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2311. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

Newton, pour rendre compte du mouvement des astres, jugea nécessaire de rétablir la notion de force. […] Or, nous ne pouvons pas dire en cela que nous jugeons de l’avenir par le passé, car le passé ne nous est connu que dans une mesure insignifiante. […] Il est même des mathématiciens qui jugent les deux principes de la thermodynamique incompatibles avec le mécanisme.

2312. (1902) La poésie nouvelle

La France jugée à l’Étranger : Lucile Dubois.‌ […] On peut le juger comme on voudra ; surtout il peut déplaire. […] L’air marin brûlera mes poumons ; les climats perdus me tanneront… Je reviendrai avec des membres de fer, la peau sombre, l’œil furieux : sur mon masque, on me jugera d’une race forte… »‌ Espère-t-il se régénérer et s’ennoblir par l’action ? […]   Il est difficile de juger avec netteté ce poète qui cessa d’écrire à vingt ans et dont la destinée ne s’est pas accomplie. […] Kahn ne se contente pas d’y analyser et juger les livres récents, mais, à leur sujet, il plaît à développer ses théories personnelles.

2313. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

Au milieu de ces écrits achevés et parfaits, un nouveau genre paraît, approprié aux penchants et aux circonstances publiques, le roman anti-romanesque, œuvre et lecture d’esprits positifs, observateurs et moralistes, destiné non à exalter ou amuser l’imagination comme les romans d’Espagne et du moyen âge, non à reproduire ou embellir la conversation comme les romans de France et du dix-septième siècle, mais à peindre la vie réelle, à décrire des caractères, à suggérer des plans de conduite et à juger des motifs d’action. […] Ceci n’est qu’un début, jugez du reste.

2314. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Plusieurs l’ont jugée inutile, mais personne n’a osé la dire fausse. […] Nous réduisons les corps naturels à deux ou trois sortes de mouvements, attraction, vibration, polarisation, comme nous réduisons les corps géométriques à deux ou trois sortes d’éléments, le point, le mouvement, la ligne, et nous jugeons notre science partielle ou complète, provisoire ou définitive, suivant que cette réduction est approximative ou absolue, imparfaite ou achevée.

2315. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

N’est-ce pas un peu dans cette posture-là qu’il a vu et jugé depuis tous les grands hommes ? […] Nous jugions la princesse.

2316. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

Plusieurs l’ont jugée inutile, mais personne n’a osé la dire fausse. […] Nous réduisons les corps naturels à deux ou trois sortes de mouvements, attraction, vibration, polarisation, comme nous réduisons les corps géométriques à deux ou trois sortes d’éléments, le point, le mouvement, la ligne, et nous jugeons notre science partielle ou complète, provisoire ou définitive, suivant que cette réduction est approximative ou absolue, imparfaite ou achevée.

2317. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Il disait : « On n’acquiert aucune connaissance transmissible qu’en voyant par soi-même. » Il écrivait à Bexon : « Tâchez, Monsieur, de faire toutes vos descriptions d’après les oiseaux mêmes ; cela est essentiel pour la précision. » Cuvier le jugeait plus exact que Linné […] Il est donc bien indifférent, relativement au peuple, que telle œuvre d’art soit obscure ou lumineuse, puisqu’il ne la jugera jamais comme œuvre d’art, mais seulement comme œuvre dramatique, comme œuvre représentative d’une action. […] Comme il faut bien s’égayer un peu, le rédacteur, A la fin de ce chapitre obscur, signale aux rires des institutrices le mot sot-l’y-laisse, « si étrangement formé. » Presque tous les mots de la langue française paraîtraient étrangement formés, si on les jugeait d’après la logique moyenne. […] Taine a jugé lui-même cet article : il ne l’a pas recueilli en volume.

2318. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

Elle aime en toi le fils du père des pauvres, et te donne aujourd’hui pour protecteurs ceux qui les jugent et se consacrent à eux… « … Mais la politique empoisonne les esprits. — Moi qui pleurais de joie et de respect en traversant enfin Genève, patrie de notre grand-père paternel, on m’y a poursuivie avec ma petite famille en criant contre nous : « A bas les Français ! 

2319. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « MÉLEAGRE. » pp. 407-444

En France, les personnes même instruites (hors du cercle de l’érudition) sont trop accoutumées à ne juger l’antiquité que sur quelques grands noms qui reviennent sans cesse, qu’on cite à tout propos et qu’on croit connaître.

