Si la furie égalitaire de ce temps avait besoin d’une philosophie de l’histoire, elle n’en choisirait pas d’autre que celle d’Emerson, qui ose bien écrire cette phrase, impie au génie individuel de l’homme : « Toute originalité est relative et tout penseur rétrospectif. » Le rang et l’étendue, dit-il ( the rang and extend ), voilà le mérite réel et absolu, et c’est, ajoute-t-il, le mérite de Shakespeare, et non pas l’originalité.
Dans les chapitres de son livre, qui n’a que des chapitres et dont l’unité n’existe que dans la personnalité très particulière de l’auteur, ceux-là qui sont intitulés : La Lumière et la Foule, Les Ténèbres et la Foule, Les Sables mouvants, Les Préjugés, Les Caractères, Les Passions et les Âmes, La Charité intellectuelle, sont de ces choses qu’il est difficile dénommer, parce qu’elles n’ont pas d’analogue en littérature… Le côté que j’oserai appeler le côté divin de cette critique, échappera sans nul doute à ceux qui ont le mépris insolent et bestial du mysticisme de l’auteur.
Ainsi, par exemple, sa philosophie a péri, et si bien péri que personne n’oserait en relever ou en défendre le cadavre, et qu’à présent c’est le spiritualisme — un spiritualisme antireligieux — qui continue l’œuvre de destruction que le matérialisme avait commencé.
Et si bien à fond, qu’il faut encore plus compter aujourd’hui sur la haine que sur l’ignorance pour oser la faire remonter sur l’eau.
Même en critique littéraire, qui est son métier et dont on voudrait faire sa gloire, ses idées générales, quand il en ose, sont de ces platitudes ineffables que le premier venu rencontrerait.
… Toutes questions qui restent sans réponse, si on s’en tient à la lettre seule des documents biographiques, mais qui commencent d’en laisser voir une, si on ose éclairer l’individualité de Charles-Quint par l’individualité de l’Espagne.
Qui oserait le nier se nierait la faculté de comprendre.
Ce sont des historiens non plus de derrière les faits, mais du fond des faits ; des historiens qui osent faire penser et écrire l’Histoire par ceux mêmes qui l’ont faite ; qui, par une merveilleuse intuition rétrospective, la prennent à la source humaine dont elle est sortie, — dans la conscience révélée de ceux qui l’ont créée ; qui se mettent enfin, sans façon, sur les épaules, la tête de Sylla ou de Richard III, et parlent par leur bouche comme ils auraient parlé eux-mêmes, s’ils avaient voulu se faire comprendre et expliquer leurs actes à la Postérité… Ah !
Et tant qu’on ne l’aura pas montré avec une évidence, si claire que sa scélératesse soit une opinion à laquelle personne n’ose plus toucher ni contredire, on n’en aura jamais fini avec le xviiie siècle.
Μ. de Girardin observe comme les hommes à système, qui ont leur idée sur les yeux ; et quant à son style… Qui osera dire que c’est un style (littérairement), que ce hachis de mouton de Dindenaud socialiste servi depuis vingt-cinq ans dans La Presse ?
« Nous comprenons que les dévots à Racine, — dit-il, outré d’une admiration « qui subsiste et qui ne lui paraît plus le dernier mot de la critique humaine ; — nous comprenons que les dévots à Racine le préfèrent à Shakespeare, mais nous nous étonnons qu’ils le préfèrent à une bûche. » La tragédie, dont il n’ose pas parler dans Corneille, quoiqu’elle y soit, comme dans Racine, essence, formes, unité, langage, convention, sottises, tout enfin !
(En a-t-elle écrit, cependant, et la haute pruderie de sa famille n’oserait-elle les publier ?)
Mais si ce livre n’était pas vrai, — pas vrai même dans le sentiment d’observateur de celui qui en a tracé les pages, — que mériterait, dans la mémoire de ses compatriotes, l’homme qui a osé l’écrire, pour avoir tenté, satirique impie, de déshonorer si abominablement son pays ?
Elle vient, enfin, de ce que j’oserai appeler dans l’écrivain le besoin des amphigouris !
Célestin de Blignières, par exemple, plus enthousiaste, plus empaumé et qui a osé (ô imprudence !)
Si dans un temps de scepticisme ou d’éclectisme comme le nôtre, on n’ose pas dire qu’il y ait autre chose dans les têtes affaiblies que des tendances à la place d’opinions, on sait bien au moins à quelles tendances a toujours appartenu la pensée de M.
Si j’osais dire toute ma pensée à propos de quelqu’un qui n’a pas dit toute la sienne, je soupçonne M.
J’admets pourtant une exception à cette règle, que j’ose poser comme absolue : c’est quand la réponse aux critiques, cessant d’être personnelle, implique l’idée du livre même et la creuse ou l’éclaire plus profondément en le défendant.
Il devait sortir des mortes données de l’abstraction pour entrer dans la vie, et il y est entré dans ce traité de la Connaissance de Dieu, où se cachent sous les plus éclatantes questions d’une théodicée, les arêtes d’une méthode profonde ; il y est entré en observateur qui ne scinde pas l’homme et son esprit pour mieux le connaître, qui ne le mutile pas pour l’étudier : « Je ne puis m’empêcher d’affirmer — dit-il à la page 122 de son second volume : — que l’idée d’être bien déployée, si l’on sait mettre de côté l’habitude que nous avons de tout restreindre, de tout abstraire, de placer, même dans l’être, la négation, qui n’est faite que pour le néant, et de n’oser jamais pleinement soutenir l’universelle affirmation, l’idée d’être est identique à celle de force, d’intelligence, de volonté, de liberté, d’amour.
Caro est un exercice éblouissant de révérences qui m’impatienterait, si je ne savais pas que son auteur est bien assez spirituel pour imaginer cette amusante manière de rendre ridicule un homme, qui consiste à le saluer trop… Sans cela, sans cette petite intention de politesse meurtrière, j’oserais dire que l’urbanité — l’urbanité à outrance — est le vice de ce livre, si brillant de clarté, où des hospitalités de roi sont faites à des faquins d’idées, et où l’auteur, l’ironique auteur, coiffe ces sots de bonnets d’âne, hauts de dix pieds, qui ressemblent à des mitres à longues oreilles, enrichies de diamants pour qu’on les voie mieux.
I Lorsque le temps n’est pas aux poètes, il faut sentir qu’on l’est deux fois pour oser faire des vers et les publier.
Le roman d’Albéric Second est l’histoire d’un amour né dans les circonstances les plus inattendues et les moins propres, semble-t-il, à faire naître l’amour dans une âme… Il faut être, en effet, un écrivain très sûr et très maître de soi pour avoir osé la circonstance, et l’état mental et physique, et l’immonde costume dans lequel, dès les premières pages de son livre, l’auteur fait apparaître son héros, attaqué de folie, fuyant son cabanon, se présentant, effaré, aux yeux de tout Paris, en plein théâtre Italien, dans la loge de la comtesse Alice.
En ce temps-là, les réputations les plus majestueuses ont été remises brutalement au crible, mais on ne secoua même pas celle de Le Sage… On ne fit pas contre lui ce qu’on osa faire contre Racine, — et il demeura incontesté et tranquille à sa place dans la littérature française, comme sur son socle dans la galerie du Théâtre-Français.
Poitou ose lui opposer, pour le convaincre de scepticisme, je ne sais quelle préface de 1835.
C’était le temps du tonitruant succès de ce grand roman d’aventure à travers un monde que jusque-là la littérature n’avait pas osé aborder.
Après nous avoir donné cet admirable Espérit que j’oserai appeler une création, le premier inventeur à qui il ne faille pas crier : « Sois doux !
Spiritualiste évaporé, il ose accuser l’Église d’un matérialisme plus grand que celui des religions païennes, parce qu’elle a permis à ses solitaires de presser la tête de mort, traditionnelle image du néant de la vie, de leurs lèvres mortifiées ou expirantes.
Nul n’a osé plus que lui dans le sens de l’absurde possible.
Il faut que les hommes ordinaires veillent sur eux ; il faut que dans l’impuissance d’être grands, ils soient du moins toujours nobles : ils se voient sans cesse en présence des spectateurs, ils n’osent se fier à la nature, et craignent le repos.
« La rage, dit Horace, l’arma de l’ïambe qu’il avait forgé. » Sa fureur de calomnie donnait la mort ; et la poésie ancienne est remplie d’allusions au suicide de Lycambe et de sa fille, qui avaient osé le refuser pour gendre et pour époux.
Ce n’est pas lui qui, à la façon de Raphaël, commencerait par les faire nues ; la main la plus licencieuse n’oserait pas déranger un seul des plis roides de leurs robes ; leur enfant sur les bras, elles ne songent qu’à lui et ne songeront jamais au-delà ; non-seulement elles sont innocentes, mais encore elles sont vertueuses ; la sage mère de famille allemande, enfermée pour toujours par sa volonté et par sa nature dans les devoirs et les contentements domestiques, respire tout entière dans la sincérité foncière, dans le sérieux, dans l’inattaquable loyauté de leurs attitudes et de leurs regards. […] Devenu chapelain de Henri VIII, si terrible que fût le roi, si petit qu’il fût lui-même, il osa lui écrire librement pour arrêter la persécution qui commençait et empêcher l’interdiction de la Bible ; certainement il jouait sa vie. […] Et cette pensée continuelle ébranla si fort mon esprit, que je n’osai pas rester plus longtemps à la porte du clocher, que je fus forcé de fuir, par crainte que le clocher ne tombât sur ma tête414. » Souvent la simple conception d’un péché devenait pour lui une tentation si involontaire et si forte, qu’il y sentait la griffe aiguë du diable. […] Celui que personne n’osait avertir, tu l’as persuadé. Ce que personne n’osait faire, tu l’as fait.
Celui qui se sent né pour chercher la vérité par sa raison se débarrasse de la croyance comme d’une entrave, et celui qui croit posséder la vérité par la foi n’ose manier hardiment le dangereux outil de la critique. […] Cardinal, on lui fit grise mine, on le menaça, on n’osa le toucher ; et bientôt on eut besoin de lui. […] Pourquoi faut-il que le jeune critique n’ait pas osé mettre ses qualités en liberté ? […] vous n’êtes que manchot et vous osez prétendre à ma fille ! […] Je lui vois traverser bien des aventures ; je n’oserais dire que je sens sous leurs pressions se modifier son âme.
« Ils étaient royalistes, mais ils étaient législateurs, et, n’appartenant à la monarchie par aucune idolâtrie d’individus, par aucune de ces habitudes qui gouvernent le vulgaire, mais par le seul regard de l’ordre et de la félicité publique, ils considéraient avant tout les besoins actuels du peuple, et, remarquant que le repos, après tant d’agitations, en était le plus pressant, … ils se seraient gardés de troubler ce calme heureux… « Ils étaient royalistes, mais ils étaient citoyens ; ils savaient qu’ils n’avaient que leurs voix dans ce vaste empire ; ils tenaient leurs systèmes les plus chers subordonnés à la volonté nationale… « Ils étaient royalistes enfin, mais, j’ose le dire, les plus prudents et les plus éclairés des royalistes ; ils avaient bien compris que, si la monarchie pouvait se rétablir jamais, ce ne serait que par le développement libre et légal de cette imposante volonté publique ; que toute secousse violente, toute tentative contraire aux lois, loin de l’accélérer, en retarderait l’inévitable cours ; et ainsi pensaient-ils que conspirer pour la royauté, c’était en effet travailler contre la royauté. […] « Il est vrai, dit-il, que nous nous plaignîmes qu’une colonne de troupes eût osé franchir la limite constitutionnelle. […] Qui oserait dire qu’elle n’aurait pu tout aussi bien se diriger dès lors dans cet autre sens sous une impulsion différente ? […] Dites à madame Julie132 que j’ose la mettre de l’un et de l’autre.
Ici, comme ailleurs, son originalité est entière et son génie créateur ; il dépasse son siècle classique et timide ; il s’asservit la forme, il la brise, il y ose tout dire, il ne lui épargne aucune crudité. […] Il est vrai, dit-il, qu’il n’y a rien ici dans ce testament qui fasse mention, totidem verbis, des nœuds d’épaule ; mais j’ose conjecturer que nous les y trouverons inclus, totidem syllabis. Cette distinction fut à l’instant approuvée de tous. » Mais par malheur la syllabe initiale ne se trouvait dans aucun endroit du testament. « Dans ce mécompte, le frère qui avait trouvé la première échappatoire reprit courage et dit : Mes frères, il y a encore de l’espoir, car quoique nous ne puissions les trouver totidem verbis ni totidem syllabis, j’ose promettre que nous les découvrirons tertio modo, ou totidem litteris. […] Les descriptions qui suivent sont telles que je n’ose les traduire.
Une explosion de vapeurs délétères a tué plusieurs de ceux qui étaient à l’ouvrage, et les survivants n’osent entrer dans la caverne. […] Si j’osais employer, comme Macaulay, des comparaisons religieuses, je dirais que sa critique ressemble au jugement dernier, où la diversité des talents, des caractères, des rangs, des emplois, disparaîtra devant la considération de la vertu et du vice, et où il n’y aura plus d’artistes, mais un juge entre des justes et des pécheurs. […] Si l’art et la beauté y perdent, la vérité et la certitude y gagnent ; et, par exemple, personne n’ose lui savoir mauvais gré d’avoir inséré la démonstration suivante dans la vie d’Addison : Pope voulait refondre son poëme sur la Boucle de cheveux enlevée. […] Et heureux les hommes, qui, ayant osé la recevoir sous sa forme effrayante et dégradée, seront enfin récompensés par elle au temps de sa beauté et de sa gloire1378 !
M. de Saint-Pierre ne crut pas devoir les imiter ; à la grande confusion des autres officiers, il osa s’asseoir en présence du général, qui ne lui pardonna point ce qu’il appelait un excès de familiarité. […] Comme celui de Guillaume Penn, il dira à tous ceux qui gémissent sur la terre: « Venez dans notre fertile contrée ; celui qui y plantera un arbre en recueillera le fruit. » M. de Saint-Pierre se proposait surtout d’imiter ce législateur dans sa confiance en Dieu, la plus grande, à notre avis, qu’aucun fondateur de république ait jamais eue, puisqu’il osa établir une société d’hommes riches et sans armes, et que, par un miracle de la Providence, cette société n’a pas cessé de fleurir au milieu des Sauvages et des Européens. […] Le bruit de ses eaux effraya Virginie ; elle n’osa y mettre les pieds, pour la passer à gué. […] Mon ami, vous êtes un grand peintre, et j’ose vous prédire la plus brillante renommée !
Il faudrait qu’un roi de France eût régné aussi longtemps que M. de Chateaubriand lui-même, pour que ce roi-là osât dire : « M. de Chateaubriand est à moi. » Hélas ! […] — une femme courageuse, qui, pour franchir un ruisseau, osait montrer qu’elle portait une jupe verte sous une robe bleue ! […] Essayez donc, si vous l’osez, de remettre le mors et la bride à ce jeune cheval échappé et furieux comme le cheval de Job ! […] à peine il osait se montrer ; il n’était plus qu’un aristocrate, un ci-devant, un suspect ! […] Certes, voilà ce que personne au monde n’oserait affirmer.
C’est un homme unique ; ses pièces touchent à la tragédie, elles saisissent et personne en cela n’ose l’imiter… Tous les ans, je lis quelques pièces de Molière, de même que de temps en temps je contemple les gravures d’après de grands maîtres italiens. […] Il se trouvait déjà, au surplus, quelques années à peine après son arrivée à Paris, dans une période de calme qui lui permettait de tout oser, de tout espérer. […] Il est décidément dangereux d’oser regarder la vérité en face et de toucher à certaines plaies et à certains masques. […] Elles valaient cependant d’être recueillies, ne fut-ce que pour inspirer à toute âme l’horreur et le dédain de ces calomnies qui, devant l’avenir, ne souillent jamais que ceux qui ont osé s’en faire une arme contre le talent ou la probité. […] Comme il était déjà très tard, chacun se retira bientôt après. » On a pu juger par cette oraison fort originale, étrange même — et réimprimée ici pour la première fois, — du bruit qu’avait fait, en mourant, le comédien et l’auteur de génie, que quelques envieux avaient osé déclarer inférieur à Scaramouche, son maître.
Mais c’est une recherche qu’on n’ose entreprendre. […] Si elles ont fructifié, c’est grâce à ses amis et à ses disciples, grâce à ceux qui ont osé choisir quelques fleurs seulement dans le vaste et très riche jardin qu’il cultivait et surtout agrandissait sans cesse. […] Tous ceux qui ont l’habitude d’écrire récriraient s’ils l’osaient, et ceux dont ce n’est pas le métier d’écrire le lisent, quand, ils regardent en eux-mêmes. […] Les maîtres de la philosophie française contemporaine n’ont pas encore osé en faire autant. […] Et il ose cette maxime, qui fera peut-être peur : On n’est jamais coupable alors qu’on est heureux 36.
La politique offrait un terrain trop brûlant encore pour qu’on osât y poser le pied. […] C’est un admirateur passionné des classiques qui le pense et qui ose le dire. […] Il osa parler de Vénus, d’Apollon et des nymphes ; ces beaux noms le séduisaient et lui plaisaient comme des camées d’agate ou d’onyx. […] Combien aujourd’hui ne sont plus que les imitateurs d’eux-mêmes et n’osent plus sortir du moule invariable où ils condamnent leur pensée ! […] Laissant, enfin, les imitations et les formes convenues, il osa être lui-même et inventa une chanson nouvelle qui ne doit rien à Béranger et semble d’abord étrangère à l’art, quoiqu’il y en ait du plus fin et du plus délicat, caché sous une apparente rusticité.
Qui osera choisir entre celui qui ne sait pas ce qu’il fait et celui qui se dédouble et se voit ? […] Les gens simples parfois en demeurent scandalisés ; celui qui, pour la première fois, selon que l’un ou l’autre des termes est le plus ancien, osa dire la « bouche » ou la « gueule » d’un canon fut sans doute accusé soit de préciosité soit de grossièreté. […] Oser dire à l’instinct qu’il se trompe, c’est une des prétentions de la raison, mais peu raisonnable ; la raison n’est là qu’une spectatrice qui compte et catalogue des attitudes que son essence même lui interdit de comprendre. […] Jetez-moi bas une vingtaine de réputations et la vôtre grandira infailliblement… » Sans doute, si le coup est vraiment un « coup d’éclat », mais qui oserait en répondre ? […] Entre le vingt-deuxième siècle et l’envahissement de l’Angleterre, une seule romancière osa une timide allusion au mécanisme de l’amour ; elle dut s’exiler en Allemagne.
Sa vie fut désolante, jusqu’à ce qu’elle désirât d’en être délivrée ; seulement, « elle n’osait pas demander à Dieu de mourir ». […] Ils n’osaient pas se reposer au bord du chemin, « parce qu’ils n’étaient pas chez eux ». […] * * * On n’ose point aborder tout de go la philosophie d’un Henri Poincaré. […] Poincaré voulut… je n’ose pas le dire… il voulut représenter ces fonctions qu’il avait établies, « par le quotient de deux séries ». […] À tort ou à raison, — et qui oserait dire, hélas !
Qui osera dire, après cela, que les femmes se soucient de la gloire ? […] Un jour, dans les rangs, un grenadier osa dire tout haut : « C’est pas Moreau qui nous aurait conduits comme ça ! […] René Bazin nous expose en un roman très honnête, très bon, où j’oserais peut-être désirer une moindre abondance d’épisodes gracieux. […] Aurais-je encore osé venir au tribunal ? […] Le journal officiel de Pékin annonça d’ailleurs, après cette audience, que les « diables étrangers », ayant osé se présenter devant le Fils du Ciel, étaient tombés à la renverse, foudroyés.
Le moyen âge, on le sait et on l’ose dire aujourd’hui, fut pour elle une grande époque ; je le répète après tant d’autres, mais avec une conviction d’autant plus profonde que j’y ai été amené avec lenteur et presque à mon corps défendant. […] Ce noble Lorrain, à la haute taille, au visage balafré et resté beau, au geste dominant, à la parole courtoise, est bien un ancêtre des illustres Guises, de celui qui à la veille d’être massacré, répondait aux donneurs d’avis : « On n’oserait !
Mais voici un bien autre attrait, le plus pénétrant de tous pour un monde qui raffole de Parny ; selon le comte d’Artois dont je n’ose citer le mot, c’est l’appel aux sens, l’éveil des sens qui fait toute la verdeur et toute la saveur de la pièce. […] Candide, dernier chapitre : « Quand on ne disputait pas, l’ennui était si excessif que la vieille osa un jour lui dire : Je voudrais bien savoir lequel est le pire, ou d’être violée cent fois par des pirates nègres, d’avoir une fesse coupée, de passer par les baguettes chez les Bulgares, d’être fouetté et pendu dans un autodafé, d’être disséqué, de ramer aux galères, d’éprouver enfin toutes les misères par lesquelles nous avons passé, ou bien de rester ici à ne rien faire C’est une grande question, dit Candide. » 472.
Il n’ose pas philosopher en docteur, il demande permission ; il hasarde son idée, comme une supposition timide, il essaye d’inventer une âme à l’usage des rats et des lapins. […] Voilà à quoi sert d’être Gaulois et poëte : il ne se dégoûtait pas comme les beaux esprits, il osait être paysan, campagnard, comme il avait été homme de cour et galant.
Ils ont vécu, ce Raoul qui, se faisant adjuger par le roi Louis l’héritage de Herbert de Vermandois, envahit le pays qu’il veut posséder, saccage et brûle, un vendredi saint, la ville d’Origny, avec son monastère et ses nonnes, qu’il promettait tout à l’heure d’épargner, qui, tout échauffé de cette atroce exécution, tout joyeux et de grand appétit, n’ose manger de la viande, quand son sénéchal en se signant lui remémore qu’« il est carême » ; ce Bernier, écuyer de Raoul, fils d’un des quatre fils de Herbert, qui, fidèle à la loi féodale, suit son maître contre son frère et ses oncles, voit sa mère brûlée sous ses yeux dans le monastère où elle s’est retirée, et renonce seulement son hommage quand Raoul, échauffe par le vin, l’a à demi assommé pour avoir trop haut regretté l’incendie de son pays et la mort de sa mère. […] Une fois fixés par l’écriture, les poèmes homériques étaient sauvés : on a pu les rajeunir discrètement, mais qui eût osé en détruire la forme consacrée pour les amplifier à son goût ?
Ce qu’on n’ose appeler le lyrisme du xive siècle est le prolongement du lyrisme savant des chansonniers aristocratiques du xiiie siècle, et c’en est la décadence : on peut deviner à quels résultats on arrive, quand la pédantesque subtilité de la dialectique scolastique se superpose à la subtilité élégante de l’amour courtois. […] Tandis que le bon prêtre de Rouen qui fait la Chronique des quatre premiers Valois, un pauvre écrivain, montre les petites gens faisant déjà le succès d’une bataille, tandis que le carme Jean de Venette, en son mauvais latin, ose excuser la Jacquerie par l’oppression féodale, Froissart rit des bourgeois qui prétendent s’armer pour défendre leur ville et leur vie ; ce n’est pour lui qu’une « garde nationale » fanfaronne et poltronne ; et sereinement, sans une inquiétude de justice, ni un tressaillement d’humanité, il crie : Mort aux Jacques !
Et comment cet Eschyle ose-t-il appeler Jupiter le prytane des immortels ? […] On sait par les didascalies que les Perses furent représentés sous l’archonte Ménon, les Sept Chefs devant Thèbes sous l’archonte Théagénidès et l’Orestie sous l’archonte Philoclès ; on sait par Aristote qu’Eschyle osa, le premier, faire parler deux personnages à la fois ; par Platon, que les esclaves assistaient à ses pièces ; par Horace, qu’il inventa le masque et le cothurne ; par Pollux, que les femmes grosses avortaient à l’entrée des Furies ; par Philostrate, qu’il abrégea les monodies ; par Suidas, que son théâtre s’écroula sous la foule ; par Élien, qu’il blasphéma ; par Plutarque, qu’il fut exilé ; par Valère-Maxime, qu’un aigle le tua d’une tortue sur la tête ; par Quintilien, qu’on retoucha ses pièces ; par Fabricius, que ses fils sont accusés de cette lèse-paternité ; par les marbres d’Arundel, la date de sa naissance, la date de sa mort et son âge, soixante-neuf ans.
Tel est aujourd’hui, sous plusieurs rapports capitaux, le plus grand et le plus pressant besoin de notre intelligence : tel est, j’ose le dire, le premier but de ce cours, son but spécial. […] J’ose ajouter, en outre, que, lors même qu’une telle entreprise pourrait être réalisée dans la suite, ce qui, en effet, se laisse concevoir, ce ne serait jamais néanmoins que par l’étude des applications régulières des procédés scientifiques qu’on pourrait parvenir à se former un bon système d’habitudes intellectuelles ; ce qui est pourtant le but essentiel de l’étude de la méthode.
Il n’a le temps de rien finir de ce qu’il ose entreprendre, et c’est ce qui le plonge si souvent dans le découragement et la tristesse, parce qu’il est trop souvent porté à douter des vues de la Providence à son égard. […] J’oserai donc à présent dire avec plus de confiance que la parole est une révélation qui n’a jamais quitté le genre humain et qui ne le quittera jamais ; Que les langues sont une révélation continue, toujours subsistante au milieu des sociétés humaines, et par laquelle les sociétés humaines sont régies, car la parole est le lien des êtres intelligents ; Que les langues sont filles les unes des autres, et que l’homme ne peut inventer ni sa langue ni ses institutions.
Qui n’aurait pas d’audace serait moins artiste… Parisien, trop Parisien peut-être, et trop jeune encore pour ne pas s’éprendre et s’enivrer de choses contemporaines, il a osé son pan de fresque après l’immense fresque du Maître des Maîtres, qui — même inachevée — fait croire à l’imagination que Balzac a peint tout, quand, interrompu par la mort, il lui restait tant à peindre encore ! […] il en faut une déjà pour oser seulement manier cette réalité historique, et s’efforcer de la monter jusqu’à son idéal le plus sublime ou de la creuser jusqu’à sa dernière profondeur.
c’est pourtant ce qu’on voulait et ce qu’on osait ; et si l’on n’a pas réalisé tout cela, on a du moins le droit de mettre le résultat à côté du vœu, et l’on peut, sans trop rougir, confronter le total de l’œuvre avec les premières espérances.
Il voulait bien, d’ailleurs, ne point parler trop injurieusement de ceux-ci, des 25 millions d’hommes qui formaient la masse de la nation : « Il est bien reconnu, disait-il, que les régnicoles, comme les émigrés, appelaient de tous leurs vœux un heureux changement, lors même qu’ils n’osaient pas encore l’espérer. » Ainsi, Français de 1792 qui couriez à la frontière, vous qui sauviez la patrie menacée, vous qui, à la suite des armées refoulées de la coalition, passiez le Rhin et l’Escaut et les Alpes, qui combattiez à Rivoli, à Zurich, aux pyramides et autres lieux, vous étiez des régnicoles ; il est bon de savoir le nom qu’on a.
Le brave La Noue, cet excellent homme de guerre du xvie siècle, a soutenu dans ses Paradoxes militaires « qu’il est profitable à un chef de guerre d’avoir reçu une route », c’est-à-dire d’avoir, une fois dans sa vie, essuyé une déroute ou du moins un échec qui lui est une leçon ; Joubert essuya une première défaite à Corona, et cela dut lui servir : il paraît bien, d’ailleurs, qu’il avait reconnu tout d’abord, et mieux que Masséna son chef, l’importance de ce poste de Corona, qui est la clef, le point stratégique des opérations dans cette contrée du Montebaldo : Pour ce qui me regarde, dit-il, je n’osais, après ma défaite de Corona, me présenter à Bonaparte ; mais tous les volontaires avaient parlé de ma défense.
Ne l’appelez pas un vaste cerveau ; le sien en est réduit, si j’ose ainsi parler, à quelques fibres élémentaires, mais très nettes, très déliées et tenaces.
. — Je mettrais dans le même groupe, si j’avais le temps de m’y arrêter, Albert Glatigny, un osé et un téméraire, qui, après les Vignes folles, est venu lancer les Flèches d’or 38 : quelques-unes portent loin.
pour le coup, Rancé ne put s’empêcher de sourire, et on surprend ce mouvement de physionomie, chez lui si rare, à travers les simples lignes de sa réponse : « J’ai jeté les yeux sur votre ouvrage des Sirènes, mais je vous avoue que je n’ai osé entrer avant dans la matière.
Mais ici, quand le roi, en hâte de partir, et dont le danger redouble à chaque minute, demande et commande à Steven des chevaux, et de lui rendre son compagnon de voyage, qu’on lui retient parce que c’est le fiancé de Mina ; quand Steven, non content de résister par piété domestique, étale cette piété, la discute, l’oppose avec faste au rôle du conquérant, quand il s’écrie : « L’homme que vous venez d’appeler un enfant se lève du sein de son obscurité pour se placer devant vous, et pour se mesurer à vous, sans orgueil comme sans crainte… Ce n’est pas parce que je commande que j’ose me comparer à vous, mais parce que j’obéis… J’ai vaincu un ennemi plus redoutable que vous…, je me suis vaincu moi-même » alors le drame cesse en ce qu’il avait de naturel et d’entraînant ; le système reparaît, se traduit de nouveau à la barre sous forme de plaidoyer.
Ils n’ont aucun rapport avec les sublimes effets que Shakespeare sait tirer des mots simples, des circonstances vulgaires placées avec art, et qu’à tort nous n’oserions pas admettre sur notre théâtre.
Jésus le premier osa dire qu’à partir de lui, ou plutôt à partir de Jean 630, la Loi n’existait plus.
Mais quand même il oserait la tenter, cela n’avancerait guère.
Les juges mêmes qui l’interrogèrent (Ravaillac) n’osèrent en ouvrir la bouche, et n’en parlèrent jamais que des épaules .
Et c’est là une chose qu’il faut oser dire.
Lorsqu’il reparut, quatre ans après, dans cette même Chambre, pour y siéger avec voix délibérative, il eut le droit de tout dire, de tout oser, moyennant cette élégance de parole et de débit qui ne l’abandonne jamais.
Quel fou osa jamais grouper sous quelque nom générique d’école, des esprits aussi différents, aussi contraires, que ceux de Verlaine et de Mallarmé, de Vielé-Griffin et de Verhaeren, d’Henri de Régnier et de Jules Laforgue, de Jean Moréas et de Gustave Kahn — pour ne citer ici que les aînés.
Cependant elle n’était pas subjuguée tout entière par ces passions aveugles et exaltées, et les esprits élevés qui la dirigeaient avaient d’autres vues ; mais ils n’osaient pas toujours les dire.
Antoine seul ose de temps à autre quelque tentative de ce genre.
Devant les autres chiens oserai-je paraître ?
Je n’ose rien prononcer sur la permission ou la défense de recevoir des présents ou autres gratifications des parents ; la permission autorise l’abus, la défense ne l’empêche pas, et c’est une mauvaise loi qu’une loi prohibitive qui n’a point d’exécution.
Le même auteur dit aussi en parlant des masques des tragédies qui doivent être caracterisez, que celui de Thamiris, ce fameux témeraire que les muses rendirent aveugle, parce qu’il avoit osé les défier, devoit avoir un oeil bleu et l’autre noir.
Notre littérature a vieilli, comme nos souvenirs : on n’ose pas encore l’avouer ; et certainement je serai soumis à d’amères censures, parce que j’aurai donné de la réalité à un fait que l’on voudrait refuser de constater, dont on voudrait même pouvoir douter.
Qui oserait écrire des Mémoires à Saint-Pétersbourg ?
Enfin, débauchés dans la proportion où ils sont lâches, les Chinois, dont la philosophie européenne a vanté les mœurs si longtemps, ont offert un tel spectacle à Huc qu’il n’a pas osé le reproduire intégralement dans la pleine lumière d’un livre qui doit s’ouvrir sous tous les yeux.
Et il le sent si bien, cet esprit positif au fond, qui arrache un si riche lambeau de bon sens à la philosophie contemporaine dont il est féru, que, malgré sa tendance à généraliser, malgré les catégories qu’il dresse des différentes formes de la main correspondant aux différentes spécialités de l’intelligence, il n’ose pas donner à son livre un autre nom que celui d’aperçu, et qu’il dit dans l’introduction, avec une modestie antiphilosophique : « Qui n’a lu Gail et ses adeptes enthousiastes, les phrénologistes ?
Les brigands mexicains qui, de son vivant, osaient l’appeler « le Pirate » (et il faut dire que le gouvernement qui l’a tué a eu la pudeur, dans sa sentence de mort, de ne pas l’appeler de ce nom), les brigands mexicains savaient bien que, pour cacher leur perfidie, il était nécessaire de lui donner juste le nom qui calomniait sa loyauté.
On y est tenu, pour l’honneur de l’homme dont on ose parler et pour son honneur à soi-même.
Trente-deux ans évêque à la même place, il a déployé dans ses fonctions d’évêque ce que j’oserai appeler « l’esprit papal ».
Il nous ouvre l’âme à secret de ce vulgaire envieux de Colomb qui osait bien le mépriser comme les gens médiocres méprisent le Génie, — au nom des intérêts positifs.
Il n’ose rien, et ce n’est pas par timidité.
Il dirait même : la grammaire, s’il osait… mais le ridicule l’arrête là, le dandy historien !
Tête que j’oserai appeler antihistorique, cervelle rechercheuse d’abstractions, M. l’abbé Mitraud n’a ni le sens de l’histoire, ni le sens de la nature humaine.
