Nous avons parlé, il est vrai, de plusieurs Ecrivains qui n’eussent mérité que notre silence, si d’autres raisons ne nous eussent pas fait un devoir d’en parler.
& à Madame Dacier, croyant que le dérangement de leurs affaires étoit la principale raison qui les déterminoit à abandonner Paris pour se retirer en Province.
On la verroit sans doute avec le même plaisir dans la Capitale, si des raisons, dont il seroit aisé de deviner la cause, n’empêchoient les Comédiens de la jouer.
En effet, il paroît, par elles & par la raison même, que son adversaire confondoit trop la vie des Solitaires avec celle des Religieux.
M. de Mairan, dans un autre genre de style, mais toujours assaisonné d’une raison lumineuse & nourrie par des connoissances profondes, a traité avec succès l’une & l’autre matiere, en sorte que l’estime de ses Concitoyens a été confirmée par les éloges de tous les Savans de l’Europe.
Productions toujours marquées au même coin de raison, de lumiere, & d’utilité.
Avec des expressions si heureuses, pouvoit-il espérer de se faire bien des partisans parmi les personnes dont les suffrages ne s'accordent qu'à la raison & à l'honnêteté ?
On croit être plus habile, parce qu’on redresse quelques erreurs de physique (qu’on remplace par toutes les erreurs de la raison) ; et l’on rétrograde en effet, puisqu’on perd une des plus belles facultés de l’esprit.
À plus forte raison rentraient-ils facilement dans ce joyeux oubli de tout grand débat où Élisabeth aimait à les entretenir. […] Supérieur à tout par la raison, accessible à tout par la sympathie, il ne voit rien qu’il ne le juge, et il le juge parce qu’il le sent. […] Des imaginations plus susceptibles que délicates, plus faciles à émouvoir qu’à détromper, n’avaient pas besoin de ces ménagements qu’exige aujourd’hui une raison inquiète, incessamment occupée à surveiller même nos plaisirs. […] Dans cette condition de la nature humaine a été puisé le véritable motif des unités de temps et de lieu, si souvent et si mal à propos fondées sur une prétendue nécessité de satisfaire la raison en accommodant la durée de l’action réelle à celle de la représentation théâtrale ; comme si la raison pouvait consentir à ce que, dans l’intervalle d’un entr’acte de quelques minutes, on crût passer du soir au matin sans avoir dormi, ou du matin au soir sans avoir mangé ! […] Il faut que la raison soit contente en même temps que l’imagination sera occupée.
Le choix de Saint-Maur fut déterminé par deux raisons. […] L’ouvrage eut un immense succès, si bien que les acteurs du Marais s’empressèrent de la reprendre et ils eurent raison, car tout Paris y courut. […] Lully se prêta avec peine à ses désirs, et il avait raison, car il échoua complétement. […] Boileau disait : le pompeux Corneille et le tendre Racine, et il avait raison. […] On avait bien raison, là-haut, de plaindre la Macédoine de n’avoir pas eu de Petites-Maisons pour le renfermer.
Les couplets les plus passionnés et les plus touchants de Racine, l’explosion de fureur d’Hermione, la prière de Clytemnestre pour sa fille, sont de longues chaînes de raisons, qui mènent l’esprit de l’auditeur à une conséquence logique, conforme à l’émotion dont son cœur est pénétré.
Il se rendit à ces raisons, & fit par écrit ce qu’il n’avoit pas voulu faire de vive voix : Barbier d’Aucour fut loué dans son Discours imprimé.
Gresset, sont également ingénieuses & sages, toujours imaginées avec élévation, toujours écrites avec élégance, respirant par-tout la raison, la décence, l’agrément, & toujours couronnées par de brillans succès ».
Ce trait seul suffit pour faire connoître le caractere de ce Romancier, à qui l’on reproche avec raison d’avoir communiqué son gasconisme à la plupart de ses Héros.
