Nous ne parlerons point de ces Jubilés substitués aux jeux séculaires, qui plongent les chrétiens dans la piscine du repentir, rajeunissent les consciences, et appellent les pécheurs à l’amnistie de la religion. […] Enfin, les vents, les pluies, les soleils, les saisons, les cultures, les arts, la naissance, l’enfance, l’hymen, la vieillesse, la mort, tout avait ses saints et ses images, et jamais peuple ne fut plus environné de divinités amies, que ne l’était le peuple chrétien.
À la gloire par la mort, c’est la devise même du chrétien. […] Dès qu’un chrétien est intelligent, dès qu’un chrétien est profond, dès qu’un chrétien comprend le christianisme. […] » aurait poussé les chrétiens à l’impiété. […] Ce qu’il y a de certain, c’est que le chrétien prie son Dieu quelquefois comme un chrétien, souvent, plus souvent, le plus souvent, comme un amoureux prie celle qu’il aime. […] Vous êtes un chrétien, je suis un homme de science.
Ou l’idéal chrétien, ou l’idéal païen ! […] Théodore est chrétienne, et les édits de persécution contre les chrétiens sont en pleine vigueur. […] Ils ne sont pas plus mystiques, ni même chrétiens, l’un que l’autre. […] J’ai dit qu’il était fort peu chrétien. […] Et l’empereur songe… Au-dessus de rassemblée des chrétiens vivants, il y a l’assemblée de toutes les âmes chrétiennes, dans le paradis.
Tout l’art du Moyen-Âge est chrétien, des fresques des Primitifs aux flèches des cathédrales, de Dante à Palestrina. […] Encore sera-ce désormais une vie en guerre, et d’ailleurs les heures ont été brèves de la douce beauté chrétienne. […] Avec Chateaubriand, malgré un mysticisme réel, nous atteignons l’époque du dilettantisme chrétien. […] Le génie chrétien a donc pu vivre — et quelle vie splendide dont l’histoire rayonne ! […] Je disais que Rousseau rendit au monde moderne le goût chrétien des larmes.
Deux points paraissaient inacceptables à ces chrétiens plus rigides. […] Lisez le fragment intitulé : Comparaison des chrétiens des premiers temps avec les chrétiens d’aujourd’hui. […] Chrétiens comme on ne l’était déjà plus de leur temps, les Pascal, les Arnauld, les Jansénius ont vainement essayé de ramener la morale chrétienne à la rigueur de son institution primitive. […] Mais ce n’est pas ainsi qu’agissent les chrétiens. […] Mais il l’est surtout parce qu’il est chrétien, et qu’un chrétien cesserait de l’être s’il pouvait croire à la bonté de l’homme et au prix de la vie.
Elles se répandirent d’abord comme un reflet sur la Perse et la Chine ; elles sanctifièrent Zoroastre et Confucius, et les législateurs du pays des pyramides ; de là elles passèrent en Grèce, où l’imagination les colora de ses brillants mensonges adoptés par les Romains ; puis l’incarnation chrétienne les sentit renaître et les pratiqua en morale parfaite et en ascétismes pieux. […] Une neige tombée en abondance la nuit précédente en faisait ressortir les gigantesques lignes sur l’horizon ; un ciel bleu, découpé par ses jours, éclatait dans l’intérieur ; il était absorbé dans l’admiration muette, cherchant comment il dresserait dans le ciel le théâtre de la grandeur du Dieu des chrétiens. […] Entrez avec moi dans l’aire de l’édifice chrétien. […] ” « Où est le siège d’un principe de civilisation dans les sociétés humaines, du principe chrétien, par exemple ? Il est partout où sa logique s’est emparée des choses humaines, partout où la vie chrétienne a pénétré, c’est-à-dire dans tous les actes chrétiens.
Si vous sortez du Parthénon chrétien, le temple de Saint-Pierre de Rome, écrasé par la masse, l’immensité, la majesté, la divinité de ces édifices, véritables temples de l’infini, qui semble avoir été construit pour faire comprendre et adorer deux des attributs de Dieu, l’espace et la durée, rendus sensibles, et si vous voulez résumer en un seul nom d’homme vos impressions confuses pour reporter cette merveille à son principal auteur, c’est le nom de Michel-Ange qui tombe de vos lèvres : l’architecte de Dieu ! […] L’éclectisme païen, déiste, chrétien, universel, n’ayant pour foi que le beau, pour gloire que l’art, pour culte que des pompes, pour morale que le plaisir sous les auspices d’un pontife lettré versant à l’Italie renaissante les tributs du monde ; tel était le caractère du siècle de Léon X. […] Mais Clément VII, aussi fervent que Léon X pour l’embellissement de la capitale du monde chrétien, ne tarda pas à rappeler à Rome l’homme que la Providence semblait avoir marqué de son sceau pour devenir l’Esdras du catholicisme. […] XIII À la mort du grand architecte San Gallo qui, avec Bramante, avait conçu, dessiné et surveillé les plans primitifs de Saint-Pierre de Rome, Michel-Ange parut le seul homme capable de rectifier et et de diviniser ce Parthénon chrétien. […] La solitude de son âme ne fut plus qu’un entretien posthume avec la chère âme qu’il brûlait de rejoindre dans l’Élysée chrétien.
Plus tard, pour les chrétiens, à cause de la prédiction de Prométhée, où l’on voulut voir Jésus, il fut presque un prophète. […] Car de tout temps on a combiné avec les affirmations orthodoxes ce qu’on a appelé les témoignages du polythéisme, et l’on a fait effort pour faire dire aux païens des choses chrétiennes. […] Il avait conquis la moitié de l’Asie et de l’Afrique, pris ou brûlé trente-six mille villes, villages, forteresses et châteaux, détruit quatre mille temples païens ou chrétiens, bâti quatorze cents mosquées, vaincu Izdeger, roi de Perse, et Héraclius, empereur d’Orient, et il se nommait Omar. […] On a argué d’un premier incendie du quartier Bruchion où était la bibliothèque alexandrine, pour prouver la facilité de ces accidents ; celui-ci était de la faute de Jules César, autre sabre ; puis d’un second incendie, partiel, du Sérapéum, pour accuser les chrétiens, ces démagogues d’alors. […] Vers le temps où Jésus-Christ était peint sur les murailles, à Rome, avec des sabots d’âne et cette inscription : Le Dieu des chrétiens ongle d’âne, au troisième siècle, pour qu’on fît de Tacite dix copies par an, ou, comme nous parlerions aujourd’hui, pour qu’on le tirât à dix exemplaires, il a fallu qu’un césar s’appelât Tacite et crût Tacite son oncle.
En opposition avec une philosophie stérile, muette, superficielle, que nous enseigne la théologie chrétienne ? […] Ce n’est plus bientôt qu’un je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue. » Oui, la théologie chrétienne décrit savamment le mal, pour nous en inspirer l’horreur, pour nous commander le retour laborieux au bien. […] Seulement, par une inconséquence qui nous touche et dont nous connaissons la cause, il se mêle à ces poésies, imparfaites par là au point de vue absolu de leur auteur, des cris d’âme chrétienne, malade d’infini, qui rompent l’unité de l’œuvre terrible, et que Caligula et Héliogabale n’auraient pas poussés. […] S’appelât-on l’auteur des Fleurs du mal, — un grand poète qui ne se croit pas chrétien et qui, dans son livre, positivement ne veut pas l’être, — on n’a pas impunément dix-huit cents ans de christianisme derrière soi. […] Après les Fleurs du mal, il n’y a plus que deux partis, à prendre pour le poète qui les fit éclore : ou se brûler la cervelle…… ou se faire chrétien !
