Ce qui avait semblé une fin, une chute suprême, n’était plus qu’une phase d’essai, une tentative, une magnanime expérience étouffée alors, et qui, après un intervalle de plus de trente-cinq ans, reprenait son cours. […] c’est lui qui, après avoir gémi dans ses écrits pendant vingt ans au seul nom d’invasion, et avoir demandé sur tous les tons, avec des cris de prophète, avec des cris d’aigle, qu’on relevât la France d’un humiliant désastre auquel il attribuait tous les maux, même civils, n’est pas content d’elle aujourd’hui qu’elle a, ce me semble, la tête assez haute et qu’elle s’est assez bien revanchée !
» Indiana n’est pas un chef-d’œuvre ; il y a dans le livre un endroit, après la mort de Noun, après la découverte fatale qui traverse l’âme d’Indiana, après cette matinée de délire où elle arrive jusque dans la chambre de Raymon qui la repousse, — il y a là un point, une ligne de démarcation où la partie vraie, sentie, observée, du roman se termine ; le reste, qui semble d’invention presque pure, renferme encore de beaux développements, de grandes et poétiques scènes ; mais la fantaisie s’efforce de continuer la réalité, l’imagination s’est chargée de couronner l’aventure. […] Indiana ignore que l’homme qu’elle distingue, et qui semble lui devoir rendre l’espérance, le goût de la vie, s’est adressé à une autre qu’elle, et si près : le jour où Noun sait tout, ou plutôt la nuit orageuse et sinistre de cette découverte, la pauvre fille se noie.
Les romantiques eux-mêmes et leurs amis, s’ils étaient là, ne devaient pas être de cet avis du tout ; le nouveau confrère, déjà couronné par d’autres victoires en rase campagne, et qui leur arrivait à l’assaut sur le théâtre d’élite où ils n’ont guère eu qu’un pied, avait de quoi les inquiéter d’abord, et la cause ne leur semblait pas tout à fait commune. […] Il importe qu’aux prochaines représentations les acteurs aillent plus vite, se concertent mieux, que la pièce semble rapide comme elle doit l’être, et qu’en gagnant d’ensemble, elle ne perde pas non plus ses meilleurs mots et ses finesses.
Si l’on pouvait faire entrer dans son âme cet ordre d’idées, il semble que l’on serait invinciblement armé contre les hommes. […] Les mœurs, les habitudes, les connaissances philosophiques, les succès militaires, tout semble, chez les Grecs, ne devoir être que passager ; c’est la semence que le vent emportera dans tous les lieux de la terre, et qui ne restera point où elle est née.
Enfin, un homme avait vu toutes les prospérités de la terre se réunir sur sa tête, la destinée humaine semblait s’être agrandie pour lui, et avoir emprunté quelque chose des rêves de l’imagination ; roi de vingt-cinq millions d’hommes, tous leurs moyens de bonheur étaient réunis dans ses mains pour valoir à lui seul la jouissance de les dispenser de nouveau ; né dans cette éclatante situation, son âme s’était formée pour la félicité, et le hasard qui, depuis tant de siècles, avait pris en faveur de sa race un caractère d’immutabilité, n’offrait à sa pensée aucune chance de revers, n’avait pas même exercé sa réflexion sur la possibilité de la douleur ; étranger au sentiment du remord, puisque dans sa conscience il se croyait vertueux, il n’avait éprouvé que des impressions paisibles. Sa destinée, ni son caractère ne le préparant point à s’exposer aux coups du sort, il semblait que son âme devait succomber au premier trait du malheur.
Rostand, d’ailleurs, ne semble pas très bien savoir à quelle époque vécut Cyrano : Cyrano, mort en 1655, a toujours ignoré, sans doute, l’emprunt que, dans les Fourberies de Scapin, jouées en 1671, Molière fit au Pédant joué ; et il est peu probable qu’il ait dédaigné d’être Dans les petits papiers du Mercure François, fondé en 1672. […] Il me semble que c’est son devoir.
Le pédant semble encore plus ancien et plus indispensable ; il écorche déjà du latin dans les comédies de l’Arioste (par exemple Cleandro des Suppositi) ; il ne cessera de lâcher la bride à sa sottise intempérante pendant plus de deux cents ans. […] La Ruffiana ne semble pas avoir brillé autant dans la comédie de l’art que dans la comédie soutenue.
Même les lois les plus libérales, celles qui semblent relâcher quelque lien social (par exemple la loi du divorce) affirment encore en un certain sens l’asservissement de l’individu à la volonté collective. […] Cette tendance semble permanente, inévitable, indestructible, par là même normale et en un sens utile.
L’entassement des gens chasse ce qui reste de jour, et c’est une nuit lugubre où il me semble voir gesticuler des fantômes. […] Il s’agit du portrait de Verlaine, introduit au Luxembourg et qu’a signé le peintre Chantalat, médiocre image, qui semble moins faite d’après nature que calquée sur la photographie d’Otto.
Un progrès ultérieur conciliera, ce me semble, ces deux tendances, en substituant à des actes sacramentels, qui ne peuvent valoir que par leur signification, et qui, envisagés dans leur exécution matérielle sont complètement inefficaces, le sentiment moral dans toute sa pureté. […] Le fait est que les gens du monde n’ont jamais, ce me semble, un système de vie bien arrêté, et ne peuvent dire précisément ce qui est principal, ce qui est accessoire, ce qui est fin, ce qui est moyen.
Il semble à trois gredins dans leur petit cerveau, Que pour être imprimés et reliés en veau, Les voilà dans l’état d’importantes personnes, Qu’avec leur plume ils font le destin des couronnes, Que sur eux l’univers a la vue attachée. […] Voltaire, qui, à la vérité, avait une bonne raison pour ne pas aimer que l’on décriât les femmes savantes (c’était son attachement pour la marquise du Châtelet), observe fort judicieusement et en homme de l’art, que dans la pièce dont nous parlons, « Molière attaque un ridicule qui semblait peu propre à réjouir ni la cour, ni le peuple à qui ce ridicule paraissait être également étranger, et qu’elle fut reçue d’abord assez froidement.