Ils avoient raison, car on ne pouvoit les traiter plus durement.
Une vanité mal éclairée a donc pu seule le porter à changer son nom en celui de Delisle, & Moliere a eu raison de tourner en ridicule cette foiblesse.
Il est vrai qu’il ne fut point heureux dans ce genre d’escrime ; la partie étoit trop inégale : le goût & la raison assaisonnés du sel de l’Epigramme, seront toujours les fléaux du médiocre talent ; mais enfin il ne lui vint pas dans l’esprit d’employer le crédit de ses Mécenes, puissans & en grand nombre, pour opprimer ses Censeurs.
Nous voudrions bien pouvoir également, en faveur de cette Lettre, réformer ce que nous avons déjà dit de ses Poésies, & nous joindre aux six Journalistes qui ont honoré ce Poëte d’éloges fort au dessus de ses espérances, comme il nous en assure ; mais les raisons de M.
Cependant M. de Voltaire n’y a répondu que par des plaisanteries & des injures toujours plus faciles que les raisons, surtout quand on défend une mauvaise cause.
Aux lumieres d’une raison saine, M. l’Abbé Pernety a ajouté les richesses de l’érudition.
La raison en est toute simple.
La réserve imposée à tous les talens quelconques, en proscrit ce qui peut blesser & aigrir, sans ramener aux mœurs & à la raison.
Un peu plus de noblesse & moins de prolixité dans le langage, rendroient ce Roman irréprochable aux yeux de la critique, comme il l’est aux yeux des mœurs & de la raison.
pour forcer ma raison à l’entendre, Il dit trop tard, ou bien il dit trop bas : « Vous qui savez aimer, ne m’aimez pas ! […] Des deux filles qu’elle perdit, l’une, l’aînée, personne d’un rare mérite, d’une sensibilité exquise jointe à une raison parfaite, était poète aussi ; dans des vers d’elle sur le jour des morts, je me souviens de celui-ci qui s’adressait aux êtres chers qui nous ont été ravis : Vous qui ne pleurez plus, vous souvient-il de nous ?
Je n’ignore pas l’espèce de monarchie qu’on accorde en France à Bossuet, mais c’est une raison de l’attaquer plus fortement. […] Joseph de Maistre injuste dans sa critique et dépassant presque toujours le but qu’il voulait atteindre, parce que, pour ne suivre que les inspirations de la raison, il lui aurait fallu avoir dans l’esprit plus de calme qu’il n’en Avait. » — Ce sont là des truisms, comme disent les Anglais, et il semble que le réfutateur ait voulu infliger cette pénitence à l’impatient et paradoxal de Maistre, de ne pas les lui ménager.
Quels généraux, quels soldais n’ont jamais fait dans la guerre que ce qu’il fallait faire, et ont su s’arrêter où la raison froide et tranquille aurait désiré qu’ils s’arrêtassent ? […] En assistant à tant de catastrophes inévitables, en voyant passer et s’accomplir sous ses yeux ce grand drame de la Révolution, où la fatalité plane comme dans une tragédie d’Eschyle, toute âme honnête se plaît, dans le calme de la raison et de la conscience, à imaginer un rôle de conciliation, de justice et de miséricorde, rôle inutile et sublime, que nul n’à rempli, que nul ne pouvait remplir, mais dont à cette distance et par une illusion bien permise on ose se croire capable, si les destins recommençaient.
Racine, en imitant les Grecs dans quelques-unes de ses pièces, explique, par des raisons tirées des passions humaines, les forfaits commandés par les dieux ; il place un développement moral à côté de la puissance du fatalisme : dans un pays où l’on ne croit point à la religion des païens, un tel développement est nécessaire ; mais chez les Grecs, l’effet tragique était d’autant plus terrible, qu’il avait pour fondement une cause surnaturelle. […] On dit, avec raison, qu’on ne pourrait pas mettre sur le théâtre français la plupart des pièces grecques, exactement traduites : ce ne sont point quelques négligences de l’art qui empêcheraient d’applaudir à tant de beautés originales ; mais on aurait de la peine à supporter maintenant un certain manque de délicatesse dans les expressions sensibles.