Serait-ce Verlaine pour certains vers chrétiens de Sagesse ? […] Boileau était chrétien. […] Il honorait la pauvreté, en poète et en chrétien. […] Quoi de plus attendrissant que les adieux de la famille chrétienne ! […] Il a été à la fois chrétien et humain.
Son peu de goût pour le clergé chrétien s’explique en partie par là. […] Il marque une défiance de moraliste chrétien à l’égard de la nature humaine, laquelle est bonne. […] Le libéralisme est donc de l’essence même du christianisme ; le libéralisme est chrétien. […] Il n’admet la conquête qu’à la condition qu’on respecte la religion du peuple vaincu, si le peuple vaincu est chrétien ; qu’on fasse chrétien le peuple vaincu si le peuple vaincu est hors la foi. […] Chrétien individualiste, chrétien libre, fils de protestante du reste, et ayant beaucoup vécu, vivant encore de la vie morale de sa mère, il ne pouvait devenir que protestant.
Une grande préoccupation était au cœur de Mme de Guérin : c’était, en même temps qu’elle recueillerait les restes poétiques de son frère, de donner quelques explications sur l’état moral de son âme, et de le revendiquer pour cette foi chrétienne et catholique dans laquelle il avait été nourri, dans laquelle il était rentré et il était mort. […] Il avait cessé d’être chrétien. […] Que ce soit la couleur du temps, le loquet d’une porte, un vieux château qu’elle visite, ou l’une quelconque des fêtes et, cérémonies rurales, le baptême ou la fonte d’une cloche, la bénédiction des bestiaux, la messe de Noël où elle se rend en famille à minuit « par des chemins bordés de petits buissons blancs de givre, comme s’ils étaient fleuris », elle trouve sur tous ces thèmes fortuits ou naturels des pensées charmantes, légères et célestes, dignes d’une Cymodocée chrétienne. […] Il faut l’entendre dans ses cris et ses vœux de chrétienne alarmée, lorsqu’elle le voit égaré, dévoyé, selon elle, emporté vers un art d’une application funeste, souffrant de la poitrine avec cela, et, à travers les distractions mondaines, déjà atteint du mal mortel : « Ô frères, frères, nous vous aimons tant !
Il y a eu dans les deux communions des réveils, des coups de baguette impérieux et puissants, des coups de trompette, de grands talents, de belles âmes éloquentes, ardentes, qui ont essayé de fondre les divisions artificielles, de dégager le vrai courant, de reporter les esprits aux hauteurs et aux sources, de ne s’attacher qu’à ce qui est la vie ; et je le dirai avec la conscience de ne faire injure à aucun, s’il y a eu d’un côté Lacordaire, ce regard flamboyant, cette parole de feu, on a eu de l’autre Adolphe Monod, cette âme d’orateur et d’athlète chrétien qui, à ceux qui l’ont vue de près dans son agonie suprême, a rappelé le martyre et l’héroïsme de Pascal. […] Notez que le chrétien selon Saint-Paul et selon Calvin a bien ses terreurs, mais aussi, une fois entré pleinement dans l’idée de la gratuité de la Grâce, il n’a point les scrupules perpétuels du chrétien catholique ; il marche avec candeur et sécurité dans la joie des enfants de Dieu. […] L’autre chrétienne et pure catholique, l’humble fille du Cayla, avertie par tant de souffrances positives, se sent plus réellement en exil ici-bas, elle ne l’oublie jamais : elle est touchée de la nature, jamais entêtée ni enivrée.
L’auteur d’ordinaire termine ses chapitres par quelque vocation élevée, quelque réflexion affectuese, ni sur le don des larmes qu’on avait en ces temps, et qui semble de jour en jour tarir ; sur les mariages chrétiens à la fois si passionnés et si chastes, et dont celui d’Élisabeth et du landgrave est comme un type accompli ; sur ce que le souvenir de Luther, au château même de la Wartbourg a détrôné celui de l’humble Élisabeth, dont le nom toutefois est resté à une fleur des champs. […] Pour couronne de ce livre qu’il dédiait à la mémoire de sa sœur, il a rencontré dans un mariage chrétien, par une découverte aussi imprévue que touchante, une noble fleur issue de la tige même d’Élisabeth. […] En un mot, c’est à la fois, pour les chrétiens, un admirable exemple de la persistance d’une faculté sainte et d’un don qui semblait retiré au monde ; pour les philosophes, un objet d’étonnement sérieux et d’étude sur l’abîme sans cesse rouvert de l’esprit humain ; pour les érudits, la matière la plus riche et la plus complète d’un mystère, comme on les jouait au moyen âge ; pour les poëtes et artistes enfin, une suite de cartons retrouvés d’une Passion, selon quelque bon frère antérieur à Raphaël. […] Catholique de pied en cap, pourquoi ne trouve-t-il pas dans son cœur une seule petite fibre chrétienne un peu adoucie ?
Et le chrétien ! […] À un endroit, parlant de la mort de La Harpe qui, malgré ses défauts bien connus, se convertit avant l’heure suprême, il lui est échappé de dire : « Il n’a pas manqué sa fin, je le vis mourir chrétien courageux. » C’est ainsi qu’il aurait dit de l’auteur dramatique : « Il n’a pas manqué son cinquième acte. » De tels mots, lâchés par mégarde, donnent fort à penser. […] Un jour, se souvenant que son poème des Martyrs avait été critiqué au point de vue de l’orthodoxie, il lui est échappé, dans un accès d’amour-propre, de dire des chrétiens ce qu’il a dit si souvent des rois : « Et ne voilà-t-il pas que les chrétiens de France, à qui j’avais rendu de si grands services en relevant leurs autels, s’avisèrent bêtement de se scandaliser !
Au xviie siècle, les moralistes, soit tout à fait chrétiens, comme Pascal, Nicole, Bourdaloue, soit philosophes, comme La Rochefoucauld, La Bruyère, Molière le plus grand de tous, avaient été fort sévères pour l’homme et ne l’avaient nullement flatté. […] Les observateurs comme La Rochefoucauld, ayant surpris l’homme dans un temps d’intrigue et dans une société corrompue, avaient insisté dans le même sens ; avec cette différence qu’ils ne lui offraient point de remède, de sorte que, sous ce regard également inexorable des moralistes tant chrétiens que philosophes, sous ce double concert déprimant, toutes les vertus naturelles périssaient. […] Il n’y a nul doute que Vauvenargues ne fût religieux ; cela ressort de ses écrits, et Marmontel a dit de lui qu’il est mort « avec la constance et les sentiments d’un chrétien philosophe ». […] Pourtant on trouvait, dans les Pensées et Paradoxes qui venaient aussitôt après ces deux morceaux, plus d’un trait en désaccord avec la doctrine chrétienne rigoureuse ; la seule manière dont Vauvenargues y parle de la mort qui ne doit pas être, selon lui, le but final et la perspective de l’action humaine, et qui lui paraît en elle-même la plus fausse des règles pour juger d’une vie, cette façon d’envisager l’une des quatre fins de l’homme est trop opposée au point de vue de l’orthodoxie et en même temps trop essentielle chez Vauvenargues pour laisser aucun doute sur la direction véritable de ses pensées.