Nous le déclarons d’avance, notre intention est d’exposer notre sentiment, & nous n’avons prétendu qu’éviter des répétitions, en retranchant ces manieres de parler, il nous paroît, il nous semble, à notre avis. […] Le siecle d’or devoit renaître sous cette nouvelle Astrée ; de nouveaux Prométhées sembloient avoir dérobé au Ciel des feux plus purs, pour animer & béatifier les humains : bienfaisance, humanité, tolérance, vertu, bonheur, étoient les cris de leurs promesses : superstition, abus, fanatisme, ignorance, esclavage, étoient les anathêmes de leur zele.
« Bien des gens semblent vouloir regarder l’Art poétique de Despréaux comme une compilation de celui d’Horace. Je ne sais si c’est mauvais goût ou mauvaise foi ; mais il me semble nécessaire que l’un ou l’autre ait enfanté cette opinion.
Au lieu de me blâmer de ce qui peut sembler un crime de ma part, elle invente des excuses à ma conduite et prend pour elle toute la faute. […] La date de la fabrication de l’objet, 1683, si elle est juste, — l’exécution du prince d’Akô ayant eu lieu en 1690, — semblerait indiquer que la petite écritoire fut exécutée, avant que Otaka fût ronin et marchand d’objets de bambou, mais ainsi qu’au Japon, les gens, qui ne font pas profession d’être artistes, sculptent des netzkés pour leur plaisir.
Les deux camps semblent plus impatients de combattre que de traiter. […] D’après le sens littéral de cette explication, il semble que le Paradis perdu serait un poème classique, et la Henriade une œuvre romantique.
À ces quatre têtes, il semble qu’on pourrait en ajouter une cinquième, celle du roi Charles II. […] Et ce que nous venons de dire de Ruy Blas nous semble évident de tout autre ouvrage.
Il me semble qu’il est le premier qui ait mis en vers les préceptes de la raison, en matière de goût et de littérature ; mais La Fontaine a mis en vers les préceptes de la raison universelle, comme Molière y a mis ceux qui sont relatifs à la société ; et ces deux empires sont plus étendus que ceux du goût et de la littérature. […] Il me semble que ce qui rend excusable ici cette expression populaire, c’est qu’elle fait allusion à une fable où il s’agit de boire une rivière.
Or, précisément, au milieu de ces événements qui ébranlaient le monde jusque dans sa raison, et qui semblaient pourtant moins une réalité qu’une fantasmagorie, on vit une singulière amazone qui n’était pas une bohème, celle-là, car elle était princesse ; elle était de la race de celles à qui les révolutions coupent très bien la tête, et qui venait par curiosité exposer la sienne. […] Il semble qu’elle en devienne plus intéressante et plus chère.
Ceux qu’il nous dit semblaient saigner sous leur pastel lilas et rose ; c’étaient des vers qui ne pleuraient pas à force de rire, mais qui riaient… pour ne pas pleurer ! […] ce sentiment ne s’est pas épuisé dans le portrait de Chateaubriand, où il semblait comme une heureuse contagion de son génie.
Sous ce modeste titre d’Études biographiques sur la Révolution d’Angleterre 6, Guizot a publié un volume d’histoire qui aurait bien eu le droit, à ce qu’il me semble, quand on pense au nom et au talent de l’auteur, de porter un titre plus orgueilleux. […] mais il me semble qu’il y a dans ce choix une profondeur inaccoutumée, une admirable intuition de la vraie source historique, une faculté de démêlement qui est plus que de la sagacité.
Vingt fois des hommes qui valaient beaucoup moins que lui ont occupé l’attention des historiens modernes, et pour ce moine il semblait qu’on avait tout dit quand on avait écrit son nom. […] Statue de cloître pour le monde moderne, qui semble n’avoir guère le temps de la regarder.
Vaublanc, lorsque vous le lisez, vous rappelle involontairement le Julien Sorel de Rouge et Noir et le Fabrice de la Chartreuse de Parme, qui n’est, du reste, que le même homme, C’est le même genre de courage qui raisonne, s’analyse, calcule et se doit de jouer encore la partie, quand elle semble le plus perdue sans ressource. […] Ainsi, il y a au commencement de ses Mémoires un grand morceau sur le cardinal de Richelieu, dont l’administration lui semble la cause première de la Révolution française, et ce long morceau d’une plume de si grand sens, a tout le chimérique du parti pris et l’ambitieux du système ; mais il est dans la logique de l’esprit de Vaublanc qui, en sa qualité d’homme d’action exagère dans l’histoire l’action des hommes et ne voit qu’eux.
Richelieu, qui protégea Renaudot, le fondateur de la première gazette en France, mais qui le protégea en restant son maître ; la Chambre étoilée, en Angleterre, qui regarda toujours les journaux d’un œil de vigilance sourcilleuse, — torvo lumine, — quoique, en Angleterre, la liberté des écrits périodiques ait bien moins d’inconvénients qu’ailleurs, parce qu’elle y est accompagnée d’un grand respect pour les hiérarchies, auraient dû, ce semble, éveiller en Μ. […] Avant de créer sa gazette, il avait innové en médecine au point de s’attirer déjà beaucoup d’inimitiés, qui éclatèrent plus tard, après son succès comme gazetier, et parmi lesquelles brille au premier rang celle du fameux et violent Guy Patin, doué plus que personne de cette force de haine corporative qui semble avoir plusieurs cœurs pour mieux détester… Renaudot, qui était chimiste, avait introduit la chimie en médecine, et peut-être ceux qui sont friands de ces rapprochements historiques en feront-ils un jour comme un précurseur de Hahnemann.