À plus forte raison n’a-t-il rien d’un jeune épuisé d’aujourd’hui. […] Le lecteur me trouvera mauvais fils, il aura raison. » En supposant même que tous les griefs de Stendhal aient été fondés, on se dit qu’il y a des sentiments qu’on peut sans doute éprouver malgré soi, mais qu’il est odieux de s’y complaire, de les développer par écrit, parce qu’ils offensent, tout au moins, des conventions trop anciennes, trop nécessaires à la vie des sociétés, et vénérables par là même.
Il le fait sans nous, et probablement il a raison. […] Il faut que la raison sache se résigner à être primée par les gens qui ont le verbe tranchant et l’affirmation hautaine.
Cette maxime, que nous ne prétendons pas étendre à tous les genres, mais qui, bien approfondie, suffit seule pour conserver la couronne poétique à Fénélon, se trouve développée dans les Ouvrages de cet Ecrivain, par des raisons aussi lumineuses que solides. […] Mais sans aigreur dans la dispute, sans entêtement dans ses idées, sans acharnement contre ses Adversaires, l’Archevêque de Cambrai se contenta d’exposer ses raisons, & les abandonna dès qu’il eut lieu de connoître qu’il défendoit une mauvaise cause.
Les siennes sont le triomphe de la poësie & de la raison. […] Mais toutes ces considérations réunies ne sont pas, au jugement de M. de Voltaire, des raisons suffisantes pour blanchir Rousseau, & condamner les autres.
L’action du cinquiéme acte où elle est placée, consiste à rendre la raison à Roland, qui est sorti furieux de la scéne à la fin du quatriéme acte. […] Le sentiment nous enseigne d’abord qu’elle est très-propre à calmer les agitations de l’esprit, et comme une discussion bien faite justifie toûjours le sentiment, nous trouvons en l’examinant par quelles raisons elle est si propre à faire l’impression que nous avons déja sentie.
Il y a même de bonnes raisons pour croire que la premiere cause du changement qui survint dans la déclamation théatrale du temps de Ciceron, venoit de ce que les romains, qui depuis cent ans avoient beaucoup de commerce avec la Gréce où ils alloient même étudier les arts et les sciences, changerent alors leur maniere de prononcer. […] Quelques artisans restent en deça des bornes que la raison prescrit.
H. avait-il raison de relever les émotions accessoires auxquelles chaque poète fait le plus souvent appel. […] Mais l’étude des grands hommes permettra, en vertu de son principe, de mesurer, avec une certaine approximation, l’effet de ces deux forces, l’hérédité, le milieu, « dont les résultats, remarque-t-il avec raison, sont d’autant moins discernables que la complexité sociale s’accroît » (p. 218).
Touché et séduit par l’idée qu’il eût pu, s’il avait vécu de son temps, étaler ses aiguillettes et ses canons à côté de la robe bouffante de madame de Fiesque ou de la marquise de Sablé, Paulin Paris n’a pas un mot profond, grave et vrai, sur ce xviie siècle qui attend toujours son juge, et qui, pour des raisons diverses, impose à tant de gens, tous plus ou moins compromis dans cette conspiration contre l’Histoire qui dure depuis deux cents ans et que de Maistre a dénoncée, mais sans pouvoir la faire condamner. […] Nous avons dit plus haut ce dont il se préoccupe et ce qu’il admire, les innocentes contemplations auxquelles il se livre sur la beauté de ces compagnies qui charment aussi la grave raison de Cousin dans sa Madame de Longueville.