2320. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

Ordre donc, ci-dessous, du tribunal souverain de Lucques de procéder au partage du domaine et du podere (métairie), et d’en remettre les trois quarts aux héritiers Bardi di Bonvisi, légitimes propriétaires du reste, se réservant, lesdits héritiers, de revendiquer contre vous, quand ils le jugeront opportun, leur part arriérée de jouissance des fruits dudit domaine, injustement retenus par vous et vos ascendants depuis l’année 1694.

2321. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

L’univers connaît cette chapelle du Vatican, dont les murs et les voûtes, animées et colorées par le pinceau d’un seul homme, semblent avoir été changés par un Verbe créateur en monde des vivants et en monde des morts, comparaissant dans toutes les attitudes de la terre, de l’enfer et du ciel, sous les regards de la Trinité divine qui évoque son œuvre pour la juger.

2322. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre I. Le quatorzième siècle (1328-1420) »

« Grande chose était de Paris, nous dit-on vers 1400, quand maître Eustache de Pavilly, maître Jean Gerson, frère Jacques le Grand, le ministre des Mathurins et autres docteurs et clercs voulaient prêcher tant d’excellents sermons112. » Des quatre prédicateurs ici nommés, le plus illustre et le seul dont nous puissions juger l’éloquence est Jean Gerson113.

2323. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Il avait une redoutable faculté d’analyse, qu’il exerçait sur lui comme sur les autres : il est impossible de s’observer soi-même plus exactement, de se juger d’une vue plus nette qu’il n’a fait dans son Journal intime et dans ce roman d’Adolphe qui est un des chefs-d’œuvre du roman psychologique.

2324. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

qu’ils le dédaignent et le jugent toujours ridicule ou vil ?

2325. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Les superficiels, au contraire, crient, tempêtent qu’il faut à tout prix délivrer l’humanité de ces préjugés. « Il faut avoir une pensée de derrière, dit Pascal, et juger du tout par là, en parlant cependant comme le peuple. » Mais, quand le nombre des finassiers est trop considérable, toute piperie devient impossible : car il devient alors de bon ton de faire le malin et de dire aux simples : Ah !

2326. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

Il ne sert non plus de rien d’alléguer que l’Église fera peut-être un jour des concessions qui rendront inutiles des ruptures comme celle à laquelle je dus me résigner, et qu’alors on jugera que j’ai renoncé au royaume de Dieu pour des vétilles.

2327. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

Elles jugent des beaux discours et des beaux ouvrages ; elles eu font elles-mêmes. » Voici quelques exemples fournis par de Pure, de leurs conversations et de leurs discours.

2328. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

On y lisait en toutes lettres : « Aime-moi, et ne t’afflige pas si quelque autre me possède. » Ce qui choquerait plus encore si l’émotion, à ce moment palpitant du drame, vous permettait de juger, c’est le moyen qu’emploie Marguerite pour tenir la promesse qu’elle a faite à M. 

2329. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Je serais bien heureux, mon cher ami, si cet article avait un peu d’influence sur l’esprit de celui qui va vous défendre et sur l’opinion de ceux qui seront appelés à vous juger.

2330. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

Il y eut une académie à Château-Thierry, c’est-à-dire une compagnie, une réunion de beaux esprits qui lisaient de beaux ouvrages, qui essayaient d’en composer quelques-uns, qui se lisaient réciproquement leurs vers et qui jugeaient les vers d’autrui, etc., enfin une académie.

2331. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Première partie. De la parole et de la société » pp. 194-242

Fabre d’Olivet, parce qu’il faudrait, pour les juger, pouvoir les embrasser et les dominer.

2332. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

Nous n’avons pas à juger le livre de Balzac.

2333. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Pour mieux juger, le savant fait taire sa sensibilité, son moi profond, et se concentre tout entier dans son moi réfléchi, dans ses facultés d’élaboration. […] Ainsi nous jugeons tout de suite de la bonté de tel ou tel poète dans la façon dont il manie et mêle les accents. […] Cette situation instable a eu sa principale répercussion dans l’architecture où l’Occident excelle et par quoi il demande à être jugé. […] Robert de Souza eut à se plaindre de cette façon simpliste de juger un écrivain.

2334. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Enfin l’accent même de la critique, à chaque époque où elle se doit renouveler, se renouvelle au juger et au toucher de ces belles œuvres, qui sont restées l’honneur et le respect de l’esprit humain. […] Ce qui est très vrai et magnifiquement exprimé ; il termine par conjurer le théatin d’abjurer ces exécrables doctrines, et vous jugez s’il parlait à un converti ! […] Certes, si quelqu’un fut jamais dans une position défavorable à juger convenablement le génie de Molière, ce fut Jean-Jacques Rousseau lui-même.