Mais chaque fois qu’il en descend, il semble, jusqu’au jour où l’ardent Visionnaire verra l’ange Gabriel face à face, en descendre plus lourd et plus chargé de l’électricité divine… IV C’est cette figure de Mahomet si longtemps déguisée par l’ignorance, l’erreur et l’injustice, que Barthélemy Saint-Hilaire a fait émerger des plus profonds travaux contemporains. […] ce n’est pas, pour les esprits difficiles, une suffisante raison, et c’est là, il me semble, un des points faibles de cette robuste dissertation, qui en a si peu.
Il semble, quand ils ne sont plus, qu’on devrait du moins rendre quelque honneur à leurs cendres. […] Il semble qu’on est dans un cabinet de médailles que l’on parcourt, et qu’un homme qui a été le contemporain et l’ami de tous ces grands hommes, en vous montrant leur figure, vous parle d’eux avec cet intérêt tendre que donnent l’estime et l’amitié.
Si l’on considère ensuite les successions légitimes dans cette disposition de la loi des douze tables par laquelle la succession du père de famille revient d’abord aux siens, suis, à leur défaut aux agnats, et s’il n’y en a point, à ses autres parents, la loi des douze tables semblera avoir été précisément une loi salique pour les Romains. […] Enfin, comme le terme d’imperium paternum semblait diminuer la majesté impériale, ils introduisirent le mot de puissance paternelle, patria potestas 102.
On a de celui-ci un Recueil de Discours, de Plaidoyers, & de Mémoires, qu'on ne doit pas confondre avec la foule des Productions du Barreau : ces divers Ouvrages sont écrits avec noblesse & facilité ; mais l'Auteur semble y avoir trop prodigué l'esprit.
Henri Mazel Il a intitulé son livre de vers les Opales… Il affectionne les coupes rares, les strophes régulières, tercets et cinquaines de préférence ; le vers semble pour lui un coursier à chanfrein haut et à galop sonore que le poète dompte et dirige.
Ils semblent vous regarder, et vous sourire, même de près.
Auguste Vitu Vous écrivez en vers avec aisance et liberté, vous souciant assez peu de certaines exigences de facture ; remontant, sans l’ombre de la préméditation, vers l’ancienne tradition française, vous semblez ignorer le Parnassisme et la sévérité de ses lois draconiennes.
J’aime mieux en signaler la douceur commune d’impressions, tout ce qui s’en dégage, comme un arôme pénétrant, d’adoration et de respect pour la femme ; le dire juste et vraiment senti des souffrances qui font, dès ici-bas, des amants, les élus d’une douceur divine ; la simplicité d’une expression qui semble jaillir de l’âme sans s’attarder aux artifices menteurs du style convenu.
« — Il me semble, dit-elle en se retirant à pas lents vers sa mère, que, pour l’enfant d’un vannier, il parle merveilleusement bien ! […] « Elles flairent le vent et se souviennent, après dix ans d’esclavage, de l’exhalation salée et enivrante de la mer, échappées sans doute de l’attelage de Neptune, leur premier ancêtre, semblent encore teintes d’écume, et, quand la mer souffle et s’assombrit, quand les vaisseaux rompent leurs câbles, les étalons de la Camargue hennissent de joie ; ils font claquer, comme une mèche de fouet, leur longue queue traînante ; ils creusent le sol avec leur sabot, ils sentent pénétrer dans leur chair le trident du dieu terrible qui fait bondir les flots. » Le maître de ces escadrons de cavales demande Mireille à son père. […] « Et les six mules, belles et luisantes, suivaient, sans détourner ni s’arrêter, le sillon ; elles semblaient, en tirant, comprendre elles-mêmes pourquoi il faut labourer la terre sans marcher trop lentement et sans courir, vers le sol baissant le museau, patientes, attentives à l’ouvrage, et le cou tendu comme un arc ! […] En ceci le poète nous semble manquer de cette habileté manuelle de composition qui a manqué à Virgile dans l’Énéide, et qui n’a manqué jamais ni au Tasse ni à l’Arioste. […] Or, par une heureuse coïncidence, ce rare phénomène végétal semblait nous avoir attendus pour s’accomplir sous nos yeux.
Quand le vent de Libecio agitait les vagues, on voyait frissonner la mer et courir l’écume avec ce sentiment de gaieté et d’immortalité que donne au regard cette surabondante vie et cette renaissante jeunesse des éléments qui semblent vivre et qui vivent en effet d’une nouvelle vie tous les matins. […] On ne décrit pas l’ivresse, on ne peint pas la verve ; la beauté est la verve de la nature ; la sienne semblait enivrer l’air qui l’enveloppait et qui devenait lumineux et tiède en la touchant ; elle marchait, comme les héroïnes surnaturelles de l’Arioste, dans un limbe d’attraits et de fascination auquel on n’essayait même pas d’échapper. […] Tous ces édifices, dont l’architecte éloigne avec scrupule les fermes, les basses-cours, les écuries, les cuisines, les logements des serviteurs, semblent avoir été construits surtout pour la sieste, ce sommeil diurne qui occupe un tiers de la journée des Italiens. […] À l’exception d’Auguste, des Médicis et de Louis XIV, les princes et les nations semblent s’être réservé le privilège d’ingratitude envers ceux qui les illustrent. […] Nous nous couchâmes le soir sur un lit de songes, dont l’Arioste semblait avoir rembourré l’oreiller des deux maîtresses et des trois hôtes de la maison.
Il me sembla qu’il pouvait en résulter une tragédie très touchante et très originale, pour peu que l’auteur eût l’art d’arranger sa fable de manière à laisser le spectateur découvrir lui-même par degré les horribles tempêtes qui s’élèvent dans le cœur embrasé et tout ensemble innocent de la pauvre Myrrha, bien plus infortunée que coupable, sans qu’elle en dît la moitié, n’osant s’avouer à elle-même, loin de la confier à personne, une passion si criminelle. […] Déjà, au mois de décembre 1798, ils avaient achevé la magnifique conquête de Lucques, d’où ils ne cessaient de menacer Florence, et, au commencement de 1799, l’occupation de cette ville semblait inévitable. […] Le Salluste me sembla de nature à pouvoir passer, et je le laissai aussi ; mais non pas le Térence, lequel, n’ayant été fait qu’une seule fois, n’avait été ni revu ni corrigé, était tel, en un mot, qu’il est encore aujourd’hui. […] L’Abel, désormais condamné à rester, je ne dirai pas une œuvre unique, mais isolée, et privé des compagnes que je m’étais promis de lui donner, avait été mis au net, corrigé, et me semblait pouvoir passer. […] Toutefois il ne semblait pas croire que la mort, avec laquelle il s’était depuis longtemps familiarisé, le menaçât alors de si près.