Et quand je les sens plus inquiets, quand on a l’air d’annoncer ceci et cela, ce qui les remonte, c’est l’espérance des chrétiens. […] Devant un Ecce Homo, le parfait chrétien se dit : « Voilà ce que le Christ a fait pour moi, et moi qu’ai-je fait pour lui ? […] Des dunes du Nord aux Vosges, partout, leur imagination dresse les deux montagnes saintes, celle des Oliviers, qui est la montagne de la résignation où l’on dit : « Non ma volonté, mais la vôtre », et celle du Calvaire, qui est la montagne du sacrifice, où l’on dit : « Je remets mon esprit entre vos mains. » Pour les chrétiens, chaque jour de nos tranchées renouvelle la passion du Christ. […] Par-delà les voiles, le soldat chrétien contemple un monde où sa place lui est réservée.
Il y a un endroit qui m’a paru un charmant exemple de ce qu’on peut appeler l’euphémisme chrétien : il s’agit de la mort, comme toujours ; mais Rancé évite d’en prononcer le nom, tout en y voulant tourner et comme apprivoiser l’esprit un peu faible de son ami, qui est vieux et, de plus, malade en ce moment. […] Aux seuls chrétiens comme Rancé il appartient de renchérir avec vérité sur cette délicatesse d’expression, et de dire, pour rendre en plein la même chose : S i quid felicius contigerit . […] Horace dit de la mort : In aeternum exilium , partir pour l’éternel exil ; et le chrétien dit : S’en retourner dans la patrie éternelle.
Mais c’est un chrétien et non pas un giaour, un chrétien profond, resté tel dans les abîmes de son être, — dans le cours de son sang, — par-delà et par-dessous tous les doutes, toutes les mauvaises pensées, toutes les tentations du xixe siècle ; c’est un chrétien naïf de foi, qui écrit à son frère, avant de mourir comme il convient, disait-il, à un gentilhomme ; « Le curé de Guaymas sort d’ici : c’est un homme intelligent et doux, un homme comme il en faut pour adoucir ce qu’il y a de trop léonin et d’indompté en moi.
Ceux qui vous traiteront ainsi seront tous des philosophes, auront à tout moment à la bouche les phrases que vous débitez depuis une heure, répéteront toutes vos maximes, citeront comme vous les vers de Diderot et de la Pucelle Et quand tout cela n’arrivera-t-il Six ans ne se passeront pas que tout ce que je vous dis ne soit accompli Voilà bien des miracles, dit Laharpe, et vous ne m’y mettez pour rien Vous y serez pour un miracle tout au moins aussi extraordinaire ; vous serez alors chrétien Ah ! reprit Chamfort, je suis rassuré ; si nous ne devons mourir que quand Laharpe sera chrétien, nous sommes immortels Pour ça, dit alors la duchesse de Gramont, nous sommes bien heureuses, nous autres femmes, de n’être pour rien dans les révolutions.
Il avait des vues sur la brièveté de la vie, sur la fragilité de nos sentiments, l’infirmité de notre raison et l’excellence de la religion chrétienne. […] Vous avez tous connu de ces abbés lauréats, sensibles aux prix académiques et aux récompenses officielles ; enclins à respecter, en littérature comme ailleurs, les jugements qui se formulent par voie d’autorité ; d’un amour-propre littéraire à la fois très éveillé et très ingénu, et où se révèle un fond de docilité chrétienne, de soumission aux puissances constituées, car toutes, et même celles que signalent les palmes vertes, émanent en quelque sorte de Dieu lui-même.
répondit Jouveroy, je ne me plais qu’avec les gens qui s’embêtent. » La Bruyère dit en parlant de certains financiers : « De telles gens ne sont ni parents, ni amis, ni citoyens, ni chrétiens, ni peut-être des hommes : ils ont de l’argent. » Je dirais volontiers des pareils de Servaise : « Ils ne sont ni chrétiens, ni citoyens, ni amis, ni parents, ni peut-être des hommes : ce sont des littérateurs chacun d’une religion littéraire distincte à laquelle il est seul à croire, et qu’il est seul à comprendre quand il la comprend ».
Un jour Guizot, qui a le triste génie des coalitions, et dont la tête d’homme d’État rêve des fusions qui ne seraient que des coalitions encore, avait écrit que le catholicisme et les diverses communions protestantes devaient unir leur effort contre ce socialisme qui menace la société moderne telle qu’après tant de siècles la voilà faite par le génie de la double Rome, la Rome politique et la Rome chrétienne. […] La discussion avec Guizot, par exemple, est un vrai chef-d’œuvre de logique et de politesse chrétienne.
C’est là que l’Institution chrétienne, en sa première forme, fut écrite. […] La doctrine qui veut que tout chrétien soit un prêtre et ne relève que de lui-même est une doctrine hussite. […] Il a en lui le caractère sacerdotal : « Tout chrétien sait ce qu’il doit savoir ; tout chrétien a reçu l’onction. » — « Un chrétien sort à peine des eaux du baptême qu’il est prêtre, et peut se vanter d’avoir reçu l’ordination et d’être clerc, évêque et pape. » La différence entre le fidèle et le prêtre n’est qu’une différence de fonctions, et ces fonctions il ne les tient et ne les doit tenir que du choix des fidèles, qui sont ses égaux : « Ce n’est que par rapport aux fonctions qu’il existe quelque différence entre chrétiens. […] La terreur de Dieu, c’est beaucoup plus ce qu’il inspire, et si, par certains côtés, il paraît plus chrétien que biblique, par celui-ci il paraît plus biblique que chrétien. […] Sa fin fut douce et très chrétienne.
Le mysticisme complet est en effet celui des grands mystiques chrétiens. […] Telle est la « nuit obscure » dont les grands mystiques ont parlé, et qui est peut-être ce qu’il y a de plus significatif, en tout cas de plus instructif, dans le mysticisme chrétien. […] Et pourtant aucun courant de pensée ou de sentiment n’a contribué autant que le prophétisme juif à susciter le mysticisme que nous appelons complet, celui des mystiques chrétiens. […] Le fait est frappant chez les mystiques chrétiens. […] Sur ce qu’il y a d’essentiellement agissant chez les grands mystiques chrétiens M.
Il fond sur les chrétiens assoupis, il immole une foule de guerriers, choisissant les plus illustres. […] La chevalerie seule fournit de pareils textes de poésie aux trouvères du moyen âge chrétien. […] Vous êtes transporté de la lune sous les murs d’Arles, que les Sarrasins et les chrétiens se disputent. […] Roger, pendant ces événements, fait naufrage et se sauve seul à la nage dans une île déserte ; il y trouve un ermite qui l’instruit dans la foi chrétienne. […] Mais la guerrière Marphise, sœur de Roger, se présente à Charlemagne au moment où ce roi des chrétiens va livrer Bradamante à Léon.
Il a servi de texte ou de commentaire aux premiers conciles chrétiens ; il a été le crépuscule de bien des dogmes ; il a nourri à lui seul la philosophie romaine de Cicéron ; il a lutté dans le moyen âge avec la philosophie expérimentale d’Aristote, puis de Bacon ; il a été submergé un moment par la philosophie presque matérialiste de Locke, de Hobbes en Angleterre ; d’Helvétius, de Diderot, des encyclopédistes en France ; mais il est ressuscité plus vivant et plus populaire que jamais il y a peu d’années, par la traduction, par les commentaires et par les leçons d’un jeune philosophe, M. […] Mais un mot d’abord sur l’origine antique et mystérieuse des belles et saintes idées que Socrate et Platon vont développer dans ce dialogue ; car rien ne vient de rien, et la philosophie grecque, qui devait bientôt, après Platon, servir d’ancêtre à la philosophie des écoles chrétiennes de Byzance et d’Alexandrie, avait certainement elle-même des ancêtres. […] L’Évangile de saint Jean, lui-même, rappelle dans son magnifique début ces vérités indiennes, égyptiennes, platoniques, ainsi que chrétiennes : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu (le Logos, la pensée, la parole, le type des choses) ; tout a été fait par lui, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans lui ; en lui était la vie, et la vie était la lumière. […] » Peut-on méconnaître les analogies frappantes entre ces doctrines engendrées les unes des autres jusqu’à l’explosion philosophique du dogme chrétien ? […] Ses hypothèses sur l’état des âmes après la mort se rapprochent des fables homériques au sujet des enfers, et pressentent le purgatoire des chrétiens.