C’est un livre, en effet, sans tendresse, sans idéalité, sans poésie, et nous oserions presque dire sans âme, si l’intelligence ne faisait pas partie de l’âme humaine et n’en constituait pas la plus fière moitié.
Ces signes étaient, si je l’ose dire, des paroles réelles, et la nature entière était la langue de Jupiter.
Je n’ose plus loin pousser cette peinture. […] Et, en face du Misanthrope, il s’écrie : « On ose attaquer un tel homme ! on ose y toucher ! on ose lui trouver des défauts ! […] Oserais-je ajouter un soupçon qui me vient ?
Mais qui oserait faire le moindre reproche à ces braves gens ? […] Il avait dit (et qui oserait, hélas ! […] Il est (si j’ose le dire) un théologien pour laïques. […] Les plaisanteries de haut goût qui circulent dans les compagnies, et dont quelques-unes sont trop pittoresques, n’osaient atteindre le commandant. […] Osons le dire franchement.
Écoutez-le : « Il y a telle page qui a été tracée dans une ivresse de pensée que je n’ose pas appeler l’inspiration, mais qu’en face du papier inerte et muet, je n’avais jamais ressentie. […] Jusqu’ici je n’en ai guère trouvé qu’un si simple qu’il semble puéril et que j’ose à peine l’énoncer. […] Léon Daudet, c’est l’armée outragée et trahie, que les politiciens haïssent sans oser la détruire entièrement. […] Osera-t-elle les décevoir, leur faire injure, les renier ? […] Cette correspondance de passion poserait donc — osons prononcer le mot — sur un mensonge ?
L’ordre, la discipline, l’autorité, tel était en effet le génie de la France à l’époque où son souverain osait dire « l’État c’est moi ». — Parole imprudente ! […] L’abbé Frayssinous, qui était alors ministre de l’instruction publique, avait fait fermer le cours du jeune professeur qui osait proclamer une philosophie contraire à la religion de l’état. […] Ils ont tous de grands sourcils noirs et des yeux baignés de larmes, qu’ils n’osent guère ouvrir qu’à la chute du jour pour contempler des ruines et des tombeaux. […] Le pauvre Ducis émondé, écrasé, ratissé et peigné par les critiques que nous connaissons, n’eut pas même la permission d’être lui-même, et le peu de libertés qu’il osa prendre lui attira encore des reproches de tous côtés. […] Il fut le seul acteur qui osât jouer le rôle de Ruy-Blas.
Et si l’homme naturel se laisse dominer par cette humeur légère, une froide indifférence prend toujours plus le dessus, et l’on finit par considérer le bienfaiteur comme un étranger, à qui on oserait bien, à l’occasion, faire quelque tort, si l’on y trouvait son avantage. […] On dirait, si j’ose employer cette image, qu’il possède un jardin pour rire et l’autre pour pleurer : il se transporte de l’un dans l’autre avec désinvolture et facilité, comme si c’était la chose la plus simple de passer ainsi de la douleur à l’insouciance, du mal d’aimer à la joie de vivre. […] Naturiste à tant d’autres égards, observateur attentif de pierres et de plantes, défenseur d’une morale qui rompait hardiment avec les conventions établies, il semblait, comme poète, vouer un culte exclusif aux artifices de l’art : et c’est justement dans Tasse que nous pouvons saisir, si j’ose dire, le secret de sa pensée intime, la clef de ce qu’il était, à ce moment-là, comme homme et comme artiste. […] Son esprit n’est pas assez tranquille, sa misérable situation domestique, qu’il n’ose point changer, tant il est faible sur ce point, le remplit d’amertume. » Koerner, aussitôt, de broder sur ce thème : « Je comprends que la situation domestique de Goethe doive peser lourdement sur lui, et c’est ce qui m’explique comment Goethe, hors de Weimar, est plus sociable qu’à Weimar même. […] Ose le servir.
Elle eut peur, une peur atroce, si violente qu’elle n’osait plus remuer, ni respirer, ni se retourner pour regarder derrière elle. […] Et il n’était plus beau : sa robe blanche et frisée avait jauni ; son nez, autrefois si noir, blanchissait ; une saleté et une sorte de honte le rendaient lamentable, car on n’osait le laver, à cause de son grand âge. […] Puis il demanda à Lucie, du ton bref et sourd d’un complice qui n’ose même pas savoir tous les détails du forfait : — … Et… cela a été facile ? […] Tout y est vrai, tout y est juste, tout y est raconté avec une rare précision, mais le roman est-il fait pour devenir le révélateur des huis clos que la Gazette des Tribunaux n’oserait reproduire ? […] Maxime n’osera plus parler de répulsion.
Cela est tellement évident que personne n’oserait le contester. […] Il ose même attaquer Chapelain, Chapelain qui est en possession de la renommée, et qui tient la feuille des bénéfices ! […] Pour moi, qui sur ton nom déjà brûlant d’écrire, Sens au bout de ma plume expirer la satire, Je n’ose de mes vers vanter ici le prix. […] En un mot, qui osera dire que le milieu et toutes les circonstances diverses du régime et des habitudes, la vie sédentaire ou la locomotion fréquente, la vie méditative dans les grands bois silencieux ou au bord de la mer retentissante, la vie enterrée dans un trou de province ou bouillonnante au creuset de Paris, qui osera dire que toutes ces choses, et mille autres analogues, soient sans influence sur l’homme, et par conséquent sur son œuvre ? […] Je n’oserais ajouter que même, pour la plupart, ils parlent faux : car ils pourraient nous répondre que c’est nous, et que chaque peuple a sa cantilène, et qu’ainsi le veut la Physiologie, ma déesse.
Il n’a jamais eu le courage d’identifier, ainsi que Taine devait l’oser, 93 et 89, la hideuse barbarie de la Terreur et les sophismes charmeurs du dix-huitième siècle. […] L’ose-t-on davantage aujourd’hui dans certains milieux : l’Université par exemple ? […] Et soudain ils se heurtaient à un Balzac monarchiste et catholique, osons dire le mot, clérical. […] Charles de Pomairols, a osé intituler une suite de pièces de vers : Poésie de la propriété. […] Il est scientifique et, j’oserai dire naturaliste, comme le reste du système.
Il s’y attache avec une passion, si j’ose le dire, tellement déréglée, que le préjudice visible qu’il fait à sa constitution extrêmement délicate n’est pas capable de l’en séparer. […] Nous n’osons plus prononcer de ces mots si durs, et qui cependant, bien placés, répondaient à la chose. […] Les plus beaux vers amoureux de Malherbe, ceux qui sont le plus dans son ton et sa manière, j’oserai dire que c’est Corneille qui les a faits.
Irrité de ce traitement, le fils d’Artembarès, dès qu’il put s’échapper, se rendit à Ecbatane, et vint se plaindre amèrement à son père de ce qu’avait osé Cyrus, ne le nommant pas cependant par ce nom, car il ne le portait pas, mais le désignant comme le fils d’un des pâtres d’Astyage. […] Lorsqu’ils furent en sa présence, Astyage, regardant Cyrus, lui dit : « C’est donc toi, toi, fils de cet homme, qui as osé traiter avec tant d’indignité le fils d’un des premiers de ma cour ? […] Mais aussi, si vous êtes vainqueur des ennemis que vous avez en présence et ensuite de tous les Spartiates, qui jusqu’ici sont demeurés chez eux, il n’est alors aucune autre nation qui ose prendre les armes contre vous, dès que vous vous serez mesuré avec la ville la plus célèbre, avec la plus puissante royauté de la Grèce, et avec les plus braves des hommes. » Xerxès ne voulut ajouter aucune foi à ce discours, et interrogeant de nouveau Démarate, lui demanda : « comment une si petite poignée d’hommes s’y prendraient pour combattre contre toute son armée ?
Il reste que je « juge », si j’ose encore m’exprimer ainsi, les cinq dernières productions de notre art dramatique d’une manière toute subjective et sur le plaisir qu’elles m’ont fait. […] C’est cette démence qui sauve ce que certaines scènes du Nouveau Jeu ont d’extrêmement osé. […] Si bien que Paméla, pour réussir complètement, aurait dû être précédée d’une campagne de presse et de conférences qui eût persuadé le public de la vérité ou de l’extrême vraisemblance de ce que l’auteur prétendait, si j’ose dire, lui faire avaler.
Je ne suis fait comme aucun de ceux que j’ai vus ; j’ose croire n’être fait comme aucun de ceux qui existent. […] Que chacun d’eux découvre à son tour son cœur au pied de ton trône avec la même sincérité ; Et puis qu’un seul te dise, s’il l’ose : je fus meilleur que cet homme-là. […] Mer où la perle éclôt, terre où germe l’épi ; Nature d’où tout sort, nature où tout retombe, Feuilles, nids, doux rameaux que l’air n’ose Ne faites effleurer, pas de bruit autour de cette tombe ; Laissez l’enfant dormir et la mère pleurer !
Seulement de nos jours, quelques champions isolés osèrent l’attaquer individuellement, amenés à la combattre dans les premiers essais d’un “art social” indiqué par les derniers représentants du naturalisme. […] Une telle influence ne se mesure pas, mais il n’est pas niable qu’elle naisse et dure — et nous osons même affirmer que l’influence de la Littérature, de tout ce qui est parole de vérité ou représentation de la vérité, est la seule qui engendre le progrès humain. […] L’homme des initiales journées de 89, qui, le 23 juin osait décréter l’abolition du principe jusqu’alors absolu de la royauté, se vit deux années après, accusé de complicité avec la monarchie. […] Nous osons dire que cette erreur est capitale puisque par elle on tournait diamétralement le dos au but que l’on devait atteindre.
« La langue, la conversation et l’esprit697, dit-il, se sont perfectionnés depuis le siècle dernier », ce qui a fait découvrir dans les anciens poëtes beaucoup de fautes, et a introduit un genre de drame nouveau. « Qu’un homme sachant l’anglais lise attentivement les œuvres de Shakspeare et de Fletcher, j’ose affirmer qu’il trouvera à chaque page, soit quelque solécisme de langue, soit quelque manque de sens notable. […] On voit d’avance que Dryden, poussé d’un côté par son esprit anglais, sera tiré d’un autre par ses règles françaises, que tour à tour il osera et se contiendra à moitié, qu’en fait de mérite il atteindra la médiocrité, c’est-à-dire la platitude, qu’en matière de défauts il tombera dans les disparates, c’est-à-dire dans les absurdités. […] Supposez une sorte de verve et de folie romanesque, le style le plus osé, tout bizarre et poétique, des chansons, des peintures, des rêveries à haute voix, le franc dédain de toute vraisemblance, un mélange de tendresse, de philosophie et de moquerie, toutes les grâces fuyantes des sentiments nuancés, tous les caprices de la fantaisie bondissante : la vérité des événements ne vous importera guère. […] J’ose dire qu’en l’imitant je me suis surpassé moi-même dans cette pièce, et qu’entre autres je préfère la scène entre Antoine et Ventidius, au premier acte, à tout ce que j’ai écrit dans ce genre. » Il avait raison ; si sa Cléopatre est manquée, si cette défaillance de la conception détourne l’intérêt et gâte l’ensemble, si la rhétorique nouvelle et l’emphase ancienne viennent parfois suspendre l’émotion et détruire la vraisemblance, en somme pourtant le drame se tient debout, et qui plus est, il marche.
Mais je le déclare, il s’en trouvera mal s’il ose disputer avec moi. […] Celui-ci promet, hésite, ajourne, et n’ose nier la terrible puissance qu’il tâche d’éluder. […] Je ferais méprise si sur vous je mettais un tel ordre ; et je n’oserais l’entreprendre, car j’en serais fort blâmé. — Là, Hugues, dit-il, vous ne le ferez pas ? […] Mais les savants auteurs qui, dans leur respect pour Blanche et pour l’étiquette, ont nié avec le plus de force la passion de Thibaut, n’ont pas osé, par le même motif, faire usage d’un argument si simple. […] Comment avez-vous osé dire ce que vous avez dit ?
Je vous dirai : « Vous vous êtes trompée », et j’ose espérer que vous me croirez… Le 16, au matin. […] Pour l’observateur, pour le moraliste qui étudie curieusement le fond des caractères, celui de Benjamin Constant ne se dessine sans doute que mieux ; ce mélange d’égoïsme et de sensibilité, qui se combine dans la nature d’Adolphe pour son malheur et celui des autres, n’est plus désormais masqué par rien ; il se remet à écrire à Mme de Charrière comme à l’esprit le plus supérieur qu’il connaisse ; il lui dit tout et plus que tout, il s’analyse et se dénonce impitoyablement lui-même, il ne craint plus d’offenser en elle cette première délicatesse ni même cette pudeur de l’amitié qu’il a violée une fois ; les confidences les plus étranges, les plus particulières, se multiplient et s’entre-croisent ; il sait être encore aimable, encore touchant par accès, spirituel toujours173, mais aussi il ose avoir toute sa sécheresse, tout son ennui désolant ; il y a du cynisme parfois. […] « Que la morale soit vague, que l’homme soit méchant, faible, sot et vil, et de plus destiné à n’être que tel », il le croit très-habituellement, il ose l’écrire, et pourtant… Voici des pages beaucoup trop démonstratives de ce que nous avançons : « Vendredi, ce 6 juillet 1791. […] C’est un conseil que j’ose donner à mon amie à l’âge de vingt-six ans. […] Oserons-nous, après cela, faire remarquer qu’il ne faut pas toujours prendre exactement au pied de la lettre ce que disent les Adorateurs ?
« Mon démon, dit-il, tente mon bon ange, et veut l’ôter de mes côtés202. » Et quand elle y a réussi203, il n’ose se l’avouer, et souffre tout, comme Molière. […] Ses rois sont hommes et pères de famille, le terrible jaloux Léontès, qui va ordonner le meurtre de sa femme et de son ami222, joue comme un enfant avec son fils ; il le caresse, il lui donne tous les jolis petits noms d’amitié que disent les mères ; il ose être trivial ; il est bavard comme une nourrice, il en a le langage et il en prend les soins. […] Stéphano a battu son camarade. « Bats-le bien, dit Caliban, et, après un peu de temps, j’oserai le battre aussi. » Il supplie Stéphano de venir avec lui tuer Prospero endormi ; il a soif de l’y mener ; il danse de joie, et voit d’avance son maître la gorge coupée et la cervelle épanchée par terre. « Je t’en prie, mon roi, ne fais pas de bruit. […] » — Elle veut oublier ce qu’elle sait de ces dangers, elle n’ose y penser ; quand on lui demande si Coriolan n’a point coutume de revenir blessé : « Oh ! […] — De mon indignité qui n’ose pas offrir ce que je voudrais donner, et encore bien moins prendre ce que je mourrai de ne pas avoir… Je suis votre femme, si vous voulez m’épouser ; sinon, je mourrai votre servante249. » Cette invincible invasion de l’amour transforme tout le caractère.
Mon compatriote qui la connaît, se fit ouvrir sa loge, où je n’osai le suivre, mais ma lorgnette y fut longtemps braquée. […] Je n’ose, en vérité, vous parler de Mme la duchesse d’Abrantès, l’auteur de tant de mémoires. […] J’aurais fort désiré lui parler, ou me mêler à sa conversation, mais je n’osai en saisir l’occasion qui pourtant en naquit plusieurs fois. […] Dumas, quand il osera l’oser, n’y manquera pas non plus.
Que si l’expression, et par conséquent la conception du sublime et du beau faiblit ou demeure stationnaire dans l’humanité, qui osera dire que celle du vrai et du bien grandisse et se fortifie ? […] Se perfectionner par la justice, ou se faire saint, en observant la loi temporelle et en la développant dans son entière vérité, tel est le but indiqué à l’homme par la morale ; … se perfectionner par l’art ou, si j’ose me servir de cette expression familière, se faire beau, en épurant sans cesse, à l’instar de notre âme, les formes qui nous entourent, tel est l’objet de l’esthétique. […] qu’on met dans la bouche du peintre ; il est surprenant qu’on ose ramasser de pareilles niaiseries, qui furent jetées, il y a déjà trente ans, à la tête de M. […] le laid seul est aimable, qu’on met dans la bouche du peintre ; il est surprenant qu’on ose ramasser de pareilles niaiseries, qui furent jetées, il y a déjà trente ans, à la tête de M. […] Qui oserait nier en effet que la réalité humaine, de quelque côté qu’on l’envisage, ait sa poésie ?
L’auteur de La Nuit a, si j’ose dire, des états d’âme de rechange ! […] On n’oserait la lire à voix trop haute : sa gracilité mystérieuse oblige au recueillement. […] Ils ne quittent pas des yeux la famille qui veille, tremblent si les jeunes filles s’approchent de la fenêtre, si le père remue… Ils hésitent à entrer, ils n’osent pas… La jeune fille dont ils parlent avec émotion était leur fille, à ces parents si paisibles, là, sous la lampe ! […] Le parisianisme ne lui suffisant plus, cet enfant de Bruxelles s’est plu, si j’ose dire, à se « boulevardiser ». […] , nul, en revanche, n’oserait le nier, elle acquiert bien droit de cité parmi nous, cette pensée, coulée dans la langue française la plus pure, la plus souple, la plus harmonieuse, qui nous arrive filtrée à travers une forme essentiellement latine !
je ne l’oserais dire. […] Sa santé altérée ; au milieu de tant d’accords profonds et vertueux, le désaccord enfin prononcé des âges ; ses vœux secrets (une fois sa fin entrevue) pour le bonheur du fils et de l’époux avec une autre qu’elle, avec une autre elle-même ; il y eut là sans doute de quoi attendrir et passionner sa situation dernière plus qu’elle ne l’aurait osé concevoir autrefois pour les années de sa jeunesse.
» Sa pensée n’osa aller plus loin. — « Madame, il se porte bien de sa blessure. » — « Il y a eu un combat ! […] Qui oserait, après avoir assisté avec nous de près à sa pénitence, l’appeler autrement qu’une pauvre âme délicate et angoissée ?
Racine l’eût été de même s’il avait plus osé s’abandonner à cette admiration rêveuse qu’il ressentait, jeune écolier, en s’égarant dans les prairies et le désert de Port-Royal, et qui lui inspirait au déclin de sa vie cette aimable peinture des fleurs d’Esther. […] La manière dont Bernardin de Saint-Pierre envisageait la femme s’accorde à merveille avec sa façon de sentir la nature ; et c’est presque en effet (pour oser parler didactiquement) la même question.
Et moi, j’ose vous dire : L’Europe entière, pendant trente ans de guerre sur terre et sur mer, ne suffirait pas à les remplir. […] Le roi de Piémont abuse évidemment de l’héroïsme ; brave comme s’il n’était que soldat, et encouragé à tout oser par l’Angleterre, à qui tout convient de ce qui peut nous nuire, le roi de Piémont, comme le grand Condé, qui jetait son chapeau au milieu de la mêlée, a jeté sa couronne de Sardaigne par-dessus les Apennins à Florence, à Rome, à Naples, à Palerme, pour que les soldats lui rapportent celle d’Italie !
Rousseau son disciple, non en crime, mais en niaiseries sociales, Voltaire osait dire de Platon et de J. […] Rousseau ce que nous n’oserions répéter ici ; nous voudrions seulement que tous les utopistes radicaux de nos jours eussent sans cesse sous les yeux le miroir des institutions sociales du disciple rhétoricien, mais non philosophe, de Socrate, pour y contempler, avec leur propre image, les monstruosités du sophisme substituant la métaphysique, qui est de l’homme, aux instincts de la nature, qui sont de Dieu !
Je n’ai chose au monde que ma personne, telle que je me suis sauvée, faisant soixante milles à travers champs le premier jour, et n’ayant depuis jamais osé aller que la nuit… Faites-moi connaître aujourd’hui la sincérité de votre naturelle affection vers votre bonne sœur, cousine et jurée amie. […] Aurait-on jamais cru qu’elle osât en venir à ces extrémités avec moi qui suis sa sœur, son égale, et qui ne saurais être sa sujette ?
Devant les obscurités d’un avenir qui nous apparaît fermé de toutes parts, qui oserait le dire ? […] André Fontainas Analyser ce tome dernier de Toute la lyre, qui en oserait tenter l’aventure ?
On se plaignoit vivement qu’on osât se déclarer pour le renversement des loix, pour l’extinction du goût, pour l’avilissement du tragique, pour une usurpation manifeste du brodequin sur le cothurne, & peut-être pour l’anéantissement de l’un & de l’autre. […] Sa persuasion, à cet égard, fut poussée si loin, qu’il osa se présager publiquement des succès plus grands que tous ceux qu’avoit jamais eus Corneille.
Des cris silencieux empliront nos deux bouches ; Mais nous ne serons pas emportés ni farouches ; Nous saurons nous contraindre à l’effleurant baiser Qui domine sa hâte et craint, parfois, d’oser, Et, tardif à dessein, prolonge en ses paresses L’espoir toujours accrû des prochaines caresses. […] En plein triomphe de la périphrase, le poète du Lac osa écrire ces vers d’une simplicité héroïque : Regarde, je viens seul m’asseoir sur cette pierre Où tu la vis s’asseoir !
L’ivresse de ce démagogue devenu fou, qui ose préférer la mort de Danton à celle de Notre-Seigneur Jésus-Christ, dégoûtera-t-elle de la Révolution les faibles chrétiens de notre âge aussi certainement que l’ilote dégoûtait les Spartiates ? […] Vous savez comme Rousseau est insupportable avec le sien, quand, à la première page de ses Confessions, le goujat superbe demande qui de ses lecteurs osera dire devant Dieu : Je fus « meilleur que cet homme-là » !
Scherer est à lire (pages 368-370 et page 343), et si dans cette conclusion l’impression morale qui surnage semble un peu en contradiction avec la conséquence intellectuelle, si on s’étonne de trouver l’une beaucoup plus favorable que l’autre, je me l’explique très bien par la situation personnelle du critique lui-même, qui fait un retour sur son propre passé, et qui, lui aussi, a osé se modifier, varier (toute proportion gardée) dans le degré de sa foi, et l’avouer sincèrement à son monde. — Et je me rappelle à ce sujet un dernier entretien que j’eus avec Lamennais.
Mais si l’on juge par le passé de l’avenir, quelles choses nouvelles nous sont inconnues dans les arts, dans les sciences, dans la nature, et, j’ose dire, dans l’histoire !
Je ne crains pas le sourcil jaloux des censeurs ; qu’ils viennent se montrer, s’ils osent, en ces matières aimables.
Si j’ose me servir de cette expression, je prends la liberté d’avancer sur mon compte que j’étais un franc et loyal chevalier, dont l’esprit était plus mâle que femelle ; mais je n’étais, avec cela, rien moins qu’hommasse, et on trouvait en moi, joints à l’esprit et au caractère d’un homme, les agréments d’une femme très-aimable : qu’on me pardonne cette expression en faveur de la vérité de l’aveu que fait mon amour-propre sans se couvrir d’une fausse modestie.
Le Play, en rassemblant les éléments du problème social qu’il avait dès lors en vue, a fait un premier ouvrage qui, sans parti pris, est un modèle et qui devrait être une leçon pour tous les réformateurs, en leur montrant par quelle série d’études préparatoires, par quelles observations et comparaisons multipliées il convient de passer avant d’oser se faire un avis et de conclure.
Musset, en son temps, a apostrophé Lamartine et s’est mis à l’aise avec lui, le traitant d’emblée et sans façon d’égal à égal, d’Alfred à Alphonse ; eu égard à la différence des âges, à celle des réputations au moment où cette épître parut, eu égard aussi, j’ose le dire, à l’étoffe et à la portée non comparables des génies, c’était légèrement fat et quelque peu impertinent : M.
Ainsi l’on fait de toi, chaste Muse plaintive, Qui de trop doux parfums entouras l’oranger ; Ces bosquets que j’aimais de notre ancienne rive Je n’ose y ressonger.
Que la balance ait toujours été tenue dans l’exacte mesure, qu’il n’y ait eu aucun soubresaut, aucune irrégularité, nous ne nous en vanterons certes pas, et, si nous l’osions faire, ceux-là seuls nous croiraient qui ne sauraient pas les difficultés inhérentes à tout recueil de cette nature, à toute publication collective paraissant à jour fixe, et dans laquelle un directeur véritable est toujours placé entre le reproche qu’on lui fait de trop imposer, et l’inconvénient, non moins grave, de trop permettre.
Les rapports naturels des sexes, exprimés dans leur franchise, dans leur nudité même, gardent quelque chose de grave et, si l’on ose dire, de sacré.
et osa-t-il même se compromettre jusqu’à lui répondre ?
Il ressentit d’abord, en y arrivant, une grande impression de solitude ; le bruit et la vanité qui, jusque dans la maladie, continuent de faire la vie apparente de ces grands rendez-vous, l’offusquaient ; il avait, si l’on ose le dire, quelques préventions un peu exagérées contre ce qu’il appelait notre beau monde ; nature genuine, comme disent les Anglais, il avait avant tout horreur du factice ; mais il ne tarda pas à s’y lier d’un commerce en tout convenable à son caractère et à son esprit avec quelques personnes qui lui prodiguèrent un intérêt affectueux, et particulièrement avec M.
Pour l’opium, Baudelaire avait un guide plutôt que de personnels souvenirs : Thomas de Quincey, helléniste distingué, écrivain supérieur, homme d’une respectabilité complète56, qui osa jeter à la face pudibonde de l’Angleterre l’aveu de sa passion pour la « Noire idole », « décrire cette passion, en représenter les phases, les intermittences, les rechutes, les combats, les enthousiasmes, les abattements, les extases et les fantasmagories suivies d’inexprimables angoisses. » 57 ⁂ De telles expériences ne valent que par les résultats artistiques qui peuvent en découler.
Oserai-je dire que ce sont ceux qu’il écrivit, il y a vingt-cinq ans, au temps où personne ne parlait de lui ?
Toute œuvre d’art est intéressante et peut être belle, du moment qu’elle est le commentaire sincère, ému, vivant, d’une individualité qui ose être elle-même. — Les questions d’écoles sont ici secondaires.
Qui oserait dire s’il aimerait mieux que Weierstrass n’eût jamais écrit, ou s’il préférerait qu’il n’y eût pas eu de Riemann ?
La foi nouvelle ne naîtra que sous d’effroyables orages et quand l’esprit humain aura été maté, déraillé, si j’ose le dire, par des événements jusqu’à présent inouïs.
Mais la popularité du baptiste s’imposait à eux, et ils n’osaient parler contre lui 300.
Je n’ose encore me prononcer sur l’âge de ces monuments, ni par conséquent affirmer que Jésus ait enseigné dans aucun d’eux.
Mais tel était le poids de l’orthodoxie dominante que très peu osaient l’avouer.
Mais le disciple infidèle ne perdit pas contenance ; il osa même, dit-on, demander comme les autres : « Serait-ce moi, rabbi ?
Cette condition ne pouvait convenir à la petite-fille d’Agrippa d’Aubigné, le compagnon de Henri IV, qui osait dire de ce prince, sans le fâcher, qu’il était un ladre verd, parce qu’il n’était pas prodigue pour ses amis.
Jamais je n’oserai.
Oserai-je dire toute ma pensée ?
Il existait en marbre ou sur la toile un modèle donné ; et celui qui aveuglé par sa passion s’avisait de comparer quelque figure commune avec la Vénus de Gnide ou de Paphos, était aussi ridicule que celui qui parmi nous oserait mettre quelque petit nez retroussé de bourgeoise à côté de madame la comtesse de Brionne : on hausserait les épaules, et on lui rirait au visage.
Peut-être oserai-je l’entretenir dans un autre moment de la suite de cette conversation ; aujourd’hui je craindrais trop de le fatiguer en le justifiant, même contre des imputations graves et peu respectueuses ; la manière la plus criante de lui manquer de respect est de l’ennuyer et c’est pour cela que je finis.
Non, ce ne fut point le Roi de la Critique, ni même le Prince, ni même — j’ose le dire — un critique du tout, dans le sens juste et profond de l’expression.
Je n’ose rien entreprendre sans y avoir beaucoup pensé.
Le symbolisme ne comportera, pour la critique, un ordre et un sens que lorsqu’un nouveau mouvement poétique (je n’ose dire une école) lui aura succédé, lorsqu’il sera possible de le définir comme il faut, par ce qu’il précède et par ce qui le suit.
Sa tache généreuse commence ou l’intérêt finit, etc. » Dans un endroit où il parle de la protection que Talbot donnait aux arts : « Bien différent, dit-il, de ces hommes vains qui, usurpant le nom de protecteur qu’ils avilissent, osent sacrifier un homme de mérite à leur orgueil, et répandre la rougeur de la honte sur un front honnête, quand il accordait une grâce, c’était une dette qu’il semblait payer au mérite, à la nation et à l’être qui est la source éternelle de tout bien.
Mais les injures violentes, les noms de débauché nocturne, de ventru, de pied-bot, qu’il jeta plus tard au sage Pittacus, furent sans puissance, comme ses armes : « Répète un chant romain, nous dit Horace, ô lyre modulée d’abord par le citoyen de Lesbos, qui, forcené pour la guerre, savait pourtant, soit au milieu des armes, soit quand son navire battu des flots reprenait le rivage, chanter Bacchus et les Muses, Vénus et l’enfant qui la suit toujours62. » Puis ailleurs, lorsque, échappé à un danger de mort, Horace, qui a cru voir de près l’Élysée, y place le belliqueux Alcée, comme Virgile osait y mettre Caton : « De combien peu, dit-il, nous avons failli voir l’empire de la sombre Proserpine, et le tribunal d’Éaque, et les demeures réservées des âmes pieuses, et Sapho sur la lyre éolienne se plaignant des jeunes filles ses compatriotes, et toi aussi, Alcée, redisant plus haut sur ton luth d’or les maux de la tempête, les maux de l’exil, les maux de la guerre !
Envoie vers moi, sous la conduite de la piété qui le guide, un char docile, etc. » Puis, s’animant à cet espoir d’un appui céleste et d’une vérité descendue d’en haut, le poëte disait tout à la fois dans un esprit de confiance et de doute : « Ose, et alors tu pourras librement courir sur les hautes cimes de la sagesse.
On lui doit les études physiologiques au théâtre ; lui seul a osé jusqu’ici montrer le sexe dans la jeune fille et la bête dans l’homme. […] Avec l’argent, il a osé tout dire, il a porté son examen partout, jusqu’au roi, jusqu’à Dieu, sans craindre de perdre son pain. […] Aujourd’hui, il n’est vraiment grand que parce que, dans sept ou huit scènes, il a osé apporter la note réelle, la vie dans ce qu’elle a de certain. […] Osez donc entrer dans un atelier de brochure. […] Et, à ce propos, une observation : savez-vous bien que les magistrats osent beaucoup plus que nous, les romanciers.
J’oserais réclamer aussi une chaire d’astronomie physique, afin d’étudier de plus près les canaux de la planète Mars, qui m’inquiètent beaucoup. […] Mais j’en aime la douce poésie, le candide mystère et, si j’ose dire, l’obscurité blanche. […] C’est là, j’ose dire, beaucoup trop accorder à la science constituée et supposer gratuitement que nous connaissons toutes les lois de l’univers. […] Les commencements de notre vers sont d’une si rude barbarie qu’aucun poète n’oserait y regarder s’il avait le malheur de les connaître. […] Mais c’est là une distinction qu’on n’oserait pas maintenir avec beaucoup de rigueur.
Arréat ait pleinement réussi dans ; son dessein, je n’oserai pas trop en répondre. […] Car, à mesure qu’il avançait, il osait davantage en ce sens. […] Mithridate interroge ses confidents, et il apprend que Pharnace a osé lever les yeux jusqu’à la reine. […] Agrippine s’écrie : « Burrhus ose sur moi porter ses mains hardies ! […] Les chants sont courts, et, ce que j’ose à peine avancer, tant on a dit le contraire, relativement peu soignés, fond et forme.
Robert Etienne à la vérité a rapporté à l’indicatif le prétendu futur du subjonctif ; mais il n’a pas osé en dépouiller entierement celui-ci, il l’y répete en mêmes termes. […] Nous osons espérer qu’on pardonnera à notre amour pour la vérité cette observation critique, & toutes les autres que nous pourrons avoir occasion de faire par la suite, sur les articles de l’habile grammairien qui nous a précédé : cette liberté est nécessaire à la perfection de cet ouvrage. […] Voilà, nous osons le dire, la maniere la plus naturelle & la plus sûre d’introduire les jeunes gens à l’intelligence du latin & du grec. […] J’ose me flater de donner à l’article […] qu’on ne commande pas les choses passées ni les présentes : chacun a répeté cet adage sans l’entendre, parce qu’on n’avoit pas des notions exactes du présent ni du prétérit ; & il semble en conséquence que personne n’ait osé voir ce que l’usage le plus fréquent mettoit tous les jours sous les yeux.
Et j’oserai presque insinuer que Rougier a manqué une belle occasion de n’être pas sublime et de ne pas obéir à la manie pardonnante des maris de théâtre de ces dernières années. […] J’ose croire que l’éminent critique ne parle pas bien sérieusement. […] » C’est peut-être « du théâtre » ; mais, si je n’étais obligé ici à quelque dignité de langage, j’oserais dire que c’est du fichu théâtre. […] Ses représentants pouvaient, quelquefois, être indignes : mais elle était pure, elle ; et qui eût osé jurer, après tout, que son esprit n’était pas en eux ? […] D’abord parce qu’il a été, lui, équitable pour le mari ; puis, parce que, sur ces irréductibles conflits entre époux, il a osé et su dire le dernier mot et le plus secret.