S’en tenir uniquement aux faits sensibles qui tombent sous notre observation, et ne pas remonter plus haut pour les mieux comprendre, lui semble une aberration et presque un sacrilège. […] Il semble cependant qu’ici il commet une erreur assez grave ; et que c’est à tort que de l’éternité du mouvement, telle qu’il l’a établie, il conclut à l’éternité du premier moteur. […] Laplace lui-même ne s’est pas flatté de faire davantage ; mais il y a porté une telle puissance et une telle fécondité d’analyse qu’en y démontrant tout, il a semblé tout produire, bien qu’il se bornât à tout organiser et à mettre tout en ordre. […] Tout ce que nos yeux peuvent découvrir lui semble connu : et l’éléphant qu’il a disséqué, et cet animal imperceptible qu’on voit à peine naître dans la pourriture et la poussière. […] « Il semblerait résulter de cet antagonisme que l’ennemi de l’homme, c’est son corps, qui sert tout au moins d’intermédiaire au vice, quand il n’en est pas directement la cause.
Il était gros, épais, carré par la base et les épaules ; le cou, la poitrine, le corps, les cuisses, les membres puissants ; beaucoup de l’ampleur de Mirabeau, mais nulle lourdeur ; il y avait tant d’âme qu’elle portait tout cela légèrement, gaiement, comme une enveloppe souple, et nullement comme un fardeau ; ce poids semblait lui donner de la force et non lui en retirer. […] Il me sembla que je le connaissais depuis mon enfance : il me rappelait ces aimables curés de campagne de l’ancien régime, avec quelques boucles de cheveux sur le cou, et toute la charité joviale du christianisme sur les lèvres. […] « Ces yeux interrogeaient et répondaient sans le secours de la parole, voyaient les idées, les sentiments, et lançaient des jets qui semblaient sortir d’un foyer intérieur et renvoyer au jour la lumière au lieu de la recevoir. […] Il aima toujours ces jeux en mémoire d’elle ; il s’y rappelait ses paroles, et un de ses gestes retrouvé lui semblait un bonheur arraché à la tombe ! […] Je n’ose les supprimer, parce qu’ils peignent merveilleusement le caractère primordial de mon frère, et que le développement successif d’une telle intelligence me semble intéressant à suivre.
Il lui semblait que l’unique moyen de suspendre d’abord et de conjurer ensuite pour jamais les désastres dont on était menacé, serait de me rendre à Paris pour communiquer de vive voix à Bonaparte, au nom du Saint-Père, ce que je lui avais exposé. […] Je lui témoignai aussi que si son discours me semblait très fondé en ce qui regardait l’envoi d’un cardinal, je ne pouvais cependant pas tomber d’accord avec lui sur le choix de ma personne ; que je faisais volontiers abstraction de mon manque de talents et de qualités nécessaires ; mais qu’il existait un autre obstacle majeur qui m’empêcherait d’être désigné pour cette mission ; que si le proverbe si vis mittere, mitte gratum , si vous voulez envoyer, envoyez qui sera agréable, était vrai (comme il l’est du reste), je n’étais pas aimé, et cela apparaissait bien dans les lettres adressées de Paris et dans les conversations que tenaient les amis de la France à Rome. […] Cacault lui paraissaient raisonnables et fondés ; que toutefois, en affaires si délicates, il ne voulait pas agir sans demander conseil à plusieurs ; que je devais donc assembler, pour le jour suivant, une congrégation de tout le sacré-collège, et que cette congrégation se tiendrait en sa présence ; que j’aurais à y relater tout ce qui s’était passé, et que l’on écouterait les dires de chacun ; qu’il se résoudrait alors au parti qui lui semblerait le meilleur, et qu’en attendant il accorderait l’audience demandée par M. […] Pour justifier leurs votes, ils arguaient que ma qualité de secrétaire d’État semblait, d’après l’observation de M. […] Nonobstant cela, il ne me semble pas possible de prétendre que j’aie cherché à rompre du côté du Pape, dès qu’on s’est mis d’accord sur tous les articles, à la réserve d’un seul, pour lequel j’ai prié qu’on consultât le Saint-Père lui-même ; car ses propres commissaires n’ont pas rejeté cette proposition.”
Quand l’espion de l’Océan, Morannal, arriva de la plaine de Lena, ses yeux égarés semblaient sortir de sa tête, ses lèvres étaient pâles et tremblantes. […] La fleur incline sa tête au souffle du zéphyr, et semble lui dire : « Zéphyr importun, laisse-moi reposer, laisse-moi rafraîchir ma tête dans la rosée du ciel, dont la nuit m’a couverte. […] Un sourire semble animer les traits obscurs de son visage : sa chevelure de brouillard flotte sur les vents, il se penche sur sa lance aérienne. […] L’étendard de Morven, déployé dans les airs, marche devant lui : son épaisse chevelure semble lutter avec les traits farouches de la guerre. […] Ses cheveux semblaient blanchis par l’âge ; son œil était sérieux et calme. « La plus belle des femmes, dit-il, aimable fille d’Arnim, non loin d’ici s’élève dans la mer un rocher qui porte un arbre chargé de fruits vermeils.