2335. (1930) Le roman français pp. 1-197

Relisez l’un après l’autre, et jugez ! […] Et de même que Le Rouge et le Noir avait été suggéré à Stendhal par un procès criminel jugé dans le Jura, « l’affaire Chambiges » ne rappelait-elle pas Le Disciple ? […] On le voit humble, timide, bégayant, à peine jugé, par son évêque, assez bon pour faire un curé de campagne, mais se donnant chaque jour la discipline, jeûnant, priant : un saint qui guérit les malades, un innocent transfiguré par un rayon céleste qui semble ne le jamais quitter. […] Il ne s’agit plus de juger, mais de s’arranger pour ajourner le jugement.

2336. (1911) Études pp. 9-261

Ou plutôt le temps est lui-même ce déroulement de l’accord instantané et n’est pas autre chose : « Il ne nous suffit pas de saisir l’ensemble, la figure composée dans ses traits, nous devons juger des développements qu’elle implique, comme le bouton la rose, attraper l’intention et le propos, la direction et le sens. […] Qu’aucun impie ne s’introduise dans le désert de lumière où se sent ravi le chrétien : Jugez-moi et discernez ma cause de la race d’Édom et d’Amalech207. […] Il semble qu’on craigne de le juger trop favorablement.

2337. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

Il y a trois siècles environ (c’est un fait), l’esprit humain, dans notre Occident, la pensée humaine, en se dégageant des débris et de la décadence du moyen âge finissant, en brisant les liens de la scolastique et d’une autorité pédantesque à bout de voie, s’est enhardie, et en même temps que d’un côté on affirmait la figure véritable de la terre et qu’on découvrait un nouveau monde, en même temps que de l’autre on perçait les sphères étoilées et qu’on affirmait le véritable système planétaire, en même temps on regardait, on lisait d’un bout à l’autre les livres dits sacrés, on traduisait les textes, on les discutait, on les jugeait, on commençait à les critiquer ; on choisissait ce qui semblait le plus conforme à la religion qu’on n’avait point perdue, et à la raison qui s’émancipait déjà.

2338. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

Elle est jugée !

2339. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 5-79

Qui a donné au Piémont le droit de juger ou de préjuger de la volonté des Toscans, des Romains, des Napolitains, des Siciliens, et de préjuger de la volonté vraie de ces peuples à son profit ?

2340. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

XXII Voilà comment les partis nous jugent et nous classent pendant que nous vivons !

2341. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

. — Je jugeai dès lors qu’il avait raison de parler de la sorte, et le temps ne m’a pas fait changer de sentiment.

2342. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

Mais jugez avec quelle angoisse et quelles difficultés.

2343. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Il ne voulait affranchir que l’esprit humain ; il jugeait les peuples en masse incapables de la liberté par leurs passions et par leurs faiblesses ; tribun de la raison, il n’était pas tribun de la foule.

2344. (1834) Des destinées de la poésie pp. 4-75

Elle ne sera plus épique ; l’homme a trop vécu, trop réfléchi pour se laisser amuser, intéresser par les longs écrits de l’épopée, et l’expérience a détruit sa foi aux merveilles dont le poème épique enchantait sa crédulité ; elle ne sera plus dramatique ; parce que la scène de la vie réelle a, dans nos temps de liberté et d’action politique, un intérêt plus pressant, plus réel et plus intime que la scène du théâtre ; parce que les classes élevées de la société ne vont plus au théâtre pour être émues, mais pour juger ; parce que la société est devenue critique de naïve qu’elle était.

2345. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

IX), qui vaut comme une introduction générale de l’ouvrage, Pascal exposait sa thèse de l’impuissance de la raison, incapable de savoir tout, et de rien savoir certainement, réduite à juger des « apparences du milieu des choses » (les deux infinis, art. 1).

2346. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

J’échouai totalement dans Pierre l’Ermite et Urbain Il ; mon Godefroy de Bouillon fut jugé aussi dénué que possible d’esprit militaire.

2347. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Manier me faisait remarquer que cette philosophie changeait trop vite et que, pour la juger, il fallait attendre qu’elle eût achevé son développement. « L’Écosse rassérène, me disait-il, et conduit au christianisme » ; et il me montrait ce bon Thomas Reid à la fois philosophe et ministre du saint Évangile.