À ce moment, la forme semble s’anéantir et disparaître ; j’ose dire que ceci est le grand trait de la poésie moderne ; sept ou huit fois Burns y a atteint. […] Vraiment on n’ose les citer, tant l’emphase en est grotesque1176. […] Elles sont étranges en Angleterre : un garçon d’environ quinze ans le prit comme victime, et le pauvre petit, incessamment maltraité, conçut « une telle crainte de son bourreau, qu’il n’osait lever les yeux sur lui plus haut que les genoux, et le connaissait mieux par ses boucles de souliers que par aucune autre partie de son habillement. » Dès neuf ans, la mélancolie le prit, non pas la rêverie douce que nous appelons de ce nom, mais le profond abattement, le désespoir morne et continu, l’horrible maladie des nerfs et de l’âme qui produit le suicide, le puritanisme et la folie. « Jour et nuit j’étais à la torture, me couchant dans l’angoisse, me levant dans le désespoir. » Le mal changeait d’aspect, diminuait, mais ne le quittait pas. […] Comment pourrait-il découvrir ou oserait-il montrer la structure des âmes barbares ?
Et, enfin, j’ose le dire une seconde fois, il y avait chez cet historien, chez ce moraliste, chez ce théoricien politique, une âme populaire et un peu, et même beaucoup, de l’âme d’une grisette. […] Eh bien, si j’ose le dire… oh ! […] Emile Pouvillon est une idylle de là-bas, une idylle tragique, et, j’ose dire, majestueuse. […] Salandri donne, çà et là, dans une brutalité et une vulgarité de détails qui sentent un peu trop, à mon gré, le néo-poncif (si j’ose m’exprimer ainsi) créé par le Théâtre-Libre, la grande scène finale est d’une rare vigueur et d’une assez belle originalité. […] Pour cela, les deux pauvres petites osent certaines démarches un peu extraordinaires pour de pures jeunes filles : mais c’est que la situation non plus n’est pas ordinaire et que, si elles sont pures, elles ne sont pas ignorantes, hélas !
Mon cher ami (j’ose encore vous nommer de ce nom, malgré votre dignité nouvelle), cela est grave. […] C’est un de ces regards qui haussent les épaules, si j’ose m’exprimer ainsi. […] J’ose lui dire avec assurance qu’il y a pleinement réussi. […] Napoléon dit, en s’en lavant les mains : « Il n’osera pas » ou : « Osera-t-il ? […] Bernadotte osa accepter
(j’osai son prénom) Que ma flamme vous pénètre ! […] Mais tout en se garant autant que possible des deux extrêmes, je ne sais s’il ne vaut pas mieux encourager les fous qui osent, que les sages qui résistent. […] Clémenceau et de jeter, du sommet de la tribune, les mots que la plupart de ses collègues murmuraient tout bas et qu’aucun d’eux n’osait prononcer. […] Jamais il ne sollicita une place ; et il osa, à plusieurs reprises, tenir tête à l’Empereur. […] Il pousse de temps à autre un gémissement, et ose à peine contempler la ville, en soulevant un coin du rideau.
Sans prétendre me comparer le moins du monde à vous, qui êtes une des plus superbes apparitions intellectuelles du siècle, j’ose pourtant prendre pour exemple la sérénité souriante avec laquelle vous suivez votre route, sans vous soucier de la méconnaissance, des insultes et de l’inintelligence. […] Il est vrai que fréquemment on n’oserait, par respect humain, publier le résultat d’un tel examen, et que ce dernier convaincrait seulement celui-là même qui pourrait y procéder. […] si j’osais t’anéantir en t’écrasant d’amour, et mourir, mourir de ta douleur et de mes délices, et me mêler à ton sang et me fondre en toi ! […] Le baiser dont nous nous baisâmes, lors de cette rencontre, par ce jour de printemps, j’ose à peine parler de la félicité de ce souvenir ». […] Et en face de si magnifiques, de si grandioses résultats, dont l’énumération pourrait s’étendre au double et au triple, on ose parler d’un naufrage de la science et de l’impuissance de la méthode « empirique !
Les lâches tremblant vous l’épée flamboyante du Khéroubim qui barre notre route : ils n’osent pas tuer l’ange… Nous frapperons tous ces Faibles car ces Faibles doivent mourir. […] C’est pourquoi si imparfait que soit mon poème, j’ose espérer qu’on y trouvera un peu le frisson de la vie. […] Au nom de l’Art inviolable, on excommunie le bourgeois assez osé pour lever les épaules devant cette danse de mystagogues. […] Pourtant, oserais-tu dire que ce ne sont pas de braves gens ? […] Je n’osais plus trop me risquer à répondre, lorsque un des jeunes gens se souleva sur ses talons et ses poignets et me sou
De tous nos camarades d’école c’est avec About et Taine celui dont j’ai suivi les progrès avec le plus d’orgueil et, j’ose le dire aussi, avec la plus affectueuse inquiétude. […] À peine ose-t-il résister aux prétendants ! […] On y trouvait une espèce de poésie, je n’ose pas dire factice, mais purement extérieure et puisée à des sources accessoires. […] Robert, je n’ai point osé lui prendre un seul baiser depuis ce jour dans la caverne, et hier devant toi ; si tu m’en donnais toi-même la permission, je ne serais plus ton adversaire. » Robert fut saisi de cette loyauté et de cette bonne foi. […] A ce propos, j’oserai faire remarquer à M.
Et c’est au lendemain du traité d’Aix-la-Chapelle qu’à ce roi victorieux, qui venait de conquérir Lille et la Flandre par Turenne, Vauban et Louvois, d’occuper la Franche-Comté par Condé, qu’il osait dire : Eh ! […] Chacun sait les railleries qu’il osa faire de Scarron, en présence de Louis XIV et de Mme de Maintenon, et sa réponse à la fois si naïve et si maligne, à Racine, qui l’en gourmandait doucement. […] Il n’osait ni blâmer ni approuver son ami, et comment le faire taire ?
Mais là encore, Lacroix arrive seul, dit que dans le moment, Balzac est menacé de Clichy, qu’il n’ose sortir que le soir, et que ces soirs, il les donne à sa maîtresse, à ses amis. […] Il semblait à la jeune fille qu’était Mme Sichel, que la vieille femme avait une haute idée de l’intelligence de son fils, mais qu’elle n’osait le témoigner, par suite de l’autorité, qu’avait sur son esprit un vieil ami, regardant son fils comme un chenapan, qui parlait toujours de venir voir sa mère, ne venait jamais, et ne lui écrivait que pour lui demander de l’argent. […] » Elle me parle d’un roman intitulé : Sarah Grand, qui a abordé la question sexuelle dans le mariage, et qui est beaucoup plus érotico-médical, que ne le sont mes romans, et elle m’affirme que sur les théâtres de Londres, le baiser, la caresse, le pelotage, vont plus loin, qu’on ne l’oserait sur un théâtre, en France.
Qui oserait dire oui ? […] Prenez les romans, les nouvelles de Diderot et ils vous prouveront que celui qui les a écrits répudierait l’école qui ose se placer sous son patronage. […] Nous protestons énergiquement, quand vous osez déclarer que le succès de vos œuvres, y compris celui de Nana, correspond logiquement avec l’avènement de la démocratie car cela donnerait à entendre, comme nous venons de le faire remarquer, que la démocratie n’est que le triomphe de l’abaissement des caractères et de l’abaissement des talents tandis que la démocratie veut, avant tout, l’élévation morale.
— la première misère de sa vie, ose-t-il dire, l’avait avilie dans son cœur et dans son esprit : « Situation radieuse ! […] L’homme qui peut intituler aujourd’hui un livre : Mon franc-parler, est un homme rare et heureux : car il n’y a rien de plus difficile que d’oser dire la vérité, en matière de critique littéraire surtout. […] Voilà le livre qui certes va attirer encore bien des orages sur la tête de son auteur, car il est difficile d’oser dire aujourd’hui sa pensée sans avoir à craindre de se voir insulter, diffamer par ceux-là mêmes qu’on veut servir, de vouloir agir en homme libre, dans un pays qui a tant répété le mot : Liberté, qui s’en est assourdi et qui ne veut plus l’entendre. […] Je n’ose me prononcer absolument ; mais voici le fait. […] On voit s’agiter près de lui son frère le jeune Xavier, qui réjouit tout Chambéry par son audace ; il ose monter en montgolfière, fait qui devait singulièrement étonner les paisibles Savoyards.
« Eh bien, moi dit-il, je demanderai la permission de rester assis, au beau milieu de cette farandole universelle, et de ne pas me lever devant cette Hélène, cette ignoble Hélène de Manon Lescaut… Alfred de Musset, qui a osé traiter de Sphinx cette fille, au cœur ouvert comme la rue et dans lequel il est aussi facile de descendre, a dit là une sottise de poète. […] « Le cardinal Dubois mourut entouré de quelques amis, car il eut des amis. » Sur le régent soupçonné d’inceste : « L’histoire ne peut l’affirmer ; mais c’est son arrêt qu’on en doute… » Sur Marat : « Et maintenant, qu’on l’admire, si on l’ose ; et, si on l’ose, qu’on le méprise… » Le succès des Girondins de Lamartine n’est dû également qu’au style, qui surpasse en énergie tout ce que ce grand poète a pu écrire en prose. […] Il a osé faire ce que ses devanciers n’avaient pas fait. […] Et celui-ci allait soulever à deux mains une belle coupe d’or à deux anses, afin de boire du vin, et la mort n’était point présente à son esprit ; et, en effet, qui eût pensé qu’un homme, seul au milieu de convives nombreux, eût osé, quelle que fût sa force, lui envoyer la mort et la Ker noire ? […] Sacy traduit : « Jacob tressaillez de joie, faites retentir des cris d’allégresse à la tête des nations. » Bossuet ose écrire : Réjouissez-vous, ô Jacob, hennissez contre les gentils », comme il a dit ailleurs : « Les hennissements de la passion. » Bossuet dit le P. de la Broise, semble prêt à faire violence à toute construction française.
Quand les Flamands sont venus, on les a appelés des magots ; et il y a encore bien des versificateurs qui, s’ils l’osaient, le répéteraient tout haut. […] Il est plus intéressant, ce me semble, de montrer au lecteur ses préjugés, ses sentiments, ses passions, ses instincts, de faire pour lui ce que chacun devrait faire pour soi, de lui décrire l’ensemble et le but de son existence, ce qu’il n’avait jamais voulu ou peut-être osé entreprendre. […] L’assurance, le ton professoral de ces littérateurs momifiés en impose ; le public n’ose pas les juger, mais s’abstient. […] J’ai relu quelques bons écrits des esprits anglais là-dessus, les anglais ont toujours compris les choses vivantes, mais je ne parle ici qu’au point de vue de la peinture, je n’oserais dire un mot sur la littérature, mes brosses et mes pinceaux me donnent assez de peine. […] Et si quelques-uns de nos poètes ont la diarrhée des vers comme un affreux petit poète satirique l’a osé dire de notre grand Lamartine, moi, je condense, je ne cheville jamais et dans tous mes vers il n’y a ni un mot de trop, ni un mot de pas assez.
Dans le récit de ce premier procès au nom de la duché-pairie contre M. de Luxembourg, il y a un moment où l’avocat de celui-ci ayant osé révoquer en doute la loyauté royaliste des adversaires, Saint-Simon, qui assistait à l’audience, assis dans une lanterne ou tribune entre les ducs de La Rochefoucauld et d’Estrées, s’élance au dehors, criant à l’imposture et demandant justice de ce coquin : « M. de La Rochefoucauld, dit-il, me retint à mi-corps et me fit taire. […] Et puis, oserai-je dire toute ma pensée et ma conviction ?
Il y en a dans la famille, où le père1329 peut déshériter ses enfants et garde avec eux, jusque dans les plus minces circonstances de la vie domestique, un degré d’autorité et de dignité que nous ne connaissons pas : tel fils malade, absent depuis longtemps, n’ose pas venir voir son père à la campagne sans lui demander d’abord permission ; une servante, à qui je remettais ma carte, refusait de la porter : « Oh ! je n’oserais pas maintenant.
Le vers l’oserait à peine, la prose ne le doit pas. […] Cosette, les cheveux dans le soleil, l’âme dans les chimères, éclairée par l’amour au dedans et par l’aurore au dehors, se pencha comme machinalement, et, sans presque oser s’avouer qu’elle pensait en même temps à Marius, se mit à regarder ces oiseaux, cette famille, ce mâle et cette femelle, cette mère et ces petits, avec le profond trouble qu’un nid donne à une vierge. » X Mais ce qui fait de ce livre un livre souvent dangereux pour le peuple, dont il aspire évidemment à être le code, c’est la partie dogmatique, c’est l’erreur de l’économiste à côté de la charité du philosophe ; en un mot, c’est l’excès d’idéal, ou soi-disant tel, versé partout à plein bord, et versé à qui ?
En ces choses vous monstré-je que celi est bien fol hardi qui se ose mettre en tel peril, à tout autrui chatel ou en péchié mortel ; car l’en se dort le soir là où en ne scet se l’en se trouverra ou fons de la mer3. » Il est fort douteux que ce dernier trait soit une réminiscence classique de l’Illli robur et ces triplex d’Horace, quoique Joinville semble avoir quelque souvenir de l’antiquité, et qu’il compare Louis IX à Titus. […] Est par là vous fais-je voir que celui-là est bien fou hardi qui s’ose mettre en tel péril avec le bien d’autrui, ou en péché mortel ; car on s’endort le soir sans savoir si l’on ne se trouvera pas au fond de la mer. » 4.
Ce qui est universel, ce sont les grandes divisions et les grands besoins de la nature ; ce sont, si j’ose le dire, les casiers naturels, remplis successivement par ces formes diverses et variables : religion, poésie, morale, etc. […] Quoi qu’il en soit, l’immuable ne doit être cherché que dans les divisions mêmes de la nature humaine, dans ses compartiments, si j’ose le dire, et non dans les formes qui s’y ajustent et peuvent se remplacer par des succédanés.
-tu l’as vu un jour ; il nous rencontra près du pont ; il te salua ; mais tu étais trop respecté dans le pays ; il n’osa te parler, et je ne voulus pas te le dire. […] De ceux-là seuls je m’occupe ; ils sont, si j’ose le dire, ma spécialité.
La vraie noblesse de l’intelligence humaine est moins dans les résultats qu’elle obtient que dans le but qu’elle se propose, et dans les efforts qu’elle ose tenter pour l’atteindre. […] Quand on considère cependant l’immense variété des faits et des questions qu’elle renferme, la tâche semble inépuisable, des perspectives infinies s’ouvrent devant le chercheur, et l’on trouve qu’il y a tant à faire, qu’on ose dire que rien n’est fait.
Delaunay, au nom des auteurs et du public, de revenir sur sa résolution et d’oser avoir vingt ans, les vingt ans de son talent. […] C’est avec ce mot de cabale que les amis satisfont la politesse, que les auteurs consolent leur génie, et qu’enfin on fouette le dos des innocents assez niais, pour oser exprimer une opinion qui était la leur, en face d’une salle qui, ce soir-là, était toute aux soins empressés de l’amitié, aux benoîtes ferveurs de la sainte claque.
Mais, en fait de critique, osons procéder comme Ramond ; il n’a pas hésité plus d’une fois à faire ses propres sentiers ; il a, le premier, monté à plus d’une cime.
Nos filles ont été trop considérées, trop caressées, trop ménagées : il faut les oublier dans leurs classes, leur faire garder le règlement de la journée… Il faut encore défaire nos filles de ce tour d’esprit railleur que je leur ai donné, et que je connais présentement très opposé à la simplicité ; c’est un raffinement de l’orgueil qui dit par ce tour de raillerie ce qu’il n’oserait dire sérieusement… Et elle ajoute par un aveu vrai et qui n’a rien d’une fausse humilité : « Que vos filles ne se croient pas mal avec moi, cela ne ferait que les affliger et les décourager ; en vérité, ce n’est point elles qui ont tort. » À partir de ce moment, on entre dans un second effort plus obscur, moins attrayant, et qui même, dans le détail un peu abstrait où nous le voyons de loin, peut sembler décidément austère ; mais Mme de Maintenon, à la bien juger, y paraît de plus en plus méritante et digne de respect et d’estime.
« La seule chose qui est favorable à M. de Blainville, ajoute Dangeau, c’est qu’il aura la queue de son manteau plus longue d’une aune que celle de M. de Sainctot ; et ainsi les charges ne sont pas égales, mais elles ne sont pas subordonnées. » Il semble à quelqu’un de spirituel avec qui je lis ce passage, que Dangeau, cette fois, a été à une ligne près de trouver cela ridicule, mais qu’il n’a pas osé.
Puis, quelques jours après, le comte, de retour, rencontre Adolphe et l’invite à souper avec Ellénore : ils vont se revoir pour la première fois : Il était assez tard lorsque j’entrai chez M. de P…, j’aperçus Ellénore assise au fond de la chambre, je n’osais avancer, il me semblait que tout le monde avait les yeux fixés sur moi.
Plusieurs jours se passèrent sans que M. de Nangis osât faire usage de cette permission ; enfin, dans le même voyage, s’étant trouvé auprès de Bontemps (le valet de chambre) dans le salon de Marly, Bontemps lui dit qu’il savait quelqu’un qui irait bientôt à la chasse à tirer avec le roi.
Oserai-je me présenter dans l’intérieur avec la note infamante d’officier général réformé ?
« L’homme de goût par excellence est celui qui n’a jamais rien admiré. » C’est ce qu’il ose dire, il en veut au goût de ce que son nom est emprunté au moins noble de tous les sens ; il estime qu’il est ignoble pour l’homme de manger, et, en mangeant, de savoir goûter.
Il commence ce pèlerinage, qui asurtout pour objet la Suisse catholique, par une diatribe violente contre Genève, où l’on célébrait, quand il ypassa, l’inauguration de la statue de Jean-Jacques, un sujet tout trouvé d’anathème : « Tristes fêtes dont nous n’osons plus rire, s’écrie l’auteur, quand nous songeons qu’il est une autre vie et que probablement ce malheureux Rousseau, mort dans l’hérésie, sans sacrements et, selon toute apparence, sans repentir, a plus affaire à la justice de Dieu qu’à sa clémence… » Je laisserais ce passage et le mettrais sur le compte de la jeunesse, si les mêmes sentiments d’exécration ne revenaient sans cesse sous la plume de l’auteur ; si, dans ces volumes de Çà et Là où il y a de charmants paysages et de beaux vers pleins de sensibilité, je ne voyais, lors d’une nouvelle visite à Genève (chapitre Du Mariage et de Chamounix), la même répétition d’injures contre la statue et les mêmes invectives contre les Genevois en masse.
Si nous osions donner un conseil à nos orateurs, c’est de le fréquenter un peu. » Ce voisin, ce jour-là, n’est ni plus ni moins que La Bruyère en personne ; et pour chaque député qui paraît à la tribune, dans le jugement et la définition de sa manière et de son caractère, c’est toujours un mot emprunté à La Bruyère qui fournit le dernier trait.
Par lui, Racine certainement, Molière lui-même, je n’ose ajouter La Fontaine, ont été et sont devenus plus correct ?
Il ne faut pas renverser, il faut bâtir ; élevons des édifices où l’humanité viendra goûter des joies pures. » Ce sont là de bien nobles querelles faites à Byron, et que j’oserai dire magnanimes ; et.si les admirateurs du grand barde n’en sont pas satisfaits, que peuvent-ils demander de plus que de voir Gœthe revenir sans cesse sur son jugement et le modifier ?
Le duc d’Otrante reconnut que, dans la branche du gouvernement qui lui était commise, la plus grande faute est de faire un mal qui n’est pas nécessaire à la sûreté de l’État ; et ce grand principe, appliqué dans toute son étendue sous un règne despotique, toutes les fois que la volonté absolue de l’Empereur, à laquelle il a souvent osé opposer de la résistance, n’est pas intervenue d’une manière directe, ce principe a rendu son administration bienfaisante pour la France et l’a fait chérir particulièrement des classes les plus exposées à la persécution. » N’oublions pas encore une fois que cela est écrit en 1814 et avant le rôle de Fouché en 1815, rôle que les honnêtes gens d’aucun parti ne sauraient, je pense, envisager sans dégoût.
Quel fut mon étonnement quand, au lieu de la gravité, de la décence, du soin de l’honneur national, de celui de l’entretien de la bienveillance mutuelle entre les deux nations, qui me paraissaient devoir composer l’ensemble de la manière d’être et des occupations d’un ministre de France, je trouvai un petit monsieur, uniquement occupé de petits vers, de petites femmes, de petits caquets, et qui, dans les petits rébus dont se composaient ses petites dépêches, disait familièrement au duc, en parlant de la certitude d’un éclat entre la France et la Russie : « La Russie amorcera si souvent, couchera en joue la France si souvent, que la France sera forcée de faire feu… » Brunet n’aurait pas mieux dit… Toute sa correspondance est sur ce ton, et présente un mélange fatigant d’affaires traitées avec la prétention au bel esprit du plus bas étage. » C’est ainsi que le prélat diplomate abuse d’un dépôt pour attaquer celui qui le lui a confié ; il le drape à la Figaro, et il ose parler de gravité et de décence !
Que quelqu’un ose soutenir le contraire : cette seconde partie porte en soi une superfétation de développements, et le cadre est dépassé.
Et osera-t-on bien comparer aussi, du plus loin qu’on veuille s’y prendre, à cette dame plus que vulgaire de Tourvoie, Mme de Montesson, qui tenait dans les dernières années la Cour du duc d’Orléans et qui réussit à être épousée ; celle-ci, une vraie madame de Maintenon en diminutif, un parfait modèle de maîtresse de maison dans la plus haute société, faible auteur de comédies sans doute, mais actrice de salon excellente, ingénieuse dans l’art de la vie et dans la dispensation d’une fortune princière, personne « de justesse, de patience et de raison », qui ne pouvant, sur le refus du roi, être reconnue pour femme légitime, sut par son tact sauver une position équivoque, éviter le ridicule et désarmer l’envie, saisir et observer, en présence d’un monde malin et sensible aux moindres nuances, le maintien si délicat d’une épouse sans titre ?
Je laisse les paroles indignes et cyniques qui passent pour avoir été échangées à l’autel même, et que le souffle de l’impure légende a portées jusqu’à nous ; mais j’ose dire que ce n’est point impunément qu’une Constitution nouvelle, fût-elle la meilleure, s’inaugure devant tout un peuple par une momerie ou un sacrilège.
Elle tient encore, si je l’ose dire, de celle de la chèvre125 qui, après avoir bondi d’un saut abrupt, tout d’un coup, au lieu de courir, tourne court au bord du précipice et s’y tient pendante avec hardiesse dans un arrêt net et élégant : de l’autre côté du ravin le promeneur indécis ne sait d’abord si c’est un jeu du rocher, et admire.
Cette sincérité est d’un autre ordre ; elle consiste dans les sentiments qu’on exprime, dans l’ensemble des jugements et des vues ; ne pas se louer directement ni indirectement, ne pas se surfaire, ne pas s’embellir ; s’envisager soi et autrui à un point juste et l’oser montrer.
Pour l’embrasser tout entière, il faudrait à la théorie de l’intelligence ajouter la théorie de la volonté ; si je juge de l’œuvre que je n’ose encore entreprendre par l’œuvre que j’ai essayé d’accomplir, mes forces ne suffiront pas ; tout ce que je me hasarde à souhaiter, c’est que le lecteur accorde à celle-ci son indulgence, en considérant la difficulté du travail et la longueur de l’effort.
Ils ont beaucoup d’art, et n’ont même que de l’art : on n’oserait dire que ce sont vraiment, des artistes.
Fût-elle toujours stérile (ce qui n’est pas), je n’oserais m’en plaindre : car elle comble de joie ceux qui s’y livrent et elle fait du même coup le bonheur des autres par les railleries faciles auxquelles elle prête.
Qui osera dire qu’un tel esprit n’équivaut pas les créateurs ?
Il est aussi deux peintures ; l’une s’appuie immédiatement à la Vie en ses multiples apparences, — c’est le tableau de chevalet, par exemple ; — l’autre, architecturale et décorative, (et la plus hautement esthétique, il faut oser l’écrire), semble ne donner de la Vie qu’un reflet en une synthèse épurée.
Loret, dans La Muse historique, raconte ou invente, sous la date du 14 février 1654, l’anecdote suivante dont le docteur Lolli et le Pantalon Turi sont les héros : Baloardo, comédien, Lequel encor qu’Italien N’est qu’un auteur mélancolique, L’autre jour, en place publique, Vivement attaquer osa Le Pantalon Bisognoza, Qui pour repousser l’incartade, Mit soudain la main à l’espade, Et se chatouillèrent longtemps Devant quantité d’assistants ; Qui, croyant leur combat tragique N’être que fiction comique, Laissèrent leurs grands coups tirer Sans nullement les séparer.
Un enseignement scientifique élémentaire, une éducation pratique et mondaine, un désintéressement croissant des choses inutiles, développeront dans la quasi-unanimité des lecteurs une asipidité dont nous n’avons encore, si j’ose dire, qu’un avant-goût ; et, par loi de contraste et de réaction, les infimes minorités artistiques se feront plus hermétiques, plus hautaines, plus absolument différentes.
S’ils gardent à Marie-Antoinette, sanctifiée par ses malheurs, une sorte de vénération sacrée, s’ils se lamentent sur le sort du roi-martyr, ne peut-on pas douter de leur sincérité quand on lit sous la plume de Villiers de l’Isle-Adam : « Les rois même défunts ont une manière parfois bien dédaigneuse de châtier les farceurs qui osent s’octroyer l’hypocrite jouissance de les plaindre » ?
De même dans la science, les plus importantes découvertes sont souvent abordées d’une manière détournée, oblique, si j’ose le dire.
Ses explications de détail, soit qu’il cherche « l’origine de la connaissance », « l’origine du logique » ou toute autre genèse, font intervenir la sélection naturelle comme un agent dont personne n’oserait nier l’existence ou l’importance.
Allons au fond de notre critique et dégageons toute notre pensée : l’auteur de Raphaël, dans cette partie délicate de son récit, a voulu tout nous dire, et il n’a pas osé.
Que dans ce procédé habituel il n’y eût quelques inconvénients à la longue, mêlés à un grand charme ; que dans cet air si tiède et si calmant, en donnant aux esprits toute leur douceur et tout leur poli, elle ne les amollît un peu et ne les inclinât à la complaisance, je n’oserai le nier, d’autant plus que je crois l’avoir, peut-être, éprouvé moi-même.
Car, remarquez-le bien, même chez l’auteur de Namouna, la fatuité (si j’ose dire) n’est qu’à la surface : il s’en débarrasse dès que sa poésie s’allume.
Je ne les pouvais couvrir, je ne les osais excuser, et elles retombaient nécessairement sur la Fronde.
Jean-Jacques Rousseau n’aurait pu l’entendre, j’ose le croire, sans éclater en sanglots, et peut-être tomber à genoux.
Je n’oserais pas contester ce tableau si saisissant et si spécieux, et qui paraît vrai dans sa généralité ; mais d’une part Gall voyait tout avec son imagination, et d’un autre côté, quand on a quelque expérience de ces questions, on sait qu’il est bien rare que les faits s’y présentent avec cette parfaite simplicité.
S’il est intéressant de savoir ce qu’a fait Alexandre, qui oserait dire qu’il est insignifiant de savoir ce qu’Aristote a pensé ?
J’ose recommander très-particulièrement M. le docteur Ernesti, à Leipsick, homme d’un mérite éminent, qui, ayant été toute sa vie occupé de l’éducation de la jeunesse dans toutes les espèces d’écoles, est plus capable que qui que ce soit de dresser un plan excellent.
Armand Silvestre n’oserait, à l’exemple de Béroalde de Verville, intituler un recueil de contes le Coupe-cul de la mélancholie ; mais volontiers il reprendrait le Triomphe de l’Abbaye des Cornards.
Le bruit en avait couru d’avance parmi les tribus désolées : c’était comme un vague pressentiment auquel on osait à peine se confier, et qui néanmoins suffisait déjà pour alléger le poids d’immenses calamités.
Le gardien du cap des tempêtes, le dieu du vertige au milieu des précipices des Alpes, le génie de Rome défendant le passage du Rubicon, sans doute sont de belles inventions d’une muse qui ne prétendait point à la croyance des peuples ; mais comment Voltaire a-t-il pu oser nous présenter le Fanatisme et la Politique ?
On n’a pas oublié non plus le crachat dont un soir, en plein salon, — elle étoila le visage surpris du capitaine d’Arpentigny parce qu’il avait osé vanter devant elle Mme George Sand.
Hédouin voulaient tout simplement mettre bas le Christianisme, et sans le Christianisme, Sterne était impossible, il n’aurait jamais existé… D’autres que nous l’ont dit, mais il faut bien le répéter, puisqu’on ose des confusions si déplorables : Sterne est un génie chrétien par excellence.
Elle est par sa nature, essentiellement sur-vitale, si j’ose m’exprimer ainsi, parce qu’elle admet, à l’inverse du christianisme, que la vie ne peut pas ne pas être un bienfait.
Ou bien, donc, la sociologie se résoudra à ne rien expliquer, ou elle osera employer les procédés déductifs : elle sera déductive ou ne sera pas.
Parfois Horace est plus ouvertement flatteur, et il ose célébrer Octave comme le héros de Rome.
L’étudiant genevois n’osa pas plus aborder le « critique de la Revue des Deux Mondes » qu’il n’eût fait du roi des Français. […] Car Amiel a bien emporté des lettres de recommandation, mais il n’ose pas s’en servir. […] ne deviez-vous pas — je l’ose dire à peine — Voir de quelle hauteur mon rêve tomberait ? […] Elle ne le désapprouve pas, « et je n’ai pas osé, confié-t-il aux roseaux du Journal, deviner ce que cela signifiait. […] Le monde Teste ne diffère pas en nature du monde Leibnitz, où le philosophe a poursuivi sa caractéristique universelle, ni même de ce monde Flaubert, où le Rouennais situait son Dictionnaire des Idées reçues, qui, s’il était achevé, disait-il, ferait qu’on n’oserait plus parler, de peur de, dire quelque chose qui s’y trouve.
Il avait trouvé un homme d’esprit assez confiant en lui-même pour oser penser avant l’empereur, assez peu modeste pour préférer toujours son opinion à l’opinion impériale et assez hardi pour la dire, et il autorisa cet homme à traiter, dans sa correspondance, le souverain, comme un journal honnête et franc traite ordinairement le public, en lui disant la vérité toute nue, sauf à traiter le public dans le Journal des Débats qu’il lui confia plus tard pour un moment, comme on traite ordinairement le souverain, plus souvent trompé qu’éclairé et endormi qu’averti. […] N’osa-t-il pas répondre un jour à l’empereur qui, en parlant de ses préventions contre le Journal des Débats, avait dit qu’il ne revenait point de préventions une fois conçues : « Sire, quand on est né sur le trône, on n’a point de préventions conçues, mais des préventions reçues, car on ne connaît pas même ceux contre lesquels on les nourrit. » — « Né sur le trône passa à merveille », continue M. […] Émery, le vénérable directeur du séminaire Saint-Sulpice qui, avec une intrépidité si calme et si sacerdotale, osa tenir tête à l’empereur, quand celui-ci se laissa emporter aux projets les plus fougueux contre le pape Pie VII ; de M. […] Le rôle que prit l’empereur dans les questions universitaires, vis-à-vis de Fontanes, est précisément celui qu’on lui a vu jouer envers Fiévée dans les questions de presse ; il a l’air de ne point oser tout ce qu’il voudrait. […] Pauvre, inconnu, désappointé tant de fois, je n’osais compter sur le succès d’une démarche que personne n’appuyait.
Ceux-là savaient tout, pouvaient tout, osaient tout. […] Nous n’oserions l’affirmer. […] Il eut pour alliés des écrivains comme Voltaire, Diderot, Rousseau, Mercier, toujours prêts à blâmer les acteurs qui sortaient trop visiblement de leur rôle, ou à louer ceux qui osaient sacrifier la tradition à la vraisemblance. […] Ramballe, qui s’en aperçoit, ressaisit Pierre par sa franchise affectueuse, par sa sympathie chaude et reçoit de lui, sans grand effort comme aussi sans grand intérêt, la confidence d’un amour que Pierre osait à peine s’avouer à lui-même. […] Pour oser rapprocher, ne fût-ce que par certains côtés, Millet de Courbet, il faut aller, nous le savons, contre des opinions reçues.
Un des premiers parmi nous, il a osé faire soupçonner que la vieille littérature anglaise était la plus originale et la plus forte des littératures de l’Europe moderne. […] Cependant vous n’oseriez prendre aucun de ces poètes pour types du génie anglo-saxon, vous craindriez de faire injure à ce génie, dont ils ne manifestent chacun qu’un seul instinct. […] Osons dire enfin toute la vérité ; le génie de Shakespeare n’a rien à en redouter. […] Nous n’oserions dire qu’il ait eu tort au point de vue de la scène. […] Oserai-je dire qu’il en est un peu du génie de Shakespeare par rapport à la critique comme de la théologie de saint Thomas par rapport à l’incrédulité.
C’est pourquoi j’ose vous l’offrir, cher monsieur, comme un trop faible témoignage de gratitude, d’estime et de sympathie. […] Les jeunes feuilles des tilleuls ont froid et n’osent s’ouvrir. […] Ils avaient besoin d’un ouvrage de ce genre pour continuer Anquetil ; mais ils n’osaient en confier l’exécution à un inconnu. […] Mais qui oserait soutenir que le Napoléon de Lanfrey est aussi vrai que celui de M. […] Elle ose trouver fades les romans d’Auguste Lafontaine, qui faisaient les délices de sa belle-mère.