Il semblait qu’il y eût du nouveau à tenter dans la tragédie après Corneille et Racine. […] Les personnages de Regnard semblent avoir été chargés de répéter ses bons mots. […] En défendant Dorante contre sa mère, elle croit ne défendre que son droit d’avoir pour intendant qui bon lui semble, et la cause du bon sens contre le préjugé des grandes alliances. […] Que vous semble de ce mot d’une fiancée à son fiancé ? […] Sa tirade nous paraît d’une légèreté moins travaillée à travers la cavatine qui n’est pas moins spirituelle, et qui semble plus facile.
Un vers de son petit poème, « Art poétique », donné en une revue de 1882, un vers presque négligemment et gaminement lancé en conclusion, me semble avoir été la parole de délivrance qu’attendaient de chaotiques inquiétudes : « Et tout le reste est littérature ! […] Jean Moréas, tout en la brisant, ne concevait point pour le Rythme d’autre mesure que « l’ancienne métrique, avivée, disait-il : un désordre savamment ordonné, la rime illuescente et martelée auprès de la rime aux fluidités abscondes, l’alexandrin à arrêts multiples et mobiles, l’emploi de certains nombres impairs. » Ainsi, à travers Mallarmé et Verlaine, et Ronsard, Moréas me semble avoir préparé les voies au « Vers libre » dont M. […] S’il use du « Vers libre », à la manière de Kahn et de Viélé-Griffin, il semble plutôt se résigner à une licence » car son art, malgré tout, est près du Parnasse. […] Ses principes me semblent de plus en plus inébranlables…. » Et voici un apport à la « Poésie scientifique » dont la valeur se double, ici encore, de la grande notoriété du poète. […] « les esprits paresseux et routiniers aiment à entendre ce qu’ils entendaient hier, a écrit Alfred de Vigny mêmes idées, mêmes expressions, mêmes sons : tout ce qui est nouveau leur semble ridicule, tout ce qui est inusité, barbare. » 10.
Et regarder la coupole, semble un moment devoir devenir l’expression, pour peindre l’abstraction d’un académicien, d’une séance de l’Académie, la dissimulation de ses impressions, de ses sensations, quand un antipathique parle. […] Mardi 7 juin Ce soir, au dîner de Brébant, Spuller, le nouveau ministre de l’Instruction publique, dîne en face de Berthelot, l’ex-ministre, dont l’ironie aujourd’hui me semble un peu plus acide que les autres jours. […] À ce récit, et au plaisir littéraire que Daudet y mettait, Gambetta le contempla, un moment, avec un regard tout plein d’une immense commisération, et qui semblait lui dire, qu’il était condamné à rester toujours le Petit Chose. […] … il me semble, que j’ai une cervelle de diamant… que, dans la journée, je vais faire des choses ! […] Lui aussi, à l’apparence si forte, et si vivant, et si dépensier d’esprit, le voici touché par la maladie et condamné à manger un pain, qui semble à la cosse de bois d’un fruit d’Amérique.
ce qui semble donner gain de cause à ceux qui prétendent qu’on peut se borner à l’un ou à l’autre. […] Soyons raisonnables ; il me semble que cela vaut bien quelques opéra qui sont des ouvrages très-modestes, & presque moraux en comparaison de ceux que je cite. […] A la manière dont il les représente, il semble qu’on soit à la veille d’une révolution funeste dans la littérature, & dans les mœurs. […] Loin de tendre, comme on le devroit, à la correction des mœurs, on semble conspirer pour leur ruine : on réveille presque toujours l’idée du libertinage. […] Ils semblent préconiser le vice, en rendant inutile l’amour de la vertu.
Il y mena quelque temps une vie d’indépendance, d’union parfaite, de bonheur sans nuage auprès de la personne distinguée qui (autant qu’on peut l’entrevoir) lui était supérieure et qui semblait l’avoir fixé. […] Ce renoncement suprême en vue de Marianne ne lui paraissait pas même mériter le nom de sacrifice : « Je ne sens que de la joie, disait-il, en songeant que je vais, en attendant la mort, mener une vie plus triste qu’elle, et j’aime si fort ma douleur qu’il me semble que c’est encore un moindre malheur de la souffrir que de la perdre ; si ma chère Marianne la peut voir, elle lui fait plaisir. » Il haïssait les biens, les grandeurs, tout ce qu’il ne pouvait plus partager ; il n’aimait que cette douleur, la seule chose qui lui restât de son amie ; il en parlait, d’ailleurs, comme d’une peine poignante, qui le tenait cruellement éveillé durant les nuits et qui prolongeait ses insomnies jusqu’au matin, où il ne s’assoupissait qu’à la fin et par excès de fatigue : « Mais j’ai beau faire, je ne saurais perdre de vue l’objet de mon tourment. […] Ce n’est qu’après cette aventure de quelques mois que Lassay rentra en France en 1686 : il me semble que nous commençons à le connaître et que nous pouvons nous rendre compte de la réputation d’inconsistance et d’inégalité qu’il s’était faite, et dont il ne se releva jamais qu’imparfaitement.
Le duc de Chevreuse, pour peu qu’on le laisse faire, est tenté de passer sa vie dans son cabinet à lire, à étudier, à se morigéner sans cesse, à s’imposer pour soi ou pour les autres des occupations de tout genre, politiques, théologiques, des occupations dont quelques-unes en elles-mêmes peuvent sembler fructueuses et nourrissantes. […] Il faut avouer que je vous ai toujours vu, dans votre enfance, aimant à être en particulier, et ne vous accommodant pas des visages nouveaux. » Il voudrait le voir accessible, ouvert à tous, sachant s’entourer mieux qu’il ne fait et de personnes plus considérées, sachant un peu proportionner ses témoignages de confiance à la réputation publique de ceux à qui il les accorde ; il voudrait surtout le mettre en garde contre tout ce qui semble dénoter une dévotion sombre, timide, scrupuleuse : Pour votre piété, si vous voulez lui faire honneur, vous ne sauriez être trop attentif à la rendre douce, simple, commode, sociable… (Et dans une autre lettre, à quelques jours de là) : Vous devez faire honneur à la piété, et la rendre respectable dans votre personne. […] Ces générations plus jeunes et pleines de nouveaux désirs, qui souffraient impatiemment le long règne et la sujétion muette imposée par Louis XIV, devraient, ce semble, se tourner avec faveur du côté d’un héritier plus ou moins prochain qui s’annonce avec des maximes contraires ; mais loin de là : au lieu de cette faveur, elles n’ont que rage à l’avance et fureur de calomnie contre ce futur roi, parce qu’on le sait vertueux et religieux.
