues nouvelles, inattendues.
Même après que leur front chauve a livré ses feuilles au vent d’automne, leur nature vivace jette encore par endroits des rameaux perdus et de vertes poussées.
Il n’a même pas beaucoup de couleur, sinon dans les sujets où l’imagination espagnole jette encore ses feux à travers le langage raisonnable de l’auteur français.
Quand il veut les relier directement l’une à l’autre, ces ponts qu’il établit, et qui sont ses transitions, sont aussi maladroitement jetés que possible : rien de plus ridicule que les transitions du second chant.
Puis, après le mouvement tournant, « les fuyards qui se jettent en dehors, dans la direction du bois, sont ramassés par Gassion ou par les Croates ».
Madame se jetait aux pieds du farouche époux, prodiguait les supplications éplorées et les plus tendres harangues.
Bien des peintres sont tombés dans le défaut de mettre des contrastes par-tout & sans ménagement, desorte que lorsqu’on voit une figure, on devine d’abord la disposition de celles d’à côté ; cette continuelle diversité devient quelque chose de semblable ; d’ailleurs la nature qui jette les choses dans le desordre, ne montre pas l’affectation d’un contraste continuel, sans compter qu’elle ne met pas tous les corps en mouvement, & dans un mouvement forcé.
Pendant que la Rochefoucauld jetait un regard si triste et si profond sur une époque qui avait forcé tous les caractères, le jeune La Bruyère faisait son apprentissage d’observateur sur une société disciplinée, où les vices comme les vertus étaient revenus à leurs proportions naturelles, et où l’état de santé avait remplacé l’excitation de la fièvre.
C’est ainsi également que, hors d’état de choisir, mais forcé de choisir, on jette en l’air une pièce de monnaie pour tirer à pile ou face.
Cette veine et cette vogue de Lesage vaudevilliste mériteraient bien une étude à part ; car, remarquons-le, ce n’était pas seulement les besoins de la vie qui le jetaient là, c’était aussi chez lui attrait et vocation.
Pourtant, à un certain jour, ennui ou caprice, ou ressouvenir d’Esther, elle commençait à se jeter du côté de la dévotion, et d’une dévotion peu commode : elle avait pris pour directeur le père de La Tour, homme de beaucoup d’esprit, sans complaisance, et qui est bien connu comme général de la congrégation de l’Oratoire.
Mais il n’a pas d’effort à faire pour s’y conformer ; sauf l’élévation qui, à un ou deux endroits, lui sort du cœur, et la verve qui, en trois ou quatre passages, est excellente, il est dans Le Vieux Cordelier ce qu’il était dans ses précédents écrits, incohérent, indécent, accouplant à satiété les images et les noms les plus disparates, accolant Moïse à Ronsin, profanant à plaisir des noms révérés, disant le sans-culotte Jésus en même temps qu’il a l’air de s’élever contre l’indigne mascarade de l’évêque apostat Gobel ; en un mot, il parle dans Le Vieux Cordelier l’argot du temps ; il a le style débraillé, sans dignité, sans ce respect de soi-même et des autres qui est le propre des époques régulières et la loi des âmes saines, même dans les extrémités morales où elles peuvent être jetées.
Quand j’ai parlé de Mirabeau il y a quelques semaines, j’ai annoncé, en finissant, qu’une publication se préparait qui devait jeter la plus vive lumière sur le Mirabeau historique et définitif et sur son rôle durant la Révolution.
Lui-même ou les personnages qu’il met en scène parlent volontiers de nature ; ils ont volontiers les yeux humides (« moi qui pleure facilement », dit-il), ils se jettent avec effusion dans les bras les uns des autres, ils arrosent leurs embrassements de larmes.
Cette fin prématurée doit disposer à quelque indulgence pour un homme d’un esprit ferme et brillant, que la société avait beaucoup distrait, que la Révolution avait jeté dans l’exil, et qui n’a pu mener à fin de grands projets d’ouvrages, sur lesquels il a mieux laissé pourtant que des promesses.