Qui oserait dire qu’à présent nous manquions de mots, de tours ? […] Or, au-delà des documents que le biographe n’ose guère dépasser, il apercevait tout un monde. […] Je vois (si j’ose ainsi parler) d’ici Gabriel Monod ! […] Il lui manque l’assurance de ne pas défendre Dieu malgré Dieu ; et, dans le doute qui le martyrise, il n’ose pas recevoir l’hostie. […] Je n’osais pas bouger.
Qui osera l’arracher à cette illusion consolante ? […] Je n’ai pas osé dire non. […] Daudet n’a pas osé pousser jusque-là sa triste héroïne. […] D’angoisse en angoisse, d’épouvante en épouvante, ils finissent par se tuer, incapables de subir longtemps un supplice tel que le Dante n’avait pas osé l’imaginer pour son enfer. […] C’est quand on procède à l’instruction du crime que les fils se multiplient et se croisent, et avec quel art scientifique, serions-nous tenté de dire, si nous osions rapprocher ces deux mots !
Je ne puis me lasser de les relire, avec la même joie, la même curiosité, le même enthousiasme… Comment, après de tels précédents, oser décider de l’avenir de tel ou tel roman contemporain, du jugement que portera sur lui la postérité ? […] Victor Giraud, une date considérable dans l’histoire de la littérature romanesque, et même de la mentalité française. » Voilà qui pour nous — j’ose écrire pour moi — est au premier abord déconcertant. […] Oserai-je confesser que, pour la série des Tartarin — même le premier, le vrai, le seul, le Tartarin de Tarascon — je ne partage qu’à demi l’estime générale. […] Oserais-je dire que je préfère ce roman au Tartarin de Daudet ? […] Ce désir, elle n’y cède pas, elle n’ose y céder, elle le refoule.
L’érudition moderne s’est efforcée de mettre ces poètes en leur milieu, dans leur époque ; avec raison, certes ; ce n’est pourtant qu’un commencement ; si l’on cherchait une fois les conflits de leur personnalité avec l’esprit et avec les formes de leur époque, j’ose croire qu’ils y gagneraient. […] J’ose d’autant plus le dire, que j’ai pour lui, depuis vingt-cinq ans, un culte particulier. […] Pour nous qui n’avons plus besoin de soutenir Hernani contre les classiques, qui voyons Ruy Blas alterner avec Andromaque au Théâtre-Français, nous osons dire que le théâtre de cette période est tout, sauf dramatique.
Il n’en restera pas moins dans l’Histoire littéraire une lacune que lui seul, qui aimait tant l’exactitude, aurait pu combler, et l’on n’ose y toucher après lui, même quand on l’a bien connu, parce que la palette intime de l’écrivain, celle qui rendrait le mieux le ton et les nuances de ses sentiments et de son caractère, a été brisée. […] Un travail bibliographique sur mon compte est donc chose toute nouvelle, et je n’oserais vous promettre de l’exécuter moi-même convenablement, surtout dans l’état de santé où je suis depuis plus d’une année.
Ballanche, redescendu dans les obstacles de la vie, traça ce sixième fragment sur Orphée perdant Eurydice que tout à l’heure il guidait sans oser la voir, et cet autre fragment où il nous montre la rencontre pudique d’Hermann et de Dorothée près du ruisseau, et de si aimables présages n’aboutissant qu’à des larmes ? […] L’heureux séjour d’Orphée en Samothrace, son chaste hymen avec Eurydice, ses entretiens avec la Sibylle mourante, son intervention au milieu des farouches combats, son refus de l’amour d’Érigone, ses bienfaits partout présents, sa personne toujours lointaine ou passagère, suffiraient à justifier les naïves paroles dans lesquelles le poëte se rend témoignage à lui-même : « Qu’il me soit permis d’affirmer que l’inspiration à laquelle j’obéis est plus près que celle de Virgile des inspirations primitives… Oui, j’ai plus que Virgile, incomparablement plus, le sentiment de ces choses que j’oserai appeler divines. » — « N’y a-t-il pas une voix dans les choses ?
Nous ne le blâmons pas trop sévèrement de cette audace d’esprit que Machiavel, Bossuet, Mirabeau et Danton ont affichée avant lui ; historiquement cette théorie tranche tout ; elle semble élever l’écrivain à la hauteur de la Providence, qui crée le droit des supériorités dans les hommes prédestinés aux grandes choses, et qui semble donner les masses subalternes en propriété à ses élus ; mais, moralement, cette théorie contient tous les périls et tous les crimes ; car, si vous reconnaissez le génie pour droit et l’ambition heureuse pour titre, quel est l’homme orgueilleux qui ne se croira pas du génie, et quel est le scélérat qui ne se sentira pas l’ambition de tout oser et de tout prendre ? […] Écoutons-le, mais ne cherchons pas à le comprendre, ou plutôt comprenons qu’il n’ose pas dire ici toute sa pensée, et que, voulant ménager en sa personne le renom d’écrivain révolutionnaire et le renom d’homme d’État monarchique, il accorde un peu aux républicains, un peu aux royalistes, pour conserver dans les deux partis la popularité de ses jeunes opinions et la popularité de ses idées mûres dans son âge plus avancé.
Nous le connaissons vers par vers et jour par jour comme s’il était des nôtres ; nous avons vécu dans sa familiarité, quant à moi, qui me suis assis vingt fois, son livre à la main, sur les décombres de sa petite métairie d’Ustica, dans sa vallée de la Digentia, toute semblable à la vallée de Saint-Point, quelquefois sous les oliviers trempés de l’écume de l’Anio, sur les voûtes recouvertes de gazon de son cellier de Tibur, il me semble qu’Horace a été un des amis de ma jeunesse, non pas précisément un de ces amis sérieux, chéris ou estimés, dont le souvenir fait monter la religion au cœur et les larmes aux yeux ; non, mais un de ces amis légers, insoucieux du lendemain, amoureux de toute ombre qui passe, convives de tout festin sous le lambris ou sous le feuillage, amis qu’on se repent d’aimer parce qu’on ne les estime pas jusqu’au cœur, mais qui peuvent se passer d’estime tant il y a d’attrait dans leur nature, de grâce dans leur faiblesse, et, si l’on osait le dire, tant il y a d’innocence dans leur corruption. […] XIII Cependant Horace s’éleva au-dessus du temps et de lui-même dans un suprême adieu lyrique à la liberté de sa patrie ; il osa la publier en ce temps-là, au moment où il allait lui-même se décourager de la république.
— Elle brava le Forceur-des-tempêtes : — quand, le plus dûrement, soi même, il se forçait, — ce que lui, le Maître du combat, — désirait faire, — mais s’interdisait, — se violentant, — elle, pourtant, confiante, — elle osa, la présomptueuse, — l’accomplir pour soi, — Brünnhilde, en le brûlant combat. — Le Père-de-la guerre — a puni la Vierge ; — en son œil il imprima le Sommeil ; — sur un rocher elle dort, fortement ; — elle s’éveillera, — la Consacrée, seulement, — pour aimer un homme, en femme. — La questionner me servirait-il ? […] — celui qui osa l’action, — s’irrite de l’action ?
» Donc, si Beethoven a osé employer le pur langage de la musique, Wagner, moins confiant en nos intelligences, ou plus soucieux d’être davantage compris, Wagner dira : « Aidons comprendre aux hommes ! […] il s’arrêtait ; n’osait-il ouvrir, en un drame autrement ordonné, la barrière aux musiques d’exubérantes ?
Toutes ces scènes sinistres et odieuses dont il serait facile de grossir le nombre, louchent à l’horrible, dépassent presque la satire et montrent jusqu’où Dickens osait aller dans l’expression de sa haine et dans l’évocation audacieuse de celle d’autrui. […] Par un manque de sérieux, une timidité pudibonde, plus native qu’acquise et dans laquelle il eut la faiblesse de se laisser confirmer par l’opinion publique, l’écrivain anglais n’osa même essayer l’application de sa morale d’innocence à cette pierre de touche de toute éthique, les relations entre les deux sexes.
La nation lui sait gré de lui avoir enseigné à oser croire à son propre génie. […] une lettre de madame de Sévigné à tous les romans de mademoiselle de Scudéry, qu’elle appelait Sapho, et dont elle regardait d’en bas briller la gloire sans oser élever son ambition si haut ?
Qui peut douter que ces beaux vers ne fussent un encouragement à Mme de Maintenon d’aspirer au trône, et une insinuation au roi d’oser l’y faire asseoir. […] Il encourage Esther à tout oser pour renverser ce ministre et sauver le sang de son peuple.
Le dessous des galeries est très-vaporeux ; si j’osais hazarder une observation, je dirais que la partie inférieure des voûtes à gauche sur le devant m’a paru seulement un peu trop obscure, trop noire. […] Mais s’il ose faire survenir la mère et lui montrer son fils prêt à tomber et à se briser à ses pieds, qu’il le fasse.
Mais comment oser dire cela ?
. — Tais-toi, sotte, reprend le Coq ; Renart n’a pas les os si durs qu’il ose se mucher ici ; notre palis n’est pas si vieux qu’il l’ait pu déjà mettre en pièces.
Vers le même temps, un peintre de Neuchâtel, Meuron, osait, le premier, tenter de rendre sur la toile « la saisissante âpreté d’une sommité alpine, au moment où, baignée de rosée et se dégageant à peine des crues fraîcheurs de la nuit, elle reçoit les premiers rayons de l’aurore ».
Les navires approchent, et lancent avec des machines, de dessus leur tillac, des bordées de pierres ; arbalètes et flèches pleuvent de tous côtés ; on essaye d’appliquer des échelles ; mais les galères ne savaient et n’osaient prendre terre.
La Bruyère, dans son discours de réception à l’Académie, parlant de Fénelon, qui était le dernier académicien reçu et qui, trois mois avant lui, avait fait un charmant discours, disait : … Après ce que vous avez entendu, comment osé-je parler, comment daignez-vous m’entendre ?
En général, c’est un mérite de M. de Meilhan, il ne parle de Louis XIV et de cette époque qu’avec respect et en connaissance de cause ; dans un parallèle entre Louis XIV et Henri IV, il ose, malgré l’engouement de l’opinion, donner la préférence au premier ; il parle de Mme de Maintenon sans l’injurier jamais et, au contraire, en l’admirant.
Pour moi, comme je suis sans ambition et ose dire qui la méprise, je compte les jours et philosophe au milieu du bruit, plus désireux de la retraite que d’aucun accroissement de charges et d’honneurs, etc.
N’oseriez défier en guerre La rivière des Gobelins !
Je n’oserais dire que Mme du Châtelet ou Mme de Staal de Launay n’eussent pas gardé, en écrivant, quelque chose de la science et des études qui les occupaient chacune dans son genre et à sa manière.
Moi, j’ose penser qu’un tel homme, doué de cette réunion d’avantages, serait tellement heureux que l’on ne peut se faire l’idée d’une situation plus agréable, même en paradis ; il n’y manquerait que la durée pour avoir ainsi le ciel sur la terre.
Elle était, à l’époque où Marolles y fut nommé abbé, dans un grand désordre, plus grand qu’il ne l’a osé indiquer dans ses Mémoires imprimés.
Daubenton seraient bien aises de vous voir en ce pays-ci (à Paris où elle habitait ; elle était allée faire un voyage en Bourgogne) ; mais vous savez, bonne amie, qu’ils ne sont ni l’un ni l’autre bien ardents sur rien. » C’est dans la même lettre qu’on lit encore : « Dites-moi, jour par jour, bonne amie, votre marche et les lieux que vous habitez ; je donnerais toute ma science pour savoir seulement où vous êtes, et tous mes papiers pour un billet de vous où serait tout ce qui ne s’écrit pas. » Dans cette branche toute particulière et la plus fleurie de la Correspondance, Buffon, qui n’a guère moins de soixante-six ans, paraît un peu amoureux de la jeune dame, si l’on ose bien hasarder (en tout bien, tout honneur) une telle conjecture ; il est galant, il fait l’aimable, il y réussit.
Et qui donc oserait dire que M. de Rovray n’est point de Paris ?
Quel rôle pour de jeunes esprits intelligents, et (j’ose le dire à mon tour) pour des esprits généreux, qui, laissant là les questions secondaires de mécanisme et se dégageant des formules, embrasseraient dans sa vérité leur époque entière, pour étudier, en l’acceptant, tout ce qu’elle contient !
honneur à ceux qui virent le mal, qui osèrent le sonder et le dénoncer, fussent-ils impuissants à le guérir !
On la soupçonne alors et un peu tôt de ce qui n’est pas encore ; elle est questionnée sévèrement par l’évêque Simon Théodorsky sur ce qui s’est passé : « Mais comme il ne s’était passé rien du tout, il fut un peu penaud quand il vit qu’avec l’ingénuité de l’innocence on lui dit qu’il n’y avait pas même l’ombre de ce que l’on avait osé supposer. » Cette innocence injustement soupçonnée ne s’y laissera pas prendre à deux fois, et la revanche sera de la bonne sorte.
Ce n’est pas tant d’avoir évité de nommer les oiseaux qu’il décrit, d’avoir dit : L’oiseau sur qui Junon sema les yeux d’Argus, pour le paon, ou L’aquatique animal, sauveur du Capitole, pour l’oie ; ce n’est pas tant de n’avoir osé nommer la cage que comme un toit d’osier où pénètre le jour , et de ne s’être point résigné à appeler un chat un chat, mais L’animal traître et doux, des souris destructeur ; ce n’est pas tant de ces travers de détail et de tous ces méfaits de fausse élégance que je le blâme ; c’est surtout d’avoir mal observé et connu son sujet.
Qu’il ose y plonger.
Moi-même, si parva licet…, si j’ose, en présence de tant de noms et d’œuvres d’alors, me rappeler tout bas ce premier souvenir de ma vie littéraire, lorsqu’en 1824 j’entrais comme apprenti rédacteur au Globe, que me demandait comme échantillon, comme premier essai de ma plume, mon ancien maître M.
Viollet-Le-Duc de la ville éternelle peut sembler un peu légère à ceux qui ont en ces matières assez de religion pour ne pas oser s’avouer à eux-mêmes tout leur sentiment, la seconde impression est la bonne, la véritable, et il l’a reproduite dignement, en mainte page de son œuvre, par le crayon ou par la parole.
Il est croyant (puisque j’ai touché ce mot) d’une façon bien remarquable, et que j’ose dire singulière chez un aussi grand esprit et chez un génie de cet ordre ; il l’est, ce me semble, sans avoir eu aucune peine pour cela, sans avoir jamais, à aucun temps, admis ni connu le doute.
Ses vers, — il n’a pas osé tout réimprimer dans ce dernier recueil ; je le conçois et je le regrette.
Le poëte se compare tout d’abord à cet ange de Klopstock, Abbadona, entraîné dans la révolte de Lucifer et qui était resté, jusque dans l’Enfer, triste et malade du regret des cieux : Sire, quand Lucifer, le prince de lumière, Se lassant de marcher dans sa gloire première, Ivre d’orgueil, osa, contre celle de Dieu, Déployer dans le ciel sa bannière de feu, Parmi les révoltés de la sombre phalange Un esprit se trouvait, doux et sensible archange, Qui, découvrant soudain dans le camp des élus Un ami qu’il aimait et qu’il ne verrait plus, Pencha son front, brisé d’un désespoir sublime, Et s’en alla pleurer dans un coin de l’abîme.
Cambouliu, professeur à la Faculté des Lettres de Montpellier, a écrit à l’un de ses amis, à l’occasion de ce mien jugement : « … Il n’y a rien en effet chez les Félibres de comparable à Mistral (à qui j’ai consacré cet hiver une leçon qui a eu un grand succès), et Jasmin a largement obtenu tout ce qu’il méritait, — j’oserai même ajouter plus qu’il ne méritait ; car je vous avoue franchement que je ne le tiens pas en très haute estime et que je ne puis guère voir en lui qu’un écolier de nos maîtres parlant patois ; je mets une grande différence entre lui et l’auteur de Mireïo, qui est, celui-là, un véritable poëte.
En général, beaucoup de ces romances de Millevoye, de ces élégies de son premier livre où il est tout entier, et j’oserai dire sa jolie pièce du Déjeuner même, me font l’effet de ce que pouvaient être plusieurs des premiers vers de Lamartine, de ces vers légers qu’à une certaine époque il a brûlés, dit-on.
Elle l’avait ramenée à Paris, où elle n’osait la laisser sortir sans précaution, de peur des entreprises de son mari pour recouvrer sa femme.
Toutefois Du Bellay n’avait pas l’étoffe d’un chef d’école : il avait trop de délicatesse, trop de facilité à suivre tous ses goûts ; pas assez d’orgueil, de force et, si j’ose dire, de volume.
Alphonse Daudet a beaucoup d’esprit et qu’il est toujours à l’affût, il s’arrête et s’intéresse à des détails qui nous échapperaient ou que nous remarquerions à peine ; il nous fait trouver curieuses par la façon dont il nous les présente des choses tout ordinaires et qui nous auraient sans doute faiblement frappés ; il a, si j’ose dire, un merveilleux flair des petits drames obscurs dont fourmille la réalité.
Et même, si j’ose dire toute ma pensée, lorsque Dorine répond : Vous êtes donc bien tendre à la tentation, Et la chair sur vos sens fait grande impression ?
Et, lorsque ses représentants ont de la valeur, ils peuvent oser des interruptions, faire accepter des mots qui, lancés par d’autres, seraient couverts par les hurlements parlementaires.
Est-il un de nos gentilshommes qui ose assumer la royale et douloureuse attitude de Villiers de l’Isle-Adam ?
J’ai résisté à d’inévitables tentations d’infidèles splendeurs, car sans cesse l’esprit du vieux moine touche à d’étranges beautés, que sa discrétion n’éveille pas, et toutes ses voies sont peuplées d’admirables, rêves endormis, dont son humilité n’a pas osé troubler le sommeil. » M.
Ils osent parler de vertu.
Toutefois, avec Molière et La Fontaine parmi nos classiques du Grand Siècle, c’est assez pour que rien de légitime ne puisse être refusé à ceux qui oseront et qui sauront.
Mais déjà une nouvelle passion est éclose dans le cœur ouvert de Marie Stuart ; celui qu’elle choisit cette fois n’a ni la faiblesse de Darnley, ni les grâces de salon d’un Riccio : c’est le comte de Bothwell, âgé de trente ans, laid, mais à l’aspect martial, brave, hardi, violent et capable de tout oser.
Madame aimait l’esprit, le distinguait en lui-même, l’allait chercher, le réveillait chez les vieux poètes, comme Corneille, le favorisait et l’enhardissait chez les jeunes, comme Racine ; elle avait pleuré à Andromaque, dès la première lecture que le jeune auteur lui en fit : « Pardonnez-moi, madame, disait Racine en tête de sa tragédie, si j’ose me vanter de cet heureux commencement de sa destinée. » Dans toutes les cours qui avaient précédé de peu celle de Madame, à Chantilly, à l’hôtel Rambouillet et à l’entour, il y avait un mélange d’un goût déjà ancien, et qui allait devenir suranné : avec Madame, commence proprement le goût moderne de Louis XIV ; elle contribua à le fixer dans sa pureté.
Le comte d’Argenson, bien qu’il fût caustique d’esprit, était de ceux, on le voit, qui dans le malheur tournent à l’élégie et à l’attendrissement ; il en est d’autres qui, de colère, auraient montré le poing à cette statue du roi, et l’auraient peut-être mise à bas s’ils l’avaient osé : « Je ne suis plus ministre, donc tu ne seras plus roi. » C’est ainsi que quelques-uns ont raisonné.
Il y a l’auteur tragique qu’on ne lit plus et qu’on peut difficilement relire, celui qui eut l’idée d’introduire sur notre théâtre des imitations de Shakespeare sans savoir l’anglais, et qui, dans l’avertissement qui précède son Hamlet (1770), disait naïvement : Je n’entends point l’anglais, et j’ai osé faire paraître Hamlet sur la scène française.
C’est ainsi encore que, dans la religion et dans le culte d’adoration publique que rendent les peuples à la Divinité, il y a, si j’ose dire, le royaume de la Prière et des Hymnes.
Il s’en tenait aux analogies mondaines et de surface, et, si j’ose dire, aux ressemblances parisiennes qu’amenaient ces noms d’Aspasie ou d’Alcibiade, et il n’entamait pas les comparaisons du fond.
L’homme sait qu’il agit en vertu, j’oserais le dire, d’une délégation du Créateur ; et c’est cela seul qui fonde le précepte d’honorer son père et sa mère.
Les petits poètes du temps qui lisent leurs vers dans les salons de manière à faire bailler les chaises, les musiciens qui osent s’entendre, et, qui sait ?
… J’ose revenir à cette idée, et ce sera ma conclusion : ce roman renferme surtout une œuvre de théâtre.
Mais ce que j’ose reprocher nettement à Hippolyte Babou, c’est de n’avoir pas, avec deux ou trois phrases négatives, nettement mis à terre le faisceau de faits que Nicolardot a cités.
Et j’oserai avancer que la perfection de cette forme littéraire exige tant de conditions et de si subtiles, qu’il faut, pour la comprendre et pour la goûter complètement, pour en tirer un autre profit que celui, très banal souvent, d’une anecdote, une intelligence déjà mûre et ornée.
Mais quand à Mme de Longueville ou à Mlle de La Vallière on ose comparer Mme de Maintenon avec les calculs sans fin de sa prudence mondaine et les scrupules tardifs d’une piété qui vient toujours à l’appui de sa fortune, nous protestons de toute la puissance de notre âme.
Weiss veut découvrir ce fond chez Molière lui-même : je suis plus respectueux et n’ose aller jusque-là. […] Agréable soirée, lundi dernier, à l’Odéon ; spectacle non pas endormant, mais un peu berceur, si j’ose dire. […] Il est si malheureux qu’il se tuerait s’il osait : de là le fameux monologue. […] Il voudrait la reprendre, mais n’oserait pas, crainte du ridicule. […] Dumas s’est montré timide, qu’il a reculé devant sa propre thèse, qu’il n’a point osé en tirer les conséquences logiques, qu’il les a adroitement et lâchement escamotées.
L’homme peut dire : Ma raison ; rendons-lui cette justice qu’il n’a jamais osé dire : Ma vérité. […] On n’avait pas osé admettre l’existence d’un Dieu invisible, et voilà maintenant qu’on aspire à entrer en communication immédiate avec lui, tout comme avec les objets sensibles et les objets de la conscience. […] Il faut être bien sûr de ses attachements pour oser les mettre à l’épreuve de la réflexion. […] Sans elle, il ne l’eut jamais conçu ; mais avec cet idéal, il la juge elle-même, il la rectifie, et il ose entreprendre de se mesurer avec elle. […] J’admire en vérité qu’on ose parler aujourd’hui si légèrement de Puget et de Girardon.
Il n’osa pas se présenter au roi, craignant « d’avoir mauvais visage de son seigneur. » Il se sauva, d’abord en Béarn, auprès de Marguerite, puis à Ferrare, auprès de la duchesse Renée de France qui était dévouée à la nouvelle religion. […] Venons au point, au point qu’on n’ose dire. […] Oui, le personnage qui conduit Pantagruel et ses amis vers la Dive Bouteille leur commande de mettre des pampres dans leurs souliers pour marquer « que le vin leur est en mépris et par eux conculqué et subjugué » ; — mais elle leur fait manger à chacun trois raisins et les fait passer sous l’arc de Bacchus, « ce que n’eût osé faire le pontife de Jupiter. » — Jusqu’ici les choses se balancent. […] On prie Dieu pour s’unir à lui, « pour s’accoutumer à avoir en lui notre refuge comme au port unique de salut », pour, non pas le faire témoin de notre âme, il l’est sans cela ; mais nous rappeler sans cesse qu’il en est témoin, « pour que notre cœur ne soit ému d’aucun désir duquel nous ne l’osions faire immédiatement témoin, déployant tout notre cœur devant lui. » La prière est humiliation devant Dieu, élévation à Dieu. […] Le vrai en tout cela, c’est que la doctrine de Calvin se cache en germe dans le christianisme des premiers siècles, et dans les parties métaphysiques les plus abstraites du christianisme des premiers siècles, mais ne l’est pas ; que Calvin la cherche dans tous les Pères, ne la trouve que dans quelques-uns, et mêlée, dans saint Augustin même, s’irrite de ne pas l’y trouver, sans vouloir briser absolument avec les anciens docteurs, et tantôt accuse les Pères de ne l’avoir pas osé exprimer, tantôt se console de ne pas l’y trouver en l’y mettant, le tout avec des souplesses de dialectique un peu inquiétantes.
Je n’oserais donner encore de conclusion ferme. […] Je n’oserais affirmer que ce procédé n’a jamais été employé dans les représentations symboliques ; mais certainement on en trouverait peu d’exemples. […] Il n’osera rien changer à son modèle. […] Puis on ose détacher un peu les bras du corps, les replier légèrement dans une position plus aisée. […] Je n’oserais l’affirmer.
Ce ne fut point à sa pédanterie dramatique que Ben-Johnson dut alors l’empire que, du temps de Shakespeare, il n’osait prétendre à partager. […] On réimprimait donc et on commentait Shakespeare ; mais les mutilations de ses œuvres obtenaient seules les honneurs de la scène ; le Shakespeare amendé par Dryden, Davenant et tant d’autres, était le seul qu’on osât représenter, et le Tatler ayant à citer des vers de Macbeth, les prenait dans le Macbeth corrigé par Davenant. […] Cependant elle demeurait stérile, et Shakespeare régnait, dit sir Walter Scott, « comme un prince grec sur des esclaves persans qui l’adorent, mais sans oser imiter son langage. » Un nouvel élan ne peut être uniquement dû à d’anciens souvenirs ; une ancienne époque, pour porter de nouveaux fruits, a besoin d’être de nouveau fécondée par un mouvement analogue à celui qui lui valut jadis sa fécondité. […] Dans l’imitation du style antique, les statuaires modernes n’éprouvent d’autre gêne que la difficulté d’atteindre à sa perfection : le plus fervent et le plus puissant adorateur de l’antiquité n’oserait, sur le théâtre le plus soumis, reproduire tout ce qu’il admire dans une tragédie de Sophocle. […] Arrêté sans doute par ces conditions dont la sévérité ne se révélera qu’au talent qui saura les remplir, l’art dramatique, en Angleterre même, où, sous la protection de Shakespeare, il aurait la liberté de tout entreprendre, ose à peine aujourd’hui s’essayer timidement à le suivre.
Et quand on a fait la part de ce que ses inventions contiennent de « romanesque » et de « mélodramatique » oserons-nous dire qu’après cent cinquante ans écoulés, son Alzire, et surtout sa Zaïre, nous arrachent encore de vraies larmes ? […] Osons enfin le reconnaître : l’Esprit des lois est un livre manqué, et on ne pourra jamais le réduire à l’unité d’un seul plan, par la bonne raison que Montesquieu n’a lui-même jamais bien su ce qu’il y avait voulu faire. […] Où serait la raison qu’un particulier ose en sacrifier tant d’autres à soi seul, et que la société ne pût par sa ruine racheter le repos public ! […] Ils n’ont vu qu’un préjugé, et un sot préjugé, pour ne pas dire une hypocrisie pédantesque, dans l’admiration que de rares humanistes osaient encore professer pour Virgile et pour Homère. […] Nous cependant, qu’elles n’ont pas entretenus, — je veux dire hébergés, meublés et nourris, — et qui ne leur devons donc pas la même reconnaissance que d’Alembert et Marmontel, nous oserons dire que leur rôle, puisqu’il faut bien convenir qu’elles en ont joué vraiment un, a été désastreux.
Il y a six siècles, un autre poète, après avoir décrit avec magnificence les attributs du Souverain Être, osa réfléchir sa conception dans une grande image. […] N’est-ce pas une misère de n’oser plus déclarer ses sympathies et de refouler ses admirations, parce que, par l’effet des circonstances nouvelles, elles semblent devenues contraires à l’intérêt du parti dont on a pris la chaîne ? […] C’est vers 1817 que Béranger, de son propre aveu, osa définitivement affranchir la chanson. […] Enhardi par le succès, il osa davantage et écrivit Le Dieu des bonnes gens. […] Il ne tient qu’aux poètes d’oser y faire d’abondantes moissons, s’ils ne trouvent ailleurs que les restes des imaginations souveraines et des fantaisies superbes qui ont épuisé le champ pour plusieurs générations.
On ne peut disconvenir en effet que les différences de religion, de climat, d’habitudes sociales, si elles n’ont pas changé le fond de la nature humaine, ont du moins donné à l’amour chez les modernes une tout autre forme que chez les anciens ; et lorsque les peintures que ceux-ci en ont laissées nous apparaissent dans leur nudité énergique et naïve, il y a un certain travail à faire sur soi-même avant de s’y plaire et d’oser admirer. […] Osons donc revenir à l’antique par Roméo.
Sa veuve est dans les larmes ; je n’ose encore la revoir. » Quelques jours après il s’excuse, dans une lettre du 16 mai 1831, d’avoir suspendu son voyage vers Paris. […] On l’ignore ; peut-être une jalousie maladive qu’il n’osait s’avouer à lui-même, mais dont la suite des événements a révélé quelques symptômes dans la vie de la princesse comme dans les lettres de Robert.
« J’ose croire que ces trois déclarations excluent jusqu’à l’apparence de l’inconsidération, et, quand même mon désir serait repoussé, j’ose croire encore que Sa Majesté l’Empereur des Français n’y verrait rien qui choque les convenances, rien qui ne s’accorde parfaitement avec la juste idée qu’il doit avoir de lui-même. » XXIV L’empereur Napoléon ne répondit même pas à une demande d’audience si extraordinaire et qui ne pouvait que l’embarrasser.
Vous qui faites, quand cela convient à votre ambition, appel au droit des nationalités exprimé au fond d’une urne et compté par des questeurs armés, interrogez donc Gênes sur son annexion au Piémont, et osez donc lui poser la question d’abdiquer son nom, sa gloire et sa liberté sous un roi des Alpes ! […] XXXIX On sait comment Charles-Albert, sans tenir aucun compte de ces conseils, lança les Piémontais en Lombardie, fut mal reçu et plus mal secondé par les Lombards, combattit en intrépide soldat, fut vaincu, n’osa reparaître à Turin sous le coup de sa témérité et de sa déroute, abdiqua le trône, s’éloigna sous un nom d’emprunt de l’Italie, et alla mourir de sa déception et de sa douleur en Portugal.
Cette maison d’Arioste est encore vide aujourd’hui, comme par respect pour sa mémoire : excepté une veuve ou un fils, qui oserait habiter la demeure d’un homme surhumain ? […] Arioste fut le maître et le modèle du Tasse ; l’Armide est d’après l’Alcine.… Je n’avais pas osé autrefois le compter parmi les poètes épiques ; je ne l’avais regardé que comme le premier des comiques ; mais en le relisant je l’ai trouvé aussi sublime que plaisant, et je lui fais très humblement réparation.
« Moi, je n’oserais pas, aujourd’hui, affirmer avec certitude s’il disait vrai ou s’il disait faux. […] Ils restèrent tout ce temps dans une ignorance parfaite de l’impression produite par leur abstention sur l’esprit de l’empereur ; car, ainsi que je l’ai raconté, ils ne quittèrent pas leurs appartements, et personne n’osa les visiter.
Qui oserait affirmer que Schiller, écrivant le drame des Brigands à vingt-deux ans, ce drame corrupteur de la moralité publique, l’aurait encore écrit, de sa plume refroidie, à l’âge fait où il écrivait ses belles œuvres savantes et morales, à son âge mûr ? […] Qui oserait enlever le repentir aux plus grands hommes ?
Il y a bien de l’orgueil dans le mot fameux : « Qu’un seul dise, s’il l’ose : Je fus meilleur que cet homme-là ». […] On riait de l’adultère, il a osé en faire une grosse affaire.
Les Lettres persanes sont un livre de génie, parce que cette pensée de génie plane, pour ainsi dire, sur toute cette frivolité, et que le grand Montesquieu y perce sous le jeune président à mortier, qui ajoutait aux scandales de son temps celui d’écrire un roman licencieux qu’il n’osait pas signer de son nom. […] La lui ôter, pour la donner à l’antiquité chrétienne, personne ne l’ose ; réduire sa part, beaucoup y ont pensé de notre temps.
Il a osé des choses monstrueuses, mais en les sauvant, avec ces atténuations de la voix, cette grâce légère de la langue, que possède ce gros homme, si délicat causeur. […] Comment ose-t-il, en plein Institut, jeter l’injure à la conscience de l’art, à l’amour unique et désintéressé des lettres, aux derniers écrivains qui méprisent l’à-propos, le savoir-faire, tous les succès qu’un talent, comme le sien, a ramassés dans la flatterie des passions et du public d’un jour !
Et Carnajou passe si bien pour un menteur, qu’un vrai chirurgien qui fait quelque temps après des réapplications de chair, n’ose pas les ébruiter. » « Il arrive même que Després, un interne de Dupuytren, recolle un morceau de doigt à un individu, qui revient lui montrer son doigt, au bout de huit jours, et que Dupuytren, à qui on montre ce morceau recollé, l’arrache en disant : « Ça ne tient pas, ça ! […] Samedi 29 octobre Aujourd’hui, je me trouve si enrhumé, que je n’ose pas aller au cimetière.