2348. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

En proie à l’amour du passé, regrettant toujours d’inutiles fadaises, antique, moyen âge, rococo, bonnet rouge et jamais actuelle, elle assiste au travail émouvant de son siècle en mal de vérité, sans même paraître s’en apercevoir… » Je n’ai point ici à juger si la poésie a répondu brillamment à cet appel.

2349. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Ce qu’était l’esprit de ces Mystères dépravés, contenu en Grèce par la douceur des mœurs, on peut en juger d’après l’affreux scandale qui éclata à Rome, au deuxième siècle avant Jésus-Christ.

2350. (1920) Action, n° 3, avril 1920, Extraits

Comme autrefois pour juger toute conception ou théorie nouvelle on se demandait tout d’abord si elle était faite pour condamner l’homme à la perte de son âme, ainsi, en jugeant les conceptions et théories modernes, il serait utile de se poser la question si elles sont capables ou non de condamner l’homme à la perte de sa raison.

2351. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

Il fallait même lui donner une âme en proportion avec son génie, pour qu’on pût mieux juger de l’effort de l’une contre l’autre, et savoir qui devait dévorer l’autre, des deux.

2352. (1856) Mémoires du duc de Saint-Simon pp. 5-63

Il y prit aussi des scrupules ; lui si prompt a juger, si violent, si libre quand il faut railler « un cuistre violet », transpercer les jésuites ou démasquer la cour de Rome, il s’arrête au seuil de l’histoire, inquiet, n’osant avancer, craignant de blesser la charité chrétienne, ayant presque envie d’imiter les deux ducs « qu’elle tient enfermés dans une bouteille », s’autorisant du Saint-Esprit qui a daigné écrire l’histoire, à peu près comme Pascal qui justifiait ses ironies par l’exemple de Dieu.

2353. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Ce n’est point sur le type classique du Tyran qu’il faut mesurer et juger Néron. […] Il faut qu’ils pensent, qu’ils prévoient, qu’ils jugent, qu’ils gouvernent pour ces millions d’hommes passifs et inertes ; il faut qu’ils soient l’âme de ce cadavre qui couvre la terre. […] Le péril était grand, à en juger par les haines qui se déchaînèrent. […] — Un trésorier de François Ier veut le faire voyager en poste. « Ainsi voyagent les fils de duc », lui dit-il pour le décider. « N’ayant jamais été fils de duc, — répond Cellini, — je ne sais comment ces personnages voyagent, mais les fils de mon art voyagent à petites journées. » — Un majordome du duc de Florence, qu’il rudoie selon sa coutume, s’étonne « qu’il l’ait jugé digne de parler à une personne telle que lui. — Les hommes tels que moi sont dignes de parler et aux papes et aux empereurs et aux grands rois. […] C’est toujours l’histoire de la Bible — « Bilha conçut et enfanta un fils à Jacob. — Rachel dit : Dieu m’a jugée, il a exaucé ma voix, et m’a donné un fils. — Bilha, servante de Rachel, conçut encore une seconde fois, et enfanta un second fils à Jacob. — Rachel dit : J’ai lutté contre ma sœur dans des luttes divines, et je l’ai vaincue. » Il faut passer aux affaires sérieuses.

2354. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Il fallait être bien disgracié de la nature pour n’être pas jugé propre à faire de la chair à canon. […] Ceux qui ne le jugeaient capable que d’être expéditionnaire avaient en apparence raison ; peut-être même cette ressource lui aurait-elle manqué, car sa belle écriture devait déjà s’être altérée dans les brouillons chiffonnés, raturés, surchargés, presque hiéroglyphiques de l’écrivain luttant avec l’idée et ne se souciant plus de la beauté du caractère. […] Absorbé par son œuvre, Balzac ne pensa qu’assez tard au théâtre, pour lequel l’opinion générale jugea, à tort selon nous, d’après quelques essais plus ou moins chanceux, qu’il n’était guère propre. […] Humble poëte contraint à la prose par les nécessités du journalisme, nous allons essayer de juger un grand poëte. […] Il avait pour l’art cet amour sans réserve qui caractérisait la jeune école à ses débuts, et malgré la Nécessité aux mains pleines de clous d’airain, il ne fit jamais aucune concession au métier, il n’épargna ni temps, ni peine pour revêtir ses conceptions de la seule forme qu’il jugeât souveraine et définitive.