c’est elle qui nous séduit, elle qui n’est que trouble et qu’agitation, qui ne tient à rien, qui fait autant de pas à sa fin qu’elle ajoute de moments à sa durée, et qui nous manquera tout à coup comme un faux ami, lorsqu’elle semblera nous promettre plus de repos. […] On a essayé plus d’une fois de refuser et de ravir à Louis XIV son genre d’influence utile et d’ascendant propice sur ce qu’on a appelé son siècle : depuis quelque temps, on semblait cependant revenu de cette contestation injuste et exclusive, lorsqu’un grand écrivain de nos jours, M. […] Bossuet, ce me semble, nous offre en particulier un des plus grands et frappants exemples du genre de bienfaits que le siècle de Louis XIV dut au jeune astre de son roi dès le premier jour.
Les sens trompent la raison, et en échange ils sont souvent trompés par elle : « Voyez quelle belle science et certitude, dit-il, l’homme peut avoir, quand le dedans et le dehors sont pleins de fausseté et de faiblesse, et que ces parties principales, outils essentiels de la science, se trompent l’une l’autre. » Il en résulte à ses yeux que les animaux, qui semblent aller plus à coup sûr, ont bien des avantages sur l’homme ; peu s’en faut par moments qu’il ne leur accorde une entière préférence. […] Qui agit par ce ressort, agit selon Dieu… » Charron ici, comme en quelques autres endroits, se trouve en contradiction avec son premier scepticisme fondamental, et moyennant cette lumière naturelle qui luit en chacun et qu’il semble reconnaître, il est plus voisin des platoniciens qu’il ne croit. […] En retraçant un portrait du parfait souverain en ces belles années de Henri IV, il semble quelquefois dessiner d’après nature, mais il laisse aux lecteurs les applications à faire, et il ne le dit pas.
De même, dans la harangue de Henri IV à l’assemblée des notables de Rouen, Voltaire semblait prendre au pied de la lettre cette gracieuse et débonnaire promesse de se mettre en tutelle entre leurs mains, tandis que Henri entendait bien ne faire là qu’une politesse ; et comme Gabrielle, au sortir de cette séance, s’étonnait qu’il eût ainsi parlé de se mettre en tutelle : « Il est vrai, répondait-il, mais, ventre saint-gris ! […] En quelques endroits, il m’a semblé que l’auteur n’était pas encore assez rompu à cette langue française, qu’il manie d’ailleurs avec une ingénieuse finesse. […] Mais, chez les poètes moins complets, l’accord semble plus rare.
Je la rassemblais autour du nom de Ronsard, et je la limitais moi-même dans ces vers où, ce me semble, je ne demandais que peu. […] Il n’avait pas tort, ce me semble, de tenter quelque nouvelle route pour enrichir notre langue, pour enhardir notre poésie, et pour dénouer notre versification naissante. […] Le François semble au saule verdissant : Plus on le coupe et plus il est naissant, Et rejetonne en branches davantage, Prenant vigueur de son propre dommage : Pour ce, vivez comme amiables sœurs.
Il lui avait envoyé son poème sur La Loi naturelle ; elle lui propose des doutes sur sa théorie, un peu trop platonicienne selon elle ; il semble que pour son compte elle adopterait plutôt celle de Hobbes, de Pascal, et de ceux qui ne cherchent l’origine de la justice que dans l’amour de la conservation et dans la seule utilité de la société. […] Il serait, ce me semble, bien difficile qu’on refusât d’être l’arbitre de tout, et de donner des lois absolues à un prince qui croyait, le 17 juin (veille de la bataille de Kolin), en donner à toute l’Allemagne. […] Quoique tout semble perdu, il nous reste des choses qu’on ne pourra nous enlever : c’est la fermeté et les sentiments du cœur. » Cependant, Frédéric discutait librement avec elle de ses résolutions tragiques, de leur commune et unanime destinée ; il sentait la force des raisons qu’on lui opposait, et il les admettait en partie : Si je ne suivais que mon inclination, je me serais dépêché d’abord après la malheureuse bataille que j’ai perdue ; mais j’ai senti que ce serait faiblesse, et que c’était mon devoir de réparer le mal qui était arrivé.
Il semble que sa carrière ainsi établie soit close ou du moins toute tracée, et qu’il n’y ait plus pour elle qu’à continuer sur ce pied-là ; car elle a près de soixante ans. […] Du moment que la nouvelle reine d’Espagne est une princesse de Savoie, il est indispensable d’avoir pour soi le père, le duc de Savoie, de qui même la proposition, ce semble, doit venir : il ne s’agit que de la lui souffler, et, pour cela, voici la machine que Mme des Ursins arrange et construit (janvier 1701) : Il est certain que le succès de tout cela dépend de M. le duc de Savoie ; vous m’en avez assez écrit pour le comprendre, et, outre cela, la chose se dit elle-même. […] Je ne sais plus quelles autres mesures prendre pour assurer davantage la réussite de cette affaire : il ne me reste, ce me semble, qu’à supplier Mme de Maintenon de m’honorer de ses bons offices auprès de Sa Majesté, et c’est ce que je vous prie de vouloir bien faire.