Tibère, l’espion empereur ; l’œil qui guette le monde ; le premier dictateur qui ait osé détourner pour soi la loi de majesté faite pour le peuple romain ; sachant le grec, spirituel, sagace, sardonique, éloquent, horrible ; aimé des délateurs ; meurtrier des citoyens, des chevaliers, du sénat, de sa femme, de sa famille ; ayant plutôt l’air de poignarder les peuples que de les massacrer ; humble devant les barbares ; traître avec Archélaüs, lâche avec Artabane ; ayant deux trônes, pour sa férocité, Rome, pour sa turpitude, Caprée ; inventant des vices, et des noms pour ces vices ; vieillard avec un sérail d’enfants ; maigre, chauve, courbé, cagneux, fétide, rongé de lèpres, couvert de suppurations, masqué d’emplâtres, couronné de lauriers ; ayant l’ulcère comme Job, et de plus le sceptre ; entouré d’un silence lugubre ; cherchant un successeur, flairant Caligula, et le trouvant bon ; vipère qui choisit un tigre. […] Il osa entrer à Ctésiphon, ville des parthes, bâtie pour faire contre-poids à Babylone.
Voilà, disais-je à Musset, les bonheurs de l’âme qui aime ; préfère-leur, si tu l’oses, les bonheurs des sens qui jouissent ! […] combien, en les lisant, ai-je accusé le sort qui m’a privé d’apprécier et d’aimer, pendant qu’il respirait, un homme pour lequel je me sens tant d’analogie, tant d’attrait, et, oserai-je le dire ?
Aussi, pour m’efforcer de faire savoir à la postérité que j’ai vécu sous un règne si glorieux, j’ai bien osé composer l’Histoire de France, et retracer les illustres actions de plus de soixante souverains qui ont tenu le sceptre d’une si florissante monarchie.
À Rennes (1598), quand le roi, qui songeait sérieusement à épouser Gabrielle, et qui, depuis quelque temps, voulait s’en ouvrir à Sully sans l’oser, s’arma à la fin de courage, et, emmenant son serviteur dans un jardin, le retint à causer durant près de trois heures d’horloge, on assiste à une conversation à la fois politique et des plus plaisantes.
La première Dauphine, qui était Allemande et née princesse de Bavière, le dit à Madame en pleurant, mais sans rien oser pour empêcher un tel affront qui les atteignait toutes deux : « Laissez-moi faire, répondit Madame, j’arrangerai cela ; car, lorsque j’ai raison, rien ne m’intimide. » Et le lendemain elle s’arrangea si bien qu’elle rencontra dans le parc une des deux demoiselles soi-disant comtesses palatines : elle l’aborda et la traita de telle sorte (les termes étonnants en ont été conservés) que la pauvre fille en prit une maladie dont elle mourut.
Daru prit depuis lors une part active aux travaux de ses collègues et suivit la ligne de l’opposition modérée qui, dans plus d’un cas, et sans déroger aux idées de gouvernement, eut à défendre les principes constitutifs de la société moderne, les bases mêmes du Code civil qu’on osait remettre en cause.
Ainsi parle Linné : et, en regard, il nous faut voir Buffon seul en été à six heures du matin, à Montbard, montant de terrasse en terrasse et en ouvrant les grilles qui fermaient chaque suite de degrés, arrivant ainsi d’un pas seigneurial jusqu’au cabinet d’étude à l’extrémité de ses jardins, et n’en sortant que pour se promener lentement, la tête pleine de conceptions, dans les hautes allées d’alentour, où nul n’oserait le venir troubler.
[NdA] Si j’osais prendre un nom qui résumât toute ma pensée, je dirais qu’il y a du Joseph Delorme dans ce Chateaubriand primitif : ce que j’ai voulu en effet dans Joseph Delorme, ç’a été d’introduire dans la poésie française un exemple d’une certaine naïveté souffrante et douloureuse.
est-ce qu’on verrait une aimable chose et qu’on n’oserait s’en approcher un peu ?
Quand on a beaucoup lu ces auteurs du xvie siècle et des précédents, après qu’on a rendu justice à toutes les qualités de couleur, d’abondance, de franchise, de naïveté ou de générosité première qu’ils ont volontiers ; après qu’on a payé un tribut de regret sincère à ce qui s’est, à cet égard, retranché depuis et perdu, il reste pourtant une qualité qui est nôtre, qui est celle de tout bon écrivain depuis Pascal, et qu’on arrive à goûter, à estimer, j’ose dire à bénir de plus en plus ; qualité bien humble et bien essentielle, imposée désormais aux médiocres comme aux plus grands, et que Vauvenargues a appelée le vernis des maîtres, je veux parler de la netteté.
Un Octave qui est un politique tout fait dès vingt ans, et qui sait dès cet âge tout ce qu’il faut penser des hommes en certaines époques, jusqu’où on peut les pousser et comment oser les conduire, court risque par moments d’être un prodige ou même un monstre.
La lecture des Mémoires de d’Aubigné, et aussi celle des Historiettes de Tallemant qu’on publia vers 1834, y servirent beaucoup ; j’oserai dire qu’une réaction commença.
Nous mettons un genou en terre devant celles qui n’ont jamais failli ; mais quand à Mlle de La Vallière ou à Mme de Longueville on ose comparer Mme de Maintenon, avec les calculs sans fin de sa prudence mondaine et les scrupules tardifs d’une piété qui vient toujours à l’appui de sa fortune, nous protestons de toute la puissance de notre âme.
La première que vous m’avez envoyée était admirable et digne d’un grand ouvrier ; celle que j’ai faite dessus n’était pas non plus de mauvaise main ; mais cette dernière que vous venez de lirer, ultima linea rerum est, elle est au-delà de toutes choses, et pour moi je n’oserais plus jamais faire un trait après cela.
Martial y a mis beaucoup d’esprit ; il a, si j’ose dire, tout à fait émoustillé l’épigramme : il a été l’Ovide du genre.
Il serait temps que la critique, si elle osait encore être de la critique, y vînt apporter quelques restrictions utiles et rappeler quelques règles salutaires.
Au contraire des nouvelles mariées qui se croient obligées de baisser les yeux, Mme de Sévigné osait montrer sa joie ; et cependant son mari partait deux jours après pour l’armée.
Son œil fauve et puissant devient aussi paisible Qu’aux jours où sur son dos Europe osa s’asseoir ; Il admire, et Léda subit sans le savoir La fascination du regard invisible.
Ami du poète novateur Le Brun, célébré et magnifiquement pleuré par lui, par ce futur ami d’André Chénier, le jeune Racine, de qui son père jugeait un peu sévèrement tant qu’il vécut, disant de lui, comme d’un jeune présomptueux, « qu’il voudrait tout savoir et ne rien étudier », était-il d’étoffe à être un poète novateur aussi, à oser dans le sens moderne, à désoler, puis à enorgueillir ce père redevenu et resté tant soit peu bourgeois, à l’étonner par un classicisme repris de plus haut ou par un romantisme anticipé, à être un peu plus tôt, et à la face de Voltaire vieillissant, quelque chose de ce qu’André Chénier, a été plus tard ?
J’avançai jusques à eux pour les faire diligenter, et il ne nous parut sur les hauteurs que quelques pelotons de paysans armés de fusils, qui auraient pu, s’ils avaient osé, nous disputer le passage ; mais ils se contentèrent d’être spectateurs de notre marche.
Enfin, tout ce que les jeunes gens font d’ordinaire en cachette de leur père, tout ce qui est péché de jeunesse, j’ai accoutumé mon fils à ne pas m’en faire mystère ; car qui s’accoutume une fois à mentir et à tromper son père, celui-là l’osera d’autant plus à l’égard des autres.
Renan, dans ce livre tant controversé, est précisément, tout en se rendant bien compte de ce triple ensemble et, si je puis dire, de ce triple feu d’objections opposées et convergentes, d’avoir osé se mettre au-dessus et prendre position au-delà.
C’est ce qui faisait dire à Saint-Évremond encore, lorsqu’il voulait marquer le contraste étrange qu’il y avait de Corneille composant et s’exprimant avec sublimité au nom de ses personnages, à ce même Corneille conversant assez brusquement ou platement pour son compte dans la vie commune : « Il ose tout penser pour un Grec ou pour un Romain : un Français ou un Espagnol diminue sa confiance ; et quand il parle pour lui, elle se trouve tout à fait ruinée.
Le premier Consul, avec son coup d’œil et sa parfaite connaissance des hommes, sut démêler dès le premier jour, dans les débris des anciens partis, tous les matériaux vivants, toutes les pierres ouvrières, si j’ose dire, qui pouvaient servir à l’œuvre de reconstruction sociale qu’il entreprenait.
Jésus-Christ est annoncé, il est attendu : il paraît que Le Dieu selon la Bible se complète, se corrige, s’attendrit, s’abaisse, s’humanise, se civilise, si j’ose dire, se met à la portée de tous les hommes et de toutes les races par le Dieu selon l’Évangile.
L’empereur son époux, qui n’osait se mêler des affaires du gouvernement, se jeta dans celles du négoce… » Suivent quelques détails piquants et caustiques sur François Ier, cet époux tant adoré d’elle et si subordonné, qui, lui laissant tout l’honneur et toute la gloire de l’empire, s’était fait l’intendant, le fermier général, le banquier de la Cour, homme de négoce jusqu’à fournir au besoin en temps de guerre le fourrage et la farine aux ennemis eux-mêmes pour en tirer de l’argent ; puis reprenant le ton grave et sévère, Frédéric continue : « L’impératrice avait senti dans les guerres précédentes la nécessité de mieux discipliner son armée ; elle choisit des généraux laborieux, et capables d’introduire la discipline dans ses troupes ; de vieux officiers, peu propres aux emplois qu’ils occupaient, furent renvoyés avec ces pensions, et remplacés par de jeunes gens de condition pleins d’ardeur et d’amour pour le métier de la guerre.
Toutes ses facultés, y compris son imagination grandiose, y trouvaient leur magnifique emploi ; un rêve superbe, une vision charlemanesque le saisit ; il entra tout d’un trait dans une phase nouvelle ; et lorsqu’en 1807, ayant reconnu qu’il n’y avait que la Russie qui pouvait ne pas être irréconciliable, il put se flatter de l’avoir gagnée dans la personne de son jeune empereur, il dut se croire en mesure de tout oser, de tout exécuter dans l’Occident.
J’ose affirmer que, si l’un des deux compagnons de voyage de l’illustre auteur abordait le même récit, il le ferait dans une impression toute différente.
L’instituer largement et avec ensemble en littérature, l’appuyer à des exemples historiques positifs qui la fassent vivre et la fertilisent, la mêler, sans dogmatisme, à une morale saine, immédiate, décente, ce serait, dans ce débordement trop général d’impureté et d’improbité, rendre un service public et, j’ose dire, social.
Étienne ; mais certainement, lorsqu’il retraçait les caractères de la première famille, et à mesure qu’il en dépeignait à nos regards le type accompli, on sentait combien M. de Vigny parlait de choses à lui familières et présentes, combien, plus que jamais, il tenait par essence et par choix à ce noble genre, et à quel point, si j’ose ainsi parler, l’auteur d’Éloa était de la maison quand il révélait les beautés du sanctuaire.
si j’ose m’exprimer ainsi.
J’oserai ajouter qu’il existe un accord curieux, très explicable d’ailleurs, entre ce qu’on aime dans le monde extérieur et ce qu’on préfère dans le monde intérieur.
L’auteur l’a vue, posée, l’appelle même une difficulté « formidable en apparence » : j’ose dire qu’il ne l’a nullement résolue.
Je comprends qu’on ose beaucoup dans un livre : le roman même, qui tient de l’histoire et de la critique, a des libertés presque égales.
Si j’osais, je dirais que j’aime encore mieux ce chapitre-là qu’un chapitre analogue de Montesquieu.
Le lecteur, à la séance prochaine, répondit que tout désastre avait sa cause, qu’il fallait oser la chercher et sonder les blessures de la patrie ; que les malheurs d’une mère, après tout, n’étaient pas une honte, et que lui n’était pas venu là pour flatter le patriotisme, mais pour l’éclairer.
Mme de Grignan, la lieutenante générale, réunit chez elle les dames de la province, et il semble croire, en homme un peu glorieux, qu’il n’aurait, dans cette assemblée, qu’à jeter la pomme : « Le favori du gouverneur, dit-il, en réputation d’un bel esprit et d’homme de cour, serait bientôt ici un dangereux rival. » Il nous donne un échantillon des plaisanteries à la provençale qu’il adresse à l’une de ces dames ; la plaisanterie nous semble, avouons-le, de toute énormité, et on y revient à deux fois avant d’oser comprendre.
Il y a déjà longtemps que j’ai envie, ne fût-ce que par variété, de parler une fois d’un ancien, et je n’ose.
J’ai peine à le faire sans avertir M. de Chavigny, nos intérêts étant communs ; mais j’ose espérer que Sa Majesté daignera me garder le secret, comme je le garderai de mon côté religieusement. » Ces paroles étaient formelles ; mais Beringhen marqua qu’il désirait quelque gage plus précis et qui fît foi du succès de son message.
« Je me suis tenu constamment, dit-il, dans la situation d’esprit où se place un juré pour écouter les dépositions des témoins ; et maintenant j’oserais, comme lui, prononcer· la formule solennelle dont le verdict est accompagné. » L’Introduction qui résume l’histoire de France depuis Louis XIV et pendant tout le xviiie siècle jusqu’au moment où Louis XVI monta sur le trône, offre un beau et grave tableau plein de vérité et de précision.
Lainé, le premier qui osa élever une parole de résistance légale et de liberté au déclin de l’Empire.
Son but a été de dire ce que ne peuvent et n’osent dire à Paris une foule de gens sensés.
L’artiste (si l’on ose employer ce mot en pareille matière), le metteur en œuvre chez Portalis fait un peu défaut quand il écrit : l’honnête homme n’en était que plus à nu quand il parlait.
Si j’osais traduire cette impression dans une langue toute littéraire et pour des littérateurs, je dirais : Zumalacárregui, c’est son André Chénier : Il est des temps, disait-il (28 juin 1835), où avec de médiocres facultés on peut devenir rapidement fameux ; nous sommes, au contraire, une de ces époques où tout conspire contre le développement des grands caractères, et où le travail des sociétés n’amène à la surface que des natures dégradées.
Vers la fin de sa vie, Marguerite, devenue à son tour une antique, n’avait plus du tout de cheveux bruns et faisait une grande dépense de perruques blondes : « Pour cela elle avait de grands valets de pied blonds que l’on tondait de temps en temps. » Mais dans sa jeunesse, quand elle osait être brune, au naturel, cela ne la déparait point, car elle n’en avait pas moins un teint d’un vif éclat, « un beau visage blanc qui ressemblait un ciel en sa plus grande et blanche sérénité », — « un beau front d’ivoire blanchissant », disent les contemporains et les poètes, qui en ceci paraissent n’avoir point menti.
Selon cette théorie d’un faux bon sens ennemi du grand goût, il suffirait de transporter purement et simplement toute action émouvante et attendrissante de la vie bourgeoise sur le théâtre pour avoir atteint le plus haut point de l’art : Si quelqu’un est assez barbare, assez classique (il est piquant de voir ces deux mots accolés par Beaumarchais et pris comme synonymes), pour oser soutenir la négative, il faut lui demander si ce qu’il entend par le mot drame ou pièce de théâtre n’est pas le tableau fidèle des actions des hommes.
Mon seul vœu, c’est qu’en avançant, et sûr désormais de lui et de tous, comme il l’est et le doit être, il se méfie moins, qu’il s’abandonne parfois à l’essor, et qu’il ose tout ce qu’il sent ; voyageur, qu’il laisse étinceler cette larme amoureuse du beau, qui lui échappe en présence du Parthénon ou des marbres ioniens de l’Asie Mineure ; romancier, qu’il continue d’appliquer ses burins sévères et qu’il craigne moins, jusque dans la passion ou dans l’ironie, de laisser percer quelque attendrissement ; historien, qu’il laisse arriver quelque chose aussi de l’éloquence jusque dans la fermeté de ses récits ; que, dans la grande et maîtresse histoire qu’il prépare, il réunisse tous ces dons, et comme toutes ces parties séparées de lui-même, qu’il a perfectionnées avec tant de soin une à une ; qu’il les fonde et les rassemble désormais, et qu’il accomplisse avec toutes les forces qu’il possède, et avec ce feu qui unit le cœur à la volonté, cette belle histoire de Jules César, du plus ami de l’esprit entre les conquérants, du plus aimable entre les grands mortels.
Il qualifie ainsi l’Ecclésiaste et le Cantique des Cantiques : — « Œuvres sans ordre, « pleines d’images basses et d’expressions grossières. » Peu de temps après, furieux, il s’écrie : On m’ose préférer Crébillon le barbare !
J’ose dire que c’est là une méthode tout à fait incertaine et qui lie peut donner que des résultats : très peu satisfaisants.
On peut discuter dans la pratique sur le plus ou moins d’opportunité de cette liberté, sur les conditions plus ou moins larges qui lui seront faites ; mais, dans l’ordre spéculatif, philosophique et moral, qui oserait nier que le principe de la liberté politique ne soit au nombre des quatre ou cinq plus grandes idées de l’esprit humain ?
— En une certaine mesure au contraire, parce que c’était la façon dont, généralement, les auteurs classiques nous étaient montrés, qui nous les faisait prendre en horreur ; parce que Virgile et Horace ne pouvaient rester dans nos souvenirs qu’accompagnés de l’idée d’ennui ; et parce que, laissés de côté par les professeurs d’à présent, ils se présenteront aux écoliers dans toute leur beauté propre, avec leur charme inaltéré et, si j’ose ainsi parler, sans encrassement.
Délivré de son isolement en s’alliant à celui-ci, il put oser entreprendre une guerre monstrueuse contre les oeuvres d’art d’Eschyle, de Sophocle, et cela non par des ouvrages de polémique, mais par ses œuvres de poète dramatique opposant sa conception de la tragédie à celle de la tradition. » Voilà donc le poète conscient, le poète qui comprend, le poète qui analyse, le poète qui est mêlé d’un critique et qui fera exactement ce qu’il aura voulu faire.
Eh bien, cela est nouveau, osé, dandy, un peu fat même, mais la fatuité n’est pas la sottise !
Kitty Bell, c’est l’ange de la pitié aussi, mais sur la terre, dans sa robe grise de puritaine, tombant aussi par pitié dans Chatterton ; car elle tombe, quoique sa chute soit voilée par sa pitié même et par celle du romancier, qui n’ose pas la raconter !
Cette fois oseront-ils se presser devant ce portrait au sexe douteux, devant cette face faisandée, pourrie, exténuée de vice solitaire, devant ce cadavre avant la lettre dont la tristesse est marquée de l’hébétement particulier aux sectateurs trop fougueux d’Onan ?
Nous osons davantage : considérant qu’elles sont plusieurs et qu’elles sont des faits comme les autres, nous tâchons d’y faire apercevoir et d’en dégager par la même méthode que chez les autres le fait primitif et unique d’où elles se déduisent et qui les engendre.
Le Tourneur et cette école d’humbles traducteurs estimables contribuaient plus efficacement à préparer les esprits à une connaissance étendue des ouvrages d’outre-Manche ; mais ces traductions elles-mêmes n’osaient tout rendre ; on hésitait, on reculait devant les originaux ; on avançait bien lentement, et en ce qui était de l’autre côté du Rhin et de l’Allemagne on en ignorait tout : Grimm et le grand Frédéric, c’est-à-dire les plus Français d’entre leurs compatriotes, suffirent longtemps aux Parisiens comme échantillons uniques. […] Très-vif et tout feu en causant, il n’osait qu’à demi sur le papier. […] Ampère n’osait tout dire à M.
Ne séparez donc pas la religion de la société : c’est comme si vous sépariez la tête d’un homme de son corps, et que, me montrant ce cadavre, vous osiez me dire : Voilà un homme. […] Que telle soit la misère profonde de l’homme en notre temps, c’est ce que personne n’osera nier. […] Dieu est peut-être plus près de nous que nous n’oserions l’espérer.
Ou plutôt ce n’est pas tout, car depuis cinquante ans nous avons fait des progrès ; — le progrès n’est-il pas la grande loi de la société moderne ; — ce n’est pas le tout d’aujourd’hui ; aujourd’hui qui oserait commencer La Fontaine autrement que par une leçon générale d’anthropogéographie. […] Premièrement pour des raisons d’histoire même ; il est arrivé en très grand, pour l’histoire, ce qui arrive généralement des constructions navales françaises ; on n’en voit pas la fin ; quand on mit l’histoire en chantier, armé, ou, pour dire le mot, outillé des méthodes modernes, les innovateurs en firent le devis ; mais à mesure qu’on avançait, et que justement parti des temps antiques on se mouvait au-devant des temps modernes, les mécomptes se multipliaient ; ils se sont si bien multipliés qu’aujourd’hui nul n’oserait en pronostiquer la fin, ni annoncer la fin du travail ; le seul historien de la révolution française que je connaisse personnellement qui soit exactement sérieux nous dira tant que nous le voudrons que pour mener à bien la seule histoire de la révolution française il faudrait des milliers de vies de véritables historiens ; or on ne voit pas qu’il en naisse des milliers ; et nous sommes fort loin de compte. […] Qui de nos jours oserait se flatter d’arrêter l’humanité ; fût-ce dans la béatitude ; fût-ce dans la consommation de l’histoire ; qui ferait la sourde oreille aux avertissements que nous recevons de toutes parts.
Et tous deux en parlant de l’écrivain, et en ne tenant pas compte de son influence sociale et politique, nous contestons sa valeur littéraire, nous osons rapporter l’opinion de l’abbé Trublet, le définissant « la perfection de la médiocrité », nous ne lui reconnaissons que la valeur d’un vulgarisateur, d’un journaliste, rien de plus, joint à de l’esprit, si vous voulez, mais de l’esprit pas d’une plus haute volée que celui qu’avaient toutes les vieilles femmes spirituelles du temps… Son théâtre, ose-t-on en parler ? […] Savez-vous que l’autre jour, à l’Académie, à propos du Dictionnaire, il a osé dire, en se touchant le front : « Enfin croyez-vous que ce que nous avons là, soit autre chose qu’une sécrétion du cerveau ?
Le premier de nos Français qui ait, un peu confusément, mais profondément, éprouvé ce sentiment nouveau, c’est un poète lyonnais, Maurice Scève, dans sa Délie, objet de plus haute vertu, poème symbolique, imité de Pétrarque, et dont la nuit obscure, si l’on ose ainsi parler, étincelle de beautés singulières. […] Quand les Essais ne seraient qu’un recueil, et, si je l’ose dire, une enfilade, un chapelet de citations, ils n’en seraient pas moins tout ce qu’ils sont dans l’histoire de notre littérature : le premier livre où un homme ait formé le projet de se peindre, et, se considérant lui-même comme un exemplaire de l’humanité moyenne, le projet d’enrichir des découvertes qu’il faisait en lui l’histoire naturelle de l’humanité. […] Catholiques ou protestants, c’est un point dont on ne tardera pas à tomber d’accord, et là est le bénéfice net, si l’on ose ainsi parler, du mouvement de la Réforme et des guerres de religion.
Par définition, et, si j’ose dire, par constitution mentale, la femme incline à s’adapter, à se plier aux influences : pareille à la liane qui s’enroule autour de l’arbre dont elle partage le destin, elle épouse la forme de qui elle aime, ou de qui elle admire. […] Il sera d’ailleurs d’autant plus vaste, ce point de vue du moraliste, qu’il embrassera plus d’objets : comme s’étend la perspective du voyageur à mesure qu’il s’élève davantage, la portée d’une observation croît à proportion des documents qu’elle assembla… La nature même de cette amoureuse appelait par contraste, et si j’ose dire, par nécessité de logique intérieure, un amant déterminé. […] Conclusions J’estime qu’il y a quelque attitude, et, si j’ose dire, quelque inconvenance, à prétendre indiquer, dès ses pages liminaires, les conclusions d’un livre. […] Nous n’avons pas osé y insister dans nos Essais sur Balzac qui remontent déjà à une quinzaine d’années.
Les louanges hyperboliques que je n’ose pas lui donner, de peur qu’il ne finisse par s’apercevoir que je me moque de lui, c’est lui qui se les donne ! […] Mais qu’il ne le fût point, j’oserai dire que cela m’est complètement égal. […] George Sand n’ose pas s’y livrer, s’y abandonner ; elle se contient et se réprime. […] Cette seconde famille, bien grande encore, moindre pourtant, si l’on ose trancher avec de tels hommes, me semble comprendre Corneille, Schiller, Marlowe, Rotrou, Crébillon, Werner, tout au bas, mais encore dans son sein, Ducis. […] Il ose dire que les personnages de sa tragédie « doivent être regardés d’un autre œil que nous ne regardons d’ordinaire les personnages que nous avons vus de près ».
J’ose dire qu’il est dommage qu’elles soient si brouillées, car elles sembleraient d’une grande douceur si on pouvait les comprendre. […] Et qui oserait les en blâmer ? Qui oserait leur envier une si généreuse espérance ? […] On n’osa pas le dire, mais plus d’un spectateur en sourit intérieurement. […] Mais jamais le jeune Alcibiade n’osa y venir, sur le tard, avec ses joueuses de flûte.
La Philologie, inoffensive et aimable dès qu’elle se borne au domaine des littératures classiques, devient une redoutable maîtresse de désillusion, lorsqu’elle étend son enquête aux livres que personne n’osait toucher parce qu’ils étaient « sacrés ». […] C’est pourquoi j’oserai confesser, en me frappant la poitrine, ce qui, dans ce livre, m’inquiète, rassuré d’avance par la quasi-certitude où je suis de me tromper. […] Au risque de proposer une explication qui peut paraître trop naïve, ce sont là, si j’ose dire, des procédés d’enseignement, des moyens comme en emploient les professeurs pour faire comprendre à un auditoire insuffisamment préparé quelque fait très lointain. […] Oserai-je risquer ici une comparaison qui paraîtra peut-être déplacée ? […] n’admettront pas que l’on ose ainsi parler de la centralisation administrative dont ils sont, par une espèce de prodige, les causes et les effets.
Après la visite de Perrault, il écrit donc à Colbert, et le supplie résolument, sans marchander sur l’expression (janvier 1669) : Monseigneur, Oserai-je vous réitérer par cette seconde lettre les mêmes prières que j’ai déjà pris la hardiesse de vous faire par ma première, dont voici les mêmes termes ?
C’est un délicat, mais un délicat qui a senti des choses si particulières et si aiguës, qu’il osera infiniment, lorsqu’il s’agira d’exprimer au vif ses façons d’être et de penser.
Si j’osais faire un rapprochement qui n’est qu’exact, c’est ainsi, dans un livre célèbre, que Ponocrates, devançant le progrès des temps, en agissait avec son élève, et qu’il l’exerçait aux notions pratiques de la vie, tout en le maintenant d’ailleurs en commerce étroit et familier avec les grands auteurs de l’Antiquité, avec Hippocrate comme avec Homère.
Il lui a rendu cette justice, qu’elle fit tout pour l’en tirer : Le vice à son aspect n’osait jamais paraître : De mes sens mutinés elle m’a rendu maître ; C’était par la vertu qu’on plaisait à ses yeux.
Il faut l’entendre nous expliquer par le menu tout le procédé artificieux et méchant du comte de Frise envers la personne qu’il a gagé de séduire75, ses batteries masquées, ses instances soudaines et ses éclats de grands sentiments, ses lenteurs calculées, les complications qu’il introduit, les jalousies qu’il suscite et toutes les tortures qu’il inflige : J’étais, ose dire Besenval, le confident de ses plus secrètes pensées.
On serait animé par une idée bien flatteuse et par un puissant mobile, par la pensée qu’on l’instruit, lui aussi, qu’on lui fait faire un pas de plus dans la connaissance de lui-même et de la place qu’il tient dans la renommée ; on jouirait de sentir qu’on lui développe un côté de sa gloire, qu’on lui lève un voile qui lui en cachait quelque portion, qu’on lui explique mieux qu’il ne le savait son action sur les hommes, en quoi elle a été utile et salutaire, et croissante ; on oserait ajouter en quoi aussi elle a été moins heureuse et parfois funeste.
» Ici nous retrouvons quelques-unes des idées particulières et, si l’on veut, des préventions de Vauvenargues, un reste de gentilhomme, ou plutôt un commencement de grand homme ambitieux, qui aimerait mieux franchement être Richelieu que Raphaël, avoir des poètes pour le célébrer que d’être lui-même un poète ; qui aimerait mieux être Achille qu’Homère : « Quant aux livres d’agrément, ose-t-il dire, ils ne devraient point sortir d’une plume un peu orgueilleuse, quelque génie qu’ils demandent ou qu’ils prouvent. » Il ne permet tout au plus la poésie à un homme de condition et de ce qu’il appelle vertu, que « parce que ce génie suppose nécessairement une imagination très vive, ou, en d’autres termes, une extrême fécondité, qui met l’âme et la vie dans l’expression, et qui donne à nos paroles cette éloquence naturelle qui est peut-être le seul talent utile à tous les états, à toutes les affaires, et presque à tous les plaisirs ; le seul talent qui soit senti de tous les hommes en général, quoique avec différents degrés ; le talent, par conséquent, qu’on doit le plus cultiver, pour, plaire et pour réussir. » Ainsi la poésie, il ne l’avoue et ne la pardonne qu’à titre de cousine germaine de l’éloquence, et qu’autant qu’elle le ramène encore à une de ces grandes arènes qui lui plaisent, à l’antique Agora ou au Forum, ou à un congrès de Munster, en un mot à une action directe sur les hommes.
Les devoirs de famille sont aussi de grands ennemis de l’étude : de ceux-ci, il n’ose se plaindre ; il est l’homme des devoirs et des tendresses.
Gardant toutes ses délicatesses de cœur, ses empreintes de nature champêtre et de paysage qu’il ravivait de temps en temps par des voyages rapides, Guérin, partagé désormais entre deux cultes, le dieu des cités et celui des déserts, était le mieux préparé à aborder l’art, à combiner et à oser une œuvre.
La littérature proprement dite n’offrirait cependant, durant cette période, que trop peu d’exemples à citer de la vérité dans les tableaux : on ose à peine rappeler les romans bourgeois trop vulgaires, dont Sorel donna la première idée dans son .
Turgot est au pouvoir, la vertu respire ; « les gens de bien, cette graine timide qui n’ose se montrer, peuvent maintenant sortir de terre, prendre racine et porter des fruits. » Toute cette école vertueuse et cordiale, les Sedaine, les Thomas, les Ducis, les de Belloy, se croient presque sur leur terrain à Versailles : on les voit d’ici se réjouir et se féliciter.
Du premier jour, il a tout accepté ; je dirais, si j’osais, qu’il a tout gobé de la veille.
C’est un homme d’un tact sur, d’une expérience consommée, et, quoi qu’on en dise, il a prouvé qu’il était exceptionnellement capable de dévouement. » Si j’osais prendre la liberté d’éclairer ces portraits par des noms connus, je dirais que ce comte de Noir-mont est un bon Montrond, un Montrond qui n’a été corrompu qu’à point.
Que faire cependant en présence des méchants auteurs, de ceux que de nos jours on n’ose plus appeler tout simplement les sots, et qui en effet sont la plupart si bien frottés de l’esprit de tout le monde que ce ne sont plus que des demi-sots ?
Qui oserait l’en blâmer ?
Je crois volontiers que la politique s’est fort épurée de nos jours, ou du moins que partout où pénètre vite la lumière, la publicité, on n’ose plus se permettre de telles fourberies.
Non, j’ose le dire, quoique incompétent dans le détail à coup sûr, mais après avoir entendu bien des déposants et par une sorte de verdict de sens commun, par une impression d’ensemble et comme une conviction naturelle, — non, il y avait de l’appareil plus que du fonds dans tout le maréchal de Noailles.
Si le projet qu’il a indiqué après coup est bien exact et s’il paraît assez bien combiné, l’exécution en fut déplorable. » — Je cherche partout des témoignages à l’appui de mes réserves, car il est bien difficile d’oser mettre un peu de vérité dans ces articles que j’écris, et l’on aurait peine à croire à combien de suggestions et d’instances j’ai dû résister pour maintenir ce jugement modéré et un peu restrictif sur le maréchal de Noailles.
Je n’ai pu me défendre d’un peu d’émotion en parlant à la reine ; cette émotion n’était point de vivacité, mais d’attendrissement et, si j’ose dire, de compassion sur l’état et les dispositions de la reine.
Ce qu’on n’osait pas dire au maréchal de Saxe, on le lui disait. — La vérité est que l’ordre d’aller en avant n’arriva pas pour le moment : le comte d’Estrées ne put donner son coup de collier que plus tard.
Je n’ose demander à M.
« Le seul art dont j’oserais soupçonner Mme de Sévigné, dit Mme Necker, c’est d’employer souvent des termes généraux, et par conséquent un peu vagues, qu’elle fait ressembler, par la façon dont elle les place, à ces robes flottantes dont une main habile change la forme à son gré. » La comparaison est ingénieuse ; mais il ne faut pas voir un artifice d’auteur dans cette manière commune à l’époque.
Je n’ose affirmer tout à fait pour Hervé : mais il l’aimait avec tendresse, il la chérissait plus qu’une sœur ; et il est certain que, dès le second jour de cette intimité, il agita de naturels, de délicats et loyaux projets.
ces Germains, que Vitellius pousse contre Rome, ne l’auront pas osé eux-mêmes ; et vous, enfants privilégiés de l’Italie, vous, jeunesse vraiment romaine, vous demanderiez le sang et le massacre d’un corps dont la splendeur et la gloire font toute notre supériorité sur la bassesse et l’obscurité des Vitelliens.
CCLIII Enfin elle passa ; je n’osai pas, par mauvaise honte, m’approcher beaucoup de la loge où Hyeronimo attendait, sans vouloir m’appeler, la tête en ses deux mains, appuyé sur la grille du cachot, me regardant à travers les mèches de ses cheveux rabattus sur sa tête ; et moi, du haut de ma fenêtre, plongeant mes regards furtifs sur sa figure immobile dans la demi-ombre de sa loge.