2355. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

On peut, ici, juger l’ouvrier par l’efficacité de l’œuvre. […] Vous me jugez paradoxal. […] Jusqu’ici, on jugeait de l’art grec surtout d’après les morceaux qui nous restent de l’époque de Périclès et de Phidias.

2356. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Un critique doit juger les livres qu’on lui présente, les déclarer bons ou mauvais. […] bien, quand nous avons à juger la mort, ne lui imputons pas, afin d’être justes, ce qui n’est pas d’elle. […] Dingley, l’illustre écrivain : un romancier de Londres, féru d’impérialisme et qui a consacré tout son génie au fougueux idéal de l’universelle Angleterre ; les auteurs ne jugent pas son ambition. […] S’il a eu soin, comme l’auteur des Études napoléoniennes, de déclarer loyalement ses opinions, il reste au lecteur d’adopter ses opinions et de juger à leur mesure les événements, ou bien d’avoir une autre doctrine et d’aboutir à d’autres conclusions. […] Nous saurons qu’il nous présente, avec impartialité, les documents, les pièces du procès et qu’il nous invite à juger là-dessus.

2357. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Je dirai seulement que si quelqu’un jugeait Carlyle en Français, comme il juge Voltaire en Anglais, ce quelqu’un ferait de Carlyle un portrait différent de celui que j’essaye de tracer ici. […] Et si Dieu, qui est la parfaite justice, me jugeait en ce moment, quelle sentence porterait-il sur moi ?

2358. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Représentants enthousiastes de l’imagination et des facultés les plus précieuses de l’âme, fûtes-vous donc si mal reçus la première fois, et nous jugez-vous indignes de vous comprendre ? […] Est-il permis de supposer qu’un peuple dont les yeux s’accoutument à considérer les résultats d’une science matérielle comme les produits du beau n’a pas singulièrement, au bout d’un certain temps, diminué la faculté de juger et de sentir ce qu’il y a de plus éthéré et de plus immatériel ?

2359. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

Tantôt en fait de l’instinct une intelligence dégradée : l’action jugée utile par l’espèce ou par quelques-uns de ses représentants aurait engendré une habitude, et l’habitude, héréditairement transmise, serait devenue instinct. […] Mais il doit y avoir bien autre chose encore, à en juger par le fonctionnement.

2360. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre III. De la signification de la vie. L’ordre de la nature et la forme de l’intelligence. »

Il reçoit, des mains du savant, les faits et les lois, et, soit qu’il cherche à les dépasser pour en atteindre les causes profondes, soit qu’il croie impossible d’aller plus loin et qu’il le prouve par l’analyse même de la connaissance scientifique, dans les deux cas il a pour les faits et pour les relations, tels que la science les lui transmet, le respect que l’on doit à la chose jugée. […] Plus simplement, dès qu’on entreprend de fonder l’ordre, on le tient pour contingent, sinon dans les choses, du moins aux yeux de l’esprit : d’une chose qu’on ne jugerait pas contingente on ne demanderait aucune explication.

2361. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Le désir que l’on éprouvait, c’était celui de « communiquer », si je puis ainsi dire ; et, à l’expérience, ou jugeait que la langue n’en fournissait pas les moyens. […] Si l’on ne jugeait donc une doctrine que sur quelques-unes de ses conséquences, il n’y aurait, semble-t-il, qu’à louer dans l’œuvre de Bayle. […] Jugez après cela si l’on peut bien raisonner, quand on conclut que puisqu’une chose sort du fond de la nature, qu’elle est un instinct de la nature, elle est véritable ?  […] Je vis alors qu’il la traversait par le milieu : d’où je jugeai que son amour était au moins diminué de la différence de la diagonale aux deux côtés du carré. » C’est M.  […] Je n’oserais juger ici ni ses Éloges académiques, ni la manière dont il comprit ses fonctions de secrétaire perpétuel.

2362. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Dans Les Sœurs Vatard, un garçon et une fille qui ne s’aiment point, qui ne se désirent point, et qu’une commune horreur de la solitude a rapprochés un temps, jugent bientôt toute cohabitation impossible, et de lassitude concluent qu’il vaut encore mieux retourner chacun chez soi. […] Au juger, et pour qui ne connaît point le mystère, cela demeure inoffensif et anodin, avec des airs candides de sujets de genre. […] Il l’a trop bien jugé lui-même, le jour qu’il l’a fait consister en « d’étranges consonances, presque nulles (oh !