Mais alors la Grèce fanatisait l’Europe ; on n’était ni chrétien ni musulman, on était Grec, comme aujourd’hui on n’est ni catholique ni carbonaro, on est Piémontais. […] XVIII Quoi qu’il en fût, M. de Marcellus, par esprit littéraire, et par esprit sérieusement chrétien, se mit à parcourir la Grèce nouvelle et l’Albanie, ni littéraire ni chrétienne, mais tour à tour, et selon le goût des Albanais, chrétienne ou mahométane comme son héros Scanderbeg, pour y chercher un nouvel Homère. […] Qu’importait au monde actuel un poème épique de plus sur les exploits de Bacchus, chanté après coup par un Grec chrétien, comme un écho mort que chanterait une croyance finie ?
L’idée chrétienne du purgatoire est l’idée même de la société humaine, qui est, cosmogoniquement, la véritable cité des expiations. […] La philosophie et la poésie grecques sont les sources humaines du spiritualisme chrétien. […] Sans doute, auprès de l’idéal chrétien tout n’est que grossièreté dans les mœurs antiques ; mais chez quel peuple et dans quel temps trouvez-vous jusqu’à ce jour la pratique de l’idéal chrétien ? […] Certes, sous peine d’être ans âme, notre poésie doit avoir une âme chrétienne. […] Les psaumes qui figurent actuellement dans les rites chrétiens étaient, chez les Hébreux, dansés aussi bien que chantés.
Un homme simple, laborieux, honnête, bon chrétien, tiède chrétien, parvenu à l’aisance, songe, comme on dit, « à vivre sa vie ». […] Porter à la scène, non pas un conflit d’ordre chrétien, mais la divinité même, les gestes des saints et des anges ! […] Son luxe aura vaincu ici une naïveté factice… Mais que devient dans tout cela l’esprit chrétien ? […] C’est le plus chrétien des quatre actes ; il pouvait être beau. […] Retirez à l’œuvre racinien sa prétendue signification chrétienne, il perd d’un coup toute signification.
« Une ère nouvelle commence. » (Généralement on ne manque pas d’estropier le texte et l’on dit : « Novus rerum nascitur ordo. ») Virgile ayant, par hasard, écrit ce vers et les suivants vers le temps de la naissance du Christ, le moyen âge le déclara chrétien, prophète et magicien. […] Ses lettres à son ami Boileau, à son fils Jean-Baptiste, d’une simplicité si vraie, respirent la plus rare beauté morale ; et quelle tendresse on devine sous cette forme prudente et contenue, imposée par la « politesse » du temps et par la pudeur chrétienne ! […] C’est bien d’avoir été fidèle à Fouquet ; mais pas un moment cette chrétienne ne paraît se figurer dans sa réalité le cas moral de cet homme de finances. […] Chrétien, certes La Bruyère l’était, quoique le chapitre postiche des Esprits-Forts ait bien l’air d’une précaution pour faire passer le reste. […] Marcel Prévost tira un excellent parti de renseignements qu’il avait reçus chez les Pères de la rue des Postes, de sa connaissance sérieuse de la morale chrétienne, — connaissance qui n’abonde pas chez nos écrivains, — et, spécialement, de l’exacte notion qu’il avait du « péché ».
Quand l’archevêque d’York, s’opposant plus tard à l’élévation de Swift à l’épiscopat, disait à la reine Anne « que sa Majesté devrait être sûre que l’homme dont elle allait faire un évêque fût un chrétien », il n’exprimait pas seulement l’opinion de tous les hommes religieux de l’Angleterre, mais celle que laisse à tout juge impartial la lecture de ce Conte du Tonneau, qui est, si l’on veut, l’œuvre d’un ami de l’Église anglicane, mais qui, à coup sûr, n’est pas l’œuvre d’un chrétien. […] Pourquoi rejeter le nom et le titre de chrétiens ? […] Enfin, si cette abolition est utile, il vaudrait mieux la remettre à la paix, nos alliés se trouvant tous, par hasard, être chrétiens. Si nous comptons, pour les remplacer, sur l’alliance des Turcs, elle est incertaine, car non seulement ils sont attachés à leur religion, mais croient en Dieu, ce qui est plus qu’on ne nous demande pour conserver le nom de chrétiens. […] La religion chrétienne, dans son origine, fut présentée aux Juifs et aux païens sans cet article de la divinité du Christ ; ce qui autant que je me le rappelle est observé par Érasme ; il dit que c’était une nourriture trop forte pour des enfants24.
Elle aurait volontiers emprunté de l’illustre philosophe son idée d’un rapprochement et d’une fusion, d’une réconciliation entre les principales communions chrétiennes ; elle traduisait cela un peu brusquement à sa manière lorsqu’elle disait : « Si l’on suivait mon avis, tous les souverains donneraient ordre que parmi tous les chrétiens, sans distinction de religion, on eût à s’abstenir d’expressions injurieuses, et que chacun croirait et pratiquerait selon sa volonté… » Au milieu de cette cour de Louis XIV, qui allait être si unanime sur la révocation de l’édit de Nantes, elle apportait et elle conserva d’inviolables idées de tolérance : « C’est ne se montrer nullement, chrétien, disait-elle, que de tourmenter les gens pour des motifs de religion, et je trouve cela affreux ; mais lorsqu’on examine la chose au fond, on trouve que la religion n’est là que comme un prétexte ; tout se fait par politique et par intérêt. […] Il y avait alors dans le royaume un roi digne de l’être, avec toutes les qualités qu’on sait, au milieu des défauts que chacun concourait à favoriser et à recouvrir ; un roi homme de mérite, « toujours maître et toujours roi, mais plus honnête homme encore et plus chrétien qu’il n’était maître et roi : C’est ce mérite qui la toucha, dit très bien le père Cathalan.
Après le dîner, qui avait lieu à trois heures, si le temps le permettait, on allait au jardin où, entre Mme Unwin et son fils, il s’entretenait jusqu’au thé de sujets sérieux et chrétiens. […] Relève-toi, chrétien tremblant ; Le nuage qui gronde, Gros de tendresse, en éclatant, Rafraîchira le monde. […] Ceux-là entre les chrétiens méritent le mieux ce nom, qui ont à cœur de faire de la paix leur but ; la paix, qui est à la fois le devoir et la récompense de celui qui rampe et de celui qui vole2. […] William Hughes, s’est fort occupé de ce maître austère et familier. — On peut comparer cette fable du rossignol et du ver luisant à une épigramme d’Evenus de Paros, traduite par André Chénier, et dans laquelle une cigale est aux prises avec une hirondelle : c’est la différence du sentiment grec au sentiment chrétien.