Hildebrand ne lui a pas seulement paru un grand homme, qui a plus ou moins raison et qui s’est plus ou moins trompé dans ses desseins, selon la triste condition des grands hommes. […] Il lui a paru un grand homme qui a toujours raison et qui ne s’est jamais trompé.
Enfin, dernière raison, et la plus puissante, quand on a mis son pied dans ce qu’on appelle présentement le réalisme, il n’est pas étonnant que d’horreur on s’en aille l’essuyer jusqu’au balai du petit laquais Almanzor ! […] Et il a raison !
Pour lui, la Révolution, qu’il disait — et avec raison — ne s’incarner dans aucun homme, se fait femme aujourd’hui, et tout aussitôt, avec la piété d’un enlumineur de fétiches, le voilà qui se met à nous peindre ce multiple visage de femme sous lequel l’idée révolutionnaire lui apparaît, peut-être d’autant plus puissante… Il est vrai qu’un remords le prend vers la fin de son travail : « Le défaut essentiel de ce livre — dit-il — c’est de ne pas remplir son titre. […] Quant à sainte Condorcet, il fait ce qu’il peut pour la placer très haut dans le paradis jacobin et philosophique entr’ouvert à ses mystiques regards au-dessus de la tête de la déesse de la Raison, et ce n’est pas sa faute, à lui, si elle n’y a pas une des plus splendides auréoles : « Elle ressemblait — dit-il — à l’ange de la métaphysique. » Apparemment, un des anges du paradis en question !
Celui qu’elle croit le plus grand de ses récents grands hommes (pour des raisons qu’on n’a point ici à examiner, cela la regarde !) […] Tout ce qui a de bonnes raisons pour vouloir que l’art soit sans âme est gœthiste de fondation.
S’il ne l’a point fait et si l’art y perd, l’art concentré, fini, qui taille son diamant et l’enchâsse solidement pour qu’il reste où il brille le mieux, c’est qu’il avait ses raisons sans doute, — des raisons plus hautes que l’intérêt d’un ouvrage et même d’un chef-d’œuvre !
de plus vain, de plus inutile, de plus sans raison d’être, — voilà pour le fond ! […] manqué par Calvin ; car la vie privée de saint Louis se trouve dans Joinville, et Guizot, qui n’avait pas de raisons pour ne pas la copier, l’a copiée.
Seulement, en supposant qu’il en eût, ce serait du génie de bien mauvais ton ; et il a raison, je pense comme lui, il faudrait décourager les jeunes gens d’en avoir comme cela. […] C’est un incorrect, — comme Alfred de Musset, qui avait aussi des rayures dans son marbre, et à qui la Critique, avec juste raison, l’a tant reproché.
Et être resté pourtant poète là dedans, s’y être préservé, ne pas s’y être éteint, c’est certainement avoir en soi un de ces filons de poésie indestructible qui font croire avec raison à ceux qui l’ont que la poésie est immortelle ! […] si on admire, avec juste raison, les esprits d’une puissance dramatique assez grande pour s’incarner dans une autre peau que la leur et devenir, à leur choix, Othello ou Macbeth, le père Goriot ou Vautrin, que ne doit-on pas penser de ceux qui, laissant là la personnalité humaine, s’incarnent dans des êtres étrangers à l’humanité, comme un hêtre ou comme un centaure ?
Oui, laissons là pour un moment la personne et le talent de Mme Valmore, mais ce cri qui jaillit du fond du cœur frappé, comme le sang jaillit d’une veine ouverte, mais cette éloquence irrésistible de la blessure ou de la caresse, mais cette émotion qui doit être, en poésie, prépondérante même à la pensée, à plus forte raison à l’image, à la phrase, au rythme, à l’harmonie, enfin à tout ce qui entre nécessairement à n’importe quel degré dans la trame d’une poésie quelconque, cette émotion ne constitue-t-elle pas certainement et dans la mesure où elle existe la poésie la plus élevée et la plus profonde, et par la raison souveraine que l’homme mesure tout à lui-même et que c’est le battement de son cœur qui donne le branle à l’univers !