La plupart des Pensées de Mme Swetchine semblent avoir ainsi mûri au feu du soleil intérieur, et, au lieu d’être, comme des plantes naturelles d’Italie, écloses au grand air et aux rayons du matin, et qui ont bu la rosée avec l’aurore, elles ont l’air d’avoir poussé en serre et en chambre bien nattée. […] Par exemple, dans une lettre à M. de Montalembert, au moment de la crise de déchirement avec M. de Lamennais : « Je le crois, disait-elle, le grand homme eut fléchi devant un enfant tendre et pieux, car il me semble bien que c’est à la seule tendresse que peut céder M. de Lamennais, et, comme Clorinde, si son bras est fort, son cœur est faible. […] Et ceci encore (car elle ne sait qu’imaginer pour dire à la vieillesse : Tu n’es pas, ou tu es le contraire de ce que tu parais : « La vieillesse est la nuit de la vie ; la nuit est la vieillesse de la journée, et néanmoins la nuit est pleine de magnificences, et, pour bien des êtres, elle est plus brillante que le jour. » Voici qui me paraît un peu risqué et inexact : « La vieillesse est le dôme majestueux et imposant de la vie humaine… » Le dôme est ordinairement, ce me semble, aux deux tiers de l’édifice et n’est pas à l’extrémité.
D’après les calculs même qu’on oppose, il me semble que M. […] La plus grave des objections est le mot ici qui semble supposer quelqu’un de présent en France : Mme de Staël n’y était que par ses amis, et elle s’y sera transportée d’imagination en écrivant. […] C’est dangereux dans ce moment… » La conclusion à tirer de tout ceci, à ce qu’il me semble, c’est que, dans cette succession si rapide d’événements et dans cette mobilité d’impressions souvent contraires, l’impossibilité morale de la lettre en question n’existe pas.
Gœthe osait donc se découvrir devant Eckermann et montrer les nombreuses piqûres que son amour-propre avait reçues ; il semblait lui dire en les étalant : « Voyez, il n’y a pas d’homme complètement heureux. » Ainsi, un jour qu’il causait de son recueil de poésies à l’orientale, le Divan, et particulièrement du livre intitulé Sombre humeur, dans lequel il avait exhalé ce qu’il avait sur le cœur contre ses ennemis : « J’ai gardé beaucoup de modération, disait-il ; si j’avais voulu dire tout ce qui me pique et me tourmente, ces quelques pages seraient devenues tout un volume. — Au fond, on n’a jamais été content de moi, et on m’a toujours voulu autre qu’il a plu à Dieu de me faire. […] Ce qu’il était permis de dire aux anciens Grecs ne nous semble plus, à nous, convenable, et ce qui plaisait aux énergiques contemporains de Shakspeare, l’Anglais de 1820 ne peut plus le tolérer, à tel point que dans ces derniers temps on a senti le besoin d’un « Shakspeare des familles. » Nous connaissons, sans sortir de chez nous, de ces pruderies et de ces arrangements-là, mais bien vite nous en rions ; — nous en souffrons aussi. […] On n’a jamais mieux défini Voltaire dans sa qualité d’esprit spécifique et toute française, qu’il ne l’a fait ; on n’a jamais mieux saisi dans toute sa portée la conception buffonienne des Époques de la Nature ; on n’a jamais mieux respiré et rendu l’éloquente ivresse de Diderot ; il semble la partager quand il en parle : « Diderot », s’écrie-t-il avec un enthousiasme égal à celui qu’il lui aurait lui-même inspiré, « Diderot est Diderot, un individu unique ; celui qui cherche les taches de ses œuvres est un philistin, et leur nombre est légion.
Toutes ces machines semblent sortir de terre à point nommé. […] Les expressions, pour vouloir renchérir sur ce qui a été dit déjà, semblent forcées bien souvent. […] Mais comment se fait-il que je ne puisse jamais être entièrement d’accord avec le savant critique, même quand il semble se rapprocher de nous ?
Son clergé plus instruit, plus discipliné, plus belliqueux ; ses fidèles plus soumis et marchant en armée comme un seul homme ; des auxiliaires sur les ailes, jusque dans la jeunesse dorée ou dans le monde bohème, par ton et par genre ; le tout présentait un ensemble imposant et une ligne rangée qui défiait l’adversaire et qui semblait provoquer le combat. […] Renan en détache un seul ; et véritablement, tel qu’il me semble le connaître, je ne me figure pas qu’il l’ait espéré ni qu’il le désire3. […] Il semble presque impossible, au point de vue de l’art et en prétendant conserver l’intérêt du récit, d’opérer une réduction quelconque de ce grand drame, consacré dans les imaginations par l’admirable liturgie du Moyen-Age et par tant de chefs-d’œuvre du pinceau.
Il sembla à Louvois qu’en remontant par-delà la Paix de Nimègue jusqu’aux Traités mêmes de Westphalie, et en les étudiant mieux qu’on ne l’avait fait, on pouvait en user habilement dans l’intérêt de la France, et il s’appliqua à y voir ce qu’on n’y avait pas su lire avant lui. […] Ils pouvaient même donner à un traité une interprétation arbitraire : ainsi, lorsqu’ils voulurent abaisser les Rhodiens, ils dirent qu’ils ne leur avaient pas donné autrefois la Lycie comme présent, mais comme amie et alliée. » Il semblerait vraiment, à les voir agir, que Louis XIV et Louvois eussent étudié les Romains de plus près qu’ils ne l’avaient fait sans doute, et qu’ils eussent pris des leçons de cette politique tant vantée. […] L’ordre d’agir enfin, envoyé de Fontainebleau, et pendant que tout le monde semblait en fête, fut apporté avec des précautions non moins mystérieuses : « Le 10 septembre 1681, nous dit M.
Détaché, vers le midi, de l’Hœmus ou des Balcans qui servent comme de large base entre la mer Noire et l’Adriatique à toute la presqu’île, le Pinde, arête de la Grèce, en jetant ses nombreux rameaux à droite et à gauche, pour former autant de vallées, semble engager un combat héroïque avec la mer qui l’assiège. […] César, à la fin, ne se donnait plus la peine de défendre sa vie ; il semblait dire : « Qu’ils la prennent, s’ils la veulent ! […] Pour guérir des folies et des misères désespérées, il faut des remèdes extrêmes, et qui eux-mêmes, à les bien prendre, visent quasi à la folie ; il faut une contre-folie, mais qu’elle semble divine et qu’elle soit entraînante en sens inverse et contagieuse.