. — Quelques années après, il avait changé et s’était transformé encore, il était dans sa troisième et dernière phase, et son journal se termine par cette parole qui est un désaveu de la précédente et qui semble indiquer l’entrée définitive dans une autre sphère : Le stoïcien est seul, ou avec sa conscience de force propre le trompe ; le chrétien ne marche qu’en présence de Dieu et avec Dieu, par le médiateur qu’il a pris pour guide et compagnon de sa vie présente et future. […] Ce n’est qu’un stoïcien manqué, ou un chrétien tardif. […] Maine de Biran veut encore davantage, il aspire à dire avec le chrétien parfait : « Douleur, tu es mon bien » — « Car, remarque-t-il délicatement, c’est le trouble et non la souffrance qui nuit à l’âme. » Tout cela ne se passe pas en un jour chez Maine de Biran, mais dure des années. […] Un sourd qui aurait par moments la perception des sons, un aveugle qui aurait le sentiment subit et instantané de la lumière, ne pourraient croire qu’ils se donnent à eux-mêmes de telles perceptions : ils attribueraient ces effets singuliers, et hors de leur mode d’existence accoutumé, à quelque cause mystérieuse… Et il en vient à conclure qu’il faut se mettre, s’il se peut, dans un rapport régulier avec cette grande cause, y disposer toute sa personne et son organisation elle-même par certains moyens : Les anciens philosophes, comme les premiers chrétiens et les hommes qui ont mené une vie vraiment sainte, ont plus ou moins connu et pratiqué ces moyens.
Les trois ordres de la société, selon lui, « la société chrétienne au nom de sa foi, le monde aristocratique au nom de son honneur et de son orgueil, la classe bourgeoise au nom de ses intérêts, tous s’accordent dans un sentiment de répulsion et d’alarme à l’endroit de la littérature. » Recherchant les causes de cet abaissement général, de ce désaccord de la littérature avec la société, il en demande compte à la critique ; il partage celle-ci en trois catégories, et toutes les trois également impuissantes ou stériles, sous lesquelles il ne tient qu’à nous de mettre des noms : la critique dogmatique et immobile (Gustave Planche, probablement) ; la critique qui se joue en de fantasques arabesques (apparemment Janin, ou Gautier, ou Saint-Victor) ; et celle qui se réfugie dans le passé pour n’avoir pas à se déjuger et à se contredire dans le présent (c’est moi-même, je le crois). […] Enfin, après une vague et partiale peinture de l’état des Lettres sous les divers régimes qui se sont succédé depuis cinquante ans, et encore sous le coup de la Révolution de Février, qui le préoccupe extraordinairement, et qui n’a été, après tout, qu’une révolution plus ou moins comme une autre, il en vient à établir son principe et à proclamer son spécifique littéraire, — le mot peut paraître assez naïvement choisi : « Il fallait, s’écrie-t-il, il fallait (au lendemain de cette Révolution) proclamer le spiritualisme chrétien dans l’art, comme le seul spécifique assez puissant pour le guérir (pour guérir l’art, entendons-nous bien), comme la seule piscine assez profonde pour le laver de ses souillures. » Remarquez-vous comme ces esprits chastes, sitôt qu’ils se mêlent de critique, sont continuellement préoccupés et remplis d’immondices et de souillures ? […] Aristote, je le pense, était un grand critique, et Lessing, et Schlegel, et Gœthe et Schiller lui-même : dites-leur donc d’appliquer dans l’art pour règle et pour mesure le principe du spiritualisme chrétien, c’est-à-dire un principe ascétique et qui appartient à un ordre tout différent ! […] Comme variante ou supplément au principe spiritualiste chrétien appliqué à la critique des livres, M. de Pontmartin fait usage d’un autre principe encore plus singulier, qui peut s’appeler purement monarchique.
Il n’a pas, en parlant de Jésus-Christ, cette naïveté et cette tendresse que Pascal avait eue et avait notée comme les signes distinctifs de l’esprit chrétien : il n’a pas les raisons du cœur, celles que le raisonnement ne sait pas. […] Il croit donc en définitive au triomphe de la religion chrétienne catholique sur toutes les religions, et de la constitution monarchique pure sur tous les gouvernements, comme il croit à une vérité géométrique, comme il est « convaincu de l’égalité des diamètres d’un même cercle » : c’est la comparaison qu’il emploie quelque part. […] Bossuet, l’Évangile même, dit-il, n’ont sur les chrétiens que l’autorité que leur donne l’Église. » Par condescendance pourtant, et afin de montrer que la vérité accepta toutes les armes, M. de Bonald prend des mains du xviiie siècle les divers problèmes, tels que ce siècle les a posés. […] Si vous êtes pour le récit de Moïse, vous êtes juif, chrétien, catholique ; Bonald ne vous lâche pas qu’il n’ait tiré du premier fait toutes ces conséquences.
Necker n’est pas peintre, et il faut attendre, pour le réveil et le triomphe des images chrétiennes, que Chateaubriand soit venu. […] Il définissait l’idée chrétienne « la plus heureuse des persuasions et la plus sublime des pensées ». […] Pendant le régime de la Terreur, il écrivait des Réflexions philosophiques sur la fausse idée d’égalité ; il exprimait en quel sens, selon lui, on devait entendre que les hommes sont égaux devant Dieu ; et, là encore, on retrouve les traces de cette aristocratie d’esprit dont le chrétien même, en M. […] il me semble que ce n’est pas là tout à fait la doctrine de l’Évangile ; il me semble que l’apôtre et, depuis lui, saint Augustin, Bossuet et tous les grands chrétiens, ont noté précisément cette gloire et cette superbe de l’esprit comme un des périls les plus raffinés et les plus à craindre pour les hautes âmes.
Mais il nous manquoit un homme qui traitât cette science en philosophe, & en philosophe chrétien. […] Voici un autre livre d’un Jésuite ; c’est l’Eloquence chrétienne dans l’idée & dans la pratique, par le P. […] Ces observations n’ont presque rien qui ressemble aux autres ouvrages sur l’éloquence chrétienne, dont j’ai parlé dans cet article. […] Entr’autres opinions singulieres que l’on trouve rêpandues dans cet écrit, on est étonné que l’auteur y soutienne celle-ci, que les Chrétiens sages & éclairés croient qu’il vaut mieux écouter un beau & bon Sermon pour mieux pratiquer les vertus, que de demander à Dieu la grace de bien pratiquer ces vertus ; & il ose traiter ceux qui pensent différemment, d’Idolâtres, de Payens, de Quakers, & de Fanatiques ignorans.