Perrault donc imagina trois personnages : un Président, savant homme, dit-il, et idolâtre des anciens, à qui il ne put prêter toutefois plus de science qu’il n’en avait lui-même, ni plus d’attachement à l’antiquité, qu’il ne croyait qu’on pût raisonnablement en avoir ; un abbé, savant aussi, mais « plus riche de ses propres pensées que de celles des autres », vraie image de l’auteur qui s’y mire complaisamment, sans se douter que cet autre lui-même a plus d’ignorance que d’esprit, et parmi l’abondance de ses idées une totale absence de sentiment esthétique ; enfin un chevalier, sorte de Turlupin de la critique, plus sot que spirituel, n’en déplaise à Perrault, qui l’a chargé d’avancer toutes les énormités qu’il n’osait faire endosser à son abbé.
Comme elle est dévote, et s’afflige de n’oser aller à l’Église, le jour de la Purification, Dieu s’empresse de venir en personne lui « donner réfection » d’une messe.
Quand l’Opéra-Comique fut réuni à la Comédie-Italienne, quand Duni, Grétry, Monsigny eurent transformé le genre en développant la partie musicale, quand il devint ce que nous l’avons vu en notre siècle, les théâtres des boulevards, qui avaient remplacé les scènes de la Foire, ressuscitèrent le primitif et populaire opéra-comique dans le vaudeville à couplets, qui demeura je n’ose dire un genre littéraire, mais enfin ne devint pas un genre musical.
Je n’oserais dire qu’il ait absolument réussi.
Astier-Réhu oserait dire que c’est une perpétuelle hypotypose.
Ceux qui s’aperçoivent du mensonge n’osent pas y contredire, car les clairvoyants et les sincères sont mal vus.
L’adjectif est d’ailleurs plus banal ici que chez Barrès ou Paul Adam et seul, je crois, un naturiste oserait dire : « Il admira la moisson féconde, la substance magnifique du pain nécessaire. » Or c’est tout le temps comme ça.
Quand il eut atteint l’âge de dix ans, personne dans son pays n’osait lutter contre lui. » Il se distinguait, à première vue, de tous les Turcs d’alentour ; il devenait manifeste qu’il était issu d’une autre race.
[NdA] J’oserai plus dans une note ; elle disait tout net : « Ni tempérament, ni roman.
Aussi, cette partie est-elle de beaucoup la plus légère de touche et la plus pure, et j’ose dire qu’elle le paraîtrait plus encore s’il n’y avait fait mainte fois des surcharges en vieillissant.
., etc. » C’est chez Grimm qu’il faut lire ce portrait, qui a été mutilé et adouci ailleurs ; on n’ose en rien transcrire, de peur de brûler le papier.
Il s’étend sur ce règne avec complaisance ; il va même jusqu’à oser établir un parallèle entre ce petit prince du Nord et Louis XIV dans sa gloire : sauf deux ou trois traits un peu fleuris et trop mythologiques, sauf un léger accent oratoire qui perce çà et là, cette comparaison fournit à une belle page historique et d’une véritable élévation.
De telles lettres rachètent bien quelques brusqueries de ton qu’on trouverait tout à côté et qui rappellent par accès la présence du maître ; elles répondent à ceux qui, ne prenant Frédéric que par ses duretés et par ses épigrammes, lui refusent d’avoir ressenti jusqu’à la fin des sentiments d’affection, d’humanité et, j’ose dire, de bonté, de même qu’il avait ressenti de vives et vraies amitiés dans sa jeunesse.
Mais, pour bien étudier un tel exemple et en tirer toute la leçon qu’il renferme, il faut oser introduire dans l’idée de ce caractère de d’Aguesseau tous les vrais éléments tels que les donnent les témoins les plus clairvoyants et les plus sagaces.
J’ai osé, dans ma dernière, maladie, écrire une lettre à Nicolas Despréaux ; vous avez bien mieux fait, vous écrivez comme lui.
Si j’osais revenir, à propos de ces contes d’enfants, à la grosse querelle des anciens et des modernes, je dirais que Perrault a fourni là un argument contre lui-même, car ce fonds d’imagination merveilleuse et enfantine appartient nécessairement à un âge ancien et très antérieur ; on n’inventerait plus aujourd’hui de ces choses, si elles n’avaient été imaginées dès longtemps ; elles n’auraient pas cours, si elles n’avaient été accueillies et crues bien avant nous.
Pour mon compte, j’ose m’assurer que je l’aime toujours.
Ici, on le retrouve ce qu’il sera toute sa vie, combattant pied à pied, un peu formaliste, tenant à n’avoir pas eu un tort, retranché dans la question de droit, disputant le terrain comme il aurait pu le faire avec Mina dans les plis et replis des montagnesa, tendant la situation au risque de la briser, jouant sa tête en toute témérité et bonne grâce plutôt que de se laisser entamer de l’épaisseur d’un cheveu ; en un mot, si j’ose le dire, à la fois chevaleresque et raisonneur comme le sont certains héros de son compatriote Corneille.
pendant plus de vingt ans, il a vu s’habiller et se déshabiller la duchesse de Choiseul, et il n’a jamais osé s’avouer à lui-même qu’il était amoureux d’elle. » — Une des personnes présentes et des plus jeunes (M.
Le vers libre I « Si j’étais encore assez jeune et assez osé, je violerais à dessein toutes lois de fantaisie ; j’userais des allitérations, des assonances, des fausses rimes, et de tout ce qui me semblerait commode… » Gœthe disait cela en 1831203, au moment même où les vieilles lois du vers français n’allongeaient leurs bras que pour mieux étreindre la liberté du poète.
Qui oserait nier ceci ?
Mais généralement, dans la vérité, il n’en est pas ainsi : iº Parce que l’oreille des poètes, après avoir été très sensible, lors de leur période de formation, de débrouillement, et pendant l’aurore de la production où tout se colore d’une lumière propre si belle à nous-mêmes qu’elle en paraît nouvelle, s’habitue à un certain nombre de cadences et que le sens auditif du plus subtil s’endort, s’amortit, un peu comme celui d’un auditeur de bonne musique, qui ne sait plus se réjouir que de cadences connues ; 2° Que, pendant que ces poètes restent techniquement stationnaires, une génération nouvelle se lève, parmi laquelle plusieurs poètes sentent confusément la nécessité d’une révolution et qu’un au moins la ressent précisément et l’ose.
Vous avez senti la différence de la chose générale et de la chose individuelle jusques dans les moindres parties, puisque vous n’oseriez pas m’assurer depuis le moment où vous prîtes le pinceau jusqu’à ce jour, de vous être assujetti à l’imitation rigoureuse d’un cheveux.
On sçait avec quelle affection Pline vante le trait ingénieux de Timante, qui peignit Agamemnon, la tête voilée au sacrifice d’Iphigenie, pour marquer qu’il n’avoit osé tenter d’exprimer la douleur du pere de cette jeune victime.
Le Magnificisme Frappés de ces incohérences et humiliés par cet échec, la plupart des poètes n’osèrent plus s’avouer symbolistes.
Dans les appréciations souvent exquises de son livre de Chez nous et chez nos voisins, il y a beaucoup de choses que je crois vues avec des yeux qui feraient honneur à un aigle ou à un lynx, mais il y en a d’autres aussi sur lesquelles j’oserais discuter.
Tout ce qui écrivait voulut écrire dans cette espèce de rhythme, oserai-je dire, dans cette forme équilibrée et docte où le critique pouvait se montrer aussi grand à sa manière que l’homme qu’il critiquait s’était montré grand à la sienne, et créer à son tour, comme l’homme dont il jugeait l’œuvre avait créé.
Et si c’est vrai, — ce que j’ose hasarder, — si les hommes de force absolue n’ont pas, comme je le crois, dans leur vie, de vol tes et de contre-voltes, ne tâtonnant pas, ne battant pas le buisson et ne changeant pas leur fusil d’épaule, comme on dit, ainsi que la plupart d’entre nous ; s’ils poussent toujours du même côté, tirant leurs coups toujours dans la même ligne, c’est qu’ils portent en eux un principe interne qui ne fléchit pas plus que le principe qui fait du chêne un chêne et qu’on appellera du nom qu’on voudra, mais que je me permettrai d’appeler le principe du génie.
qui a des bontés pour Jésus-Christ et qui lui accorde avec une magnanimité de vainqueur une place unique dans le Panthéon de l’humanité, ont employé, pour dire qu’ils osaient avoir une opinion différente de l’opinion du grand et fort Renan, une papelardise égale à celle de cet archipattepelu qui a introduit, avec le triple sophisme de la diminution, de la probabilité et du peut-être, la papelardise dans l’histoire !
Pointillé à nous impatienter les yeux, l’auteur du Vieux Pauvre du Cumberland, de Lucy Gray, de l’Enfant aveugle, ose des recherches d’originalité, souvent heureuses, et au milieu des infiniment petits du détail, il sait ouvrir de l’horizon.
Nous osons regarder de près les idées représentatives, meurtrières maudites de la certitude ; et si, par hasard, la vérité se rencontre chez elles, nous irons prendre chez elles la vérité.
Puisque nous sommes en voie de paganisme, et en même temps coupable au premier chef envers la doctrine du progrès, osons un suprême et dernier sacrilège en faveur de l’art grec. […] Soutenir aujourd’hui que le Parthénon est plus beau que la cathédrale de Reims, de Strasbourg ou de Cologne, c’est une audace révolutionnaire qui demanderait une plume vraiment héroïque ; nous ne l’oserons jamais. […] et qui oserait refuser le nom de poète à Chateaubriand, le père et le maître de toute la poésie nouvelle ? […] L’apologue osa se montrer, mais avec quelles précautions, au sein même de l’Orient sacerdotal. Pour peindre les difformités et les vices, pour introduire l’esprit de critique, de négation, de révolte, on n’osa pas mettre en scène des personnages humains ; les héros et les dieux avaient seuls droit de cité dans la poésie.
La vieillesse même ne peut la flétrir ; le Temps n’ose point l’attaquer. […] Le premier et le seul de tous les Césars, il ose retrancher au peuple sa pâture humaine. […] Le roi, indigné qu’on osât lui marchander sa vengeance, ne répondit qu’en avançant le jour de l’exécution. […] La reine n’osait caresser ses chiens devant lui : « car il ne pouvoit souffrir ces petits animaux, parce qu’ils venoient de France ; et lorsqu’il les voyoit, il disoit : Fuera, fuera, perros frances ! […] On passe, On détourne la tête, on lève les bras au ciel ; à peine ose-t-on échanger un nom à voix basse.
S’il en était autrement, il n’oserait pas trancher délibérément comme il fait ; il ne résoudrait pas en quelques mots les questions religieuses, politiques et militaires ; il ne déciderait pas d’un trait de plume les problèmes qui arrêteraient longtemps la sagacité d’un concile, d’un parlement ou d’un conseil de guerre. […] L’esprit flotte incertain, et n’ose pas se prononcer. […] Ou s’il veut revenir aux inspirations de sa jeunesse, s’il veut recommencer les chants de ses premières années, le cantique s’arrête sur ses lèvres, la prière bégaie sourdement, l’espérance ose à peine s’avouer, le poète a disparu avec le chrétien. […] Une seule voix, si j’ai bonne mémoire, osa parler pour elle, et cette voix est la même qui révèle aujourd’hui à la France les merveilles encore inconnues de la littérature scandinave. […] S’il savait moins, il oserait davantage ; car, malgré les paroles de François Bacon, qui dit quelque part : « Qu’un peu de sagesse amène au doute, et que beaucoup de sagesse ramène à la croyance », ce principe, applicable tout au plus aux idées religieuses, échoue bien souvent contre la timidité de l’imagination.
À peine oserai-je formuler une timide objection de style sur cet Homme-Dieu qui découle d’une clef de voûte. […] Tant et tant que quand Lome est revenu des fjords, il ne reconnaissait plus la maison de son ascendant, et restait bouche bée devant le huis, sans oser ouvrir ! […] Oserai-je dire mon sentiment et qu’à tout prendre je préfère la forme ironique et souriante qu’il affecte chez M. […] Que cette magie ne contienne pas un tantinet de mystification, je n’oserais pas l’affirmer ; je n’oserais pas affirmer le contraire non plus.
De nombreuses générations d’honnêtes gens n’osaient pas avouer cette lecture et faisaient peser une même réprobation sur l’auteur, sur son héros et sur son livre. […] Marcel Boulenger eut d’autant plus de mérite à oser prendre cette attitude qu’elle était plus rare au temps qu’il publia ses premiers ouvrages. […] S’efforce-t-il d’accorder son ton avec celui des grandes œuvres qui composent le répertoire de cette illustre maison, on lui en sait tant de gré que l’on ose à peine remarquer qu’il n’y réussit pas toujours, et, quoique cette fameuse scène soit en principe consacrée à ce qu’il y a de plus élevé dans la littérature, on continue à le faire bénéficier de cette indulgence un peu dédaigneuse que l’on accorde à ce qui ne touche en rien l’art ni la littérature. […] Les critiques n’osent pas contredire ce sentiment, car le rôle de trouble-fête est rarement de leur goût — et ils savent bien qu’on ne peut tenter de corriger le sentiment général : les plus habiles s’en tirent en approuvant sans critiquer41. […] On n’ose prononcer leurs noms à propos de qui que ce soit, tant sont redoutables certaines comparaisons, et l’on sait bien qu’il faut qu’un homme soit mort pour que l’on reconnaisse qu’il s’aventura lui aussi, par ces lieux vagues où l’on voit Des fantômes puissants qui dans les crépuscules Déchirent leur suaire en étirant leurs doigts95.
Elle l’a accepté, ne pouvant pas faire autrement, et elle n’a osé le modifier qu’à la longue. […] Il pouvait répudier sa femme, mais pour le faire il fallait qu’il osât briser le lien religieux que le mariage avait établi. […] Cette antique religion le lui défend, et s’il ose le faire, elle l’en punit. […] Comme on était sous l’empire de cette idée qu’ils étaient tour à tour d’excellents protecteurs ou de cruels ennemis, l’homme n’osait jamais agir sans être sûr qu’ils lui fussent favorables. […] Il en avait peur et n’osait ni raisonner, ni discuter, ni regarder en face.
Cette nation a été autrefois brillante et guerrière ; mais elle l’a été par sélection, si j’ose le dire. […] Il suffit que le plan de réforme que vous venez de tracer ait été celui de la Prusse pour que j’ose affirmer que ce ne sera pas celui de la France. […] Il y aurait trop d’inconvénients à ce qu’elle pût choisir la personne à laquelle elle donnerait sa procuration politique ; mais la femme qui a son mari, son père, ou bien un frère, un fils majeurs a des procureurs naturels, dont elle doit pouvoir, si j’ose le dire, doubler la personnalité le jour du scrutin.
Au milieu de l’universelle relativité des choses, qui oserait émettre la prétention de ne point faillir ? […] N’a-t-on pas attribué à Goethe cet aphorisme médiocrement flatteur pour notre amour-propre national : « L’homme en France qui ose penser ou agir d’une manière différente de tout le monde est un homme d’un grand courage ? […] Mais n’est-ce pas en somme un jugement bien osé porté sur l’écrivain qui fut peut-être de tous ceux de notre siècle le moins occupé de la réclame et le plus dédaigneux du succès ? […] En 1856, ils rapportent d’un voyage d’Italie un volume dans le genre des Reisebilder, mais tellement échevelé qu’ils le brûlent sans oser en rien publier qu’un court fragment dans l’Artiste. […] Il osait là une énorme entreprise, et il ne semble pas y avoir échoué, quoique, à vrai dire, l’immense ampleur donnée à son champ d’étude soit peut-être une des causes qui ont rendu son œuvre peu accessible à notre esprit.
Durantin, non seulement n’avait pas osé l’aborder de front, mais il l’avait dénouée par un incident dépendant absolument de sa volonté : un duel où l’honnête homme tue le coquin. […] « Après cela ose encore demander pourquoi ce mystère, qui a si fort intrigué tes salons, si bien excité la verve aux mille facettes de tes chroniqueurs, et qui t’a distrait quelques heures, ô sultan blasé ! […] « — Je n’oserai donc pas vous dire une pensée qui m’est venue. […] Et surtout une religion qui ne soit pas un appétit de la mort. » Ainsi conclut le héros du livre (je n’ose dire : du roman) de M. […] « Et comme il y a toujours le côté-pour rire au milieu des événements les plus sérieux, la note comique fut donnée par nos maîtres de langues, de dessin et autres, qui, sortis de Paris le 28, n’avaient pas osé y retourner à cause de la bataille.
Bernard Derosne, il n’oserait jamais ce coup d’État. […] il faut toujours se retremper aux sources pures de l’antiquité ; il n’y a que l’antiquité, monsieur, je le sens bien aujourd’hui, si bien, que je prépare en ce moment une traduction de Thucydide qui, j’ose l’espérer, emportera votre suffrage. […] Mais qui pourra, qui osera l’écrire (bien que je ne mette pas en doute le mérite et la bonne volonté de MM. […] Vous savez ces « pièces montées » qui dominent au milieu des grands repas bourgeois : ce nougat aux étages superposés à l’infini paraît miraculeusement équilibré, l’on admire qu’il ne s’écroule point, on oserait à peine respirer ! […] Osons fixer ces obscénités.
Charles Reynaud, ce que j’appellerais, si j’osais, la campagne humanisée. […] Aussi quel courroux lorsque des hérétiques ont osé prétendre que madame de Longueville manquait d’embonpoint ! […] Sans oser y compter ni le prédire, mettons à profit ce moment de pacification intellectuelle pour rendre hommage à ceux qui relèvent encore et ennoblissent, en leur personne, ce rôle, si beau et si rare, de défenseur de la vérité ! […] Le 31 mai venge le 21 janvier : Danton lui-même, soupçonné de tendances constitutionnelles, est débord : Robespierre règne, Marat triomphe, la Terreur commence : La France est livrée aux monstres, et les gladiateurs chrétiens n’ont plus qu’à dire à ce César aviné et sanglant qu’on ose appeler le peuple : — « Cæsar, morituri te salutant !
G., quand il crayonne un de ses dandys sur le papier, lui donne toujours son caractère historique, légendaire même, oserais-je dire, s’il n’était pas question du temps présent et de choses considérées généralement comme folâtres ? […] Quel poëte oserait, dans la peinture du plaisir causé par l’apparition d’une beauté, séparer la femme de son costume ? […] Qui oserait assigner à l’art la fonction stérile d’imiter la nature ? […] C’est là mon excellente excuse auprès de ceux qui ont pu me trouver bien osé et un peu parvenu de parler sans façon, au début de ce travail, de mon intimité avec un homme célèbre. […] Je n’oserais certes pas parler avec complaisance de mes rêveries, s’il n’était pas utile de les joindre ici aux rêveries précédentes.
j’ose à peine le croire, Mais ce jour à jamais emplira ma mémoire. […] Elle a foi dans son vœu ; Elle ose la première à l’avenir en feu, Quand chassant le vieux Siècle un nouveau s’initie, Lire ce que l’éclair lance de prophétie.
Je lui parlais, il me parlait, nous nous entendions à demi-mot ; mais je n’osais pas lui demander son nom, de peur de paraître ignorer ce qu’on devait supposer que je connaissais. […] Qu’il y avait loin de cette commotion révolutionnaire de trois mois où nous nous étions rencontrés, et j’oserai dire aimés pour la première fois, au branle de la roue du temps !
Les Français de ce temps ont prétendu les remettre à la mode, mais ils n’oseront pas les remettre en lecture. […] La rue n’était éclairée que par les lueurs qui sortaient çà et là des fenêtres, et, comme déjà des apparences de ressemblance m’avaient trompé dans cette soirée, je n’osai pas arrêter cette personne.
Je n’ose écrire ce qui fut dit ; d’ailleurs, je n’en vois pas l’utilité. […] Alors il sent ses ailes pousser dans toute leur envergure, et il monte dans le drame à une hauteur de l’éther où jamais homme, ni antique, ni moderne, n’avait osé regarder.
On put croire d’abord que le jeune poète parnassien n’avait vu dans ces récits qu’un exercice amusant et difficile de versification, quelque chose comme le plaisir d’écrire en français des vers latins (si j’ose cette catachrèse) sur des sujets réfractaires à la poésie. […] C’est le cas de dire, comme ce personnage de Molière : « J’y crois pour ce que j’y crois… » Néanmoins, si j’ose le dire, la conception du devoir, chez M. de Vogüé, ne me paraît que provisoirement coupée du dogme catholique.
Un coup d’œil sur l’étendue de ce poème vous montre aussitôt que le détail infini auquel le poète, en traitant un sujet historique, est astreint pour expliquer l’enchaînement extérieur de l’action aux dépens du développement clair des motifs intérieurs, ce détail, dis-je, j’osai le réserver exclusivement aux derniers. […] En ce qui touche les artistes, je n’oserais affirmer qu’ils sont arrivés d’emblée à s’assimiler le principe de la déclamation wagnérienne ; mais, en tout cas, ils y ont tâché avec honneur.
Ce qui semble jusqu’à présent n’avoir été entrepris par les fondateurs de ces associations que par un calcul de prudence repose, en grande partie inconsciemment, sur une base que nous appelons sans honte une conscience religieuse : l’aigreur même de l’ouvrier qui produit ce qu’il y a de plus utile, pour en retirer pour lui-même les avantages relativement les moindres, renferme une constatation de l’immoralité profonde de notre civilisation, que ses défenseurs ne peuvent repousser qu’à l’aide de sophismes véritablement ridicules : car s’il est vrai que la richesse ne fait pas le bonheur, celui-là seul qui est dépourvu de tout sentiment oserait nier que la pauvreté fait le malheur (R. et A.). […] Aimer les hommes, c’est oser, entre eux et nous, un rapport, dont nous restons, toujours le terme premier.
Quant à moi, j’ose en toute confiance remonter en imagination des milliers de mille générations dans la suite des temps écoulés, et je vois dans un animal rayé comme un Zèbre, mais peut-être d’une organisation très différente sous d’autres rapports, le parent commun du Zèbre, du Couagga, de l’Âne, de l’Hémione et de nos races diverses de Chevaux domestiques, que du reste ces dernières descendent d’une ou de plusieurs souches sauvages92. […] » J’avais traduit ainsi que suit : « Quant à moi, j’ose en toute confiance remonter des milliers de mille générations dans la suite des temps écoulés, et je vois le parent commun des races diverses de notre cheval domestique dans un animal rayé comme un zèbre, mais peut-être d’une organisation très différente sous d’autres rapports, que, du reste, il descende ou non d’une ou plusieurs souches sauvages, telles que l’hémione, l’âne, le couagga ou le zèbre. » J’avais cru devoir protester contre la supposition énorme, à mon avis, qui résultait de cette version ; c’est que l’ancêtre commun de tous nos chevaux domestiques et seulement de nos chevaux, ait pu être un animal rayé comme un zèbre, qui lui-même serait descendu d’une ou de plusieurs autres espèces sauvages du genre.
Il osa le premier mettre des figures véritablement en l’air, et qui plafonnent, comme disent les peintres. […] Tite-Live le premier des romains dans l’art d’écrire l’histoire, Salluste l’historien, que Paterculus et Quintilien osent comparer à Thucydide, ont vécu du temps d’Auguste.
Pouvoir, opposition, partis, gouvernements étrangers, personne ne croyait assez à soi pour oser être et nettement agir. […] Mais elle alla plus loin, et osa prétendre que la langue latine avait été imposée à la race gauloise ; un plaqué plus honteux encore !
Fortifié par ces études profondes, il osa attaquer le cartésianisme, non-seulement dans sa partie dogmatique qui conservait peu de crédit, mais aussi dans sa méthode que ses adversaires même avaient embrassée, et par laquelle il régnait sur l’Europe. […] Il paraît que son fils Gennaro Vico rassembla les notes qu’il avait pu dicter depuis l’édition de 1730, et les intercala à la suite des passages auxquels elles se rapportaient le mieux, sans entreprendre de les fondre avec le texte auquel il n’osait toucher.
Au milieu de ces revers, qui affectent si profondément l’honneur militaire et l’avenir de la monarchie, l’apathie de Louis XV est complète ; « Il n’y a pas d’exemple qu’on joue si gros jeu avec la même indifférence qu’on jouerait une partie de quadrille. » Le seul honneur de Bernis chargé de la partie politique, mais naturellement exclu des questions militaires, et qui n’a qu’un peu plus de faveur que les autres sans avoir plus d’autorité et d’influence aux heures décisives, est de comprendre le mal et d’en souffrir : « Sensible et, si j’ose le dire, sensé comme je suis, je meurs sur la roue, et mon martyre est inutile à l’État. » Il demande un gouvernement à tout prix, du nerf, de la suite, de la prévoyance : « Dieu veuille nous envoyer une volonté quelconque, ou quelqu’un qui en ait pour nous !
… » M. de Lamartine voudra bien me pardonner de l’oser louer en le rapprochant de La Fontaine.
En cette saison gracieuse, reposée et unique peut-être dans sa vie, Rosny, âgé de près de vingt-sept ans, dans sa maturité première et, si l’on ose dire, dans sa fleur d’austérité, n’avait pas encore cette mine rébarbative qu’il eut depuis, et que nous lui verrons prendre successivement à travers les fatigues, les périls, les contentions et les applications de toutes sortes, où sa capacité opiniâtre, son ambition légitime et jalouse, son amour du bien public et de l’honneur de son maître l’engagèrent de plus en plus.
Alors se marqua l’époque, toujours mémorable pour moi, d’un moment de bonheur que je regretterai toute ma vie : j’étais ivre de l’amour du bien, l’image de la vertu s’était comme réalisée en moi ; je voyais d’un autre côté que la considération dont j’ose dire que je jouissais, était, au moins, en partie, le fruit de mon travail sur moi-même…48.
Elle voulait que les Dames parlaient hardiment à leurs élèves de l’état de mariage, et leur montrassent le monde et ses conditions diverses telles qu’elles sont : « La plupart des religieuses, disait-elle, n’osent pas prononcer le nom de mariage ; saint Paul n’avait pas cette fausse délicatesse, car il en parle très ouvertement. » Et elle était la première à en parler comme d’un état honnête, nécessaire, hasardeux : Quand vos demoiselles auront passé par le mariage, elles verront qu’il n’y a pas de quoi rire.
Il nous accuse d’être sujets à l’engouement, et à un engouement prolongé, ce qui tient, selon lui, au manque de caractère et à ce qu’on a trop de vanité pour « oser être soi-même ».
Je n’oserais me fier à mon cœur ; ce délicieux bonheur semble si désirable !
Frédéric vit le bon côté, le côté sérieux de ce succès de son frère dans l’opinion : Le public en France, lui écrivait-il (13 septembre 1784), suit ce droit bon sens naturel qui voit les objets sans déguisement ; mais les ministres ont bien d’autres réflexions à faire, dont la principale roule sur leur conservation… Mais j’ose me flatter que votre séjour disposera les esprits en notre faveur, et que si la France voit enfin qu’elle est obligée de revirer de système, elle nous choisira comme son pis-aller.
J’aime vos lettres, votre conversation et vos écrits ; mais je crains si fort de prendre sur vos occupations, et je respecte tellement votre loisir, que je n’ai osé le troubler les autres années.
Oserai-je vous supplier d’éclairer sur cela mon ignorance ?
En 1709, après avoir refait une armée, Villars sut si bien choisir ses postes, et il en occupa d’abord un si bon ou qu’il rendit tel, dans la plaine de La Bassée, que les ennemis, bien que supérieurs de quarante mille hommes, n’osèrent risquer une attaque ; après l’avoir tâté, ils renoncèrent pour le moment à une bataille et se rejetèrent sur le siège de Tournai, qu’ils entreprirent.
Je constate seulement ces filiations tardives et assez inattendues, ces vicissitudes et ces retours de fortune et de destinée, et j’y vois surtout, j’ose l’avouer, une image de la fluctuation et du caprice des pensées humaines.
Le roi écrit-il quelque part : « Dans la métaphysique il y a beaucoup de labyrinthes, et où je crois en physicien avec un Maupertuis, j’ose douter dans la métaphysique avec un Locke. » — « Ce n’est pas assez », se dit La Beaumelle, et après avoir remanié quelque peu la phrase qu’on vient de lire, il y ajoute de son chef et sous le couvert de Frédéric (p. 268) : « Ce Locke n’est pourtant pas encore assez sceptique pour moi.
Le duc de Montausier, qui eut toujours des bontés pour lui, avait obtenu pour sa traduction d’Athénée le privilège nécessaire, mais ce privilège accordé et la traduction faite, pas un libraire ne s’en voulut charger : Enfin, s’écrie Marolles qui se décide à l’imprimer à ses frais (1680), enfin, pour ne pas frustrer la grâce du privilège obtenu par le généreux seigneur à qui cet ouvrage est dédié, j’ai osé entreprendre de faire cette édition pour vingt-cinq exemplaires seulement, laissant toutefois à l’imprimeur la liberté d’en prendre tel nombre qu’il voudra de copies pour lui, afin au moins que peu de personnes connaissent après moi que ce travail n’était peut-être pas si méchant qu’il dût demeurer éternellement enseveli dans les ténèbres de l’oubli.
Il n’est pas de ceux qui ayant tout vu, tout essayé dans l’action, comme Retz, et tout osé, se risquent à tout dire, sauf à se faire une langue à leur image et qu’ils sont seuls à parler de cet air-là, bien assurés qu’ils sont d’ailleurs d’être toujours de la bonne école et de la bonne race : il est un de ces auteurs de profession qui, ayant commencé par la plume et ne la perdant jamais de vue, se retrancheraient plutôt (comme Fontanes) des idées ou des accidents de récit, s’ils croyaient ne pouvoir les rassembler et les rendre en toute correction et en parfaite élégance.
Étant un étranger comme je suis, j’ose moins répondre pour mes plans futurs de vie qui peuvent m’emmener bien loin de ce pays ; mais, si je pouvais disposer de ma destinée, rien ne serait plus de mon choix que de vivre où je pourrais cultiver votre amitié.
J’ose croire que si vous eussiez été auprès de moi lorsque cette cruelle offense vous a été faite, elle vous eût inspiré plus de compassion que de colère. » La première partie de cette réponse à Hume était écrite avant le retour de Mme de Boufflers à Paris ; elle attendit d’y être pour l’envoyer ; en arrivant, elle y prit connaissance d’une autre lettre de Hume adressée à d’Alembert, et qui contenait l’exposé de toute la querelle, avec prière de la communiquer, non-seulement aux amis de Paris, mais même à M. de Voltaire, c’est-à-dire à l’ennemi tout personnel de Rousseau.
En le remerciant de ce qu’il a fait, oserai-je exprimer ce vœu qu’à une seconde édition il nous la donne plus complète, plus nettement dessinée encore, dégagée de quelques dissertations inutiles et qui nuisent véritablement à l’unité du ton ?
Décrire un appartement de femmes ou peindre les cérémonies du culte arabe, est, à mon avis, plus grave qu’une fraude : c’est commettre, sous le rapport de l’art, une erreur de point de vue. » C’est ingénieux, c’est délicat ; j’oserais dire que c’est digne d’un Vauvenargues ou d’un Racine.
La Vérité dans le vin nous peint au naturel les vices du temps, l’effronterie des femmes de robe, la sottise des maris, l’impudence des abbés ; il y a dans le dialogue une familiarité, un naturel, dans les reparties une naïveté, dans les situations un piquant et un osé qui font de ce tableau de genre un des témoins historiques et moraux du XVIIIe siècle.
Ô Catinat, quelle voix enrhumée De te chanter ose usurper l’emploi ?
Necker qu’il ose mettre en balance d’une manière incroyable avec Napoléon ?
Tous les gouvernements sont pesés à sa balance, et l’on risque le bannissement à oser avancer modestement devant lui que le commerce d’une puissance est de quelques millions plus lucratif qu’il ne l’annonce.
Le premier contact avec un monde plus varié a révélé au solitaire ses aspirations puissantes, irrésistibles ; il ne se borne plus à se considérer lui-même comme à La Chesnaie, il se compare : il a conscience de ce qu’il peut désormais, il osera.
Cependant, si Béranger est sincère dans les expressions de ses lettres, il n’y aurait rien de cela ; mais je suis maintenant craintive et méfiante, et je n’ose plus faire un pas, même quand le cœur me le dit.
Ce n’est qu’à regret qu’il écrase la mouche qui menace ses ouailles ; et quand il a pris le loup il n’ose le tuer, il le laisse partir ; car Fleuse sait que partout, dans les animaux, dans les insectes, dans les plantes, dans les choses, dans le vent, dans la nuit, il y a des âmes, des esprits inconnus auxquels il ne faut pas toucher : Son idée, que l’analyse n’avait pas affaiblie, qui, en l’absence de toute formule, s’était changée en sentiment, vivait robuste dans ce crépuscule intellectuel : l’idée de l’homme chétif soumis à son grand gardien, l’Invisible.
Sans oser attribuer à M.
Oserons-nous maintenant demander si notre vie a droit à ces épithètes, alors qu’il n’y a pas d’exemple d’une conduite plus personnelle que celle de nos contemporains ?
Oserons-nous maintenant demander si notre vie a droit à ces épithètes, alors qu’il n’y a pas d’exemple d’une conduite plus personnelle que celle de nos contemporains ?
L’esprit humain ne serait pas ce qu’il est sans elle, et j’ose dire que vos sciences, dont j’admire si hautement les résultats n’existeraient pas s’il n’y avait, à côté d’elles, une gardienne vigilante pour empêcher le monde d’être dévoré par la superstition et livré sans défense à toutes les assertions de la crédulité.
Les bêtes fauves n’osent plus approcher de son antre, le feu le garde comme un dragon flamboyant.