Elles avaient leurs raisons pour cela. […] Mais il n’y a pas les mêmes raisons pour que le lâche nous plaise, à nous, comme le laquais a plu dans la société du xviiie siècle.
C’est un positif de raison comme de style, qui, à force de positif, a la main gourde dont parle Montaigne. […] De l’imitation consciencieuse qui veut être habile, de l’imitation qui est même parfois réussie dans la dégradation de ce qu’elle imite… Vous voyez qu’en fait de romans et de contes, nous, avions raison de dire que nous touchons tout à l’heure à la période des Luce de Lancival et des Carion de Nisas !
On peut dire d’abord que l’érudition étouffa le génie ; et l’on en conçoit les raisons. […] Par la même raison, ils doivent encore être plus loin de la finesse de l’esprit et des idées, qui ne peut être que le partage d’un siècle exercé et très poli, et qui peut-être suppose déjà un peu le dégoût des grandes choses et le désir de s’ouvrir de nouvelles routes.
C’est lui qui nous pourvoit de ce que nous appelons nos « bonnes raisons ». […] Et c’est une des raisons de la résistance qu’il a rencontrée. […] Je ne vois donc aucune raison de ne pas dire comment il était. […] De plus il n’évoque que des raisons de convenance personnelle plutôt que la réprobation, qu’une impossibilité morale. […] Mais justement il semble ne penser jamais qu’à des raisons extérieures.
Lorsque la guerre de la Succession commença (1702), voyant de nouvelles promotions se faire, dans lesquelles figuraient de moins anciens que lui et y étant oublié, il songea à se retirer du service, consulta plusieurs amis, trois maréchaux et trois hommes de Cour, et sur leur avis unanime « qu’un duc et pair de sa naissance, établi d’ailleurs comme il était et ayant femme et enfants, n’allait point servir comme un haut-le-pied dans les armées et y voir tant de gens si différents de ce qu’il était, et, qui pis est, de ce qu’il y avait été, tous avec des emplois et des régiments », il donna, comme nous dirions, sa démission ; il écrivit au roi une lettre respectueuse et courte, dans laquelle, sans alléguer d’autre raison que celle de sa santé, il lui marquait le déplaisir qu’il avait de quitter son service. « Eh bien ! […] Ma curiosité, indépendamment d’autres raisons, y trouvoit fort son compte ; et il faut avouer que, personnage ou nul, ce n’est que de cette sorte de nourriture que l’on vit dans les cours, sans laquelle on n’y fait que languir. » L’ambitieux pourtant ne laissait pas sa part d’espérances : il était jeune ; le roi était vieux ; Louis XIV vivant, il n’y avait rien à faire ; mais après lui le champ était ouvert et prêtait aux perspectives. […] Quant à Voltaire, il en parle, il est vrai, comme d’un aventurier d’esprit et d’un libertin : on en voit assez les raisons sans les faire, de sa part, plus générales et plus injurieuses à la classe des gens de lettres qu’elles ne le sont en effet. […] Mais il ne faut pas croire que cette production comme naturelle n’ait pas sa raison d’être, sa majesté et souvent sa grâce. […] C’est ce qu’on ne saurait trop maintenir, et Saint-Simon n’a eu que raison quand il a conclu de la sorte en se jugeant : « Ces mémoires sont de source, de la première main : leur vérité, leur authenticité ne peut être révoquée en doute, et je crois pouvoir dire qu’il n’y en a point eu jusqu’ici qui aient compris plus de différentes matières, plus approfondies, plus détaillées, ni qui forment un groupe plus instructif ni plus curieux. » La postérité, après avoir bien écouté ce qui s’est dit et se dira encore pour et contre, ne saurait, je le crois, conclure autrement.