… Quoique j’aie cherché, sans le trouver, dans les deux trop petits volumes de M. de Lescure, l’écrivain oublié des Actes des Apôtres, de ces Apôtres moins heureux que ceux de Jésus-Christ, qui fondèrent le Christianisme, tandis qu’eux, ces nouveaux pauvres diables d’Apôtres, n’ont pu empêcher la royauté très chrétienne de s’en aller en quatre morceaux, j’y ai trouvé pourtant assez de journaliste et même, disons le mot, assez d’homme d’État dans Rivarol pour appuyer aujourd’hui sur ce qu’il fut comme journaliste, malgré le flot du temps qui remporta et qui, comme journaliste, devait l’emporter, et sur ce qu’il aurait pu être comme homme d’État, sans la faiblesse aveugle d’une Royauté vouée à toutes les fautes, et dont l’imbécillité fut le bourreau, avant le bourreau… VII Oui, le journaliste, — et, à travers le journaliste,, l’homme d’État que le journaliste, comme on sait, n’implique pas toujours, voilà ce qu’est et ce qu’apparaît presque exclusivement Rivarol dans cette publication nouvelle de M. de Lescure. […] S’il n’était plus chrétien comme on lui avait appris à l’être en ses premières années, il avait emporté et gardé de son christianisme ce fort déisme qui allait à son royalisme, — qui est même le royalisme en philosophie, car Dieu, en métaphysique, c’est le Roi ! Rivarol, à l’heure qu’il est venu, n’était ni le de Maistre, ni le Bonald qui allaient venir ; mais, précurseur de ces grands esprits, il devait balayer devant eux la place où ils allaient établir leurs doctrines chrétiennes. Il y a telles phrases de l’auteur des Tableaux de la Révolution qu’on pourrait recueillir, et qui sont comme des pierres d’attente de l’édifice que de Maistre et Bonald s’étaient chargés de rebâtir… Il est certainement de leur famille, comme le Fils Prodigue est le fils de son père… Il n’a ni la pureté de la vie ni la rectitude absolue d’entendement de ces deux grands esprits ; mais il est bâti sur le même axe, et la force de son esprit historique le sauve toujours des chimériques sottises de la philosophie… C’est par le sens de la politique et de l’histoire qu’il rejoignait la vérité chrétienne.
L’ascétisme chrétien aurait alors parfaitement raison contre elle. […] Le livre chrétien par excellence, l’Imitation, après avoir débuté comme le Maître de ceux qui savent par ces mots : « Tout homme désire naturellement savoir », avait toute raison d’ajouter : « Mais qu’importe la science sans l’amour ?
Malgré tout, en effet, malgré la contagion de la libre pensée, ce terrible choléra moderne de la libre pensée qui les ronge et qui les diminue chaque jour, les chrétiens sont encore assez nombreux pour faire de la gloire comme le monde la conçoit et la veut, — et, de cela seul que l’Église mettait en question la sainteté de Christophe Colomb, il avait sa gloire, même aux yeux des ennemis de l’Église, qui, au fond, savent très bien, dans ce qui peut leur rester d’âme, qu’il n’y a pas sur la terre de gloire comparable à celle-là ! […] Otez, en effet, par la pensée, la personnalité de Christophe Colomb de la synthèse du monde, que, seule, l’Église embrasse, et que seule elle explique, et il ne sera plus qu’un homme à la mesure de la grandeur humaine ; mais avec l’Église et faisant corps avec elle, il devient immédiatement le grand homme providentiel, le bras charnel et visible de Dieu, prévu dès l’origine du monde par les prophètes des premiers temps… Les raisons de cette situation miraculeuse dans l’économie de la création, irréfragables pour tout chrétien qui ne veut pas tomber dans l’abîme de l’inconséquence, ne peuvent pas, je le sais, être acceptées par les esprits qui chassent en ce moment systématiquement Dieu de partout ; mais l’expression de la vérité, qu’ils prennent pour une erreur, est si grande ici, qu’ils seront tenus de l’admirer.
Elle n’en était pas plus mauvaise pour cela ; c’était la forte et sobre éducation, très pieuse, mais très peu jésuitique, qui forma les générations de l’ancienne France, et d’où l’on sortait à la fois si sérieux et si chrétien. […] J’appris plus tard des choses qui me firent renoncer aux croyances chrétiennes ; mais il faut profondément ignorer l’histoire et l’esprit humain pour ne pas savoir quelle chaîne ces simples, fortes et honnêtes disciplines créaient pour les meilleurs esprits. […] Un prêtre assez remarquable le dirigea pourtant, ce fut M. l’abbé Frère, théologien profond, très versé dans la mystique chrétienne. […] Ce qu’il voulait, c’était une éducation libérale, pouvant convenir également au clergé et à la jeunesse du faubourg Saint-Germain, sur la base de la piété chrétienne et des lettres classiques. […] Si le christianisme est chose révélée, l’occupation capitale du chrétien n’est-elle pas l’étude de cette révélation même, c’est-à-dire la théologie ?
nous n’en savons rien, pas plus que les chrétiens ne savent sous quelle forme leurs âmes victorieuses et sauvées vivront après la mort. […] La foi chrétienne a perdu son empire ; tout est analysé, c’est-à-dire mis en doute, jusqu’au patriotisme lui-même. […] C’est la conséquence logique, naturelle, nécessaire, c’est proprement le fruit de la culture chrétienne et de la culture classique. […] Jusqu’à nouvel ordre, la croyance chrétienne reste ici-bas notre meilleur, notre unique viatique. […] Par quel étrange malentendu des moralistes chrétiens ont-ils pu dire que la piété chrétienne « anéantit le moi » ?
Chrétien sincère, il s’est détaché, à un certain jour, de la foi naïve pour s’élever (car il estime que c’est un progrès) par un examen rigoureux à la foi réfléchie. […] Ce qui est certain, c’est qu’il est encore et toujours chrétien, en ce sens au moins que le sermon sur la montagne lui paraît d’inspiration divine et quelque chose de tel que l’humanité d’après ne doit point ressembler à l’humanité d’avant ; ce qui est certain, c’est qu’à ses yeux, comme il le dit excellemment ; et à ne parler même qu’au nom de l’histoire, « Jésus en tout est l’unique, et que rien ne saurait lui être comparé ». […] En ce sens, il est vrai de dire que de Maistre, le plus catholique des esprits, paraît le moins chrétien des cœurs.
Ordinairement, le poëte chrétien classique s’inspire de David et des Psaumes, la haute source première, et il les paraphrase plus ou moins en adaptant le chant à sa voix : ainsi fait Racine, ainsi fait Le Franc, ainsi Lamartine ; ainsi fait Veyrat. […] Chrétien véritable et régénéré, il offrait d’ailleurs à Dieu son humiliation, et quelquefois avec une insigne douceur ; témoin la pièce qui a pour titre : Aimé de Dieu. […] Panthéiste, athée ou chrétien, Tu connais leurs luttes obscures ; C’est mon martyre, et c’est le tien, De vivre avec ces deux murmures.
La lutte fut celle que tous subissent et subiront, jusqu’au jour où l’esprit chrétien s’affaiblissant de plus en plus, l’accord des deux antiques adversaires rendra la paix et l’unité à la conscience humaine. […] Il est homme profondément autant qu’il est chrétien. […] Edmond Pilon La bonne Vierge-Vénus et la Vénus-Marie Se penchent, se désolent, sanglotent et prient Sur ton tombeau plus blanc que celui des colombes, De l’Olympe, du Pélion, du Paradis, Des anges, des satyres et des séraphins prient Pour le pauvre homme bon et le poète parti Vers les églises d’encens et les riches prairies Où la harpe entremêle à la flûte fleurie Des rythmes de prière à des chansons d’orgie ; Ta vie toute pareille à celle du pèlerin, Dont la violente jeunesse grisée d’amour et de vin Avance peu à peu vers la prière des anges, Aboutit — ô Verlaine — à ce tombeau étrange Bâti des impuretés de ta jeunesse ardente Et des strophes liliales de tes poèmes chrétiens ; Te voici, à présent, couché dans la prairie ; Mais la rouge passiflore à la fleur de Marie Enlace, malgré tout, sa passion orgueilleuse Aux tiges de la pensée et des fleurs religieuses Que placeront des amis, que sèmeront des fidèles Et que planteront de beaux anges avec leurs ailes… La couronne d’épines et la couronne de roses, Le bâton de Tannhauser et la houlette des fêtes Que Watteau dessina, pour toi, voici deux siècles, S’emmêlent sur ton ombre tourmentée et posent Leur symbolique trophée au bord de ton silence… Verlaine, ton tombeau est un tombeau étrange Que veillent à la fois les amours et les anges… [La Vogue (15 juin 1900).]