Cyprienne ne sait rien encore de ce beau chef-d’œuvre, non plus que Philippe, qui n’attend qu’une occasion pour oser l’aimer.
Je n’ose lui dire à quel point je le trouve malheureux ; hélas !
» elle se contentait d’éluder, de se taire, et baissant les yeux : « Passez, disait-elle, à autre chose. » La noble fille, enlacée à son tour par le serpent, n’osait répondre comme Hector, mais elle pensait comme lui.
Je dis lecture, car je n’ose toutefois supposer que l’aimable troupe de société qui contribua si fort à mettre à la mode les proverbes de M.
Osons toucher et sonder ses plaies : elles sont dans sa vie et dans son caractère.
« C’est un lambeau que je veux laisser tomber en marchant mon chemin, dit-elle de quelqu’un de ces épisodes de rencontre ; il trouvera sa place avec les autres de même nature : et, comme il ne sera pas traité avec plus d’ordre et de suite, il n’aura pas aussi plus de prix ni de valeur. » Le bon esprit de Mme de Motteville, qui l’a portée à ne consulter sur ces choses éloignées que de bons témoins et qui faisait que les plus dignes de foi aimaient à s’en ouvrir avec elle, donne à ces parties accessoires et à ces hors-d’œuvre plus d’intérêt qu’elle n’ose en prétendre.
Fiévée, qu’on oserait moins contester de nos jours qu’à une autre époque : Il n’est personne qui ne soit apte à recevoir de l’argent.
Pourtant, réduite et entendue dans un certain sens, cette idée a sa justesse : « Je ne crains pas de vous dire, écrit-il pour son fils, que plus la place est élevée, plus elle a d’objets qu’on ne peut ni voir ni connaître qu’en l’occupant. » Saint-Simon, que j’oserai ici contredire et réfuter, a dit de Louis XIV : Né avec un esprit au-dessous du médiocre, mais un esprit capable de se former, de se limer, de se raffiner, d’emprunter d’autrui sans imitation et sans gêne, il profita infiniment d’avoir toute sa vie vécu avec les personnes du monde qui toutes en avaient le plus, et des plus différentes sortes, en hommes et en femmes de tout âge, de tout genre et de tous personnages.
Ils n’osent se livrer à leur mauvais génie ; on voit qu’ils sont contenus ; mais le bout de l’oreille perce… J’entends que les journaux servent le gouvernement, et non contre.
Il m’y aidera, si j’ose dire, lui-même, car plus d’une de ses paroles, par lesquelles il juge les autres, peut, en se retournant sur lui, montrer où fut le trop de passion et la dureté.
la grande et belle voix, la voix unique, s’écriait-il, toujours égale, toujours fraîche, brillante et légère, qui, par son talent, a appris à sa nation qu’on pouvait chanter en français, et qui, avec la même hardiesse, a osé donner une expression originale à la musique italienne. » Il ne sortait jamais de l’entendre « sans avoir la tête exaltée, sans être dans cette disposition qui fait qu’on se sent capable de dire ou de faire de belles et de grandes choses ».
Necker lui plaît tant dans la conversation, quand il s’y abandonne, qu’elle lui trouve du rapport avec Horace Walpole, et elle l’ose avouer : « Le Necker a beaucoup d’esprit ; il ne s’éloigne pas de vous ressembler à quelques égards. » Horace Walpole n’est point de cet avis ; M. et Mme Necker font au printemps de 1776 un voyage en Angleterre, et, à leur retour, Mme Du Deffand écrit : Ils ne vous plaisent pas beaucoup, je le vois bien ; tous les deux ont de l’esprit, mais surtout l’homme.
Osez-vous appeler Chêne cet avorton qu’un souffle fait trembler ?
Le soir on croit voir dans cette chaise une forme accoudée ; — c’est le fantôme, — disent les pêcheurs du clan des Mackinnons ; et personne n’oserait, même en plein jour, monter jusqu’à ce siège redoutable ; car à l’idée de la pierre est liée l’idée du sépulcre, et sur la chaise de granit il ne peut s’asseoir que l’homme d’ombre.
Oserai-je dire ce qui l’a trompé ?
D’un autre côté, en quelques cas assez rares, tel que l’Éléphant, par exemple, aucun individu de l’espèce ne devient la proie d’autres animaux, car même le Tigre de l’Inde n’ose que très rarement attaquer un jeune Éléphant protégé par sa mère.
Or, oser et vouloir légitimer des bâtards, c’était la paternité qui se retournait contre elle-même.
Par un contraste inexplicable, il a choisi Hegel, le triste Hegel et son monstrueux prosaïsme, — Hegel l’antipoète, l’antechrist de toute poésie, qui a osé écrire que « la nature n’est rien en soi, qu’il n’y a rien de réel en elle que le mouvement de l’idée », et qui, répliquant à Kant préoccupé d’un soleil central pour les étoiles que l’astronomie devait un jour découvrir, ne craignit pas de répondre : « Il n’y a point de raison dans les rapports des étoiles entre elles ; elles appartiennent à la répulsion formelle.
Renan est l’aristocrate de la science, C’est lui qui a osé écrire : « Il ne faut pas sacrifier à Dieu nos instincts scientifiques. » Après cela, vous comprenez très bien le charmant détour que l’auteur des Études a pris ou l’immense illusion dont il est la dupe.
Mais, pour le moment, nous, analyste et critique, qui n’oserions certes pas affirmer que notre intelligence est supérieure à celle de Virginie, constatons la crainte et la souffrance de l’ange immaculé devant la caricature.
Il ne remarquait pas que les axiomes du naturaliste aboutissent à des vérités redoutables qu’on n’ose aborder tant qu’on garde les restes de ses premières croyances, et qui l’auraient déchiré si elles l’avaient atteint.
Oserons-nous dire que cette esquisse, si imparfaite qu’elle soit, a jeté en France les fondements de l’étude vraiment philosophique de l’histoire de la philosophie ? […] On n’ose rappeler l’éloge qu’en a fait le plus grand critique de notre temps, sir William Hamilton9. […] Mais ce n’est pas moi, c’est la nature humaine qui le dit : La pensée, qui s’exerce dans un cercle qu’elle n’a point tracé elle-même et qu’elle n’ose pas franchir, peut être en possession de la vérité ; mais il lui reste à conquérir cette liberté absolue qui caractérise la philosophie proprement dite. […] Je vous ai dit que Socrate n’avait point eu de système ; oserais-je dire qu’il importe assez peu28 que Descartes en ait eu un ? […] Quand on en est là, on est arrivé au dernier terme de l’idéalisme subjectif, comme la philosophie de la sensation en était arrivée à son dernier terme, quand elle osa prétendre que l’âme n’est que la collection de nos sensations.
. — Tu veux oser cette chose inouïe, d’instruire les hommes ! […] N’a-t-il pas osé affirmer que Racine créait des caractères plus vivants que Shakespeare, que l’architecture était un art dont l’humanité avait perdu le sens (la pierre, dit-il, est devenue plus pierre qu’autrefois) ? […] Mais quand se trouvera-t-il un homme assez hardi pour oser entreprendre d’aussi graves révélations, au risque des plus violents reproches et des soupçons les plus injurieux ? […] Briggs à l’écrivain téméraire qui oserait avouer toute la vérité sur le caractère de Poe. […] Balfour d’avoir empiété sur son domaine, et, n’étant point métaphysicien, d’avoir osé parler de métaphysique.
Qui oserait nier, en effet, que la réalité humaine de quelque côté qu’on l’envisage, ait sa poésie ? […] ne nous suffira-t-il pas d’avoir osé regarder son soleil en face, pour lui sembler digne de ses vengeances ? […] Eugène d’Araquy a de la jeunesse pourtant, mais une jeunesse sans audace et sans volonté, qui ne sait pas ou n’ose point être originale. […] Mademoiselle Émilie Dubois est, de toutes les Agnès passées, présentes et futures, j’ose le dire, la plus naïvement adorable et la plus gracieuse.
La bête ne perçoit même pas qu’on ose vouloir la tromper. « S’en prendre à moi, songe-t-elle. […] S’il s’appuie sur les bases historiques, j’ose dire que ces bases me sont inconnues, mais il y a tant de manières de lire l’histoire ! […] Peut-être que l’édilité ‘future reposera sur ce principe que la construction des maisons ne sera autorisée que sur un tiers ou sur un quart de la place disponible, je n’ose dire davantage.
. — Et d’ailleurs, reprenait vivement le premier consul, ces choses-là les ont renversés ; et moi j’ose dire que je suis du nombre de ceux qui fondent les États, et non de ceux qui les laissent périr.
On n’ose plus parler en bonne compagnie, car les faiseurs de bons contes vous traduisent en ridicule.
D’Argenson ose être lui-même sans peur du ridicule et parler à sa guise sans rien de cette « petite circonspection » qui en France, dit-il, « étête » tous nos personnages.
Campaux, plus prudent, n’ose affirmer qu’il ait dépassé dans la Faculté des arts le grade de licencié.
je ne voudrais pas encore une fois m’enfermer sans retour dans ces îles enchantées, dans ces cercles où tout l’homme ne saurait penser et vivre, où la femme elle-même n’était pas nécessairement plus aimable qu’on ne la rencontre, sans trop la chercher, en dehors de là : éternelle nature féminine qui recommence toujours, qui devine si tôt ce qui est bien, ce qui est mieux comme ce qui est pire, en même temps que ce qui est décent, et qui le rapprend sans enseigne et sans affiche à quiconque lui veut plaire ; devant qui la passion, la verve, la poésie, le naturel aujourd’hui avec tous ses risques et tous ses avantages peuvent oser plus que jamais se déployer !
Bien aveuglés et infatués étaient les adversaires ; car, dans leur confiance en eux-mêmes, ils s’estimaient si nécessaires à la royauté qu’à cette seule pensée que le roi pût les dissoudre, il n’en était pas un seul qui n’eût dit : Il n’oserait !
Je n’irai pas chercher dans les œuvres en prose, dans les romans de Théophile Gautier, son autobiographie précise : il pourrait la récuser, et trop d’art s’y mêle à tout moment à la réalité pour qu’on ose se servir sans beaucoup de précaution de cette clef-là.
Certes, si je l’osais dire, Madame va bien exciter l’envie. » Et moi je demande : N’est-ce pas comme aujourd’hui ?
Faugère le désir qu’il en fît usage pour rétablir la vérité et montrer que la part de gloire qui revenait légitimement à Mme Roland était assez grande sans qu’il fût besoin d’y rien ajouter aux dépens de son mari : « J’acceptai cette mission avec empressement, nous dit le nouvel éditeur, et je m’occupai dès lors à compléter les éléments d’un ouvrage qui sera consacré à faire connaître plus intimement Roland de La Platière, en même temps que la femme supérieure qui ne fut pas tout dans sa destinée, mais qui, en s’unissant à lui, a contribué à donner à son nom un éclat que son seul mérite n’aurait point produit. » Oserai-je dire à M.
Plusieurs écrivains, de ceux qui sont chaque jour sur la brèche, ont donc senti le besoin de varier et d’accroître leurs moyens, de perfectionner leurs instruments et, si j’osais dire, leur outillage, afin de pouvoir lutter avec les autres arts rivaux et pour satisfaire à cette exigence de plus en plus positive des lecteurs qui veulent en tout des résultats.
Le futur lord Wellington fit placer notre général à sa droite, et, en présence du commandant des guérillas et des officiers de notre escorte qui s’étaient mis à table, le traita avec la plus grande distinction. » C’est alors que Wellington adressa au général Franceschi les paroles d’éloge que j’ai citées plus haut ; mais il n’osa faire davantage ni accéder à la demande du général d’être considéré comme prisonnier des Anglais et envoyé en Angleterre.
Quelque hauts services que puissent penser avoir rendus à leur cause les anciens écrivains du Globe devenus députés, conseillers d’État et ministres, je suis persuadé qu’en y réfléchissant, quelques-uns au moins d’entre eux se représentent dans un regret tacite les autres services croissants qu’ils auraient pu rendre, avec non moins d’éclat, à une cause qui est celle de la société aussi : il leur suffisait d’oser durer sous leur première forme, de maintenir leur tribune philosophique et littéraire, en continuant, par quelques-unes de leurs plumes, d’y pratiquer leur mission de critique élevée et vigilante ; aux temps de calme, l’autorité se serait retrouvée.
» J’ose avouer que, pour un grand nombre, le résultat de mon plus sérieux examen, c’est que ces hommes-là, en d’autres temps, n’auraient pas écrit du tout.
Là, en effet, est entre nous la dissidence, et il faut oser l’articuler.
Les exécuteurs n’osèrent refuser à des femmes ce qu’ils avaient refusé à Hérault de Séchelles et à Danton.
Oserais-je vous dire que c’est un état qui porte avec soi sa consolation pour un homme droit qui ne tient pas au monde ?
Son humanité, aimable et faible, éclate à chaque page de son récit, comme lorsque, au départ, il n’ose se retourner vers son beau château de Joinville où il laisse ses deux enfants, de peur que le cœur ne lui fende.
Il offrait à l’auteur de l’École des femmes des stances courageuses et la satire II ; il opposait l’auteur d’Alexandre à l’auteur d’Astrate ; et dans une dissertation en prose, il osait humilier l’Arioste devant l’imitateur de sa Joconde.
Son spiritualisme va s’affirmant et, si j’ose dire, s’aggravant.
« Il contrefaisait d’abord les marquis avec le masque de Mascarille, dit un des interlocuteurs de La Vengeance des Marquis 42 ; il n’osait les jouer autrement, mais à la fin il nous a fait voir qu’il avait le visage assez plaisant pour représenter sans masque un personnage ridicule. » Il faut entendre ces mots en ce sens que Molière, la première fois qu’il contrefit les marquis, dans Les Précieuses ridicules, eut recours au travestissement de Mascarille, le valet de L’Étourdi et du Dépit amoureux, rôles qu’il aurait joués avec le masque, suivant l’étymologie du nom (maschera, mascarilla).
Il faut bien remarquer qu’un sentiment n’a pas ordinairement dans notre ame une cause unique ; c’est, si j’ose me servir de ce terme, une certaine dose qui en produit la force & la variété.
Et quant au retour dont il aurait été payé, une épigramme de 1527 nous apprend que le poëte en fut pour ses avances : Je pense en vous et au fallacieux Enfant Amour, qui par trop sottement A fait mon cueur aimer si haultement, Si haultement, hélas que de ma peine N’ose esperer un brin d’allégement, Quelque doulceur de quoi vous soyez pleine.
Les Pensées semblent vouloir déshonorer quiconque oserait se trouver content de sa part de cette sagesse humaine que Pascal secoue comme un préjugé, mais qui tient, quoi qu’il fasse, à sa chair et à ses os.
France, plus subjectif et moins divers, pour oser ne pas le soupçonner de s’isoler, lorsqu’il se nourrit de solitude, et voir en lui, quand il y tient, un pessimiste cordial et un contempteur vrai de l’éphémère ?
Au début, deux jeunes scélérats se risquèrent à adresser à madame Gros des paroles inconvenantes ; sa froideur absolue et sa fermeté leur imposèrent silence ; jamais depuis il n’est arrivé qu’on ait osé prononcer devant elle un mot déplacé.
J’ose dire que l’idée d’une pareille apologie ne fût pas venue à un protestant.
Il osait ranger dans cette classe de raisonnements ceux de Bossuet et de Jean-Jacques Rousseau. 3º Enfin, il y avait, selon lui toujours, les raisonnements d’hommes, ceux des vrais sages, de ceux qui ont cassé la noix (comme l’abbé Galiani), et qui ont trouvé qu’elle ne contient rien.
J’ai déjà touché quelque chose de ce qu’il dit sur la procession insurrectionnelle du 20 juin, sur ce bonnet rouge qu’on mit sur la tête de Louis XVI, et dans lequel il ose voir une couronne à la Marc Aurèle.
Il s’épuise à vouloir opérer en Louis XVI cette métamorphose d’un roi honnête et timide, brusque et faible, en un roi ferme et ouvert, qui aille tête levée, qui ose tout ce qu’il faut pour son salut, pour celui de la monarchie et de la société.
Mlle Madeleine de Scudéry était bien autrement sensée que son frère ; la part de la Normandie, si j’ose dire, était bien plus apparente en elle : elle raisonne, elle discute, elle plaide en matière d’esprit comme le plus habile procureur et chicaneur.
Tel auteur tragique de cinq pieds six pouces pourrait être quelquefois tenté d’écraser un critique qui n’en aurait que cinq : mais il ne l’oserait.
Il commence même à porter ses vues plus loin ; son esprit de système l’entraîne vers les spéculations physiques : J’ai recueilli, dit-il, sur le mouvement de la terre des observations, et j’en ai formé un système si hardi, si neuf et si spécieux, que je n’ose le communiquer à personne.
De même qu’il diminue tant qu’il peut les probabilités de l’histoire, si on le laissait faire et s’il l’osait il en nierait l’utilité, ou du moins il soutiendrait que, telle qu’elle a été transmise jusqu’ici, elle a été plutôt nuisible qu’utile.
Quand on entre, on le voit dans l’entrebâillement de la porte du vestibule, qui vous dit, avec un clappement de langue gourmand, et l’avance d’une main, qu’il n’ose pas vous donner : « Je fais un plat !
Riche d’images, le style tend à l’obscurité ; une image nouvelle, étant la représentation presque directe d’un fragment de vie, est beaucoup moins péremptoire que le cliché, lequel est, si l’on ose dire, une image abstraite.
La somme de la douleur qu’ils oseront infliger aux antres hommes se diminuera sans cesse de celle qu’ils peuvent partager.
Elle convient aux apologistes aussi bien qu’aux critiques et aux adversaires, car nul n’oserait avouer qu’il croit à la religion sans avoir de bonnes raisons, et qu’il choisit telle raison plutôt que telle autre sans savoir pourquoi.
Leur désir a été d’exprimer immédiatement l’inexprimable, si j’ose dire, de fondre leur âme avec la conscience universelle afin de noter, par une sorte d’auscultation intellectuelle, jusqu’aux pulsations de la matière, jusqu’à la respiration du monde. » Tancrède de Visan, Paysages Introspectifs, in-8º, 1904.
Marcel Ballot (Figaro) se manifeste assez hostile aux débutants, cependant il a de l’érudition un esprit clair, et néanmoins subtil, et il a osé des vues originales qu’on n’a pas assez remarquées.
Si ceux, dit le même auteur, qui dans la conversation & dans les livres, ont hazardé les premiers d’user de ces mots nouveaux, n’avoient jamais osé prendre cette liberté, nous en serions privés encore aujourdhui.
J’oserais assurer que la pureté de la morale a suivi les progrès des vêtements depuis la peau de la bête jusqu’à l’étoffe de soie.
Malgré l’impulsion qui me presse, je n’ose me suivre plus loin, de peur de m’enivrer et de tomber dans des choses tout à fait inintelligibles.
Le poëte a dit : monte decurrens velut amnis, … etc. qui est-ce qui ose imiter Pindare ?
Plus à l’aise que moi, Cassagnac nous les a montrées, dans son livre, avec une force de renseignement et une connaissance si approfondies, que ceux qui ont discuté les idées de son histoire n’ont pas osé toucher à ce formidable côté des hommes.
Moi, je dis que dans ce Joseph Delorme chacun de nous a sa facette dans laquelle il peut se mirer, s’il l’ose, et se retrouver, tel qu’il fut au moins quelques jours !
Son désir audacieux s’épouvante de sa faiblesse ; et, arrêtée par un profond vertige, elle épuise sa force en convulsions, déprimant aujourd’hui ce qu’hier elle exaltait, et faisant inutilement trembler le monde. » Nous n’osons suivre le poëte dans toute sa pieuse ferveur, ne pouvant lui emprunter le charme de son harmonie.
Outre ces prétentions à l’orthodoxie littéraire, notre ouvrage ose revendiquer le mérite de suggérer des renseignements précis et nouveaux qui pour quelques-uns de nos portraits tiennent à la tradition reçue par notre enfance, pour la plupart à des relations précieuses contractées dans notre première jeunesse et poursuivies jusqu’à la perte de ceux dont nous invoquons le souvenir. […] Ce fut lui qui le premier proscrivit de son vocabulaire les épithètes vagues et banales, osa tout voir, tout exprimer. […] On comprend qu’il ait osé dire en sa correspondance que Sapho l’ennuyait. […] Mais qui donc oserait faire un crime à ce loyal esprit d’un excès de confiance dans la nature humaine ? […] Les moutons y sont si maigres qu’on n’ose les tondre de peur de les montrer à nu.
C’est plutôt la spécialisation de Démosthène qui m’étonne et, oserai-je le dire ? […] Oserai-je le dire ? […] Alors que Koenig lui avait témoigné les plus grands égards, il osa l’accuser de faux. […] Osons dire que ces trois interventions lui font honneur. […] Hauvette a tort de se déclarer stupéfait que Voltaire ait « osé » s’occuper de Dante.
Cette situation, l’Islam, depuis le viie siècle, l’avait, si j’ose dire, repérée. […] » — « Oui, dit Angélique, puisque mon oncle nous conduit. » On sent qu’elle n’est qu’à demi convaincue, mais qu’elle n’ose pas s’opposer au désir de Béralde. […] On n’ose pas sur un point aussi grave suspecter sa sincérité ; mais il nous sera quelquefois difficile de distinguer, dans ce qu’il affirme, la réalité de l’hallucination. […] Quant à sa vie, elle fut errante, et sa route semée je n’ose dire de croix, puisque ce symbole était odieux à ce poète si abondamment et parfois si naïvement symbolique. […] On se demande seulement comment Hugo, qui ne pouvait être la dupe de ses propres supercheries, osait parler d’exactitude et aussi quel plaisir il éprouvait à foudroyer des gens dont il inventait l’état-civil.
L’esprit de M. de Rémusat se manifeste sans doute avec bien de la diversité dans ses écrits présentement publiés ; on l’apprécie tout à la fois comme critiqué, comme philosophe, comme moraliste non moins élevé qu’exquis et pénétrant ; mais il y a autre chose encore, il y a en lui un certain artiste rentré qui n’a pas osé ou daigné se produire, ou plutôt il n’y a rien de rentré, car il s’est, de tout temps, passé toutes ses fantaisies d’imagination, il s’est accordé toutes ses veines. […] Souvent (si je l’osais dire) il n’y a pas de fond véritable en nous, il n’y a que des surfaces à l’infini.
Le spectateur, qui est dans cet état, aime à promener ses regards vaguement, sans but et sans suite, sur une infinie diversité de choses, et si le poète ose lui faire violence, en exigeant de lui la disposition sérieuse qui ne convient qu’au spectateur de la tragédie, je veux dire en voulant arrêter jusqu’à la fin ses yeux sur un objet unique, sans incidents, sans interruptions et mélanges bizarres de toute nature pour le distraire, sans jeux d’esprit ou mots piquants pour réveiller à toute minute, sans inventions inattendues, hardies, pour le tenir sans cesse en haleine, la gaieté tombe, le sérieux reste et le comique s’évanouit. […] Car ils sont tellement maladroits et ils ont si peu le sentiment des convenances de l’art, qu’ils osent, dans leurs copies ou leurs imitations, l’un, omettre beaucoup de scènes et de caractères, l’autre, fondre en une seule deux pièces du grand modèle grec66.
On ne peut être trop exact dans ses preuves quand on ose blâmer un Fénelon. […] Oserai-je dire toute ma pensée ?
* * * — Je ne me rappelle plus ce que me racontait aujourd’hui ma maîtresse, mais j’ai attrapé au milieu de son récit, se passant je ne sais où, cette réjouissante phrase : « Je me serais trouvée mal, si j’avais osé ! […] Je reçois encore aujourd’hui des lettres d’injures, parce que j’ai osé faire un parallèle entre Timon d’Athènes et Le Misanthrope. » De Molière la causerie saute à tout ce xviie siècle, si ennuyeux, si antipathique, d’une si mauvaise langue, entre la langue grasse du xvie siècle et la langue claire du xviiie .
Il nous peint Audiffret-Pasquier, comme un hurluberlu, répétant à tout propos : « Qui osera nous arrêter, quand nous formerons un bataillon carré, avec le drapeau tricolore planté au milieu de nous ! […] Tout ce que nous osons dire à la dame que nous aimons, c’est que nous envions près d’elle la place des canards mandarins.
Et quand on songe que Gœthe, cet arrangeur, avait derrière lui, pour s’en inspirer, cette ribambelle et cette ribaudaille de démons : lago, Lovelace, Tartufe, don Juan, Valmont, le Satan de Milton et celui de Byron dans la Vision du Jugement, tous les dandies de la terre, Voltaire dans Candide et Talleyrand pendant quatre-vingts ans d’existence, on est tout étonné que Gœthe, ce tondeur sur tous les œufs pour en rapporter quelque chose, n’ait pas tondu sur ces œufs-là, qui sont des œufs d’autruche, et ne nous ait pas donné mieux que son grand diable, déhanché et maigre, qui ne paraît à l’imagination éveillée, pour peu qu’elle ait une conception juste du diable, qu’un Crispin, — un Crispin de l’Enfer, écrasé par ce nom de Méphistophélès que le polisson ose porter ! […] Or, puisque j’ai lâché ce mot de philosophie, qu’on trouve embusqué derrière tout nom allemand ou toute chose allemande, j’oserai me permettre la généralité suivante, que je vous supplie, vu la grosseur du cas de Gœthe, de me pardonner.
Il déclara « que l’Erreur soutient la Coutume, que la Coutume accrédite l’Erreur, que les deux réunies, soutenues par le vulgaire et nombreux cortége de leurs sectateurs, accablent de leurs cris et de leur envie, sous le nom de fantaisie et d’innovation, les découvertes du raisonnement libre. » Il montra que « lorsqu’une vérité arrive au monde, c’est toujours à titre de bâtarde, à la honte de celui qui l’engendre, jusqu’à ce que le Temps, qui n’est point le père, mais l’accoucheur de la Connaissance, déclare l’enfant légitime et verse sur sa tête le sel et l’eau. » Il tint ferme par trois ou quatre écrits contre le débordement des injures et des anathèmes, et au même moment osa plus encore : il attaqua devant le Parlement la censure, œuvre du Parlement463 ; il parla en homme qu’on blesse et qu’on opprime, pour qui l’interdiction publique est un outrage personnel, qu’on enchaîne en enchaînant la nation. […] Je n’oserais traduire devant un lecteur moderne les gigantesques périodes qui ouvrent le Traité de la Réforme. […] J’ose dire qu’ils sont aussi animés et aussi vigoureusement productifs que les dents du dragon fabuleux, et qu’étant semés ici ou là, ils peuvent faire pousser des hommes armés.
J’ai cependant entendu un poète avouer cette craintive faiblesse : « Je n’ose trop lire Francis Jammes, disait-il, de peur d’être tenté de l’imiter. » Ô petit poète, si Jammes traduit si parfaitement ta propre sensibilité, lis-le, aime-le, et tais-toi. […] On m’avait interdit tes cheveux, tes prunelles Parce que tes cheveux sont longs et pleins d’odeurs Et parce que tes yeux ont d’étranges ardeurs Et se troublent ainsi que des ondes rebelles, dit-elle à son amie ; mais elle osa concevoir « qu’une vierge amoureuse est plus belle qu’un homme » ; et, depuis, loin des hommes, elle cacha son bonheur, « contre les regards durs et les bruits du dehors ». […] Osons admirer chez elle ce que nous admirons chez Sapho, et comprenons que c’est une très belle sincérité qui s’exprime dans ces vers : Pour Aphrodite, j’ai dédaigné l’Erôs, Car je n’ai de joie et d’angoisse qu’en elle.
Je n’ose pas dire les qualités, quoique pour moi elles soient telles. […] De ces aquarelles, il passa à des tableaux de chevalet, c’est-à-dire des scènes de mœurs, jusqu’à ce qu’enfin il osa couvrir de couleurs de vastes toiles, de grands romans sociaux. […] Zola a été le premier peut-être à les supprimer, comme le confesseur, lorsque le pénitent, par pudeur ou par désir de rendre sa conduite plus honorable, cherche des détours et choisit des phrases ambiguës et des mots obscurs, déchire les voiles dont l’âme s’enveloppe et dit le mot propre que le pécheur n’osait employer. […] Le plus grand astre du firmament britannique, l’illustre Shakespeare porta le Réalisme à un certain point où n’oserait peut-être pas le suivre Zola.
Ce grand esprit, qui a l’horreur de la violence, rentrera en soi sous une impression de fatigue et de dégoût ; elle fera, si j’ose dire, une retraite spirituelle en elle-même dans le sanctuaire de ses plus chers souvenirs ; elle se rendra à l’appel énergique que lui font ses secrets instincts, trop longtemps froissés par la discussion violente et la lutte ingrate ; elle reviendra à son goût pour la campagne, pour ces champs du Berry, théâtre de la première poésie de ses rêveries d’enfant ; il y aura en elle comme une éclosion soudaine et inespérée de souvenirs frais et charmants, d’émotions exquises et saines. […] Plus d’une fois elle avait osé, pour respirer le grand air des libres espaces, soulever un instant le joug de plomb qui l’écrase. […] Qui oserait, sans folie, affirmer qu’il y a quelque chose que l’amour ne puisse pas faire ? […] La première raison qui s’offre est si naïve que j’ose à peine l’exprimer. […] Au fond, j’ose à peine le dire, tant ce mot est décrié par l’école des artistes raffinés, c’était une bourgeoise.
La minorité irréligieuse du xviie siècle nie Dieu ; la majorité irréligieuse du xviiie siècle, je n’oserais trop dire croit en Dieu, mais aime à y croire. […] C’est dans un article portant au titre le nom d’un inconnu, que Bayle, comme à couvert, et protégé par l’obscurité du sujet et l’inattention probable du lecteur, ose davantage, et traite à fond un problème capital, au coin d’une note qui s’enfle et sournoisement devient une brochure. […] Voyez-vous l’auteur du xixe siècle, qui, cent cinquante ans après Le Sage du reste, découvre ce monde-là, et ose l’exposer au jour. […] Il vous dira : « J’ose prendre le parti de l’humanité contre ce misanthrope sublime (Pascal) ; j’ose assurer que nous ne sommes ni si méchants ni si malheureux qu’il le dit… » Et ceci est la tradition de Vauvenargues et le pressentiment de Condorcet, et la transition de l’un à l’autre. — Il vous dira : « C’est une étrange rage que celle de quelques messieurs qui veulent absolument que nous soyons misérables. […] Dans un passage sur les jeux scolaires, il ose nommer la « balle », le « ballon » et le « sabot » ; et ce sabot ne saurait se souffrir. — Sait-on bien que Racine lui-même n’est pas constamment élégant ?
Là eût-on pu voir grand’noblesse de riches armures, de belles armoiries, et toutes sortes de pennons et bannières ; car là étoit toute la fleur des seigneurs de France, et nul chevalier ni écuyer n’osoit demeurer à l’hôtel s’il ne vouloit être déshonoré.
Mais cela dit, et nonobstant ces suppléments d’enquête toujours ouverts, conservons, s’il se peut, la légèreté du goût, son impression délicate et prompte ; en présence des œuvres vives de l’esprit, osons avoir notre jugement net et vif aussi, et bien tranché, bien dégagé, sûr de ce qu’il est, même sans pièces à l’appui.
Odilon Barrot, écrite en octobre 1853, Tocqueville paraisse étonné que ces mêmes systèmes aient osé se produire ?
Je n’ose me flatter d’avoir tout lu.
L’impuissance de la philosophie solitaire en face des maux réels y est vivement mise à nu, et la tentative de suicide par où finit Cléveland exprime pour nous et conclut visiblement cette moralité plus profonde, j’ose l’assurer, qu’elle n’a dû alors le sembler à son auteur.
Il se faisait tâter le pouls six fois par heure par les quatorze ; et quand cette nombreuse Faculté n’était pas dans la chambre, il appelait ce qui en manquait pour en être sans cesse environné, comme s’il eût espéré qu’avec de tels satellites la maladie n’oserait pas arriver jusqu’à Sa Majesté.
L’homme a besoin de s’appuyer sur l’opinion de l’homme ; il n’ose se fier entièrement au sentiment de sa conscience ; il s’accuse de folie, s’il ne voit rien de semblable à lui ; et telle est la faiblesse de la nature humaine, telle est sa dépendance de la société, que l’homme pourrait presque se repentir de ses qualités comme de défauts involontaires, si l’opinion générale s’accordait à l’en blâmer : mais il a recours, dans son inquiétude, à ces livres, monuments des meilleurs et des plus nobles sentiments de tous les âges.
J’achète un verre et je bois. » Quelques heures après, elle se trouve rue Vendôme, près de l’établissement des bains ; la voix mystérieuse l’engage alors à se baigner ; mais cette même voix sort avec tant de force du fond de la baignoire, que Mme C…, effrayée, se retire sans avoir osé prendre son bain. — « M.
Les chansons de geste et les romans bretons sont, si j’ose dire, les deux souches jumelles qui ont porté quelques-uns des rameaux les plus féconds de notre littérature.
J’ose dire que c’est le contraire chez le prêtre.
pas assez modeste, au scandale que propage un tome, paraît-il, le premier d’un libelle obstiné à l’abattage des fronts principaux d’aujourd’hui presque partout ; et la fréquence des termes d’idiot et de fou rarement tempérés en imbécile ou dément, comme autant de pierres lancées à l’importunité hautaine d’une féodalité d’esprit qui menace apparemment l’Europe, ne serait pas de tout point pour déplaire ; eu égard à trop de bonne volonté, je n’ose la railler, chez les gens, à s’enthousiasmer en faveur de vacants symptômes, tant n’importe quoi veut se construire.
Je n’oserais jurer que chez M.