Une certaine légèreté d’agrément qui est, à proprement parler, l’honneur poétique et littéraire, manqua donc à la culture genevoise ; Senebier le reconnaît lui-même et en recherche les raisons : « La plupart des écrivains genevois, profonds dans l’invention et la déduction de leurs idées, sont faibles pour le coloris et pesants dans le style ; ces défauts ne naîtraient-ils pas de la gravité et de la réflexion que le sentiment de la liberté inspire, que le goût de prononcer sur les objets importants du gouvernement nourrit109… » Cela me paraît venir surtout de ce qu’en écrivant, les auteurs genevois, même ceux qui ont le sentiment du style, ne se sentent pas complétement chez eux dans leur langue ; la vraie mesure, le vrai niveau si mobile de cette langue, n’est pas au bord du Léman, mais au bord de la Seine ; ils le savent bien, ils s’efforcent, ils se contraignent de loin pour y atteindre, et l’on s’en aperçoit. […] On ne saurait croire, hors de Paris, combien nous sommes sensibles, au delà de tout, aux plus légers manques de distinction à l’extrême surface, et c’est aussi la seule raison (si raison il y a) qui m’empêchera d’oser considérer comme chef-d’œuvre l’Héritage, dont l’idée est très-heureuse, et l’exécution souvent fine et toujours franche. […] Il y voit avec raison le germe de bien de travers et de bien des maux : être et paraître, c’est à l’écraser et à l’extirper, ce besoin de faire effet, qu’il croit que consiste le plus fort de la morale : « Chose singulière ! […] Genève et la Suisse sont la patrie moderne de l’idylle ; au pied des grands monts, dans ces petits jardin un peu pomponnés, on l’y pratique journellement, et cela même était une raison peut-être pour qu’on n’en écrivît point de distinguées.
Jamais les romantiques n’abusèrent de ce vers : ils le mêlèrent discrètement à l’alexandrin classique, pour le diversifier ; ils le ménagèrent précisément en raison des effets qu’on en peut tirer. […] Il revient chez lui ; il fait de grandes courses à cheval, il rêve, il lit : les anciens, les Romains du moins, ne l’attirent guère ; il y a trop de raison et de raisonnement chez eux ; il y a trop de réalité dans nos classiques ; et La Fontaine lui renvoie une trop laide image de la vie et de l’homme. […] Ce sont comme deux fragments, le terme et le début, d’une immense épopée spiritualiste sur la destinée humaine ; la huitième vision de la Chute d’un ange nous explique la conception du poète : l’homme fait sa destinée, monte ou descend par son propre mérite, supprime le mal en s’élevant à Dieu, raison de l’être, et terme de l’aspiration de toute créature. […] D’inspiration personnelle, de sentiment original et profond, il n’y en a guère plus dans ces étincelantes Orientales que dans les Odes : l’intensité des images, la puissance des rythmes firent, avec raison, le succès du livre. […] Ils ont tous les deux raison.
C’était le témoin naturel des membres du cercle lorsqu’ils avaient un duel, et c’est même pour cette unique raison qu’on l’appelait le commandant. […] Il y a souvent une heure dans la vie d’une femme où elle a rêvé d’être actrice, à plus forte raison dans la vie d’une jeune fille sans dot et inquiète de l’avenir. […] Et elle se représente tout de suite les embarras d’argent dont elle voit les désordres autour d’elle depuis qu’elle a l’âge de raison, la préoccupation des termes à payer, de toute une vie médiocre à organiser et à maintenir. […] L’importance artistique du Conservatoire peut parfaitement se discuter avec de bonnes raisons dans tous les sens. […] Les artistes qui méprisent le Conservatoire et les subventions de l’État ont peut-être raison artistiquement, ?
Le Corbeiller a eu raison de nous le montrer ainsi. […] Je vois à cela deux raisons. […] Et dès lors c’est lui qui doit avoir raison. […] Et ils n’avaient que trop raison. […] Et je vois à cela trois ou quatre raisons.