C’était le germe du procédé qui a engendré les Sephiroth de la Cabbale, les Æons du gnosticisme, les hypostases chrétiennes, toute cette mythologie sèche, consistant en abstractions personnifiées, à laquelle le monothéisme est obligé de recourir, quand il veut introduire en Dieu la multiplicité. […] La qualité de président des assises finales de l’humanité, tel est l’attribut essentiel que Jésus s’attribue, le rôle que tous les premiers chrétiens lui prêtèrent 721. […] Mais rien n’indique que, dans les siècles qui précèdent l’ère chrétienne, le judaïsme palestinien ait fait aucun emprunt à l’Égypte.
nous l’honorons spécialement dans la sœur Emmerich, qui est une sainte à grâces spéciales, dans la sainteté même, une sainte à visions…, et ce mot-là est pur d’ironie, puisque nous sommes chrétien et que sur cette question de visions comme sur celle de miracles, nous n’avons pas d’autres doctrines que celles de l’Église romaine. […] Suppléer au mutisme volontaire ou forcé de l’histoire, c’est déjà téméraire pour tout être qui a le respect de la vérité humaine : mais ajouter à l’Évangile, le continuer là où il s’arrête, cela peut être si facilement sacrilège pour qui doit avoir le respect chrétien de la vérité divine ! […] » Et vraiment pour nous qui les admirons aujourd’hui comme l’originalité la plus extraordinaire et la plus puissante, le plus incroyable à nos yeux n’est pas d’avoir créé dans l’histoire ou vu ce qui, de fait, n’y est pas (car c’est la même chose), mais c’est de n’avoir pas brouillé les lignes en écrivant dans l’entre-deux ; c’est de n’avoir pas faussé l’histoire connue, en y ajoutant ; c’est d’avoir pu, par exemple, l’Évangile étant donné, l’Évangile qu’on peut, même sans être chrétien, sans avoir l’âme bien haute, sans être Jean-Jacques, trouver le plus beau livre qui ait jamais paru parmi les hommes, ajouter aux faits qu’il renferme ; à son esprit, à son langage, et cela sans que l’imagination se soulève avertie et dise précisément comme on dit du Père Lacordaire sur la Madeleine : « Prenons garde !
Dargaud est au fond un chrétien de nature, d’un christianisme… incorrigible, Dieu merci ! Il est chrétien comme on est sauvage ; mais son parti qui n’est pas chrétien, lui, et qui ne veut pas qu’on le soit, à quelque degré que ce puisse être, a bien senti qu’il l’était profondément, jusque dans cette Histoire de la Liberté religieuse, et voilà pourquoi il s’en est détourné en silence, trompé sans doute dans l’espérance qu’il avait de ne pas trouver dans ce livre cet accent qui en fera la gloire et en assurera la durée.
Il la méprisa dans les arts, dans la politique, dans les lettres, dans la morale chrétienne que cet athée ne comprit pas, aveuglé qu’il était par son athéisme, le crime irrémissible de son esprit. […] Car on se demande, en lisant ces lettres, dont quelques-unes valent en critique ce que leur auteur a jamais écrit de plus profond et de plus piquant dans ses livres, on se demande ce qu’il eût été, ce Stendhal-Beyle, s’il avait été spiritualiste et chrétien, c’est-à-dire ce qu’aucune intelligence moderne, ce qu’aucun esprit de ce côté du temps ne peut se dispenser d’être sans à l’instant même se rompre, en plus ou en moins, se dessécher, se rabougrir. […] Au moins Goethe avait été chrétien ; il avait été l’auteur du Faust et de l’Egmont, et, quand le Christianisme a passé par un génie, c’est comme l’amour quand il a passé par un cœur : il en reste toujours quelque chose.
Il la méprisa dans les arts, dans la politique, dans les lettres, dans la morale chrétienne, que cet athée ne comprit pas, aveuglé qu’il était par son athéisme, le crime irrémissible de son esprit. […] Car on se demande, en lisant ces lettres, dont quelques-unes valent en critique ce que leur auteur a jamais écrit de plus profond et de plus piquant dans ses livres, on se demande ce qu’il eût été, ce Stendhal-Beyle, s’il avait été spiritualiste et chrétien, c’est-à-dire ce qu’aucune intelligence moderne, ce qu’aucun esprit de ce côté du temps ne peut se dispenser d’être, sans, à l’instant même, se rompre en plus ou en moins, se dessécher, se rabougrir. […] Au moins, Gœthe avait été chrétien ; il avait été l’auteur du Faust et du D’Egmont, et, quand le christianisme a passé par un génie, c’est comme l’amour quand il a à passer par un cœur : il en reste toujours quelque chose.
Mais, sous le vernis du xvie , on découvre chez eux l’homme du Moyen-Âge, chrétien, galant, rude, un peu débridé. […] J’ai rencontré un sujet de drame chrétien, il m’a tenté et je l’ai traité de mon mieux, sans le moindre souci de sa réalisation à la scène, ni de l’accueil qu’il pourrait recevoir. […] Je suis chrétien, romain ; cette conception est la mienne. […] Nous voici replacés dans la situation privilégiée du dramaturge chrétien au Moyen-Âge. […] Il n’est pas particulier à l’art dramatique chrétien : c’est le problème de l’art dramatique tout court, à un certain degré d’ampleur, de généralité et de conformité à sa nature.
Le christianisme est à leurs yeux l’œuvre de l’humanité entière, Socrate y a préludé, Platon y a travaillé, Térence et Virgile sont déjà chrétiens, Sénèque plus encore. […] Elle est toute à deviner : ni chrétiens, ni juifs, ni païens ne nous ont transmis rien d’historique sur cette première apparition ni sur le principal héros. […] Les savants israélites cherchent souvent à prouver par des rapprochements de textes que Jésus a volé toute sa doctrine à Moïse et aux prophètes, et que ce qu’on a appelé la morale chrétienne n’est au fond que la morale juive. […] Ce n’est qu’au VIe siècle environ avant l’ère chrétienne que ces sortes d’idées s’introduisirent chez les Sémites. […] S’il avait eu des gravures chrétiennes, il les eût traitées comme des images de dévotion.
Ernst (Revue Contemporaine) y voyait « la patrie chrétienne ». Dernièrement enfin, M. de Villiers de l’Isle-Adam (Revue Wagnérienne, 3e année, V, 198) racontait un entretien qu’il avait eu avec Wagner en 1863, où le maître disait : « Sachez qu’avant tout je suis Chrétien. » Nous ne pensons pas, comme M. […] Wagner était-il Chrétien ou non ? […] Schopenhauer y voyait contenue la grande vérité« du besoin de la délivrance de l’exister et l’assouvissement de ce besoin par la négation du vouloir (IV, 733). » « C’est en concordance avec ce principe que, dans l’Évangile Chrétien, la sainteté de la souffrance nous est démontrée, et que la Croix, ce chef-d’œuvre de souffrance, est le symbole primordial de la religion chrétienne. » Wagner (1880) : « Un être a pris pour lui le péché énorme de tout ce qui existe (entendre ici par péché ce que dit Calderon : le plus grand péché de l’homme est d’être né) ; il l’a expié par sa mort. […] En résumé, Wagner et son Parsifal sont chrétiens, mais la légende de Parsifal, tout cet appareil religieux n’est, pour nous servir de l’expression de Schopenhauer, qu’« un véhicule mystique » qui nous représente la religion de la Pitié.