2363. (1932) Les idées politiques de la France

Mais enfin, il a réussi, et si le libéralisme politique s’est éteint, c’est un peu faute de cahiers à dresser, de revendications majeures à proclamer, d’abus criants à dénoncer : aux abus murmurants, l’influence des defensores civitatis que sont les députés, la presse, apportent des remèdes jugés suffisants. […] On pourrait même en marquer le moment précis : ce début de janvier 1656 où l’abbé Antoine Arnauld, docteur en Sorbonne, ayant été jugé téméraire par cette compagnie, et ayant écrit, pour se disculper, un copieux factum, fit lecture de son œuvre à ses amis de Port-Royal. […] La condamnation du Sillon a été prononcée par Pie X sur une question de discipline, la discipline des cercles sillonnistes, que Rome jugeait trop indépendants des évêques, et qui durent se dissoudre.

2364. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Conclusion. Le passé et le présent. » pp. 424-475

Chez nous, quand un homme a une idée, il l’écrit ; une douzaine de personnes la jugent bonne ; et là-dessus tous mettent en commun de l’argent pour la publier ; cela fait une petite association, qui grandit, imprime des traités à bon marché, fait des lectures, puis des pétitions, rallie l’opinion, et enfin apporte un projet au Parlement ; le Parlement refuse, ou remet l’affaire ; cependant le projet prend du poids ; la majorité de la nation pousse, elle force les portes, et voilà une loi faite. » Libre à chacun d’agir ainsi ; les ouvriers peuvent se liguer contre leurs maîtres ; en effet, leurs associations enveloppent toute l’Angleterre ; à Preston, je crois, il y eut une fois une grève qui dura plus de six mois.

2365. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

Tous les Athéniens comprenaient Démosthène, savaient leur langue, jugeaient leur législation et leurs arts.

2366. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

Jugez-en vous-mêmes.

2367. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Les critiques ne s’en sont pas doutés : ils ont jugé ses comédies comme des livres.

2368. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

C’est, en tant qu’êtres sociaux, notre devoir de les juger tels.

2369. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

On en jugera par la comparaison des deux textes.

2370. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

J’ai connu le monde, je l’ai jugé, je l’ai fui ; mais, comme l’homme est un être instinctivement sociable, j’ai trouvé dans cette maison, dans l’amitié de ces deux sœurs aussi sauvages que moi, une société pour mon cœur ; et je trouve dans ces livres, rapportés de mes voyages et jetés pêle-mêle à mes pieds, une société pour mon esprit.

2371. (1856) Cours familier de littérature. II « XIe entretien. Job lu dans le désert » pp. 329-408

Je ne veux la juger et je ne la juge que par le trait dominant général, universel, qui la caractérise, c’est-à-dire par la condition du meurtre et de la dévoration d’une créature animée par une autre créature animée, sous peine de mort, pour soutenir et alimenter la vie de l’une par la mort de l’autre.

2372. (1914) Boulevard et coulisses

Paris avait une certaine sensibilité particulière qu’on ne trouvait que chez lui, une façon de voir les choses, de concevoir la vie, de juger qui était sa marque ; il avait un ton plus délicat et plus vif qu’ailleurs, une élégance plus fine.

2373. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

., Messieurs, vous avez tous raison, vous jugez en connoissance de cause ; quelle différence du style de la Motte à celui de la Fontaine !

2374. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

La mesure de l’angle facial a son importance, quand il s’agit de notables proportions, comme dans la classification des races humaines ; mais jusqu’à ce que l’analyse anatomique et même chimique de la substance cérébrale nous ait appris le dernier mot sur cette question de la qualité relative du cerveau, on n’en pourra juger que d’une manière générale et superficielle.

2375. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Cependant il eut un assez grand succès : d’une part, il satisfaisait certaines rancunes qu’une puissance trop prolongée finit toujours par provoquer contre soi ; en second lieu, il levait le drapeau contre une école que les uns jugeaient rétrograde, et que les autres commençaient à trouver un peu immobile. […] Je suppose que vous ayez à juger le stoïcisme.

2376. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

Les corps organisés : vieillissement et individualité L’existence dont nous sommes le plus assurés et que nous connaissons le mieux est incontestablement la nôtre, car de tous les autres objets nous avons des notions qu’on pourra juger extérieures et superficielles, tandis que nous nous percevons nous-mêmes intérieurement, profondément. […] La base expérimentale de la théorie de H. de Vries a été jugée étroite, mais l’idée de mutation, ou de variation brusque, n’en a pas moins pris place dans la science.

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