Volontairement ou à son insu, Luther transigeait ; et, quelque effort qu’il fît pour s’arracher à la doctrine des œuvres et remplacer dans l’homme la vertu par la grâce, il n’osa pas pousser sa logique jusqu’à l’excès, laissant à de plus hardis à en tirer la conséquence extrême, c’est-à-dire l’abolition des oeuvres.
Tout ce que le lecteur voulait voir, il le voit : où il y avait des ruines, une résurrection ; où il n’y avait rien, des créations durables ; le jeu rendu à tous les ressorts de la machine ; les mêmes hommes qui hors de leur place troublaient l’État, à leur place le raffermissant et l’illustrant ; la fonction du gouvernement exercée par celui auquel elle appartenait, et qui avait, comme tout exprès, l’amour de la gloire, si inséparable de l’idée du bien public, que je n’oserais pas le mettre au-dessous de l’amour du devoir.
Les uns chuchotent des mots mystérieux qu’ils osent à peine confier au vent.
L’Église aura des indulgences pour les égarements du cœur, et puis il est si commode à la fatuité aristocratique de croire que la masse du genre humain est absurde et méchante et d’avoir sous la main une lourde autorité pour couper court aux raisonnements de ces impertinents philosophes, qui osent croire à la vérité et à la beauté.
La passion ose à peine élever la voix devant elle, et son amour ne fait pas plus de bruit, sous la pudeur rigide et taciturne dont elle le couvre, que le battement d’un cœur à travers une armure.
Augier n’a pas osé le mettre en face de l’amant de sa femme.
Les gens de lettres pensent de même sur la critique littéraire ; ils n’osent pas proposer de la proscrire entièrement, mais leur délicatesse sur cet article est si grande, que, si l’on y avait tout l’égard qu’ils désirent, on réduirait la critique à rien.
Si M. de Chateaubriand n’avait pas écrit cette partie politique de ses Mémoires, et s’il eût laissé le souvenir public suppléer à ses récits, on lui eût trouvé sans doute des écarts bien brusques et des inconséquences ; mais la grandeur du talent, la chevalerie de certains actes, la beauté historique de certaines vues, auraient de loin recouvert bien des fautes ; je ne sais quel air de générosité aurait surnagé, et jamais on n’eût osé pénétrer à ce degré dans la petitesse des motifs et des intentions.
Maintenant reconnaissons dans Bussy une qualité : il a du glorieux, du vaniteux, du goguenard et du railleur, du bel esprit et du malin esprit, mais au fond, tout au fond de tout cela, si l’on ose le dire, il y a du bon esprit.
Les domestiques, qui n’auraient jamais imaginé que le comte eût osé se présenter à M. de Monnier, furent stupéfaits de nous voir tous trois ensemble.
Et à propos de ce procès encore, dans un dîner donné par Barère, et où l’on vint à parler des infâmes questions d’Hébert adressées à la reine sur son jeune fils, tandis que d’autres paraissaient irrités contre l’imbécillité d’Hébert qui avait ménagé un triomphe à sa victime, Saint-Just osa dire ce mot qu’un des convives a recueilli : « En somme, les mœurs gagneront à cet acte de justice nationale. » Saint-Just, malgré la fièvre de fanatisme qui l’avait saisi, méprisait les hommes.
Pour se persuader qu’elle est ce qu’elle veut être, elle ne s’en tient pas aux gestes décoratifs que l’on vient de décrire mais elle ose accomplir des actes véritables.
J’incline à la première de ces deux solutions, qui est la moins décourageante ; mais je n’oserais absolument nier la seconde.
Si j’osais, en parlant d’une pareille fille, me servir d’un mot abaissé par ce qu’il y a de théâtral dans nos mœurs, je dirais que son succès fut grand dans les quelques salons où elle alla.
Mais, au moment d’attaquer le problème, je n’ose trop compter sur l’appui des systèmes philosophiques.
À toi, reine, j’apporte cette couronne tissue des fleurs d’une prairie sacrée, où jamais le pâtre n’oserait conduire ses troupeaux, où le fer n’a pas pénétré, mais où l’abeille voltige, au printemps, sur la verdure inaltérable, que la pudeur solitaire nourrit des bienfaisantes ondées du ruisseau.
Quand on y songe, on ne sait que désirer et l’on n’ose rien souhaiter, pas même le bonheur universel. […] Si j’avais le moyen, j’adopterais une petite fille ; mais ce monde, et surtout ce pays-ci, est si incertain, que je n’ose me donner ce luxe. […] (Clément Thauziat, c’est l’homme fatalement beau.)… Voyons, n’oserez-vous pas avouer devant moi, que vous l’aimez ? […] J’oserai dire qu’il n’y a de vrai au monde que le beau. […] » Voilà, monsieur, les conseils que j’oserais donner à nos jeunes gens.
Les simples ivresses de Daphnis et de Chloé dans leur vallon ne leur étaient pas plus naturelles que n’étaient naturels à Baudelaire, tel que nous l’avons défini et situé, ses rêves d’amour dans le boudoir qu’il décrit, meublé avec ce souci de mélancolie sensuelle : Les riches plafonds, Les miroirs profonds, La splendeur orientale, Tout y parlerait A l’âme en secret Sa douce langue natale… Osons dire d’ailleurs que, dans l’ordre psychologique comme dans l’ordre physiologique, la maladie est aussi logique, aussi nécessaire, partant aussi naturelle que la santé. […] Mais osons dire encore, pour ne pas faire du bien-être l’épreuve suprême des choses de l’âme, qu’il y a parfois plus d’idéalisme dans cette douleur que dans cette joie. […] Osons dire qu’elle ne le doit pas, et que, dans l’analyse des grands bouleversements moraux de l’humanité, l’indifférence impassible est ce qu’il y a de moins intelligent, partant de moins scientifique. […] J’oserai même affirmer qu’ils n’ont pas fait preuve d’une grande rigueur d’intelligence. […] J’ai dit fréquemment : les ambitions d’Ernest le préoccupent plus que ses affections, et ses nouvelles affections plus que les anciennes… » Et une autre fois : « En voyant dans vos lettres les traces de vos souffrances, je ne puis m’empêcher de songer que vous et moi, monsieur, nous cherchons dans mon frère quelqu’un qui n’est plus… Ce que nous voulons saisir en lui n’est plus qu’un fantôme et un souvenir… » Puis, comme effrayée de ce qu’elle vient d’oser sentir, la charmante créature ajoute : « Pourtant je suis assurée qu’il m’aime, et, en présence du chagrin que vos regrets lui font ressentir, il m’est impossible de ne pas croire à l’étendue, à la profondeur de l’amitié qu’il vous porte… » La vérité est que l’ami et la sœur paraissent avoir, à des degrés divers, été des créatures sensibles jusqu’à la douleur et touchées de maladie.
Il a circonscrit le domaine où la critique historique et l’observation scientifique peuvent opérer à coup sûr, d’après des règles positives ; mais il a osé dire qu’en dehors de ce domaine, il entre dans la critique elle-même une part de subjectivisme, un élément de tact, de divination et d’art. […] Il osait dans ses écrits aborder tous les sujets et prendre tous les tons. […] Michelet n’avait rien de cet esprit ; rire en pareil sujet lui eût semblé de l’impiété ; pénétré de la sainteté de la cause qu’il défendait, il osa tout dire, oubliant que, si « tout est pur pour les purs », il n’en est pas de même pour la foule frivole et rieuse. […] Au moment où la ruse ambitieuse de la Prusse et la légèreté criminelle du gouvernement français menacèrent l’Europe d’une guerre impie, Michelet, presque seul, osa protester publiquement contre l’entraînement d’un chauvinisme vaniteux et brutal. […] De quel cœur il suit au bord du toit de l’église le petit oiseau à qui sa mère enseigne à essayer ses ailes, à croire en elle, qui lui dit d’oser !
Je ne sais si l’on apprécie hors de France tout ce qu’il y a de naturel, de simplicité, j’oserai dire de familiarité sous la splendeur de cette inimitable éloquence, combien peu de rhétorique et d’apprêt, quelle absence d’amour-propre et de vanité littéraire ! […] Enfermé, lui aussi, dans son « poële de Hollande », armé de son cartésianisme, ce que Bayle ose le premier soumettre à l’analyse de sa critique dissolvante, c’est la religion, c’est la morale ; et d’abord vous diriez qu’il ne critique et qu’il ne doute que pour le seul plaisir de douter ou de critiquer. […] Tel est bien le cas de Dancourt, qui n’a point de génie, dont le talent est mince, le comique peu profond, la plaisanterie souvent grossière, mais dont le théâtre abonde en détails de mœurs, en bouts de dialogues pris sur le fait, rendus au vif, et je n’ose pas dire en portraits, ce serait trop d’honneur, mais en silhouettes au moins de personnages qui s’habillent et qui parlent, qui marchent ou qui s’agitent, qui sentent et qui pensent à la mode de l’an 1700. […] Oserai-je dire qu’il n’est pas très intelligent ? […] 5º Les Œuvres. — De toutes les pièces qu’on vient d’énumérer, il n’y en a pas six dont on ait gardé la mémoire ; — ni seulement une que l’on osât encore jouer ; — et il n’y a pas un auteur à qui l’histoire de la littérature doive plus qu’une mention.
— Quant aux veneurs, ce sont simples machines, et s’ils osent prétendre à quelque mérite, une raillerie brutale les remet à leur place. […] Du haut de son expérience improvisée, il contemple avec mépris la génération arriérée qui le précède, et sourit d’un air de grand homme, savant et pédant, en pensant à son père, « pauvre sire qui n’osait voyager, craintif au dernier point. » Cette vanité de bourgeois lui porte malheur.
L’épouse, en entrant sous le toit de son mari, sait qu’elle se donne tout entière36, « qu’elle n’aura avec lui qu’un corps, qu’une vie ; qu’elle n’aura nulle pensée, nul désir au-delà ; qu’elle sera la compagne de ses périls et de ses travaux ; qu’elle souffrira et osera autant que lui dans la paix et dans la guerre. » Comme elle, il sait se donner : quand il a choisi son chef, il s’oublie en lui, il lui attribue sa gloire, il se fait tuer pour lui ; « celui-là est infâme pour toute sa vie, qui revient sans son chef du champ de bataille37. » C’est sur cette subordination volontaire que s’assiéra la société féodale. […] Il n’y avait pas un roi — de tous mes voisins — qui osât me rencontrer — avec des hommes de guerre, — m’attaquer avec la peur. — J’ai bien tenu ma terre. — Je n’ai point cherché des embûches de traître ; — je n’ai point juré — injustement beaucoup de serments. — À cause de tout cela, je puis, — quoique malade de mortelles blessures, — avoir de la joie… — Maintenant, va tout de suite — voir le trésor — sous la pierre grise, cher Wiglaf… Ce monceau de trésors, — je l’ai acheté, — vieux que je suis, par ma mort. — Il pourra servir — dans les besoins de mon peuple… — Je me réjouis d’avoir pu, — avant de mourir, acquérir un tel trésor — pour mon peuple… — À présent, je n’ai plus besoin de demeurer ici plus longtemps. » C’est ici la générosité entière et véritable, non pas exagérée et factice, comme elle le sera plus tard, dans l’imagination romanesque des clercs bavards, arrangeurs d’aventures.
« Certes, on trouverait des choses bien sages à dire à Roméo sur la tombe de Juliette, mais le malheur est que personne n’oserait ouvrir la bouche pour les prononcer devant une telle douleur. […] je n’oserai jamais lui parler !
J’ose donc affirmer, pour ma part, que ses reproches et ses éloges n’ont aucun sens appréciable et qu’elle ne sait absolument ce qu’elle dit. […] Les jets d’eau de nos jardins publics ont aussi plus de retenue et de mesure que les éruptions volcaniques ; mais j’ose avancer, avec la timidité convenable, que celles-ci ont un caractère plus saisissant que ceux-là.
Si une douzaine environ de genres d’oiseaux étaient éteints ou inconnus, qui oserait s’aventurer jusqu’à soutenir qu’il en peut exister qui se servent de leurs ailes seulement en guise de rames pour frapper la surface de l’eau, comme le Microptère d’Eyton (Micropterus brachypterus, Anas brachyptera ou Brevipenne stupide), qui les emploient en guise de nageoires dans l’eau et de pieds antérieurs sur terre, comme le Manchot (Aptenodytes), ou en guise de voiles comme l’Autruche, et enfin qui n’en font aucun usage, comme l’Aptéryx. […] S’il n’existait que des Pics de couleur verte, ou si nous ignorions qu’il y en a des noirs et des bigarrés, j’ose affirmer que nous eussions regardé la couleur verte comme une admirable adaptation de la nature destinée à dérober aux regards de ses ennemis cet habitant des forêts.
et comment Bonald a-t-il osé contredire non seulement la logique, mais l’évidence, en soutenant que l’ouïe est « le sens de l’intelligence » ? […] Lui-même en est étonné, et il n’ose les revendiquer pour siennes : Non vindice lingua Défendit sua dicta sibi158.
Je ne suis fait comme aucun de ceux que j’ai vus ; j’ose croire n’être fait comme aucun de ceux qui existent. […] Qu’il y ait des règles à observer et beaucoup de précautions à prendre pour penser avec justesse, personne ne l’oserait nier, si beaucoup s’en moquent. […] Ardente, fébrile peut-être, mais sans générosité, sans confiance en elle-même, la sensibilité n’ose produire au grand jour sa disgrâce. […] Quand, Mme de Clèves devenue libre, son jeune amant accourt lui offrir le bonheur, elle n’ose accepter le brillant présent par-delà lequel elle a appris à voir ce qu’il ne voit pas : la vie. […] Mais il est un écrivain qui a déployé dans ce système de dégradante insulte à l’égard de toutes les puissances directrices, de toutes les institutions, disciplines et traditions formatrices du passé civilisé et spécialement national, un génie autrement subtil, savant, passionné et, si j’ose dire « prenant » que Victor Hugo.
Leopardi devait abandonner ses travaux commencés : « Tous ces travaux… restent et resteront dans ma pensée, car ma santé est réduite à un tel état, que je ne puis fixer mon esprit dans la plus petite application, même pour un instant, sans me sentir aussitôt défaillir… Et quant à l’avenir, je n’ose former aucun projet. » Cette santé déplorable, que des excès de travail, dans sa première jeunesse, avaient achevé de ruiner, ôtait l’obstacle insurmontable qui se dressait entre lui et toute espèce de joie, il le savait bien, et il fait dire à l’un des interlocuteurs de ses dialogues : « Le corps, c’est l’homme ; car, en négligeant tout le reste, — la magnanimité, le courage, les passions, la puissance d’action, le pouvoir de jouir — tout ce qui rend la vie vivante et noble dépend de la vigueur des corps et sans elle ne peut pas exister. […] Parfois, il n’osait même pas remplir secrètement, honteusement, ce devoir, et il priait son fils d’écrire directement à sa mère. […] De noble nature est celui qui ose lever ses yeux mortels contre la commune destinée et qui, d’une langue franche, sans rien changer à la vérité, confesse que le mal nous a été donné en partage et que notre condition est misérable et fragile ; celui qui se montre grand et fort dans la souffrance, et qui n’ajoute pas à ses misères les haines, les colères fraternelles plus lourdes encore que tous les autres maux, en accusant l’homme de sa douleur, mais en rejette la faute sur celle qui est la vraie coupable et qui, dans le fait, mère des mortels, est par volonté leur marâtre. » Le poète ne se rappelle plus ici ce qu’il a souvent lui-même proclamé : cette marâtre, la Nature, toute cruelle qu’elle est, s’ingénie cependant à ourdir mille ruses bienfaisantes pour tromper les hommes sur leur vraie condition ; elle ne leur donne point le bonheur, peut-être parce que ce n’est point sa fonction, ou parce que le bonheur est un pur caprice de leur esprit ; mais elle leur en donne l’illusion, qui le remplace. […] John Ruskin prit la défense de l’artiste dans une lettre chaleureuse à laquelle l’agresseur ne sut ou n’osa rien répondre. […] Ou encore, sans parler d’inoubliables morceaux tels que l’entrée de Gwynplaine dans la prison, la tempête de neige qui engloutit l’ourque biscayenne, la fuite éperdue de Jean Valjean, et tant d’autres — des pages comme celle-ci, consacrée aux religieuses de Picpus : « Quant à nous, qui ne croyons pas ce que ces femmes croient, mais qui vivons comme elles par la foi, nous n’avons jamais pu considérer sans une espèce de terreur religieuse et tendre, sans une sorte de pitié pleine d’envie, ces créatures dévouées, tremblantes et confiantes, ces âmes humbles et augustes qui osent vivre au bord même du mystère, attendant, entre le monde qui est fermé et le ciel qui n’est pas ouvert, tournées vers la clarté qu’on ne voit pas, ayant seulement le bonheur de penser qu’elles savent où elle est, aspirant au gouffre et à l’inconnu l’œil fixé sur l’obscurité, immobiles, agenouillées, perdues, stupéfaites, frissonnantes, à demi soulevées à de certaines heures par les souffles profonds de l’éternité. » III Les moyens favoris de Victor Hugo sont eu réalité des plus simples, et ne diffèrent en rien de ceux de la rhétorique courante ; ils peuvent se ramener à la répétition, à l’antithèse et à la métaphore.
Enfin, si quelque passion éclate dans ce livre, j’ose dire que c’est seulement celle de la vérité et du bien : heureux si j’avais pu mettre en garde contre quelques erreurs, dissiper quelques illusions, empêcher ou guérir quelque mal ! […] La réduire à une sorte d’usufruit, c’est au fond la thèse des communistes : les fruits sont à quelques-uns, la terre est à tous… Ce que l’auteur des Mystères de Paris n’avait osé dire dans ce livre qu’avec de prudentes restrictions et des précautions de langage, il l’a dit franchement et hautement, sans euphémismes et sans ambages, dans Martin l’enfant trouvé, livre publié quelques années plus tard. […] Et c’est entre ces deux moitiés de la société que l’écrivain ose proclamer une guerre impie ! […] C’est assurément un grand signe d’aberration intellectuelle quand de telles théories osent se produire ; c’est surtout un symptôme affligeant de déchéance morale, quand elles ont eu cours dans une société.
Vous trouverez cette fois des approximations dont la plupart visent non plus les auteurs — à quoi seule l’étude oserait prétendre —, mais les livres : toutefois n’est-il pas vrai que — dès qu’ils méritent qu’on en écrive — les livres eux aussi ont leur identité. […] Répondez-moi, du moins, dit enfin Mathilde du ton de voix le plus suppliant, mais sans oser regarder Julien. […] Parlant de ses imitateurs, Musset disait : « Ils ne savent pas, les imprudents, tout ce qu’il faut de bon sens pour oser n’avoir pas le sens commun. […] J’avoue ne plus la suivre quand se demandant si sa poésie survivra aux siècles, elle répond : « Je n’ose l’affirmer ». […] Elle eût été bien belle, cette étude ; cependant oserais-je l’avouer, de tous les écrits qu’eût pu nous donner Rivière c’est celui dont je me passe le mieux, car je le possède dans toute son œuvre, dans toute sa vie, dans tout son être même.
Depuis plusieurs années, des artistes de réputation (Ingres, Delaroche) n’exposaient plus : « Moi, Horace Vernet, je suis heureux d’avoir osé présenter ma poitrine en remplissant un devoir et en payant une dette de reconnaissance au public… Tant que ce même public voudra de moi, je serai sur la brèche.
La forme de l’Institut national, son organisation, fut essentiellement modifiée sous le Consulat, et son esprit, je n’ose dire s’altéra, mais du moins se modifia essentiellement aussi.
Du Bellay, dans un sonnet final, demande à ses vers s’ils osent bien espérer l’immortalité et si « l’œuvre d’une lyre » peut prétendre à espérer plus de durée que tant de monuments de porphyre et de marbre qui semblaient devoir être éternels. « Ne laisse pas toutefois de sonner, dit-il à son Luth, car si foible que tu sois, tu peux du moins te vanter d’avoir été le premier des François à chanter « L’antique honneur du peuple à longue robe. » Du Bellay a raison.
Il osa désobéir à ce bon père qu’il vénérait, et seul, sans appui, brouillé avec sa famille (quoique sa mère le secourût sous main et par intervalles), logé dans un taudis, dînant toujours à six sous, le voilà qui tente de se fonder une existence d’indépendance et d’étude ; la géométrie et le grec le passionnent, et il rêve la gloire du théâtre.
Madame, le sénéchal d’Armagnac avec son artillerie ose bien dire qu’il a été cause en partie du gain de la bataille, car jamais homme n’en servit mieux….
Enfermée d’abord dans le réservoir aristocratique, la doctrine a filtré par tous les interstices comme une eau glissante, et se répand insensiblement dans tout l’étage inférieur Déjà en 1727, Barbier, qui est un bourgeois de l’ancienne roche et ne connaît guère que de nom la philosophie et les philosophes, écrit dans son journal : « On retranche à cent pauvres familles des rentes viagères qui les faisaient subsister, acquises avec des effets dont le roi était débiteur et dont le fonds est éteint ; on donne cinquante-six mille livres de pension à des gens qui ont été dans les grands postes où ils ont amassé des biens considérables, toujours aux dépens du peuple, et cela pour se reposer et ne rien faire578 » Une à une, les idées de réforme pénètrent dans son cabinet d’avocat consultant ; il a suffi de la conversation pour les propager, et le gros sens commun n’a pas besoin de philosophie pour les admettre. « La taxe des impositions sur les biens, dit-il en 1750, doit être proportionnelle et répartie également sur tous les sujets du roi et membres de l’État, à proportion des biens que chacun possède réellement dans le royaume ; en Angleterre, les terres de la noblesse, du clergé et du Tiers-état payent également sans distinction ; rien n’est plus juste. » — Dans les dix années qui suivent, le flot grossit ; on parle en mal du gouvernement dans les cafés, aux promenades, et la police n’ose arrêter les frondeurs, « parce qu’il faudrait arrêter tout le monde ».
Toi dont ma mère osait se vanter d’être fille, … Soleil… Ô haine de Vénus !
Oserais-je espérer que l’on trouvera le moyen de se passer de l’apprentissage des langues étrangères ?
Jusqu’au moyen âge elle est la langue de la science et du génie ; elle règne, elle est universelle ; on fait gloire à Dante du courage qu’il a eu au xiiie siècle, d’oser créer la langue italienne.
S’il ne réussit pas à se fixer, c’est la marque même de sa distinction que d’y travailler ; car qui ose dire qu’il n’existe ni vrai ni bien et que s’il existe, n’y ayant rien de plus digne d’être recherché, le poursuivre ne soit la tâche des esprits les plus généreux et les plus excellents ?
Sensibilité vive, mais passagère et sans vapeurs ; raison nourrie sans être profonde, n’enfonçant guère dans les choses, mais parfois, et de la première vue, en découvrant le fond ; gaieté, sans rien d’éventé ; une douce mélancolie qui se forme et se dissipe au moment où elle s’exprime ; pas de vieillesse, sans la prétention de ne pas vieillir ; beaucoup de mobilité, avec le lest d’un grand sens qui écarte de la conduite l’imagination et les caprices ; du goût pour les gens en disgrâce, mais sans rancune contre les puissants ; une pointe d’opposition, comme chez tous les frondeurs pardonnés qui n’osaient ni se plaindre ni regretter, et qui se ménageaient pour un retour de fortune ; le cœur de la meilleure mère qui fut jamais, quoi qu’on en ait dit, capable d’amitiés persévérantes, et qui craignit l’amour plutôt qu’elle ne l’ignora ; tels sont les principaux traits de ce caractère, où le solide se fait sentir sous l’aimable, et où l’aimable n’est jamais banal.
s’emmêleront, infiniment affinées, toutes les anciennes formes de l’expression artistique ; il a compris, et il a osé ; il nous a montré la définition et l’exemple de l’Art totalbp, parfait, vers lequel, isolément et obscurément, nous marchons, de si loin ; son œuvre est un signal pour les générations futures, — pour des époques si distantes, que Wagner est, plutôt que le Précurseur à l’Art de l’avenir, son Prophète.
Il fut la source du patronage philosophique, et remplit les chaires françaises de professeurs qui étaient ses adhérents ou n’osaient exposer ouvertement sa faiblesse.
Il se soulage par leurs blasphèmes qu’il n’oserait répéter, des révoltes mal étouffées qui grondent dans son âme.
Chamfort était l’homme qui fournissait le plus d’idées et de vues à ses amis en causant ; il suffisait de le mettre sur un sujet et de l’animer un peu : « Je ne puis me refuser, lui disait Mirabeau, au plaisir de frotter la tête la plus électrique que j’aie jamais connue. » Je n’ose répéter tous les éloges de Mirabeau, qui sembleraient exagérés.
* * * — C’est curieux le mépris de la vieille Grèce pour la Rome du temps d’Auguste, pour la Rome polie, considérée par elle comme barbare, et dont ni Lucien, ni Denys d’Halicarnasse qui parla si bien des choses romaines, n’osent mentionner les poètes et les artistes : mépris d’une douce civilisation pour un peuple de soldats, et dont nous avons la délicate traduction dans ce refus d’une courtisane de coucher avec un fanfaron guerrier, se figurant coucher avec le bourreau.
Nous avons dîné à une table sur la place, et nous avions devant nous le soleil couchant, la Seine, les grands arbres du parc, le coteau de Bellevue où Charles Edmond est heureux dans sa maison, et où je n’ose plus le conduire.
Qu’est-ce qui aurait osé peindre, il y a vingt ans, une femme en robe vraiment jaune ; ça n’a pu se tenter qu’après la « Salomé » japonaise de Regnault, et cette introduction autoritaire dans l’optique de l’Europe de la couleur impériale de l’Extrême-Orient, oui, c’est une vraie révolution en la chromatique du tableau et de la mode.
On ne devrait pas laisser les cuistres toucher à des organismes aussi délicats que le langage : du moins pourra-t-on désormais leur enseigner que les « tropes » sont une branche de la psychologie générale et qu’il faut réfléchir très longtemps avant que d’oser couper en deux morceaux et tailler à arêtes vives un bloc verbal que l’esprit humain laisse volontairement informe.
Paul de Kock ose seul imprimer aujourd’hui ?
Il faut que l’autorité dont jouit la conscience morale ne soit pas excessive ; autrement, nul n’oserait y porter la main et elle se figerait trop facilement sous une forme immuable.
Les « naturistes » placent Zola plus haut que ne l’osèrent jamais ses disciples les plus directs : et les plus enthousiastes, écoutez l’un d’eux, M.
Je n’aurais pas osé la rapporter dans un livre, parce qu’on aurait trouvé cela invraisemblable.
Et, réciproquement, parce qu’il y a des formes vides, bêtement copiées, combien de « graves » esprits ont osé dédaigner la forme !
C’est au milieu de ce mélange de sécurité trompeuse où l’on n’osait pas trop appuyer, de désordre inouï dont on commençait à rougir, et d’anxiété vague que l’on ne voulait pas avouer, que la société, la littérature et la critique furent surprises par la Révolution de février. […] Comment un talent si excessif, si naturellement porté à tout voir à travers un verre grossissant, aurait-il pu saisir et rendre ces délicatesses exquises, ces demi-teintes impalpables, auxquelles un homme du monde, à talent égal, oserait à peine toucher ? […] On a osé comparer M. de Balzac à Molière, et un grand poëte en a récemment donné l’exemple, comme pour achever de justifier ceux qui lui avaient refusé l’esprit critique. […] Je dis une partie, car je n’oserais certainement pas, malgré mes brutales allures, répéter tout ce qui se chuchote, sous le manteau des cheminées littéraires, entre les Hugolâtres les plus convaincus. […] Au reste, je n’oserais pas discuter froidement, et au seul point de vue littéraire, ces poëmes où l’on ne saurait toucher sans rencontrer une blessure et une larme.
Il ajoute : « Oserai-je dire qu’il y a une impiété véritable à les solidariser avec la religion qui les a inspirées ? […] Qui oserait prétendre que Taine ne lui a rien appris sur le fabuliste ? […] Ce serait bien pis s’ils n’y jouissaient pas même de la sûreté civile et que leurs biens, leur vie ou leur liberté fussent à la discrétion des hommes puissants sans qu’il leur fût possible ou permis d’oser réclamer les lois. […] Joseph Jechaïah, fort impartial en sa qualité de juif, assiste, dans les rues d’Antioche et sur la route de Daphné, aux entreprises de vandalisme des chrétiens, qui brisent les statues sans que les Hellènes citadins osent résister. […] Il n’a jamais varié sur ce point, s’indignant encore dans son interrogatoire d’entendre décerner le titre de roi très chrétien à un monarque qui n’avait pas voulu anéantir l’hérésie et osait même (comme devait le faire également Richelieu) protéger les huguenots d’Allemagne.
C’est la gloire de l’homme d’oser toutes les idées. […] Brunetière hésite à frapper de nullité nos recherches et nos travaux, il n’osera plus en condamner la divulgation. […] Visa n’osait d’abord, parce qu’il avait entendu un bruit de voix. […] Seul, à genoux, près de la porte, Je regarde et n’ose entrer. […] Il n’osa pas lui parler ; mais il toucha sa robe, et le soir, encore troublé, il confia au papier cette aventure d’amour.
Puis après un silence, il me dit : « Eh bien, je dîne avec ma maîtresse, je n’ose pas vous inviter, et cependant vous me feriez plaisir. » — Qu’à cela ne tienne, je ne suis pas si pudibond que cela ! […] — Mais très bien. — Et moi aussi, mais je n’osais pas le dire !
Mais il se laisse entraîner à dire, comme Bonald, qu’elle est nécessaire pour penser, que les opérations de l’entendement « ne peuvent se faire sans elle »80 ; et, par une réminiscence évidente du même auteur, il définit ainsi son rôle : « Elle tire la pensée du sanctuaire obscur de l’intelligence, où elle était confondue dans la foule de toutes les pensées qui la composent (sic), pour la porter à la surface et nous la rendre sensible en lui donnant un corps, sans lequel elle resterait voilée pour nous81. » Dans un chapitre précédent, il n’a pas osé réfuter le paradoxe de la révélation du langage ; entre Condillac et l’école théologique, il s’est abstenu de prononcer82. […] IV, § 8], il ne les a pas trouvées, et son esprit, faute de mieux, s’est arrêté à l’idée d’une mystérieuse nécessité, que pourtant il n’ose pas dire absolue.
Han Ryner ne se consent-il individualiste que pour subir, si j’ose dire, une enseigne à sa boutique de sagesse. […] Hugard a osé transgresser la poétique de Boileau.
Souday me connaît trop pour oser croire que je l’invente. […] Ce doit être un pauvre diable de poète… Il est tellement minable, qu’il n’a pas osé entrer. » Et il alla causer avec lui dans l’antichambre. […] Cet animal n’a pas eu l’esprit de la découvrir lui-même, et il me canule, si j’ose m’exprimer de la sorte… Merci et au revoir. […] Maintenant que Mistral est mort, je n’ai aucune raison de garder pour moi les objections que je n’osais lui soumettre. […] Plus tard on corrige, parce que l’on ose sacrifier et condamner le mot, le vers qui formait l’obstacle27. » Sully-Prudhomme lui-même, malgré sa facilité, reconnaissait la nécessité du travail du style.
Or le contraire, l’opposé et, si j’ose dire, l’antipathique de M.
Les légitimistes disaient : « Il est mort en bon gentilhomme. » Une dame de la vieille cour eut le meilleur mot : « Enfin il est mort en homme qui sait vivre. » Un plus osé, M. de Blancm…, disait : « Après avoir roué tout le monde, il a voulu finir par rouer le bon Dieu54. » Ce qui est hors de doute, c’est qu’en mourant il avait, ne fût-ce que par complaisance, désavoué la Révolution.
Il y a en lui une irrésistible sympathie par tous les points avec la Vie universelle, et il cherche ensuite à réprimer cette expansion, à la ramener dans un ordre régulier de foi ; il y a en lui, si je l’ose dire, du bouddhiste qui tâche d’être méthodiste.
68 Il résulte, pour moi, de cette quantité d’indications et de glanures que je suis bien loin d’épuiser, il doit résulter pour tous, ce me semble, que, maintenant que la gloire de Chénier est établie et permet, sur son compte, d’oser tout désirer, il y a lieu véritablement à une édition plus complète et définitive de ses œuvres, où l’on profiterait des travaux antérieurs en y ajoutant beaucoup.
« Il y a des abîmes qu’on n’ose pas sonder et des caractères qu’on ne veut pas approfondir, de peur d’y trouver trop de ténèbres et trop d’horreur ; mais l’histoire, qui a l’œil impassible du temps, ne doit pas s’arrêter à ces terreurs ; elle doit comprendre ce qu’elle se charge de raconter. » Ici je ne m’excuse pas, je me justifie.
Notre cœur est comme un arbre entouré de feuilles mortes. » Ce frère tombe malade à Paris ; — elle l’apprend ; elle lui écrit sans oser lui envoyer la lettre, de crainte de froisser la nouvelle épouse.
J’oserais poser à ce philosophe une série de questions cosmiques dont ces quatre énormes volumes ne seraient que le premier chapitre.
Nous n’avons rien à répondre, si ce n’est qu’il y aurait deux Voltaire, car nous prenons pour juges les connaisseurs les plus distingués en poésie et nous leur demandons si aucun d’eux oserait donner la préférence à l’auteur des Trois Manoirs ou à l’auteur des Trois Plaids.
Plus loin ils disent encore : « nous n’ignorons pas combien est difficile et même périlleux le rôle des modérés ; c’est pourtant celui que nous avons osé choisir.
Dieu ne fut point juif : qui oserait le prétendre ?
Tristan n’ose lever les yeux, Iseult se voile la face.