Le christianisme, naissant au sein d’un peuple grossier, promettant à ses apôtres les fers et la mort ; annonçant à Rome et à Athènes, au sein des lumières, la morale d’un homme qui venait d’expirer sur la croix, renversant les idoles jusque dans les métropoles du culte idolâtre ; contredisant tous les orgueils de l’homme ; les chrétiens, mourant comme leur maître, et donnant leur mort même pour preuve de leur mission ; consentant ainsi à l’ignominie du supplice ou à la honte du mensonge : tel est le tableau que présente l’établissement du christianisme. […] Le Tasse avait à peindre le berceau de la société chrétienne. […] M. de Maistre remarque admirablement bien que « toute religion, par la nature même des choses, pousse une mythologie qui lui ressemble ; et que la mythologie de la religion chrétienne est, par cette raison, toujours chaste, toujours utile, et souvent sublime, sans que, par un privilège particulier, il soit possible de la confondre avec la religion même ». Si Boileau se fût élevé à cette haute considération, il aurait connu les ressources de l’épopée chrétienne ; son esprit réservé et sévère n’aurait pas été effrayé d’une profanation qui était impossible pour le véritable poète ; et il n’aurait pas continué à perpétuer parmi nous le règne caduc des divinités de la Grèce.
Cet héritage de la tradition n’a pas seulement enrichi les croyants et les dociles ; tous y ont participé, et pendant un long temps ceux mêmes qui se sont le plus écartés de l’unité de foi n’ont jamais renié les principes essentiels de la philosophie chrétienne. […] Dante, Milton, Caldéron, sauf quelques mélanges divers de platonisme, de mosaïsme ou de pompe idolâtre, ont donné aux vérités chrétiennes d’admirables et vives représentations.
Enivré qu’il ait été par la Renaissance et cette poésie moderne qui s’efforce depuis plus de vingt ans d’en réverbérer les rayons, le noble auteur des Chants du Passé (nous l’avons déjà dit) revient, vers la fin de son recueil, à cette simplicité mâle que la vérité chrétienne, embrassée définitivement par notre âme, communique non seulement aux œuvres du cœur, mais aux productions de l’esprit. […] Les sonnets religieux, les poésies qu’il adresse à la Vierge, marquent bien ce dernier coup d’aile de sa Muse dans le ciel chrétien où elle s’envole, et qui sait ?
Il parle de vie future, et l’on sait qu’il était chrétien. […] Il fut, en ce soir d’un beau jour, aussi bon chrétien qu’il avait été païen convaincu. […] Ce n’est pas le saint, ni même le chrétien, mais le débauché qui est responsable. […] Paul Claudel est un poète chrétien pour qui le grand Pan n’est pas mort. […] Il est chrétien, ou quasi chrétien, lorsqu’il exige que l’on trouve un sens à la douleur et à la mort.
Il en est de même parmi les femmes ; et quand ils ont épuisé cet impur amas d’injures, ils se mettent à s’entr’appeler athées, idolâtres, juifs, chrétiens ; c’est-à-dire: Les chiens des chrétiens valent mieux que toi ! […] Ils font connaître cette civilisation soi-disant chrétienne, mais en réalité sans nom. […] Sa religion est coupable, plus que son naturel, des duretés qu’il a pour les chrétiens. C’est elle qu’il faut accuser des rigueurs avec lesquelles on les maltraite ; sans les emportements de zèle aveugle qu’elle lui inspire, les chrétiens auraient sujet, comme les mahométans, de bénir son ministère. […] Des manières grossières et insolentes envers les étrangers et les chrétiens caractérisent les Turcs ; celles des Persans, au contraire, honoreraient toute nation civilisée, etc. » Voyage du Bengale en Perse, t.
oui, il mourut après une pénible maladie de soixante-treize jours, pendant laquelle il offrit de très éclatants modèles de toutes les vertus chrétiennes. […] Nous jouissons à Rome de tous les droits de cité, et quand ma mère a appris de quelle manière si chrétienne le Pape et Votre Éminence se vengeaient de la prison de Fontainebleau et de l’exil de Reims, elle n’a pu que vous bénir au nom de son grand et malheureux mort, en versant de douces larmes pour la première fois depuis les désastres de 1814. […] Les laïques sont ceux qu’elle emploie soit dans le civil, dans la diplomatie, dans les finances ou dans le militaire, pour les besoins de son administration ou de sa défense ; Les ecclésiastiques sont les moines ou les prêtres de tout ordre, dont elle dispose pour tous les services dans le monde chrétien. […] Le plus chrétien de ces gouvernements, à ses yeux, était le plus honnête. […] Le Pape pour lui était le père commun de la civilisation chrétienne.
C’est la fille légitime de l’intelligence savante et réglée, et, dans une société chrétienne et française, elle a pour blason la croix, la balance et le glaive. […] Mais cela fût-il vrai, ce qui est douteux, qu’importerait une école militaire détruite, qui faisait de l’âme avec des muscles, à nous qui avons des canons rayés et l’âme chrétienne ? […] Sceptique en tout, même en littérature, moitié de voltairien et de chrétien, mais de chrétien protestant, y a-t-il pour lui une religion et une morale, je ne dis pas en rhétorique, mais en réalité ? […] C’est d’abord la poésie grecque d’avant et d’après Pindare, puis la poésie à Rome païenne, puis à Rome chrétienne, puis au Moyen Âge, et enfin dans le monde moderne.
Il n’y a, ici comme là, ni le côté grandement chrétien, ni les bons Évêques, ni les Saints, ni les Héros comme Saint Louis et Joinville… Le Cid lui-même, qui tient tant de place dans le Romancero du second de ces deux volumes, est bien plus féodal que catholique de mœurs et d’accent, ce qui est faux historiquement, mais ce qui, de plus, est un contresens en Espagne. […] Jamais rien de plus doux, de plus miséricordieux, de plus généreux, et, diront peut-être beaucoup de pauvres chrétiens, — imbéciles quoique chrétiens (cela se voit), — de plus chrétien ne fut écrit… On se fond, vraiment, en lisant cela ! […] Raisonnement aussi bête que celui-là qui exigerait que l’enfant devenu homme rentrât dans le ventre de sa mère… et pourtant raisonnement toujours d’un effet certain sur les bourgeois, et même sur des bourgeois qui se croient chrétiens !
C’est encore ainsi que le comprenaient les premiers écrivains chrétiens qui le croyaient élève de Moïse. […] Cette idée, cependant, devait naître un jour : ce ne furent pas, comme on le croit souvent, les chrétiens qui l’inventèrent. […] Le bonheur éternel, tel était la suprême confidence des affiliés aux mystères d’Isis, et telle fut aussi la raison du succès de ces associations mystiques, qui servirent de modèles, non pas aux premiers chrétiens, mais aux chrétiens de la seconde et de la troisième génération. […] Elle était d’origine anglaise et d’essence chrétienne. […] Les premiers chrétiens ne furent nullement embarrassés de situer le ciel.
De là le mouvement du Sillon et la démocratie chrétienne. […] L’idéal socialiste puise même sa force dans le même principe que l’idéal chrétien. […] Le socialisme se justifie par l’idée, comme le chrétien, selon Luther, se justifie par la foi. […] Le chrétien lui échappe par la foi en Christ, le socialiste lui échappe par la foi en la Révolution. […] Si j’avais écrit mon livre dans le premier quart de siècle de la Troisième République, le chapitre sur la démocratie chrétienne n’y aurait sans doute pas figuré.