Un christianisme platonicien, qui semble retenir « le souverain plasmateur Dieu » comme efficace surtout pour liquider d’un coup tout l’embarras métaphysique, et qui, pour une raison analogue, éloigne toute précision de dogme : solution moyenne qui fait une religion d’honnêtes gens, pressés d’aviser à la pratique, et qui a bien l’air d’être le fond du spiritualisme français. […] Et par là Rabelais est en plein dans la pure tradition du génie français, qui jusqu’au milieu du xviie siècle ne connaît guère la femme et cette vie tout affective dont elle nous semble être essentiellement source et sujet. […] Il n’a pas le sens de l’art, si l’on entend par là l’adoration des formes harmonieuses et fines : la grâce souveraine de l’être équilibré dans sa perfection, la calme aisance dont il se possède en jouissant de soi, ne semblent pas l’avoir touché.
Il me semble qu’il faut prendre garde de trop louer l’idée philosophique qui a déterminé le caractère de Gil Blas. […] Et ainsi, jusque dans la conception morale que semble exprimer la dernière partie du roman, Lesage ne dépasse pas le possible et le réel : on ne saurait dire que Gil Blas soit un idéal ; il arrive à être à peu près la moyenne d’un honnête homme, après avoir été un peu au-dessous. Une chose qu’il faut louer presque sans réserve chez Lesage, c’est le style, naturel jusqu’à la négligence, et pourtant plus travaillé qu’il ne semble d’abord, léger et fort tout à la fois, piquant, imprévu, abondant en traits, ayant le relief et le mordant du style dramatique.
Une détestable rhétorique semble apporter des collèges à la tribune tout l’arsenal des métaphores, comparaisons, allusions, citations qui servaient depuis deux siècles aux discours latins des écoliers. […] Et alors la paix que je ferai sera digne de mon peuple, de vous et de moi. » Le fond est ce qu’il faut qu’il soit : des idées nettes, simples, immédiatement accessibles, des sentiments communs, réels, immédiatement évocables ; l’honneur, la gloire, l’intérêt ; de vigoureux résumés des succès et des résultats obtenus, de rapides indications des résultats et des succès à poursuivre, des communications parfois qui semblent associer l’armée à la pensée du général et la flattent du sentiment d’être traitée en instrument intelligent : toutes les paroles qui peuvent toucher les ressorts de l’énergie morale, sont là, et sont seules là. […] En général, sans avoir changé sa forme ni renouvelé ses moules, il me semble que Napoléon est pourtant moins classique, moins asservi au goût révolutionnaire dans ses dernières années, et qu’il exprime son tempérament par des effets plus personnels.
On hésitait à prendre au sérieux un savant qui tirait tant de révérences à l’idéalisme, un critique qui ne semblait occupé qu’à donner de l’eau bénite. […] Il semble que le public soit las de fictions et savoure la certitude de la réalité des récits et descriptions que ces sortes d’écrits lui offrent. Il semble aussi que son éducation esthétique soit au point qu’il est apte à extraire lui-même d’une matière brute les possibilités de plaisir littéraire qu’elle contient, et qu’il se plaise à faire ce travail plutôt qu’à le recevoir tout fait d’un artiste habile.
Il est vrai que tout semblait conspirer pour faire de l’exotisme de Pierre Loti quelque chose de très pénétrant et de très puissant. […] Tout, ai-je dit, semble avoir conspiré pour assurer cette royauté à l’auteur d’Aziyadé. […] A qui a parcouru les cinq continents et la surface entière de la planète, les sujets qui passionnent Balzac semblent mesquins et sans intérêt.
La distance qui paraît si grande entre les clercs et les écrivains en langue vulgaire, ainsi qu’entre les deux publics distincts qui les suivaient, est moindre qu’il ne semble au premier abord. […] Mais cette langue de la traduction, si rebelle à tout ce que l’esprit français ne doit pas s’assimiler, semble naître ou plutôt mûrir tout à coup, pour exprimer tout ce qui ne cessera pas d’être vrai. […] Quand ils se guindent ainsi à réfléchir sur les événements, et à regarder dans le passé et dans l’avenir, ils semblent comme pris de vertige.
À la vérité, il dirigeait depuis 1857 la Revue spirite et il n’était que l’introducteur en France de cette doctrine, déjà professée en Amérique, mais si exploitée par les charlatans qu’elle en semblait déconsidérée à jamais. […] Sabatier, doyen de la Faculté des sciences de Montpellier : « Les centres cérébraux psychiques concentrés sont des accumulateurs du psychique diffus répandu dans l’Univers, et qui leur parvient par le canal des nerfs périphériques, par les organes des sens et les cordons nerveux qui les rattachent au centre cérébral8. » La démonstration semble ainsi faite, comme le dit Myers, qu’il existe, autour de nous, un univers spirituel, en rapport étroit avec l’univers matériel. […] Ils semblaient prendre plaisir à vouloir vaincre par eux-mêmes et à s’imposer, contre vents et marées, par la seule force de leur génie.
Mallarmé semblait donc résigné au désastre définitif lorsque le livre de Huysmans : À Rebours (1884) dont le succès fut très vif vint décider de sa fortune. […] Le reflet rose de la lampe dormait sur la table, Derrière lui, son portrait, peint par Whistler, semblait s’effacer dans un brouillard de rêve. […] Lorsque Mallarmé, écrit Paul Valéry, m’ayant lu le plus uniment du monde son Coup de dés, comme simple préparation à une plus grande surprise, m’en fit enfin considérer le dispositif, il me sembla voir la figure d’une pensée, pour la première fois, placée dans notre espace… Ici, véritablement, l’étendue parlait, songeait, enfantait des formes temporelles.