. — Les Raisons de Pasqualin (1895). — Le Sceptique loyal (189b). — Sur deux nomarques de lettres (1895). — Le Sage Empereur (1890). — Sur Puvis de Chavannes (1896). — Fidelia (1897). — La Vocation merveilleuse (1898)
Boileau a donc eu raison de ridiculiser cet Ouvrage, en donnant de son style une imitation très-propre à la décrier.
Point de moyen plus sûr de s’attirer des lecteurs, des admirateurs, des prosélytes ; & cependant rien de plus révoltant aux yeux d’une raison, nous ne disons pas austere, mais éclairée, que ce penchant à faire consister tout le bonheur dans la jouissance actuelle des plaisirs des sens.
Liniere avoit très-fort raison de répondre à ce mauvais Versificateur, qui se vantoit de ce que les Vers ne lui coutoient rien, ils vous coutent ce qu’ils valent.
C'est ainsi qu'il est permis aux Modernes de s'enrichir des dépouilles des Anciens ; ce sont des richesses étrangeres qu'ils transplantent pour l'utilité publique ; & l'on a droit de devenir Législateur, quand on a pour garans les Oracles du vrai goût & de la saine raison.
La raison de cette différence de fortune sur un même objet, est assez sensible : M.
C’est un fait qu’en 1756 faisant le portrait du roi, Sa Majesté cherchait à s’entretenir avec lui sur son art, et que La Tour répondit à toutes les observations du monarque, Vous avez raison, Sire, mais nous n’avons point de marine.
Xénophon, qui arrivait avec l’arrière-garde, les exhorta par toutes les raisons à ne pas perdre courage. […] Quand il fait des fautes de langue, il les veut, presque toujours avec raison. […] Même raison pour la construction renversée de la phrase suivante. […] La rime ici fait dire une sottise à la raison. […] Jusque dans les moments extrêmes, la nature désespérée subissait l’empire de la raison et des convenances.
« — Eh bien, tu as raison, puisque tu l’aimes… Moi j’aime mieux la musique italienne. […] Cependant le régime, dit avec tant de raison de la Terreur, devenait de jour en jour plus terrible. […] On peut donc dire qu’il avait raison de profiter de sa grande célébrité de peintre qui ne lui avait guère rapporté jusque-là que des louanges. […] Vous avez raison, citoyen premier consul ; eh bien ! […] Il faut que la froide raison fasse taire les illusions de l’amour-propre et de l’intérêt.
Y a-t-il quelque vertu ou raison secrète qui, résidant dans l’un, entraîne ou provoque l’autre ? […] Nous ne pouvons, à la vérité, faire cela que sur une petite échelle ; mais nous avons d’amples raisons pour conclure que la même opération, si elle était conduite dans le grand laboratoire de la nature, aboutirait au même effet. […] C’est seulement à la Renaissance, avec Stevin et Galilée, que la mécanique a commencé ; et, très probablement, la cause de ce long retard est le désaccord de l’induction ordinaire et de la raison pure. […] Tout au rebours ; il y a même des indices en sens contraire ; car, si l’on ne peut imaginer géométriquement une quatrième dimension, on peut l’exprimer algébriquement, grâce à l’analogie des dimensions et des puissances, et la vraie raison que nous avons pour refuser à l’espace réel la quatrième dimension est encore une analogie. […] On peut se représenter les deux perpendiculaires sur une droite par l’imagination, et on peut les concevoir aussi par la raison.
Ou encore ils font comme ces seigneurs voleurs, ces Burgraves du Rhin qui barraient le fleuve ; aucune vérité ne passe. » C'est une raison de plus pour la Revue suisse de donner à son public ce qui lui arrive de ces vérités non scandaleuses et désintéressées.
— Raisons du moins fort (1889). — Poésies posthumes (1890).
La richesse, l’opulence, la noblesse, le crédit, seroient-ils donc des titres pour avoir raison en littérature ?